mercredi 18 décembre 2024

Trésor de Notre-Dame de Paris

 LE TRÉSOR DE NOTRE-DAME DE PARIS

DES ORIGINES À VIOLLET-LE-DUC

DOSSIER PÉDAGOGIQUE

EN LIEN AVEC L’EXPOSITION 2023

MUSÉE DU LOUVRE - PARIS

Placide Poussielgue-Rusand d’après Viollet-le-Duc,
Reliquaire de la Sainte Couronne d’Epines, 1862,
© Musée du Louvre, Guillaume Benoit.


Ce dossier donne des clés pour appréhender le contenu de l’exposition, propose une présentation et une analyse d’une sélection d’œuvres afin de préparer son parcours de visite. Chaque notice est accompagnée d’un glossaire et d’une sitographie. Des encarts viennent approfondir certains thèmes en lien avec les œuvres. Des pistes de réflexion sont évoquées à la fin du dossier afin de préparer des activités selon les publics.

 

Le Trésor de Notre-Dame de Paris.

Des origines à Viollet-le-Duc

 Tandis que les travaux de restauration de la cathédrale entreront dans leur dernière phase, le musée du Louvre consacre une exposition inédite au trésor de Notre-Dame de Paris. Ce trésor, qui rassemble les objets et les vêtements sacerdotaux nécessaires à la célébration du culte, des reliques et des reliquaires, des livres manuscrits ainsi que d’autres objets précieux offerts par piété, rejoindra ensuite la sacristie néo-gothique de la cathédrale, construite par Jean-Baptiste Lassus et Eugène Viollet-le-Duc de 1845 à 1850 pour les abriter.

Avec plus de 120 œuvres, cette exposition offre un condensé de l’histoire de ce trésor, en les replaçant dans le contexte de son histoire millénaire : depuis ses origines au Moyen Âge jusqu’à sa résurrection au 19e siècle et son épanouissement avec Viollet-le-Duc sous le Second Empire.

 Le trésor de Notre-Dame, entièrement reconstitué après la Révolution, est célèbre aujourd’hui pour les reliques insignes qu’il abrite, en particulier celles de la Couronne d’épines et du Bois de la Croix qui proviennent de l’ancien trésor de la Sainte-Chapelle (non présentées dans l’exposition) et qui ont trouvé à Notre-Dame, sous le règne de Napoléon Ier, un asile dans de nouveaux reliquaires. Le trésor est également célèbre pour la splendeur des chefs-d’œuvre de l’orfèvrerie française rassemblés au 19e siècle, notamment ceux qui furent conçus par Eugène Viollet-le-Duc, témoins exceptionnels de l’histoire de la cathédrale et de l’histoire de France.

Pour la première fois, l’exposition propose de remonter le temps et de renouer avec l’histoire du trésor avant la Révolution : inventaires, récits historiques, peintures, manuscrits enluminés, gravures et autres documents figurés mais aussi plusieurs œuvres, qui nous sont parvenues, permettent en effet de retracer en partie la longue histoire du trésor depuis les temps mérovingiens et d’entrevoir cette richesse en partie disparue, comparable à celle des plus éblouissants objets créés pour Notre-Dame au 19e siècle.

 Commissariat : Jannic Durand, conservateur général honoraire du patrimoine ; Anne Dion-Tenenbaum, conservateur général et adjointe au directeur du département des Objets d’art ; Florian Meunier, conservateur en chef au département des Objets d’art et Michèle Bimbenet-Privat, conservateur général honoraire au département des Objets d'art, musée du Louvre.

 

 Les intentions du dossier d’œuvres

 Ce dossier propose de documenter, à partir d’une quinzaine d’œuvres sur les cent-vingt présentées, l’histoire mouvementée d’un trésor d’église qui a été détruit au cours de la Révolution française mais qui a toujours été renouvelé. Quelques sources écrites ou figurées nous laissent entrevoir l’ancienneté de sa constitution, son épanouissement ou au contraire son amenuisement selon les périodes fastes ou difficiles de l’histoire de Paris et de la France. Un trésor éphémère, comme tous les trésors, où s’accumulent de nombreux objets sacrés qui se distinguent par leur forme, leur matériau et leur fonction au sein de l’église.

Les objets liturgiques conservés aujourd’hui dans la sacristie de Notre-Dame datent du 19e siècle. Ils témoignent de la volonté de la fabrique de la cathédrale et d’un homme : l’architecte et restaurateur Viollet-Le-Duc (1814-1879) de le renouveler, voire de le réinventer dans le goût médiéval, celui de l’art néo-gothique, afin qu’il retrouve sa splendeur du 13e siècle.

Les œuvres retenues dans ce dossier proviennent d’institutions telles que les Archives nationales, la Bibliothèque nationale de France, de musées comme Carnavalet-Histoire de Paris et le Louvre et pour une dizaine d’entre elles du trésor de Notre-Dame. Leur étude met en lumière la composition d’un trésor d’église dont chaque objet, qu’il soit évoqué ou présent dans l’exposition, raconte une histoire.

 L’intérêt porté aux commanditaires et donateurs révèle le pouvoir et le rôle essentiel des chanoines, ces clercs auprès de l'évêque, dans l’accumulation d’objets ou d’ornements liturgiques, véritables œuvres d’art de l’orfèvrerie religieuse, du savoir-faire des tapissiers ou des enlumineurs. Le trésor raconte les rapports entre le pouvoir politique et le pouvoir religieux lorsqu’il devient une réserve monétaire pour le roi ou, à l’inverse, lorsqu’il bénéficie de ses largesses.

Les objets du trésor ont une vie au sein de l’espace cathédral. Objets investis de sacralité et déposés sur l’autel, Ils participent à la liturgie: messe ou fêtes solennelles. Exposés au musée, ils revêtent une dimension patrimoniale et deviennent objet d’étude des croyances et des pratiques religieuses.

 

Le trésor de Notre-Dame : un trésor du 19e siècle !

 Les traces d’un trésor très ancien : objets précieux et reliques prestigieuses

 La tradition attribue à saint Denis, martyrisé avec ses compagnons Rustique et Éleuthère, la fondation au milieu du 3e siècle d’un évêché à Paris. Une cathédrale est mentionnée dès la fin du 5e siècle et un baptistère au siècle suivant, mais l’histoire des bâtiments antérieurs à la construction de l’édifice actuel, vers 1160-1163, demeure très incertaine malgré les fouilles archéologiques réalisées depuis le 18e siècle. En 775, un acte de Charlemagne précise que la cathédrale est dédiée à la Vierge Marie, à saint Étienne et à saint Germain.

C’est au 6e siècle que remontent les premiers indices d’un trésor, avec le Testament d’Ermintrude que complète à peu près au même moment une liste des reliques de l’évêque Saint-Germain déposée à la cathédrale en 626-625.

L’institution au début du 9e siècle d’un chapitre de chanoines rapidement destiné à devenir responsable du trésor marque une étape décisive sur le plan institutionnel, tandis que s’impose définitivement la dédicace de la cathédrale à la Vierge, Notre-Dame.

Avant 886, les reliques de saint Marcel, évêque de Paris mort en 435, rapatriées d’un faubourg pour échapper aux invasions normandes, permettent à la cathédrale de rivaliser avec les prestigieuses abbayes de Saint-Denis, Saint-Germain-des-Prés et Sainte-Geneviève. Au 13e siècle, elles sont exaltées dans une grande châsse reliquaire monumentale d’or et d’argent, placée en hauteur au-dessus du maître-autel.

Au début du 12e siècle, Anseau, chanoine de l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem, envoie un fragment de la Vraie Croix, dont le Bréviaire de Châteauroux représente l’arrivée solennelle à la cathédrale. C’est un des derniers faits marquants de l’histoire la plus ancienne du trésor dont il ne subsiste plus aujourd’hui que quelques fragments de la relique d’Anseau.

 

Testament d’Erminethrudis ou Ermintrude

 

Paris, vers 575 ?,
copie de la première moitié du VIIe siècle
Encre sur papyrus
Archives nationales de France. K4.

Le testament d’Ermintrude est une source exceptionnelle pour l’histoire de la constitution du trésor de Notre-Dame. Daté de la fin du VIe siècle, entre 567 et 584, son support, le papyrus, provenant de la basse vallée du Nil et exporté jusqu’au port de Marseille, témoigne de la persistance des relations avec le monde méditerranéen alors que le parchemin s’impose comme support d’écriture. Déroulé, il mesure 1,50 mètre !

Le document indique le don par Ermintrude d’un grand plat d’argent à la « sacro-sainte église de la cité des Parisiens » d’une valeur de cinquante sous d’or. Sont également énumérés les biens légués au fisc, aux enfants, petits-enfants et aux treize églises ou communautés de la région parisienne. Le testament, copie contemporaine de l’original délivré par les autorités selon les règles en vigueur à cette époque, est le seul testament féminin mérovingien1 qui nous soit parvenu. Il est conservé à l’abbaye de Saint-Denis jusqu’en 1793. Le précieux testament rejoint à cette date les Archives nationales. Sa conservation par les moines de Saint-

Denis ne doit rien à son contenu premier mais au fait qu’il ait été réutilisé sur son verso pour rédiger un faux alors qu’une querelle l’opposait à Notre-Dame !

L’intérêt du testament d’Ermintrude est double : il donne les premiers indices de la présence au sein de la cathédrale du legs d’un objet réalisé en matériau précieux ; il éclaire sur les croyances et les pratiques d’une dame qui devait appartenir à la plus haute aristocratie mérovingienne et qui par ses dons cherche à assurer le salut de son âme et à perpétuer sa mémoire.

 

1 Mérovingien : nom donné à la dynastie de souverains qui règnent sur la France du 5e au 8e siècle et dont Clovis (481-511) est le premier roi des Francs.

 

Bréviaire à l’usage de Paris du dauphin Louis de Guyenne

Procession de la croix d’Anseau


Maitre de Bedford (actif à Paris entre 1405 et 1435) et collaborateurs
Paris, vers 1413-1414
Parchemin
Collection Médiathèque-Equinoxe, ville de Châteauroux, ms. 2

Cette enluminure décore une des pages du bréviaireà l’usage de Paris. Ce livre contient les prières à lire chaque jour et un calendrier des saints. Datées vers 1413-1414, les peintures sur parchemin sont réalisées par le maître de Bedford et le maître de Boucicaut, enlumineurs virtuoses, et leurs ateliers. L’origine de la commande est assez prestigieuse pour s’adresser aux meilleurs artisans puisqu’elle provient du dauphin, Louis de Guyenne (1397-1415), fils du roi de France Charles VI (1380-1422).

 Le sujet peint représente rétrospectivement la translation ou transfert, par le chanoine du Saint-Sépulcre de Jérusalem Anseau, le 1er août 1120, des fragments de la Vraie Croix présents dans la ville sainte redevenue chrétienne depuis sa reconquête par les croisés en 1099, Anseau la remet à un compatriote en partance pour la France. Arrivée à Paris, la relique est portée solennellement en procession sur une civière à bras. Elle est conservée dans un reliquaire doré en forme de croix et repose sur un tissu azur, parsemé de fleurs de lis. Les motifs se retrouvent sculptées sur la porte de la cathédrale et symbolise la Vierge. Un décor qui n’a pas échappé au goût du détail des enlumineurs. La relique, admirée et vénérée lors de son cheminement à travers les rues de Paris, est sur le point de pénétrer dans la cathédrale par le portail principal dit du Jugement dernier.

 L’événement revêt une telle importance que l’église de Notre-Dame obtient l’institution d’une fête chaque 1er août afin de célébrer la translation de l’insigne relique. Elle s’accompagne pour chaque pénitent qui y participe de l’indulgence plénière ce qui remet à vie l’obligation pour le fidèle de réparer ses péchés par des actes de pénitence.

Le trésor de Notre-Dame s’enrichit au début du 12e siècle d’une des reliques les plus prestigieuses et convoitées.

 Sa possession rejaillit sur le rayonnement de la cathédrale qui renforce son pouvoir au sein de la capitale et s’affirme face à l’abbaye de Saint-Denis.

 Deux lettres d’Anseau, sont présentées à proximité du bréviaire et de la croix-reliquaire qui conserve des fragments de la croix envoyée en 1120 à Notre-Dame (étude suivante). Les deux lettres conservées aux Archives nationales, sont des documents historiques essentiels pour connaître un jalon clé de l’histoire du trésor. Si la première lettre prouve l’envoi du fragment de la Vraie Croix, la seconde fait état de l’envoi d’une autre relique : un morceau de la pierre du Saint Sépulcre enchâssé dans une croix.

 

 Le chrétien et son salut

Culte des saints et des reliques au Moyen-âge, une dévotion partagée par tous

La dévotion aux reliques des saints, de la Vierge et du Christ est une des formes de la piété médiévale Les restes matériels des saints ou les objets qui avaient été en contact avec eux étaient parés du pouvoir de réaliser des miracles comme celui de guérir, de protéger des mauvaises récoltes et d’intercéder auprès de Dieu. Le mérite accordé aux reliques devait rejaillir sur le rayonnement des églises, des monastères et des princes capables d’en posséder.

L’enthousiasme pour les restes physiques ou matériels entraina un véritable trafic des reliques et la constitution d’ateliers de faussaires. Il explique le morcellement des restes supposés des saints ou les fragments des instruments de la Passion du Christ comme ceux de la Vraie Croix ou l’éparpillement des épines de sa couronne. De nombreux fragments de reliques inondèrent, au cours du Moyen-âge l’occident chrétien et les trésors se remplirent de reliquaires pour les magnifier. Les reliques du Christ étaient considérées comme les plus prestigieuses. Le roi de France Louis IX, Saint- Louis (1226-1270), n’hésita pas à dépenser une somme considérable pour posséder la couronne d’épines et d’autres reliques et leur bâtir un écrin-reliquaire monumental, la Sainte Chapelle, au cœur du pouvoir politique.

 

 Monstrance avec portion de la croix d’Anseau


Maurice Poussielgue-Rusand (Paris, 1861 – Paris, 1933)
Paris, 1901 (?)
Vermeil, bois, verre, émaux
H. 34 ; l. 12 ; pr. 11,3 cm
Poinçons de Maurice Poussielgue-Rusand
Paris, église Saint-Ferdinand-des-Ternes, FTE0877,
Propriété de la Ville de Paris



Cet objet nommé monstrance est une pièce d’orfèvrerie religieuse destinée à conserver et à montrer, d’où son nom, à la vénération des fidèles, une parcelle de la croix du Christ ou Vraie Croix. Reconstituée à partir des fragments du bois clair, un des deux bois de la croix dite d’Anseau, elle est entrée au trésor de Notre-Dame au 12e siècle.

 Cet écrin réalisé pour l’insigne relique de la Passion du Christ1 est l’œuvre de l’orfèvre et bronzier Poussielgue-Rusand. Il répond à la commande du chanoine2 de l’église Saint-Ferdinand-des-Ternes alors détentrice de la relique. La monstrance n’a jamais appartenu au trésor de la cathédrale. Elle est conçue, probablement au début du 20e siècle après authentification des fragments de bois comme étant bien ceux envoyés en 1120 à Notre-Dame. L’orfèvre réalise un décor en adéquation avec la forme et la nature de la relique. Une croix enserrée dans un cadre de verre contient l’instrument du salut des chrétiens tandis que quatre anges portant les instruments de la Passion du Christ, le roseau, la couronne d’épines, l’éponge et la lance, ornent le pied. Des clous fixés aux angles de la monture renvoient à la crucifixion de Jésus.

 Un changement de propriétaire, de lieu et une authentification de relique… L’histoire mouvementée du fragment de la croix n’est pas sans rappeler celle du trésor de Notre-Dame. Il revient au chanoine Léon Le Monnier de Saint Ferdinand des Ternes, où l’objet est encore conservé, de retrouver l’histoire et l’origine prestigieuse de la sainte relique. En 1793, le gardien du trésor, en quittant Notre-Dame, sauve la plus grande portion de la croix d’Anseau de la destruction révolutionnaire. Il revient à Pierre Eugène Clausse, à la tête du clergé de Notre-Dame en 1797 de redonner aux fragments l’aspect d’une croix. Après son départ de la cathédrale, Clausse emporte la relique et le reliquaire dans lequel il l’avait faite enchâsser. La relique passe d’ecclésiastiques en familles pieuses jusqu’à se retrouver entre les mains de Léon Le Monnier en 1900.

 

 1 Passion du Christ : souffrances de Jésus depuis son arrestation après son dernier repas avec les apôtres jusqu’à sa crucifixion.

2 Chanoine : clerc qui entoure l’évêque dès le 7e siècle. Le groupe de chanoine forme le chapitre.

 

 Livres de chants, attributs et ornements prestigieux pour s’adresser à Dieu : la générosité des chanoines

 Le trésor des 14e et 15e siècles, abrité dans les armoires et les coffres d’un bâtiment dédié, a entièrement disparu à l’exception de quelques livres enluminés et d’un vase antique en agate sculpté conservé au Walters Art Museum de Baltimore. Les inventaires en donnent le détail et les manuscrits cités ne sont pas toujours faciles à identifier. Avant tout destinés à la célébration des offices dans le choeur et les chapelles, ils pouvaient facilement entrer au trésor, en sortir ponctuellement ou de façon plus pérenne.

 À partir du 16e siècle et jusqu’à la Révolution de 1789, le trésor prend part aux grandes manifestations de la ferveur populaire, dans les rues de Paris pendant les processions et au sein de la cathédrale lors des grandes cérémonies qui rythment l’année liturgique. Chaque jour, le chœur de la cathédrale et ses chapelles s’emplissent des couleurs des ornements, du scintillement de l’orfèvrerie et des chants de la maîtrise. Son développement doit moins aux souverains, ordonnateurs de fontes fréquentes, qu’à l’intervention des chanoines, comme le peintre Rosso, concepteur du nouveau bâton cantoral en 1538, ou encore le chantre Michel Le Masle, donateur des nouvelles tapisseries réalisées pour le chœur à partir de 1638. Ainsi se renouvelle le trésor encore médiéval qui fut considérablement amoindri dans la seconde moitié du 16e siècle au moment des guerres de religion.

 

Portrait du chanoine Michel Le Masle, grand chantre de Notre-Dame


Anonyme (atelier de Simon Vouet, Paris, 1590 – Paris, 1649)
Vers 1646
Huile sur toile
H. 80,5 ; l. 65 cm
Paris, musée Carnavalet, inv. P654


Michel Le Masle est chanoine1 et grand chantre de Notre-Dame. Le grand chantre préside au chant choral comme maître de choeur et donne les premiers mots de la prière chantée accompagné du bâton cantoral, attribut de sa fonction. Placé au milieu des stalles du chœur, il est accompagné d’un livre de chants liturgiques posé sur un lutrin. Michel Le Masle, personnage influent, obtient la dignité de grand chantre grâce à la protection de Richelieu

(1624-1642) cardinal-ministre du roi Louis XIII (1617-1643) dont il a été un de ses secrétaires puis son homme de confiance.

 Le chanoine se fait portraiturer dans ses vêtements de grand chantre par un élève de Simon Vouet (1590-1649) en 1646. Représenté à mi-corps et assis, il porte le rochet, un surplis en lin blanc qui s’arrête aux genoux et l’aumusse déposée sur son bras gauche, une bande de fourrure qui à l’origine recouvrait les épaules et protégeait du froid. Sa robe de couleur rouge apparaît discrètement au col, rappelée par l’étoffe qui ferme l’espace du tableau et met en valeur le personnage.

 Le véritable sujet de cette toile est le bâton qui se trouve derrière Michel Le Masle et qui renvoie à sa dignité de grand chantre. Il le reçoit solennellement le jour de sa nomination. D’une hauteur d’un mètre soixante, le bâton est l’oeuvre de Rosso (1494-1540), peintre et décorateur du roi François 1er (1515-1547) à Fontainebleau et nommé chanoine de Notre-Dame. L’objet est réalisé en 1538, comme l’atteste un dessin de la main de l’artiste (exposé à côté du tableau, Collection particulière), en remplacement d’un exemplaire du 14e siècle. Le bâton est exécuté par l’orfèvre Macé Bégault en argent et doré. La hampe porte un décor de fleurs de lis. Son sommet se termine par un édicule dans lequel se trouve une statue de la Vierge.

Par le prestige dû à son ancienneté et à son concepteur, le bâton fait la fierté du chanoine Michel Le Masle qui introduit la représentation de son sommet dans ses armoiries.

Première oeuvre Renaissance entrée au trésor, le bâton cantoral est un témoin de son renouvellement au 16e siècle et ce grâce aux dons des chanoines et à l’intérêt qu’ils portent aux innovations artistiques.


1 Chanoine : clerc qui entoure l’évêque dès le 7e siècle. Le groupe de chanoine forme le chapitre. Certains chanoines ont une fonction particulière comme celle de chantre. Ils disposent d’une stalle : un siège attitré au sein du choeur, partie la plus sacrée de la cathédrale. Les liturgies, culte rendue à Dieu par des paroles et des gestes, se déroulent dans le choeur.

 Description iconographique:

 Derrière le personnage on remarque le "bâton cantoral", attribut de la dignité de grand chantre de Notre-Dame.

 Commentaire historique:

 Michel Le Masle, seigneur et prieur des Roches et de Notre-Dame-des-Champs, fut aussi chanoine de Notre-Dame et secrétaires de Richelieu. En 1646, Il donna sa bibliothèque à la Sorbonne. Le portrait du musée Carnavalet est probablement un fragment du portrait en pied du donateur detiné à orner l'une des deux cheminées monumentales situées à chaque extrémité de la bibliothèque ; un portrait de Richelieu par Philippe de Champaigne lui faisait face.

 Date d’acquisition : 1884

 

Graduel à l’usage de l’Eglise de Paris


1669
Parchemin
H : 80 cm ; l : 57 cm
Bibliothèque nationale de France.
Département Musique. RES VMA MS-1413


Cette peinture sur parchemin réalisée en pleine page décore un des sept volumes qui renferment les chants accompagnant la liturgie chrétienne.

L’enlumineur Etienne Compardel est chargé d’exécuter l’ensemble du cycle de peintures. Réalisée entre 1669 et 1671, cette commande prestigieuse et ambitieuse est attribuée au chanoine Duhamel et devait répondre à une liturgie rénovée en 1662 au sein du diocèse de Paris. L’enluminure est placée en ouverture du volume. Le sujet représente David en roi biblique musicien jouant de la harpe, le regard tourné vers le ciel à la recherche de l’inspiration divine. L’iconographie répond à la fonction du manuscrit et rappelle l’importance du chant dans le judaïsme et le rôle du roi David à qui est attribué la composition de psaumes et de louanges.

 Versé au trésor, le graduel est répertorié dans tous les inventaires. Sa taille : plus de quatre-vingt centimètres et son poids nécessitèrent la commande d’un nouveau lutrin en bronze ! Les volumes étaient déposés au jubé sous la garde du petit sonneur des cloches de la cathédrale à qui le chanoine Duhamel versait une rente. Ces précisions indiquent que les livres du trésor pouvaient se trouver dans différents lieux de l’espace cathédral et montre l’importance des  chanoines, qui par leur générosité, assurent leur entretien.

 Le graduel connait une histoire tumultueuse. Les volumes, saisis au cours de la Révolution au profit du cabinet des Manuscrits de la Bibliothèque nationale, sont restitués en 1807 au chapitre, qui les fait restaurer en 1819, puis compléter en 1827 par un huitième volume. Endommagés lors des pillages de 1831, puis de nouveau restaurés, ils restent à Notre-Dame jusqu’à leur dépôt, en 2010, au département de Musique de la Bibliothèque nationale de France, sauf un conservé au trésor de Notre-Dame.

 


 Le graduel est consultable en ligne :  ici


Le chant liturgique : faire entendre la parole divine

« Qui bien chante, deux fois prie ». Cette déclaration de Saint-Augustin, père de l’Église chrétienne et évêque d’Hippone (395-430), Annaba en Algérie, doit inciter les chrétiens à pratiquer le chant lors de la prière individuelle ou en communauté. Le chant sacré est une adresse à Dieu qui accompagne les cérémonies religieuses. Il permet au croyant de louer Dieu, de prier et de proclamer sa foi. Les psaumes, écrits par le roi David témoignent de l’ancienneté de la pratique du chant transmis de la liturgie juive au christianisme.

Dès le 4e siècle, une école épiscopale parisienne forme de jeunes élèves au chant. Au 12e siècle Notre-Dame devient le chef de fil musical en Europe. Son école invente des genres musicaux tels que la polyphonie et les motets.


 L’Annonciation


Charles Poerson (Vic-sur-Seille, vers 1609 -
Paris, 1667)
Esquisse pour une pièce de la tenture de la
Vie de la Vierge
1652
Huile sur toile
H :50cm ; l : 63cm
Musée Carnavalet - Histoire de Paris. P2321

L’Annonciation est l’une des dix esquisses réalisées en 1652 par le peintre Charles Poerson (1609-1667) destinée à la réalisation des cartons de la tenture de la Vie de la Vierge. Quatre autres proviennent de l’atelier de Philippe de Champaigne (1602-1674) et du peintre Stella (1596-1657). Sur cette esquisse, le peintre, élève de Simon Vouet (1590-

1649) met en scène, sous l’œil de Dieu le Père et du Saint esprit, l’annonce faite à Marie par l’ange Gabriel de sa maternité divine : elle donnera naissance à Jésus, le sauveur des hommes. La vierge Marie répond au tumulte des angelots et aux drapés virevoltants qui l’entourent par une attitude empreinte de calme et de sérénité.

 C’est à la demande du cardinal-ministre Richelieu (1624-1642)) que le chanoine et chantre Michel Le Masle, son ancien secrétaire et homme de confiance, passe commande dans un premier temps de quatre tapisseries. Le chanoine reprend le projet interrompu par la mort du cardinal en 1643. Pour rappeler son implication, il fait figurer ses armoiries dans les angles des panneaux (on y retrouve le sommet du bâton cantoral, insigne de sa fonction de chantre décrit dans l’étude précédente). Les tapisseries sont livrées entre les années 1638 et 1657 et rejoignent les ornements du trésor. Les jours de fêtes, la tenture décore selon le projet de Richelieu le chœur de Notre-Dame. Tendues au-dessus des stalles du chœur, les tapisseries forment un écrin qui le magnifie La tenture faisait partie intégrante d’un plus vaste projet de rénovation du chœur de Notre-Dame à la suite du « Voeu de Louis XIII » prononcé en 1638. Le roi promet de consacrer son royaume à Notre-Dame si un fils lui nait et si l’ennemi espagnol est écarté. Louis XIII meurt en 1642 et il revient à son fils Louis XIV (1661-1715) de faire transformer le chœur. Un nouveau maître-autel est construit en 1699. Le roi charge, en 1708, l’architecte Robert de Cotte des modifications architecturales : nouvelle clôture et nouvelles stalles, ces sièges en bois réservés aux clercs. Le réaménagement du chœur donne une ampleur inédite au trésor difficilement mesurable aujourd’hui du fait de sa destruction au cours de la Révolution. Cependant, la nouvelle configuration du chœur rendait obsolète la présentation de la tenture de la Vie de la Vierge. Dernière grande commande, les tapisseries sont cédées pour 10000 livres à la cathédrale de Strasbourg où elles sont toujours conservées et parfois présentées. Seules pièces du trésor qui nous soient parvenues, les tapisseries sont un précieux témoignage de la somptuosité des ornements liturgiques qui paraient la cathédrale.

 L’implication de commanditaires prestigieux- un ministre qui répondait par son projet de tenture à celui plus vaste de Louis XIII de transformer le chœur, un chanoine qui poursuit le projet de Richelieu après sa mort et permet la réalisation des quatorze tapisseries- témoigne des liens de plus en plus étroits entre le pouvoir monarchique et Notre-Dame après « le vœu de Louis XIII ». Si Reims est le lieu du sacre et Saint-Denis la nécropole royale, Notre-Dame devient, au cœur de la capitale, la cathédrale choisie pour protéger le royaume.

 

 Reconstituer le trésor. Le don des « Regalia » et des reliques de la passion par Napoléon

 Le trésor est anéanti durant la Révolution française. Le 2 novembre 1789 est décrétée la nationalisation des biens du clergé. Le 3 mars 1791, les objets « inutiles au culte » sont confisqués et fondus. Les objets subsistants sont à leur tour transportés par charrette à l’Hôtel de Ville en août 1792, avant d’être fondus en octobre à l’Hôtel de la Monnaie.

 Le Concordat, accord signé le 15 juillet 1801 entre la France et le Saint-Siège, et la loi du 8 avril 1802 relative à l’organisation des cultes permettent le rétablissement du culte et rendent nécessaire la reconstitution d’un trésor. Le choix de Notre-Dame de Paris pour le sacre de l’empereur Napoléon Ier le 2 décembre 1804, et non de Reims comme sous l’Ancien Régime, donnent à la cathédrale une prééminence nouvelle. L’empereur veille à enrichir le trésor, par des dons ou par l’affectation de saisies de guerre. L’archevêque Jean-Baptiste de Belloy obtient en 1804 l’insigne relique de la Couronne d’épines provenant du trésor de la Sainte-Chapelle, pour laquelle est commandé un imposant reliquaire en 1806.

 La préparation du sacre en 1804 suscite des achats pour le trésor, comme la croix et les chandeliers d’une garniture d’autel datant des années 1710-1720, ainsi que des commandes de vêtements (chapes, chasubles, tuniques etc…) et d’orfèvrerie liturgiques, dont subsistent encore quelques exemples. Après la cérémonie, la cathédrale obtient la garde des manteaux impériaux, de la couronne de Joséphine (première épouse de Napoléon Ier), des insignes impériaux et des insignes dits de Charlemagne qui étaient avant la Révolution déposés à la basilique de Saint-Denis, ainsi supplantée par Notre-Dame comme lieu symbolique du pouvoir.

 

Couronne dite « de Charlemagne »


Martin-Guillaume Biennais (La Cochère, 1764 - Paris, 1843)
Paris, 1804
Laiton doré, camées
Musée du Louvre, Département des Objets d’Art. MS 91


La couronne aux camées dite Couronne de Charlemagne appartient aux Regalia1, les instruments du pouvoir remis au roi lors de la cérémonie du sacre à Reims et déposés à Saint-Denis jusqu’à la Révolution française. La couronne est livrée en 1804 pour le sacre de l’empereur Napoléon 1er (1804-1815) à Notre-Dame, le 2 décembre de la même année. L’orfèvre Biennais dit avoir restauré la couronne de Charlemagne pour l’occasion. Or celle-ci est une invention moderne, la couronne avait été détruite ! Biennais s’est inspiré de deux gravures des Monuments de la monarchie françoise de Montfaucon représentant une image de Charlemagne datant du 15e siècle ceint d’une couronne impériale.

 L’orfèvre réalise une couronne fermée. Huit branches se rejoignent, surmontées d’une croix, symbole de l’empire chrétien universel sur lequel règne Charlemagne. Quarante camées et intailles, pierres gravées, décorent l’objet. Ils proviennent de la cathédrale de Bourges et du trésor de Saint-Denis. La couronne fait partie de ce que l’on appelle les « honneurs » de Charlemagne. Elle joue un rôle secondaire, tout comme les autres objets ayant servis au sacre des rois de France: main de justice et sceptre du roi Charles V (1364-1380) présents lors du sacre de Napoléon 1er (1804-1815).

 Biennais a reçu commande d’autres insignes dits « honneurs » impériaux remis à l’empereur lors de la cérémonie du 2 décembre. Jacques-Louis David (1748-1825) représente les premiers dans la partie gauche de son tableau Le sacre de Napoléon 1er, conservé au musée du Louvre et les seconds, au premier plan dans la partie droite tout comme sur le dessin préparatoire pour Le Sacre exposé à proximité de la couronne et provenant de la Fondation Napoléon.

Les « honneurs » de l’empereur et ceux de Charlemagne sont déposés par Napoléon 1er au trésor de Notre-Dame auxquels s’ajoutent des pièces d’orfèvrerie qui figuraient sur le maître-autel lors du sacre: un ensemble de chandeliers et une grande croix processionnelle mais aussi une aiguière présentés dans la même vitrine et visibles sur le dessin et le tableau de David.

Après l’abdication de Napoléon en 1815, les objets du sacre sont devenus encombrants et sont cachés au public.

Les « honneurs » de Charlemagne et ceux de l’empereur sont ensuite déposés au garde meuble. Ces derniers sont détruits en 1819. Le roi Charles X (1824-1830) qui veut restaurer la monarchie de droit divin se fait sacrer en 1824 à Reims et utilise la couronne dite de Charlemagne.

 

 1 Regalia : insignes du pouvoir monarchique remis au roi lors de la cérémonie religieuse du sacre : épée, éperons, couronne, sceptre, main de justice, manteau fleurdelisé. Les Regalia sont déposés au trésor de l’abbaye de Saint-Denis.

 Pour voir la couronne en détail : ici



Main de Justice du Sacre de Napoléon Ier



Martin-Guillaume Biennais (La Cochère, 1764 - Paris, 1843)
Paris, 1804
Ivoire, argent doré, or, pierres précieuses, perles
Musée du Louvre, Département des Objets d’Art. MS 85



La main de justice est un autre insigne appartenant aux « honneurs » de Charlemagne. Tout comme la couronne, l’objet est une invention moderne de l’orfèvre Biennais qui prétend avoir « démonté et remonté » la main. Il la livre en 1804 pour la cérémonie du sacre1. Il s’inspire tout comme pour la couronne d’une gravure des Monumens de la monarchie françoise de Montfaucon qui représentait une main de justice médiévale destinée au sacre des rois de France et conservée à Saint-Denis. Elle faisait un geste de bénédiction mais était imprimée inversée ! Biennais, peu soucieux de vérité historique, réalise une main gauche. À la base de la main, il ajoute l’anneau dit de Saint-Denis, daté de 1200-1215. Il se compose d’une rosace sertie de pierres précieuses et semi-précieuses, de camées médiévaux et d’une intaille antique. Cet insigne joue un rôle secondaire lors du sacre. Elle se trouve avec la couronne de Charlemagne dans la partie gauche du dessin et du tableau du Sacre de Napoléon 1er de David. La couronne et la main de justice, discrètes sur les représentations mais voulues par l’empereur lors de son sacre, envoie un symbole fort de légitimité de la dynastie napoléonienne en la rattachant au prestigieux empereur carolingien.

Biennais a réalisé une autre main de justice, une main droite et ouverte. Elle faisait partie des « honneurs « de l’empereur. Offerte au trésor de Notre-Dame, elle est fondue en 1819. La main de justice exposée est utilisée lors du sacre de Charles X en 1824.

 

 1 Sacre : cérémonie religieuse au cours de laquelle le roi reçoit les insignes de son pouvoir, oint, devient un monarque de droit divin dont le pouvoir émane de Dieu seul. Le lieu traditionnel du sacre est Reims.

 

Fiche œuvre de la main de justice : ici  

Fiche œuvre du dessin préparatoire pour Le Sacre de Napoléon par David : ici


Fiche œuvre du tableau Le sacre de Napoléon par Jacques Louis David et propositions d’analyses : ici




d'autres précisions : ici           encore : ici                et pour finir : ici


Anneau et châsse reliquaires de la sainte couronne d’épines



Jean-Charles Cahier (Soissons, 1772 -Marseille, 1857)
1806 Argent doré, cristal Laiton doré, tôle peinte
Cathédrale Notre-Dame de Paris,
Direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France.
NDP 101 - NDP 26



Le reliquaire en cristal et argent doré est une production de l’orfèvre Jean-Charles Cahier. Il livre son œuvre au chapitre de Notre-Dame en 1806. La forme circulaire répond à celle de la relique : la couronne d’épines du Christ qui se compose d’un jonc tressé, retenu par des fils d’or. La transparence du cristal permettait aux fidèles de voir et de vénérer l’instrument de la Passion le plus insigne.

La relique est transférée depuis la Sainte Chapelle, écrin-reliquaire construit par Saint-Louis (1226-1270) pour conserver les reliques du Christ, jusqu’à Notre-Dame au cours d’une cérémonie solennelle le 10 août 1806.

Une châsse de la main de Cahier contient le reliquaire de la Sainte Couronne. Livrée en 1806, celle-ci se compose d’un socle sur lequel est racontée l’histoire de la relique que complètent des objets de la Passion : la lance, les tenailles et les clous, le roseau et l’éponge, instruments ayant servi au supplice du Christ sur la croix. Trois anges, un genou à terre, portent le globe terrestre surmonté d’une croix qui renvoie à la vocation universelle du christianisme. Le globe s’ouvre pour contenir le reliquaire, une serrure est cachée par le phylactère qui se trouve à son sommet. La femme au pied de la croix symbolise la foi. Le lion couché renvoie au nom donné à Jésus dans le livre de l’Apocalypse (5-5) : « le lion de la tribu de Juda ».

De style néo-classique, la châsse-reliquaire1 répond au goût de Napoléon 1er (1804-1815).

Aujourd’hui, le reliquaire de la couronne d’épines est conservé dans le trésor, dans une autre châsse réalisée en 1896 par l’orfèvre Poussielgue-Rusand (œuvre proposée dans le dossier).

 La translation de la couronne d’épines en 1806, le sacre de Napoléon deux ans plus tôt accompagnés des dons des insignes du sacre font de la cathédrale Notre-Dame un haut lieu de la nation française.

La reconstitution du trésor, enrichi par les largesses de Napoléon 1er, peut se lire comme un symbole de la réconciliation avec les catholiques dont le culte est rétabli en 1802 après les années tumultueuses de la Révolution française.

 

1 Châsse-reliquaire : boîte, coffre qui contient une relique, une partie d’un squelette ou un corps entier de saint. Sa forme varie : église, coffre ou cercueil. Les matériaux sont souvent précieux et un décor historié rappelle l’histoire du saint. La châsse-reliquaire peut avoir une paroi transparente pour permettre de voir la relique.

 

Fiches œuvres : 

anneau reliquaire : ici

Reliquaire : ici




Le renouveau du trésor. Des dons royaux au trésor néogothique de Viollet-le-Duc

 Patiemment reconstitué depuis 1802, le trésor profite, sous la Restauration (1814-1830), de l’étroite union entre le pouvoir royal et l’Église catholique. Les dons au trésor proviennent tout d’abord des souverains. Charles X (1824-1830), bien qu’il soit sacré à Reims, octroie en 1825 une somme destinée à confectionner un important ornement liturgique (chapes, dalmatiques, chasubles, etc…) pour Notre-Dame. L’archevêque, Monseigneur de Quelen, multiplie cérémonies et processions à l’occasion du jubilé, année sainte décrétée par le pape pour 1826. Les reliques, notamment des saints apôtres ou de la Passion, sont solennellement mises en scène. Pour la clôture, le 15 août, la nouvelle statue de la Vierge en argent offerte par le roi Charles X (1824-1830) est portée par quatre valets de pied du roi, pour la procession traditionnelle du voeu du roi Louis XIII de 1638, rétablie par Louis XVIII dès 1814.

Louis-Philippe (1830-1848) offre un ensemble de vêtements liturgiques à l’occasion de la naissance du comte de Paris en 1838 et Napoléon III (1852-1870) pour le baptême du prince impérial en 1856. Les archevêques et les chanoines sont à l’origine de nombreux dons, comme en témoignent les chapelles du cardinal Morlot et du chanoine Deplace, ou la mitre de Monseigneur Sibour. Des particuliers

peuvent également se montrer généreux, comme la mystérieuse marquise de Neuchèze qui lègue en 1864 quatorze reliquaires à la cathédrale.

Le trésor subit à nouveau d’importantes destructions lors de la Révolution de juillet 1830, avec le double pillage de l’archevêché et du trésor, puis lors de l’insurrection de février 1831.

Un concours pour la restauration de la cathédrale est organisé en 1843 et remporté par Jean-Baptiste Lassus et Eugène Viollet-le-Duc. Le projet inclut la reconstruction de la sacristie. Le bâtiment de style néoclassique de Jacques-Germain Soufflot avait été endommagé pendant les émeutes et ne donnait plus satisfaction au chapitre.

 La construction et l’aménagement intérieur ne sont achevés qu’en 1854 et le trésor prend place dans le nouveau bâtiment de style néo-gothique.

À partir de 1855, et surtout entre 1866 et 1869, Viollet-le-Duc est chargé de dessiner un mobilier liturgique et des reliquaires en harmonie avec le style de ce nouvel écrin. Il peut satisfaire son goût pour le Moyen-âge et offrir à la nouvelle sacristie un trésor digne du trésor gothique du 14e siècle disparu.

 

 Chape de l’ornement offert par le roi Charles X


Mathevon Jacques et Bouvard Frères, Petit-Didier (soierie) Lyon et Paris, 1825
Drap d’or - Cathédrale Notre-Dame de Paris,
Direction régionale des affaires culturelles d’Ile de-France. NDP 1102-1

 

La chape est un vêtement liturgique. Elle est classée parmi les ornements du trésor avec les tissus et tapisseries. Cape ample et sans manche, elle est ouverte sur le devant, maintenue par une agrafe et descend presque jusqu’aux pieds. Déployée, sa forme est semi-circulaire et son diamètre peut atteindre 1,60 mètre. Le prêtre la porte lors de certaines célébrations en dehors de la messe où il revêt la chasuble. La chape exposée est un don du roi Charles X (1824-1830). Sacré à Reims, c’est pourtant à Notre-Dame qu’il offre la somme de 25000 francs qui servit à la commande de plusieurs pièces.

 Le tissu finement brodé d’or, au décor de lis, de pivoines et de branches de chêne, renvoie à la virtuosité des artisans soyeux lyonnais. Endommagé pendant les journées révolutionnaires de juillet 1830 et lors du sac de l’évêché en 1831, le vêtement est remodelé. La chape est portée pour le baptême du prince impérial, fils de Napoléon III (1852-1870) en 1856.

 Le trésor de Notre-Dame s’enrichit au 19e siècle des libéralités des monarques et notamment de l’alliance du trône et de l’autel lors de la période de la Restauration (1815-1830). Le successeur de Charles X (1824-1830), Louis-Philippe, roi des Français de 1830 à 1848, offre à l’occasion de la naissance de son petit-fils en 1838 un ensemble de vêtements liturgiques provenant de la célèbre maison de soyeux lyonnais Grand Frères. Son don permet de reconstituer un trésor malmené en 1830. Napoléon III imite ses prédécesseurs avec la remise au trésor d’un ornement à l’occasion du baptême de son fils.

Les deux chapes, celle offerte par Louis-Philippe et celle de Napoléon III sont exposées à proximité de la chape de Charles X.

 

 Fiches oeuvres

Baptême du petit fils de Louis-Philippe en 1841 : ici

Baptême du prince impérial en 1856 : ici


Chapelle du chanoine Deplace : calice et sa patène, ciboire, bassin et burettes


 

Placide Poussielgue-Rusand (Paris, 1824– 1889), d’après le Père Arthur Martin
(Auray,1801-Paris, 1856)
Avant 1865
Argent doré, micro-mosaïques, émail
Cathédrale Notre-Dame de Paris,
Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France. NDP 9 a,c, e, g, h.



Cet ensemble d’objets liturgiques porte le nom de chapelle. La chapelle se compose d’un calice et de sa patène, d’un ciboire, de burettes et son plateau. Ces objets sont utilisés par le prêtre au cours de la célébration de l’eucharistie et déposés sur le maitre-autel ou à proximité.

 Les pièces d’orfèvrerie sont l’œuvre de l’orfèvre Poussielgue-Rusand qui les réalise avant 1865. Les matériaux et les techniques utilisés, l’argent doré, la micro-mosaïque et l’émail, renvoient à la noblesse des pièces et à la virtuosité du travail des artisans. Le style néo-gothique, cher au 19e siècle, rappelle l’âge d’or du grand trésor gothique des 13e et 14e siècles que Viollet-Le-Duc, qui restaure Notre-Dame, veut recomposer.

Le chanoine Deplace a reçu le calice et les burettes de l’empereur Napoléon III (1852-1870) après avoir prêcher le Carême aux Tuileries. Il en fait don au trésor pour Pâques 1867 avec les autres pièces. Par son geste, il participe, tout comme d’autres chanoines, à la progressive reconstitution du trésor depuis son pillage lors de la Révolution de 1830 et des journées insurrectionnelles de 1831.

Il met en valeur le trésor et le savoir-faire français dans la production d’orfèvrerie religieuse en exposant les pièces de sa chapelle alors que se déroule l’exposition universelle de 1867 à laquelle participe l’orfèvre Poussielgue-Rusand. Il profite de la venue des têtes couronnées européennes pour faire visiter le trésor dont la renommée et la somptuosité attirent les monarques. C’est ainsi que le chanoine reçoit l’empereur de Russie, la reine des Belges ou encore l’empereur d’Autriche.

 

Fiches œuvres du calice et de la patène : ici


Des objets pour célébrer la messe

 L’eucharistie célèbre, pour les chrétiens, le sacrifice du Christ. Au cours de la messe, le prêtre associe à la parole des gestes symboliques. Il utilise des vases et de la nourriture pour renouveler avec les fidèles le dernier repas du Christ et de ses apôtres : la Cène, avant sa mort sur la croix et la proclamation de sa résurrection par ses fidèles. Ces objets réservés à un usage liturgique et investis d’un caractère sacré par leur destination au culte divin, doivent se distinguer des objets usuels par la noblesse des matériaux, l’or ou l’argent doré associés parfois aux pierres précieuses ou semi-précieuses et par la finesse du travail des orfèvres, des émailleurs et mosaïstes.

 

Parmi les vases :

 • Le calice : est une coupe dans laquelle est versé le vin auquel est ajouté de l’eau. Il contient, après la consécration du prêtre, pour les chrétiens catholiques et luthériens le sang de Jésus- Christ.

• Le ciboire : conserve les hosties consacrées, pain non levé qui représente pour le croyant le corps du Christ.

• La patène : est une coupelle ou petite assiette qui reçoit les hosties qui sont ensuite consacrées par le prêtre.

• Les burettes : conservent le vin et l’eau versés dans le calice.

• L’autel : le prêtre se trouve face à l’autel, table sur laquelle il célèbre la messe et où sont disposés les objets liturgiques. Elle renvoie aux tables des sacrifices antiques. Le maître-autel est placé dans l’espace le plus sacré de l’église : le chœur. Pour les chrétiens catholiques, le Christ est réellement présent lors de la consécration du pain et du vin par le prêtre.

Au cœur de la Foi chrétienne, l’Eucharistie est le sacrement au cours duquel le prêtre et les fidèles rendent grâce à Dieu de les avoir sauvés par son sacrifice sur la croix.

 

Anonyme, La messe de Saint-Grégoire, 1438,
Bourgogne, huile sur bois   RF19418


Reliquaire de la sainte Couronne d’épines

 

Placide Poussielgue-Rusand (Paris, 1824 - 1889),
d’après Eugène Viollet-le-Duc (Paris, 1814 - Lausanne, 1879)
1862
Argent doré, cristal, pierres précieuses et semi-précieuses
Cathédrale Notre-Dame de Paris, 
Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France. NDP 68


Le reliquaire de Notre-Dame, destiné à recevoir la relique de la couronne d’épines1, répond à une décision d’exposer à nouveau les reliques de la Passion à la vénération des fidèles lors de la semaine sainte2. Le conseil de fabrique choisit en 1845 de faire appel aux deux architectes, Lassus et Viollet-Le-Duc (1814-1879) pour réaliser le projet. Il est laissé en suspens jusqu’en 1859, date à laquelle il est relancé. L’aménagement du trésor dans la nouvelle sacristie étant achevé depuis 1854, il peut alors être augmenté de nouvelles pièces d’orfèvrerie. Viollet-Le-Duc réalise des dessins, dont un est présenté à la fin de l’exposition, qui répondent en partie à la commande initiale de reprendre la forme du reliquaire de la Saint Chapelle du 13e siècle connu par la gravure.

L’orfèvre Poussielgue-Rusand (1824-1889) est chargé de l’exécution du reliquaire, livré en 1862. Réalisé en argent et doré, la partie supérieure se compose d’un réceptacle en cristal surmonté d’une couronne ornée de fleurs de lis, de quatre cent pierres précieuses et semi-précieuses et supportée par les statuettes des douze apôtres. Les fidèles avaient été sollicités lors du Carême3 pour offrir les pierres au trésor. Quatre personnages jouent le rôle de support. Sainte Hélène, l’empereur romain Constantin (306-337) son fils, Baudoin II (1228-1261) empereur latin de Constantinople et Saint Louis (1226-1270) sont assis sur des trônes et renvoient à l’histoire de la relique depuis sa découverte jusqu’à son achat par le roi de France en 1239.

Saint Louis tenant la Couronne d'Épines

Baudoin II

Sainte Hélène


Si le réceptacle est inspiré par le reliquaire médiéval, le pied témoigne de l’imagination créatrice de Viollet-Le-Duc qui propose une œuvre néo-gothique originale. La virtuosité de l’exécution de cette pièce d’orfèvrerie, qui a nécessité deux années de travail, magnifiée par son décor de pierres précieuses et semi-précieuses et la finesse des détails ont valu à Poussielgue-Rusand une médaille en 1862.

 1 Couronne d’épines : selon la tradition, elle est découverte par l’impératrice Hélène en 326 sur le mont Golgotha, aux portes de Jérusalem. Elle emporta quelques morceaux à Constantinople (aujourd’hui Istanbul). Au 13e siècle, Baudoin II venu chercher de l’aide auprès de Saint-Louis, pour défendre son empire, lui vendit la relique.

2 Semaine sainte : Elle commence le dimanche des Rameaux, inclut la Cène et comprend la Passion du Christ et sa mort sur la croix. Sa résurrection est célébrée le dimanche de Pâques.

3 Carême : Période de 40 jours qui rappelle le temps passé par Jésus au désert après son baptême et les quarante années d’Israël dans le désert. Temps de pénitence qui commence le mercredi des Cendres et se termine le jeudi Saint.

 

Fiches oeuvres

Dessin du Reliquaire : ici

Gravure de la grande châsse de la Sainte Chapelle avec le reliquaire du XIIIe siècle : 

Gravure de la grande châsse de la Sainte Chapelle avec le reliquaire du XIIIe siècle 


Eugène Viollet-le-Duc. Redonner au trésor son lustre médiéval

 Dès 1843, Eugène Viollet-Le-Duc (1814-1879) et l’architecte Jean-Baptiste Lassus (1807-1857) sont choisis pour restaurer Notre-Dame. Le chantier donne l’occasion à Viollet-Le-Duc de mettre en œuvre sa vision globale de la restauration. Il propose, au-delà du bâtiment et de ses abords, de restituer des décors, des sculptures, de créer du mobilier et des objets d’orfèvrerie religieuse en accord avec l’architecture gothique de la cathédrale. « Dans son zèle à restaurer la vieille cathédrale, le vaillant architecte ne pouvait oublier qu’à une église du 13e siècle il faut un mobilier du même âge ou du moins du même style », écrit l’historien de l’art Paul Mantz dans un article sur le trésor en 1868.

La nouvelle sacristie, reconstruite au sud du chœur comme l’ancien édifice, accueille le trésor en 1854. Viollet-Le-Duc dessine de somptueuses pièces pour le renouveler. Ses études sont publiées dans son Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe siècle à la Renaissance en dix tomes et dans son Dictionnaire raisonné du mobilier français de l’époque carolingienne à la Renaissance en six volumes. Les chanoines de Notre-Dame confient l’exécution des ouvrages aux orfèvres Cahier (1772-1857), Chertier (1825-1890) et Poussielgue-Rusand (1824-1889) qui, tous trois, adhèrent à l’esprit médiéval que Viollet-Le-Duc oeuvre à restituer. L’ensemble exceptionnel d’œuvres exécutées témoigne de l’extraordinaire inventivité de l’architecte alliée à une subtile connaissance des œuvres gothiques.

 

Grand ostensoir et son Thabor

 

Placide Poussielgue-Rusand (Paris, 1824 – 1889), 
d’après Eugène Viollet-le-Duc (Paris, 1814 – Lausanne, 1879)
1867
Argent doré, pierres précieuses ; bronze doré
Cathédrale Notre-Dame de Paris, 
Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France. NDP 70 A et B


Cette pièce d’orfèvrerie est destinée à montrer l’hostie consacrée aux fidèles afin qu’ils puissent la vénérer.

L’ostensoir1 est déposé sur l’autel lors de la messe du Saint-

Sacrement2 ou porté en procession.

 C’est à partir d’un projet de Viollet-Le-Duc (1814-1879), dont le dessin est présenté en fin d’exposition, que l’orfèvre Poussielgue-Rusand (1824-1889) est sollicité par le chapitre de

Notre-Dame pour réaliser l’ouvrage. La commande est livrée en 1867 avec d’autres pièces d’autel : un tabernacle, deux candélabres et un chandelier.

Viollet-Le-Duc s’éloigne de ses créations qui rappellent l’art médiéval. Il choisit de reprendre la forme du soleil des ostensoirs du 18e siècle comme Le Grand Soleil dont il reste un dessin de Claude II Ballin, présenté dans la seconde salle de l’exposition. Au centre, deux disques de cristal sertis de diamants et de rubis, réceptacle du Saint-Sacrement, sont placés dans un quadrilobe orné des symboles des évangélistes d’où partent les rayons solaires. Les deux anges qui semblent portés dans les airs par la naissance d’une tige bourgeonnante encensent avec vivacité et allégresse la gloire rayonnante du Christ. Viollet-Le-Duc s’inspire pour le motif des anges des ostensoirs du 14e et du 15e siècles comme celui de Flagnac dans le sud de la France.

 Cette remarquable pièce d’orfèvrerie qui complète le trésor de Notre- Dame est présentée à l’exposition universelle de 1867 et selon la tradition de la maison Poussielgue-Rusand, le modèle est proposé à la vente et diffusé dans des matériaux plus ou moins coûteux.

 

 1 Ostensoir : pièce d’orfèvrerie destinée à présenter l’hostie, le corps du Christ, dans sa partie transparente, lors de la fête du Saint Sacrement instituée au 13e siècle. Au 14e siècle, l’ostensoir prit la forme d’un soleil. L’autre nom donné à cet objet est monstrance.

2 Saint-Sacrement : adoration de l’hostie consacrée, le corps du Christ

Thabor : support sur lequel est posé l’ostensoir lorsqu’il est présenté avec l’hostie, corps du Christ, aux fidèles.

 

voir : ici


Chrémier en forme de colombe


Jean-Alexandre Chertier (Paris, 1825 -1890)
d’après Eugène Viollet-le-Duc (Paris,1814 - Lausanne, 1879)
1866
Argent doré, émail champlevé
Cathédrale Notre-Dame de Paris,
Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France. NDP 66

Cet objet appartient aux vases liturgiques et sert à contenir les Saintes Huiles.

Il est dessiné par Eugène Viollet-Le-Duc (1814-1879) et exécuté par l’orfèvre Jean-Alexandre Chertier (1825-1890) en 1866.

 Le chrémier1 représente un aigle de face, droit sur ses pattes. À l’intérieur du vase, un tube en argent sert à contenir le saint chrême. Les ailes ouvertes le long du corps mettent en valeur le ventre de l’oiseau orné d’une croix fleuronnée entourée de rinceaux, de forme végétale. Le choix de l’aigle et non de la colombe, symbole du Saint-Esprit qui d’après la tradition apporta l’huile sainte lors du baptême de Clovis, roi des Francs (481-511), renvoie à l’Aigle de Suger de l’abbaye de Saint-Denis conservé au musée du Louvre.

Viollet-Le-Duc se réfère à la prestigieuse production émaillée de Limoges du 12e et 13e siècle dont Chertier maîtrise parfaitement la technique choisie pour le décor du ventre et du dos de la « colombe ».

 Il rend ainsi hommage à Suger, abbé de Saint-Denis de 1122 à 1151 qui enrichit le trésor de son abbaye et est considéré comme le précurseur d’un nouveau style architectural en Ile-de France: le style gothique que Viollet-Le-Duc réhabilite et réinvente à Notre-Dame.

En renouant avec la virtuosité des émailleurs limousins, l’architecte-dessinateur d’objets et de mobiliers liturgiques satisfait son goût pour l’art religieux médiéval.

 

1 Chrémier : objet qui sert à conserver les huiles saintes. Il renvoie au saint chrême, cette huile faite d’huile et de baume pour la parfumer. Le chrême est utilisé pour les baptêmes, le sacre des rois et la consécration des objets de culte. La tradition rapporte qu’une colombe apporta une ampoule d’huile odorante pour le baptême de Clovis, roi des francs (481-511) qui se convertissait au christianisme.

 

Plan par Viollet-le-Duc mars 1866
Plume et aquarelle. Société des Amis de Notre-Dame de Paris (DMND 30 Cat 98).

 Fiche œuvre : ici

Aigle de Surger vers 1147
Musée du Louvre - Paris


Voir Aigle de Surger : ici



Buste reliquaire de saint Louis



Jean-Alexandre Chertier (Paris, 1825 – 1890) 
d’après Eugène Viollet-le-Duc (Paris, 1814 – Lausanne, 1879)
Entre 1867 et 1869
Argent, âme de bois, émail, cabochons de verre
Cathédrale Notre-Dame de Paris,
Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France. NDP 8a

Le buste-reliquaire de Saint Louis, Louis IX, roi de France de 1226 à 1270, est réalisé par l’orfèvre Chertier (1825-1890) sur un dessin de Viollet-Le-Duc (1814-1879). Ce dernier répond à une commande du chapitre qui souhaite renouveler ses reliquaires probablement en 1867. Viollet-Le-Duc reprend fidèlement le chef-reliquaire gothique réalisé en 1306 par l’orfèvre Guillaume Julien à la demande du petit-fils du saint roi, Philippe IV Le Bel (1285-1314). Il en fait une description dans son Dictionnaire raisonné du mobilier. Chertier recouvre d’une plaque d’argent une âme de bois sculptée. Il travaille au repoussé les fleurs de lys qui ornent le buste. Il décore la couronne et du col de la tunique de cabochons de verre. La base ajourée permettait de voir la relique.

En 1306, le chef-reliquaire du crâne de Saint-Louis est transféré depuis l’abbaye de Saint-Denis qui conservait les ossements du roi à la Sainte Chapelle sur ordre de Philippe Le Bel. À l’occasion de ce transfert, le roi fait don à Notre-Dame d’une côte de Saint-Louis, prestigieux présent pour le rayonnement de la cathédrale.

Le buste-reliquaire de 1306 est fondu à la Révolution. Il reste une foliole, petite plaque en émail, conservée au Cabinet des Médailles de la Bibliothèque nationale de France. Le crâne a dû disparaître au même moment.

Toutefois, de nombreuses églises possèdent des reliques du pieux roi. Depuis le Moyen-Âge, les restes de Saint-Louis ont été dispersés par ces successeurs, offert ou vendus. Une pratique qui répond à l’engouement pour le culte des saints et au prestige du roi.

Aujourd’hui Notre-Dame conserve une mâchoire et une côte que la tradition attribue à Saint-Louis. Le trésor accueille une tunique dite de Saint-Louis et sa discipline de fer dans un étui d’ivoire. Une partie de ces reliques ont rejoint le reliquaire de l’orfèvre Chertier en 1867.

 

Fiches œuvres : 

Le reliquaire de Saint Louis : ici

Chromolithographie du XIXe siècle du buste-reliquaire de 1306 : ici 

Foliole du buste-reliquaire : ici

Chemise de Saint Louis : ici 


Le Reliquaire du Saint Clou et du Bois de la Croix




 Reliquaire du Saint Clou et du Bois de la Croix 
de Placide POUSSIELGUE-RUSAND 
commandé par Eugène VIOLLET-LE-DUC (1862)


Fiche d'oeuvre : ici


Reliquaire de la Croix de Saint Claude

Reliquaire de la croix de Saint Claude, qui a été reconnu en 1895 
et a été offert par le roi René au couvent des Célestins d'Avignon. 
Ce reliquaire, de style gothique, a été exécuté sur des dessins de l'architecte 
Jules Astruc (1862-1935), grâce au leg du chanoine Jouan (1825-1895).

 Cette pièce fut présentée à l’Exposition Universelle de paris en 1900


Fiches d'oeuvre : ici



Reliquaire de la Croix dite Palatine

Reliquaire de la Croix dite Palatine
par Famechon Jean-Pierre (orfèvre)
XIIe et XIXe siècle

Fiche d'oeuvre : ici


Vierge à l'Enfant en argent par Charles Nicolas Odiot en 1826
Oeuvre commandée par le roi Charles X
Restaurée en 1856 après avoir été jetée par une fenêtre en 1831.


Offerte par le roi Charles X à la cathédrale en 1826, cette Vierge à l’Enfant en argent est l’une des nombreuses œuvres emblématiques conservées dans le Trésor de Notre-Dame.

 Réalisée par l’orfèvre Charles Nicolas Odiot, la statue avait été à l’origine voulue par Louis XVIII en 1817. En effet, durant la première Restauration, le roi, dans une volonté de continuité avec l’Ancien Régime, fit rétablir la procession dite du « Vœu de Louis XIII » commémorant la consécration de la France à la Vierge Marie en 1638. Il souhaite alors offrir une statue d’une Vierge à Notre-Dame. Ce n’est toutefois qu’en 1826 que son successeur, le roi Charles X, fera aboutir l’offrande, exhaussant le vœu de son frère.

Au cours du sac du palais de l’archevêché en 1831, la sculpture est mutilée. Elle n’est restaurée qu’en 1856.

Depuis 1929, une couronne réalisée par l’orfèvre Boucheron permet de coiffer la statue lors les processions.

Elle est d’ordinaire portée en procession dans les rues de Paris le 15 août, solennité de l’Assomption, pour perpétuer le “Voeu de Louis XIII”.

 

 




Bibliographie sélective

 Ouvrages

Catalogue de l’exposition
Sous la direction de Jannic Durand,
Anne Dion-Tenenbaum, Florian Meunier
et Michèle Bimbenet-Privat.
Coédition Hazan / musée du Louvre éditions.
336 pages., 170 ill., 39 €.

 Puissance des cathédrales ici

SITOGRAPHIE

Notre-Dame de Paris : ici

Le Trésor de Notre-Dame de Paris : ici

Architecture

Extérieure  ici        mais encore  ici      et aussi  INHA

Intérieure (chœur)  

La Croix et la Gloire de Marc Couturier ici 

Lexique

Commission Diocésaine d'Art Sacré de Paris ici                                    




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