Etre châtelain en Bresse au XVIIe siècle
Comment vivait-on dans les châteaux de Bresse au XVIIe siècle ?
Un inventaire après décès permet de pénétrer dans le château de Mareste, à Chavannes-sur-Reyssouze dans l'Ain (01), en 1619.
Une bonne description des réalités du passé est
fournie par les inventaires rédigés par des notaires après un décès, dans
certaines circonstances, en particulier pour préserver les droits des enfants
mineurs. On trouve ainsi que les archives l’inventaire dressé à la mort du
seigneur de Chavannes en 1619, par les notaires Danon et De Geisse. Il se
présente sous la forme d’un volume relié dont malheureusement la première page
manque.
L’inventaire, pièce par pièce et objet par objet du
château et de ses dépendances, dure six semaines, du 6 novembre au 18 décembre
1619. Les circonstances sont probablement celles du décès de Claude de Mareste.
Celui-ci était très âgé, né vers 1550, il était le fils de François de Mareste
et de Claudine de Chavannes. Marié quatre fois, il eut deux fils de sa seconde
femme, Jean-Louis vous ne (marié en 1609 à Pont-de-Vaux à Claudine de Montgey)
et Gaspard. L’inventaire est fait au nom de ce dernier et de Claudine de
Montgey, comme tuteurs des héritiers mineurs, sans doute Charlotte et
Angélique, les deux filles de Jean-Louis.
La demeure du Seigneur, le « château et
maison forte de Chavannes », est décrite comme entourée de faussés se
remplis d’eau ; on y accède par un pont et deux pont-levis « avec
leurs chaines se de fer ». à l’intérieur, outre la grande salle basse,
elle comprend la chambre du maître de maison, trois autres chambres et un
cabinet. Au-dessus, quatre chambres (dont celle des valets), un cabinet dans la
tourelle, un grand grenier et un galetas.
La grande salle basse est meublé de deux garde-robes
– l’une se pleine de papiers et terriers, l’autre d’habits –, d’un buffet, d’un
coffre contenant du linge et de cinq tabourets. Le seigneur recevait plutôt
dans sa chambre, qui contenait onze « chaises à dossiers », une table
et de coffres (l’un à linge, l’autre pour les habits), deux lits à colonnes et
rideaux et deux « grabats ». Dans le reste du château, on trouve
encore au total sept lits et une dizaine de coffres, deux tables et trois
buffet, le plus souvent en noyer ou en chêne.
300
articles répertoriés
La quantité de large et impressionnantes :
Soixante-six draps, deux cent quarante-huit serviettes et quarante-huit nappes ;
il est vrai qu’à cette époque on ne faisait guère la lessive qu’une fois par an.
La vaisselle est aussi abondante : soixante-sept assiettes, quarante et un
plats, quelques tasses et écuelles, tous
en étain ordinaire. Le seigneur de Chavannes possédait peu d’objets de valeur,
si ce n’est deux tasses, deux gobelets, deux salières et douze cuillères en
argent – la mode de la fourchette n’arrivera pas avant longtemps dans les
châteaux de province.
La masse des archives fait rêver l’historien : plus
de 300 articles répertoriés, dont beaucoup remontent au XVe siècle :
papiers féodaux et seigneuriaux (terriers, titres divers, livres de comptes) ou
familiaux (testaments, contrats de mariage, actes d’achats, procédures
judiciaires), qui ont malheureusement aujourd’hui disparu. Ces liasse et
registres sont répartis entre divers lieux : essentiellement la grande
salle basse où elles sont facilement accessibles (dans un sac, une boite et une
garde-robe), mais aussi dans la chambre du Seigneur (sous clé, dans les tiroirs
fermés de la table) ; les archives très anciennes (du XVe s., ayant donc
plus de cent ans et servant rarement) sont entreposées dans la chambre haute.
Aristocratie
terrienne
Toute proche du château, la grange des
« basses-cours » comprend la maison d’habitation du granger, couverte
de tuiles avec chambre, grenier et appentis servant d’étable à brebis. Le
mobilier en est très simple ; il comporte entre autres une table et ses
deux bancs de chêne « à la mode du village », et un archebanc* aussi en chêne, placé
« en-dessous de la cheminée » qui était donc
« sarrasine », c’est-à-dire à foyer ouvert. Accolés à ce bâtiment,
sont situés des étables, une écurie, une grange, un pressoir et un puits. Un
jardin, une vigne, un verger dans lequel est « une petite maison servant à
tenir les abeilles » et un étang rempli de carpes complètent l’ensemble.
Le bétail est nombreux, dix bœufs, treize vaches, cinq veaux, sept taureaux, un
cheval, deux juments, un poulain, onze porcs, vingt et un moutons et brebis,
treize poules et poulets. La « grange » comporte aussi des terres et
des prés à Chavannes, ainsi que des bois à Chavannes et Vescours.
Le seigneur de Chavannes possède trois autres
granges du même type, la grange de Corcelles à Chavannes, de Coran à
Saint-Etienne-sur-Reyssouze et de Montrin à Saint-Bénigne. Il est aussi
propriétaire de cinq étangs, tant à Chavannes qu’à Saint-Nizier-le-Bouchoux et
de deux moulins sur la Reyssouze : le moulin de Montrain à Saint-Bénigne
et la moitié du moulin de Pont de Chavannes. Dans ses possessions figure enfin
la seigneurie de Vescours, qui est décrite comme abandonnée : la maison
seigneuriale entourée de fossés, est ruinée ; les terres environnante sont
« tout en friches, la plus grande part en bois, attendu qu’il y a plus de
24 ans qu’elles n’ont pas été cultivées ». Cette dernière indication
remonte à 1595, année où le maréchal de Biron dévasta la Bresse. Cette
seigneurie à l’abandon rappelle donc, une génération plus tard, le souvenir des
dévastations de la guerre entre la France et la Savoie, qui ont précédé le
rattachement en 1601.
Ces dives éléments dessinent le profil d’une
seigneurie classique du XVIIe siècle, de dimension modeste (elle s’étend sur
cinq paroisses), avec ses trois éléments : le château, la réserve
seigneuriale, les granges. L’intérieur ne traduit ni luxe ni ostentation, mais
montre l’incontestable aisance de cette aristocratie terrienne, et permet
d’imaginer la vie de relation très dense qui était celle de ces familles
d’ancienne noblesse ;
Ce château a totalement disparu, son emplacement
même est maintenant incertain. L’actuel domaine de Mareste, dont on peut
admirer les beaux bâtiments à structure de bois a été daté des années 1620, il
est donc postérieur à ce document.
*L'archebanc
est un banc muni d'un coffre en forme d’arche, et peut aussi ne pas avoir de
coffre. Une fois le couvercle de coffre rabattu, il peut servir de banc. Dans
le nord et dans le centre de la France, l'archebanc s'appelait également banc à
coffre. Ce meuble fut inventé au moyen âge pour rester très à la mode durant le
XVIe et le XVIIe siècles.
Ce siège archaïque et rustique se distingue sous
diverses variantes:
- l'archebanc à dossier bas, non compartimenté
Famille
de Mareste
D'azur à trois fasces d'argent et à la bande de
gueules brochant sur le tout
« À la
gloire marche, à Dieu seul je m'arreste »
- D’Hozier, Généralité de
Bour-gogne, Belley, Enregistrement d’amoirire, fol. 11,n°86 :
Albert-Eugène de Mareste, écuyer, seigneur de Rochefort.
Famille
originaire de Savoie, divisée en deux branches
1° Les Mareste de Chavannes, Claude de Mareste, dit de Chavannes, fit reprise de fief, le 5 juin 1602, de la seigneurie de Chavannes, au mandement de Pont-de-Vaux.
-
Pierre-Charles de Mareste était en 1702, seigneur de Chavannes-sur-Reyssouze.
-
Adrien de Mareste, son fils, renouvela l’hommage, le 17 novembre 1735, de
Chavannnes et des rentes nobles de Lugny et Buisson.
-
Barthélemy de Mareste fit reprise de fief le 14 août 1772.
2°Les seigneurs de Rochefort, Jean-Jacques de Mareste, comte de Saint-Agneux, baron de rochefort, seigneur de Saint-Paul, Château-Bouchard, né à Saint-Paul en Savoie, s’établit vers 1650, à Rochefort, près Belley. Il obtient du roi de France des lettres de naturalité, datées de Saint-Germain-en-Laye, en janvier 1667. (Arch. de la Côte-d’Or, B.49)
Les
nobles de Mareste assistaient à la première assemblée de la noblesse de Bresse,
le 17 octobre 1656.
DES MARETS – d’Hozier, Généralité de Bourgogne, Bourg en Bresse, Enregistrement d’amoirires, fol.608n°304bis : Marguerite des Marets, femme de Charles Michel, écuyer, seigtneur de Villiers, accolait aux armoiries de son mari ses armes d… à une herbe
La famille de Mareste est originaire de
la Chautagne. Elle possède des biens sur les rives du Rhône, ainsi que de part
et d'autre de la montagne d'Hautecombe. Sa puissance s'accroit avec l'héritage,
en 1513, des biens de la famille de Chevelu.
Amédée de Foras (1878) indique que « la
filiation remonte authentiquement au XIIIe siècle, même sans tenir compte des
deux premiers degrés que j'inscris d'après le dire de Guichenon », au XVIIe
siècle. Le premier membre mentionné par Foras est Boson de Mareste, vivant en
1200, père de Boson de Mareste, vivant en 1240. Ce dernier pourrait être le
père de Bernard de Mareste, selon Guichenon.
Bernard de Mareste † 1293, damoiseau,
est mentionné dans plusieurs transactions datées de l'année 1279. Ambroisie de
Forest attente un procès, avec ses sœurs, à l'encontre de Bernard de Mareste, à
propos de biens qu'elles avaient hérité de leur père et de leur oncle.
L'affaire se règle vers 1292
Les
sires de Mareste portèrent les titres suivant les périodes de :
Marquis de Centagneu (Saint-Paul)
(1778), de Lucey (1654), de Saint-Agneux (1684)
Comtes de Centagneu (Saint-Paul), de
Châteaufort, de Rochefort
Barons de Bornessant (1565), de
Champrovent, de Chevelu, de Conjux, de Lucey (1563), de Montfleury (v. 1728) ;
Seigneurs de l'Abbaye d'Anglefort,
d'Apremont, de Billième, de Chanaz (1442), de Chavanne, de Chevelu, de Culoz,
de Domessin, de Ferrières, de Foraz en Chautagne, de Lompnes, de Lucey6, de
Lutrin, de Jongieu, de Mareste, de Martel, de Montaigre, de Montdragon, de
Montfleury, de Motz, de Portaux, de Rochefort, de Rubod, de Serrières, de
Silans, de Vacheresse, de Vens, de Verdun, du Villaret, du territoire de Yenne.
Des membres de la famille ont été
châtelains du comte de Savoie pour les châtellenies de Chanaz (1348-1349,
1351).
Branche
des Mareste d'Avressieux, barons de Montfleury.
Cette branche s'éteint à la fin du XIXe
après le décès de Appolinaire Louis adolphe de Mareste en 1867.
Branche
des Mareste de Lucey de Chevelu.
Cette branche semble s'éteindre, par les
mâles, en la personne de Pierre-Paul-Hyacinthe de Mareste de Lucey au début du
XIXe.
Branche
des Mareste, seigneurs de Montaigre (Vieu).
Le château de Mareste à Chavannes-sur-Reyssouez
Le château de Mareste est un ensemble dont la partie
la plus ancienne remonterait aux XIe ou XIIe siècle et qui se situe sur la
commune de Chavannes-sur-Reyssouze dans le département de l'Ain en région
Auvergne-Rhône-Alpes.
La partie sud datant du Moyen Âge abritait une
commanderie de l'Ordre des hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Le corps
principal en "L" date du XVIe siècle. Depuis 1541 et durant 407 ans,
la famille de Mareste resta propriétaire des lieux mais les archives furent
détruites dans un incendie provoqué par l'un des descendants de la famille
devenu fou. La propriété, alors à l'abandon, fut rachetée en 1962 par un
collectionneur qui en entreprit la restauration avec l'aide des Monuments
Historiques. Depuis 1974, les propriétaires actuels en achèvent la
restauration.
Le domaine de Mareste présente un ensemble très
atypique en Bresse. En effet, les façades sont constituées de colombages
hourdis de briques (technique fréquente en Bresse au XVe siècle) et la façade Est
s’ouvre sur une galerie caractéristique mais le pignon d'angle est surmonté
d'un toit à quatre pentes à forte déclivité, doté d'une charpente élancée
revêtue de tuiles plates vernissées polychromes, typique, lui, de
l'architecture vernaculaire de la Bourgogne.
Ce monument, propriété privée, fait l’objet d’une
inscription partielle au titre des monuments historiques par arrêté du 26
septembre 1969.
Seules les façades et toitures de l'ensemble des
bâtiments sont inscrites.
Au XVe, Chavannes était un fief de la famille de ce
nom, qui le tenait des ducs de Savoie. Au XVIe le fief passe par alliance aux
de Mareste, qui gardèrent la propriété jusqu'à nos jours. Les bâtiments du
domaine paraissent remonter aux alentours de 1610. C’était un pavillon de
chasse avec des dépendances agricoles. Comme ces bâtiments n'ont jamais été
modernisés, il se trouvent actuellement constitué d'un ensemble très
authentique de la construction bressanne du début XVIIe en bois et briques.
Sources : Revue de l'Ain n°63
Commentaire
descriptif de l'édifice
Les bâtiments forment un plan en U ouvert au nord, bas, montés en châssis de chêne remplis de briques, sur socles de moellons. Les toitures sont plates, en tuile rondes, sauf le pavillon principal qui a une toiture aiguë en petite tuiles. Parfois la brique est remplacée par du mortier ou même des entrelacs d'osier. Les encadrements des portes et des fenêtres sont en bois. L'entrée principale est au centre du bâtiment, au sud ; elle est sans voûte, entièrement en bois. Les toitures plates sont très saillantes, la plupart du temps sans forgets. Cheminée bressane en brique et plafond à grosses poutres apparentes. L'escalier qui monte au pavillon est à rampe tournée Louis XIII. Deux cheminées Louis XV. Le puits est en briques avec de grosses margelles de pierre monolithe et bâti en chêne avec toit à quatre pentes. Le pavillon et l'aile est servaient à l'habitation, le reste constituait les écuries. Tout est resté dans l'état ancien.