Des preuves attestent de la présence sur le site
d'un castrum romain.
« Au village
de Dampierre, à quelques coudées d’une église monumentale, se dégage, hors des
eaux vives et des bocages, un ensemble architectural et impressionnant, d’une
élégance telle qu’il semblait ne pouvoir appartenir qu’aux bords de la Loire ou
aux vallons de l’Ile-de-France. De ces constructions, il barre encore
aujourd’hui une large esplanade bordée de futaies, et infléchie sur les côtés
».
On y pénètre par une grille monumentale en fer forgé
de l’Ecole de Nancy au XVIIIe siècle.
Dans ce vaste espace, à plus d’une centaine de
mètres d’elle, se détache, haut vers le ciel, une tour carrée, cantonnée de 4
tourelles aux toits en poivrières ou en dôme. Elle a fort grand air et peut être considérée comme un
des plus beaux spécimens de la fortification française du XVe siècle.
Autrefois précédée d’un pont-levis sous lequel
coulait l’eau des fossés entourant le château féodal, aujourd’hui comblés et
démolis, elle en était l’entrée. Elle est traversée par un passage voûté qui
accède à la cour d’honneur au fond de laquelle se détache, sur une longueur de
40 mètres et une hauteur de 28, une bâtisse en pierre à deux étages percés de
onze ouvertures, dont trois sur un avant-corps à peine saillant, le tout coiffé
d’un toit à la Mansart à trois lucarnes dont l’arcure de celle du centre,
accolée de deux pots à feu, fait allusion aux armes des Picot de Dampierre.
Le contact de ces deux architectures, l’une féodale
et défensive, l’autre plaisante et accueillante, fait de ce domaine une
résidence privilégiée caractéristique d’une époque sans austérité dont la
majesté aurait paru plus puissante encore, si le formidable donjon du XIIe
siècle, démoli en 1810, le dominait encore de sa massive hauteur.
Terre d’invasion, cette région a été dans tous les
temps foulée par les pas des conquérants : les Romains s’y sont implantés, des
bandes germaniques y ont pris pied, les Francs l’ont conquise, la féodalité en
a fait une seigneurie de haut rang dont les comtes ont confié la garde aux plus
valeureux de leurs vassaux. Elle relevait de la châtellenie de Rosnay, et était
elle-même le chef-lieu d’une châtellenie dont dépendaient 70 fiefs.
Elle a été possédée par des personnages importants, seigneurs de Saint-Dizier, vicomtes de Troyes, connétables de Champagne, d’où, par des alliances de haut lignage, sont issus plusieurs rois, empereurs et princes de France, d’Espagne, d’Autriche d’Allemagne et d’Angleterre. Plusieurs dynasties s’y sont succédé.
Le
fondateur de la première, celle des Dampierre-Saint-Dizier,
est, en 980, Hildevent. Par son mariage avec Mahaud de Bourbon, son arrière-petit-fils
Gui II donna naissance à la branche des Dampierre-Bourbon.
A la mort de son fils aîné Archambaud, survenue en 1219, dont une fille épousa
Thibaud IV comte de Champagne, roi de Navarre, elle passa à son frère Guillaume
II.
En 1223, Guillaume prit pour femme Marguerite de Flandres qui hérita du comté en 1244, alors qu’il était décédé. Elle trépassa en 1280, laissant pour héritier un de ses fils, Gui III. Avec lui s’ouvrait la dynastie des Dampierre-Flandres.
C’est sa petite fille Philippine, épouse du roi d’Angleterre Edouard, qui obtint de son mari la grâce des bourgeois de Calais en 1347.
Le troisième fils de Marguerite de Flandres, Jean I était Seigneur de Dampierre en 1250.
En 1258, il laissait la châtellenie à son frère Jean II qui la garda jusqu’en 1307. Elle échut alors à sa fille Marguerite, qui, depuis 1305 était la femme de Gaucher VI de Châtillon.
Avec
eux commença la dynastie des Dampierre-Châtillon
qu’illustra Jacques 1er, Amiral de France, tué à la bataille d’Azincourt en
1415.
Elle dura jusqu’en 1472 et disparut avec Valéran dont la fille aîné avait épousé en 1469 Philippe 1er de Lannoy, chevalier de la Toison d’or et chambellan de Charles V d’Allemagne, qui fonda la dynastie des Dampierre-Lannoy.
Le
dernier seigneur mâle de cette famille, Pierre II, mourut en 1522, sans laisser
d’enfants. Il a été inhumé dans l’église de Dampierre, dont son tombeau est un
des plus beaux ornements. Sa sœur Jeanne, et son mari François d’Haraucourt le
vendent en 1526, à Louis Picot,
seigneur de Pommeuse, 1er Président à la Cour des Aides de Paris.
Ainsi se termine la filiation ininterrompue des détenteurs de la seigneurie et cesse de couler dans les veines du nouveau possesseur le sang de Champagne qui, depuis 500 ans, vivifiait les familles les plus illustres de France et d’Europe.
Louis
Picot introduit au XVIe siècle la dynastie des Picot de Dampierre. Louis II avait le titre de baron.
C’est sous son fils Eustache, homme d’armes, que vers 1646 la baronnie fut érigée en marquisat : François Picot, maître de camp de cavalerie, qui épouse Madeleine Gargam, fille de Pierre Gargam, lieutenant du roi à Châlons puis conseiller d’état.
C’est
à François Picot de Dampierre que l’on attribue la reconstruction du château
entre 1657. Il décède en 1686.
Suivent, Jean-Auguste, capitaine de vaisseau, Pierre, brigadier des armées du roi, capitaine des chasses et des plaisirs du roi [qui fait renouveler les décors en 1745] se transmirent cette distinction jusqu’au fils de ce dernier, le comte Auguste-Henri-Marie, général des armées de la République, mort pour la France en 1793. Il avait 3 garçons et 1 fille.
Le marquisat passa à son fils Charles, aide de camp du général Dessoles, sous Napoléon 1er, son beau-frère, pair de France, qui l’avait remplacé au Conseil général, et qui fut tué glorieusement, à la tête des Mobiles de l’Aube, au combat de Bagneux, en 1870. Il n’avait pas d’enfant.
Le château et les biens de Dampierre entrèrent alors par filiation dans la famille de la Rochefoucauld-Estissac, à cause de Louise Picot, fille du général de la Révolution, mère de la femme de Jules de la Rochefoucauld, duc d’Estissac.
Son fils, Roger de la Rochefoucauld-Ségur, dernier
marquis de Dampierre, le laissa à ses filles, les comtesses de Kergolay et
Amélie de Mérode, qui s’en dessaisirent en 1907. Elles vendent à un antiquaire
parisien le Vicomte Chalanqui-Beurey.
Le nouvel acquéreur fait compléter à grand frais la
décoration intérieure. Il fait raser les dépendances et remplacer le parc à
l’anglaise tracé au XIXe siècle par des parterres à motifs de broderie devant
les façades et sur les terrasses latérales.
Ces transformations sont suivies par la vente de tout ce qui constitue
le décor des appartements : meubles, cheminées, lambris, parquets, serrures, en
particulier des peintures d’Oudry et des superbes boiseries sculptées du salon
dit des Quatre empereurs, attribuées à Verbeckt (boiseries qui étaient classés
MH)
Le domaine est vendu dans les années 1930 à sa famille d’origine Picot de Moras d’Aligny qui le garde sans s’en occuper et ce jusqu’en 2020.
Enfin,2021, Antoni Calmon devient le nouveau propriétaire du domaine pour la somme de 675 000€ ; le château est à restaurer entièrement, vide de tout, il est resté 15 ans à l’abandon.
Antoni vit à Paris avec son compagnon Alessandro : pouvez-vous vous présenter, s’il vous plaît ?
Alessandro
« Je suis un Italien de Toscane et je vis à
Paris depuis plus de dix ans. Je suis consultante créative dans le domaine de
la mode et de la décoration, principalement pour l’agence d’architecture
Humbert & Poyet. Mon travail consiste à fournir une direction artistique et
une inspiration en fonction des projets et des souhaits de mes clients et à
créer des lieux ou des expériences qui leur sont propres. »
Antoni
« Je suis Antoni Calmon, un médecin esthétique
qui travaille entre Paris et Londres. Je passe mes journées à faire en sorte
que les gens se sentent bien dans leur peau. Je suis née à Perpignan, je suis à
Paris depuis six ans, et j’ai une passion pour l’histoire, l’opéra et
l’équitation. Moderne, n’est-ce pas ? » (Rires)
En 1938, le baron et la baronne d’Aligny,
représentants d’une branche cadette des Picot, peuvent racheter cette demeure
familiale dont leurs enfants poursuivent la mise en valeur. A défaut du donjon,
dont plusieurs dessins de la collection Gaignières rappellent la silhouette, le
château conserve un pittoresque châtelet de la fin du Moyen Age, de plan
quadrangulaire, cantonné de tourelles rondes percées de canonnières basses.
Quant au corps de logis, isolé depuis la disparition des dépendances qui
encadrait la cour d’honneur, il doit son caractère à la sobriété de ses façades
de pierre blanche et au profil de son grand comble à la Mansart
particulièrement important.
A
l’intérieur, le vestibule donne sur un grand escalier de pierre dont le premier
palier correspond à une suite de pièces surélevées en raison des voûtes
d’arêtes de l’ancienne cuisine en demi sous-sol située au-dessous. Sa
remarquable rampe de pierre sculptée porte le chiffre de François Picot,
marquis de Dampierre, et de Madeleine Gargam, fille d’un intendant des
Finances, qui a du faire reconstruire la Château après leur mariage, célébré en
1653.
Précédé d’une longue allée, d’une grille et d’un
saut-de-loup, le corps de logis devait être encadré sur la cour de pavillons
aux angles arrondis.
Des traces d'un castel fortifié qui date du XIIIe
siècle attestent d'une première présence sur les terres de Dampierre. A partir
du XVIIe siècle la baronnie de Dampierre devient le marquisat et le
propriétaire François Picot de Dampierre fait reconstruire le château sur des
plans attribués à François Mansart. Après de grands travaux au tournant du XXe
siècle, les communs furent rasés, les jardins à la française transformés en
jardin anglais, et les décors restaurés.
Le premier quart du XXe siècle vit la disparition
des parquets, boiseries, peintures et cheminées, notamment dans le salon dit
des Quatre Empereurs, avant que le château ne revienne dans une branche cadette
de la famille Picot. Il est depuis 2021 la propriété́ d'Antoni Calmon qui
souhaite lui rendre son lustre d'antan.
Façades, charpente et toiture du château ; son
escalier d'honneur et la cuisine voutée en sous-sol ; le châtelet, y compris la
grille fermant son passage ; le miroir d'eau du parc et la terrasse reliant le
châtelet au château. : classement par arrêté du 15 février 1929
Boiseries, XVIIIe siècle, attribuées à Jacques
Verbercht (tranférées chez M. Carlhian, 6 bis, avenue Kléber à Paris), 4 portes
cintrées à deux vantaux avec leur dessus de porte, 4 glaces avec leur trumeaux,
8 petits panneaux d'encadrement de glaces, 4 grands panneaux muraux, 4 panneaux
d'angle, Classé MH 11-02-1929. Disparues
Récolement 30 janvier 1975. Boiseries probablement
vendues par M. Carlhian. Les héritiers Carlhian, qui habitent toujours Paris
(bd Murat), n'ont pu donner les références du nouveau propriétaire de l'œuvre ;
pas plus que M. Fabrice Ouziel (bd Beaumarchais, Paris), historien connaisseur
du fonds des archives Carlhian. Disparues
Des preuves attestent de la présence sur le site d'un castrum romain, même si la première mention d'un château date du XVe siècle. Remanié au XVIe siècle et au début du XXe siècle, le domaine présente un châtelet médiéval, un château de plaisance construit par Mansart et un parc d'essences centenaires dotés de terrasses, de parterres, et d'un miroir d'eau.
Le Châtelet
Magnifique exemple d'architecture défensive, le
Châtelet date du XVe siècle avec des remaniements successifs notamment l'ajout
de tours et le changement des toitures.
Il faisait partie d'un ensemble plus conséquent,
avec donjon sur motte, basse et haute-cour, murailles, le tout entouré de
douves en eau, avec pont-levis
Aujourd'hui subsiste le tracé des douves à l'ouest,
les traces du pont-levis en façade et les soubassements des murailles qui
servent de contreforts à la terrasse d'honneur
Restauration
du Portail XVIIIe siècle
Alors qu'il n'avait pas quitté le domaine de
Dampierre depuis le XVIIIe siècle, malgré quelques restaurations et
modifications ensuite, le portail a pour la première fois en Janvier 2023
entamé un voyage vers les locaux de Arts-et-Forges à La Chapelle-Saint-Luc (10)
Il y restera, le temps de faire des recherches sur
ses couleurs et dorures originelles, et de restaurer toute sa structure
métallique.
Le Portail a obtenu le label Fondation du Patrimoine
en 2022 et bénéficie du soutien de la Fondation de l'Aube à travers son Club
des Mécènes et une collecte ouverte à
tous.
Personnalités de Dampierre :
Isaac ben Samuel de Dampierre, dit « le Ri », (circa
1100 - 1175), rabbin.
Elhanan ben Isaac de Dampierre (peut-être mort en
1184), fils du précédent.
Isaac ben Abraham de Dampierre, successeur d'Isaac
ben Samuel de Dampierre.
Nous relevons dans les archives de l'évêché que :
L'abbaye du Pont-aux-Dames. (Ordre de Citeaux),
assise en la paroisse de Couilly (Châtellenie de Crécy), élection et diocèse de
Meaux en Brie 1226-1790 avait :
Rentes ordinaires, terres, prez, bois, héritaiges et
possessions dêpuïg lé tèmpS dé iiostrë fondation, qui fût l'an mil deux cent vingt-six,
au mois d'avril, par, de bonne mémoire, Hugues de Chatillon, comte de
Saint-Pol, jusques en l'année mil cinq cent vingt-deux.
Item.
Sur la terre et seigneurie de Dampierre, en Champaigne, quarante livres
tournois de rente âdmôrtye, aulmosnée par le testament de feue dame Marguerite
du Tour, femme de Monseigneur Gauchier de Chatillon, en l'an mil trois cent
neuf.