mardi 2 avril 2024

Le retable d’Issenheim à Colmar

Retable d'Issenheim par Matthias Grünewald XVIe siècle

Ce retable a été réalisé entre 1512 et 1516 par Matthias Grünewald pour les panneaux peints et Nicolas de Haguenau pour la partie sculptée. Les deux artistes répondaient à une commande du précepteur du couvent des Antonins d’Issenheim près de Colmar (alors en Allemagne). Composé de 11 panneaux, le retable représente la vie du Christ et celle de saint Antoine l'Ermite (patron de l'ordre des Antonins). La vocation de cet ordre était de soigner les malades atteints du feu sacré ou feu de saint Antoine, une maladie qui, en provoquant un rétrécissement des vaisseaux sanguins, engendrait une nécrose des membres. Les Antonins venaient en aide aux malades en les soignants notamment avec des baumes et breuvages à base de plantes.

Le retable est constitué de 11 panneaux de panneaux en tilleul, qui s’articulent autour d'une caisse centrale où prennent place des sculptures. Les volets, qui représentent un épisode différent de la vie du Christ : l’Annonciation, la Crucifixion, la Lamentation et la Résurrection étaient ouverts au gré des périodes liturgiques durant le culte et  lors des fêtes correspondantes. Pendant les jours ordinaires, c'est la Crucifixion qui était donnée à voir aux malades. Une œuvre peinte au réalisme morbide mais avec des figures fantastiques, à la fois lumineuse, sombre et truffée de symboles.

Un halo en forme de cœur, centré sur l’un des personnages, capte les influences célestes présentes en divers lieux du retable. Mais, en y regardant de plus près, Matthias Grünewald nous livre un message troublant sur l'Eglise et son côté obscur...

Le polyptyque fermé

Première ouverture : les panneaux centraux sont ouverts ; pédrelle* peinte enlevée

Seconde ouverture


* pédrelle : La prédelle est la partie inférieure d'un retable polyptyque, développée horizontalement, qui sert de support aux panneaux principaux, et où figurent une série de petits sujets en relation avec le thème principal. Elle peut être composée d'une seule planche en longueur, ou de plusieurs éléments.

LE RETABLE D’ISSENHEIM  ET SON MESSAGE DISSIDENT

I. La Vierge aux immondices

1. Des symboles moqueurs

Notre enquête au sujet du message dissident du Retable d’Issenheim commence avec deux constatations tant soit peu étranges :

• Que faire avec une viola de gamba au visage moqueur et au sourire narquois qui vous tire la langue au beau milieu du Concert des anges de la Nativité du Retable ?

• Que faire avec un pot de chambre malodorant, dont la place était même à cette époque sous le lit, et qui répand sa puanteur fort intentionnelle au beau milieu de la pièce, aux pieds de la Vierge ?

Le symbolisme médiéval nous apprend en effet que rien, dans un tableau, n’est laissé au hasard, que tout a sa signification, positive ou négative. Que penser donc de ce visage de caricature insolent et de cette mauvaise odeur qui semble contaminer la Vierge et l’Enfant sur la droite de notre panneau ? Que signifient ces messages moqueurs et insolents dans la Nativité de Notre Seigneur ?

Insolents dans la Nativité de Notre Seigneur ?

La viola de gamba semble en effet être en train de se moquer de quelque chose ou de quelqu’un : elle semble en fait se moquer de nous, du spectateur, innocent et benêt. Elle a l’air de considérer que nous sommes des dupes auxquelles on peut raconter n’importe quoi, sans provoquer la moindre réaction et le moindre soupçon. Car ce n’est pas seulement la viole de gambe qui est étrange dans ce tableau. Tout l’orchestre angélique et le chœur céleste sont étrangement négatifs et caricaturaux, avec leurs plumes diaboliques et leurs visages tristes, contraires à la louange que les musiciens célestes devraient exprimer.

2. Un orchestre mal accordé

Les musiciens de la partie gauche du panneau de la Nativité sont tout sauf un orchestre et un chœur de louange. Car même si l’on peut admettre que l’ange du premier plan tient son archet de la manière dont on avait l’habitude de le tenir à l’époque, les deux autres anges musiciens ne le tiennent pas du tout d’une manière orthodoxe et capable de produire un son adéquat. En plus de cela les trois anges regardent chacun dans une direction différente, ce qui ne leur permet certes pas de jouer ensemble. Leur musique semble être cacophonique

En plus-de cela, le chœur des anges, qui est supposé exprimer une joie céleste, n’est pas seulement composé de visages moroses, mais surtout d’anges dont les bouches sont closes à double tour. Les anges du chœur ne chantent pas. Leurs bouches sont cousues.

Parler d’une belle musique angélique et d’un chœur de louange est donc une gageure qui ne correspond pas à la réalité de ce chœur dont la musique est fort suspecte de ne pas être céleste. Plutôt que symphonique.

3. Un jubé bizarre

Le jubé dans lequel Grünewald a placé ses musiciens étranges est, lui aussi, incongru et bizarre. Il rappelle, avec ses excroissances bulbaires, les constructions de Bosch dans le Jardin des Délices. Il est d’un gothique excessif, d’un style fantaisiste légèrement outrancier.

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