dimanche 13 octobre 2024

Château de Jaucourt / Reliquaire de la Vraie Croix

 



La baronnie de Jaucourt, relevait des comtes de Champagne, sur la frontière entre la Champagne et la Bourgogne.

Le château fort médiéval, qui fut rasé au XVIIe siècle par le roi Louis XIII.

Les origines du nom Jaucourt remontent au début du XIIIe siècle, quand Lambert Ier de Jaucourt, chambrier du comte de Champagne Thibaut Ier de Navarre, et panetier et chambellan de la comtesse de Champagne, acheta la terre de Jaucourt, dans l'Aube.

Le château, construit dans la plaine, n'est pas connu pour avoir été pris de vive force ou avoir subi un siège. Il était cependant assez sûr pour servir de prison à Guiot de Bourgnay qui s'était déjà échappé par deux fois de sa prison de Châlons.


Le 22 décembre 1367, Jeanne de Jaucourt, héritière de sa famille, et son fils Alexandre, vendirent la terre à Philippe le Hardi, duc de Bourgogne.

La famille de Bourgogne y passe du temps, en particulier comme étape nocturne pour ses voyages vers Paris. Après trente années de réfection des parties hautes du château, d'aménagement du parc, la demeure est assez vaste pour accueillir la caravane que forment les déplacements du Duc. D'ailleurs Marguerite III de Flandre, épouse de Philippe le Hardi, déploie son énergie à en faire un séjour agréable pour la famille ducale, et les fossés du château servirent de parc à un couple de cervidés pendant plusieurs dizaines d'années.

La Terre passe ensuite à une branche cadette des ducs Valois de Bourgogne, celle des comtes de Nevers, de Rethel et d'Eu : Philippe de Bourgogne (1389-1415), fils cadet de Philippe le Hardi et Marguerite, puis à ses propres fils, Charles de Bourgogne (1414-1464) et Jean de Bourgogne (1415-1491). Jean la laissa, avec la seigneurie d'Isle-Aumont, à sa benjamine Charlotte, comtesse de Rethel (1472-1500), femme de Jean d'Albret, seigneur d'Orval et de Lesparre-Médoc. La terre échut à leur fille Marie d'Albret d'Orval (1491-1549), femme de son petit-cousin Charles II de Clèves, comte de Nevers et d'Eu.

La sœur cadette de Marie, Charlotte d'Albret d'Orval, épouse du maréchal Odet de Foix-Lautrec comte de Montmorency-Beaufort, avait reçu la seigneurie d'Isle, Lesparre et Orval. Leur fille Claude, † 1553, légua tous ses biens champenois, plus Orval et Lesparre, à son cousin germain François, qui suit.

Le fils de Marie d'Albret et Charles II de Nevers, François Ier de Nevers († 1562) premier duc de Nevers, réunit toutes les possessions des Nevers : notamment, en plus de Nevers, Rethel et Eu, il eut Beaufort, Isle, Jaucourt, Jully et la Grève, qui passèrent ensuite à trois de ses enfants : Jacques de Clèves, duc de Nevers († 1564) ; Marie de Clèves (1553-1574), princesse de Condé, mariée à Henri Ier de Bourbon-Condé, puis leur fille Catherine de Condé († 1595) ; enfin Catherine de Clèves, duchesse de Guise et comtesse d'Eu.

La baronnie de Jaucourt comprenait Arsonval (Aube), Argançon et Dolancourt. Elle était aussi associée aux seigneuries de Jully-sur-Sarce et La Grève (à Ceffonds ?).

Elle devint chef-lieu du bailliage bourguignon qui prit le nom de la Montagne, dont les assises se tenaient à Jaucourt plusieurs fois par an.

C'est en 1597 que Catherine de Clèves, qui avait reçu Jaucourt et Beaufort de sa nièce Catherine de Bourbon-Condé, les vendit à Gabrielle d'Estrées, et la Terre fit partie du duché de Beaufort érigé la même année. Elle passa ensuite à son fils César de Vendôme (fils naturel d'Henri IV) puis à Françoise de Lorraine, la veuve de César. Leurs fils François duc de Beaufort, le roi des Halles, et son frère aîné Louis-Joseph de Vendôme la possédèrent, et ce dernier la vendit en 1688 aux Montmorency-Luxembourg.

En 1632, le roi Louis XIII, fils d'Henri IV, fait raser les fortifications de la Terre de Jaucourt.

À partir de Charles Ier Frédéric de Montmorency-Luxembourg, fils du maréchal de Luxembourg, le château et la Terre de Jaucourt restèrent dans la famille de Montmorency-Luxembourg fondue en 1767 dans les Montmorency-Fosseux-Beaufort jusqu'à la Révolution, le duché de Beaufort prenant le nom de duché de Montmorency en 1689.


Reliquaire de Jaucourt au musée du Louvre


Reliquaire de Jaucourt
Reliquaire de la Vraie Croix porté par deux anges
1100 / 1360 (XIIe-XIIIe siècle; XIVe siècle)


Lieu de création : Byzance ; Champagne (Jaucourt)

Deux anges gothiques agenouillés sur un socle de cuivre doré soutiennent en exaltant le reliquaire byzantin de la Vraie Croix. Ce montage a été réalisé, comme le précise l'inscription, pour Marguerite d'Arc, dame de Jaucourt (+1389), sans doute par un orfèvre champenois du douzième quart du XIVe siècle. Le reliquaire byzantin lui-même, complet, affecte la forme d'un boîtier peu profond, en forme de tableau à rebords saillants, muni d'un couvercle coulissant, revêtu de lames d'argent doré travaillées au repoussé et clouées sur l'âme de bois. L'iconographie reprend deux des formules les plus usuelles sur les staurothèques byzantines. A l'intérieur, au-dessous des archanges Michel et Gabriel en buste, Constantin et Hélène, sa mère, en costumes impériaux, figurés de part et d'autre du réceptacle à relique en forme de croix à double traverse, rappellent la conversion de Constantin et l'inversion de la Vraie Croix à Jérusalem par sainte Hélène ; sur le couvercle, la Vierge et saint Jean sont représentés debout au pied de la croix où devait être fixée une image du crucifié, aujourd'hui disparue. Le revers du boîtier est occupé par une grande croix gemmée qui surgit de deux acanthes et se détache sur un fond réticulé, tandis que les couvercles sur les tranches du boîtier courent des rinceaux de feuillages inscrits dans des cercles et sur celle du couvercle, une simple tige fleuronnée. A l'intérieur du tableau central, on remarque deux alvéoles carrées, vides, destinées à contenir des reliques que retenaient deux bandes de métal croisées. De tels compartiments, souvent munis de couvercle ou protégés par une plaque de métal ajourée, associent ainsi parfois sur les staurothèques d'autres reliques de la Passion ou des saints à celle de la croix.

Inscription :

: «+ CEST SAINTUAIRE OU IL A DE LA VRAIE CROIS FIST AINSI A ESTOFER NOBLE DAME MADAME MARGUERITE DARC DAME DE IAUCOURT PRIES NOSTRE SEIGNEUR POUR LI QUI LI DOINT BONE VIE ET BONE FIN AMEN +»

ARMOIRIES : Sur le fermail de l’ange gauche « DE SABLE A DEUX LIONS SUR L’AUTRE : JAUCOURT ; Sur le fermail de l’ange de droite « PARTI : A DEXTRE DE SABLE A DEUX LIONS L’UN SUR L’AUTRE, A SENESTRE BANDE D’OR ET DE GUEULES» : MARGUERITE D’ARC ; sur la base «PARTI : A DEXTRE DE SABLE A DEUX LIONS L’UN SUR L’AUTRE , A SENESTRE D’OR SEME DE CROISETTES AU LION D’OR » JEANNE D’ARZILLIERES

 

Hauteur : 26,4 cm ; Largeur : 17,2 cm ; Longueur : 37,8 cm ; Hauteur : 14,5 cm (ange de gauche) ; Hauteur : 15,1 cm (ange de droite)

 Matériau/Technique : émaux champlevés rouge opaque et brun-noir translucide (plaquettes armoriées), cabochons

Matériau : argent (statuettes en argent doré)

Technique : doré = dorure (techniques métal)

Technique : techniques peinture (visages et mains)

Matériau : cuivre (base)

Technique : émail champlevé (techniques métal->émaillé = émaillage = émail = émaux) (rouge opaque et brun-noir translucide pour les plaquettes armoriées)

Lieux et dates

Date de création / fabrication Epoque / période : époque byzantine (457-1453) (Byzance) ; gothique (Occident->moyen âge)

Date de création/fabrication : 1100 - 1300 et vers 1345 - 1360

Lieu de création / fabrication / exécution Byzance ; Champagne (Europe->France)

Mode d’acquisition  achat

Date d’acquisition  date : 1915

Propriétaire Etat

Affectataire Musée du Louvre, Département des Objets d'art du Moyen Age, de la Renaissance et des temps modernes

Emplacement actuel

Richelieu, [OArt] Salle 503 - Jeanne d'Evreux, Vitrine 16







Château d'Isle-Aumont, Comté, Marquisat, Duché-Pairie

 



Castrum du Comte de Champagne Hugues 1er au XIe siècle


Le site d’Isle-Aumont à 10 km au sud de Troyes est l’ancien INSULA OPPIDUM du Haut-Moyen-Age sur lequel se sont succédé stations néolithique et celtique, sanctuaires païens et chrétiens, monastères et châteaux.

Le nom du village vient de ce que la place-forte en forme d’île où se trouve l’église, appartenait aux ducs d’Aumont dont le blason était d’argent à un chevron de gueules accompagné de sept merlettes de même. Tels était le chef-lieu du duché d’Aumont dont dépendaient 80 villages et hameaux.

Les d’Aumont, une des plus grandes familles de France, possédaient notamment l’Hôtel d’Aumont à Paris (devenu le Tribunal administratif, rue de Jouy, Paris 4ème ).

A l’église romane, à la fois paroissiale et monastique, avec portail refait au XVe siècle, était jadis accolé le Prieuré Bénédictin fondé par saint robert de Molesme en 1097 ; les restes du cloître ont été mis en valeur dans un but culturel et de sauvegarde pour la protection des sépultures des 150 moines (sous les dalles du promenoir) et pour le puits du XIIe s. Et son authentique margelle large et basse rappelant la forme des baptistères. Ce Prieuré avait succédé à l’abbaye de saint URSION, l’un des premiers monastères de la Gaule du Ve siècle ; une vaste nécropole renfermant plus de 600 sarcophages mérovingiens y était attenante.

Le portail armorié (Champagne, France et Bourgogne), l’Abside du XIIe avec ses trois fenêtres à décor très oriental en têtes de clous et la tour romane coiffée d’une élégante flèche du XVIIIe, sont les choses à voir avant de pénétrer dans l’église où la visite guidée s’impose ; la statuaire et les sanctuaires carolingien et romain récemment dégagés sont une surprenante révélation. Les sarcophages du Ve au VIIIe siècle offrent la plus belle série typologique qui se puisse voir dans la région. Quant au Christ du temps de Saint-Louis, sculpté dans un tronc de tilleul, haut de 1m84, il est étonnant par l’expression de sérénité qui se dégage de son beau visage ; chose rare, sa robe de pourpre était ornée de fleurs de lis. Il n’est pas impossible que ce soit un cadeau de Saint-Louis, venu à Isle en 1230, ou de sa fille Isabelle épouse du comte Thibaut V, qui possédait le château d’Isle avant 1270.

Après les fouilles, sur les ruines de ce château féodal, a été remontée en pierres anciennes une construction à usage d’habitation (le châtel)


Vue cavalière du "château d'Isle" au Moyen-Age, l'un des plus importants du domaine des Comtes de Champagne. La situation des bâtiments, en plan, est précise ; en élévation, le dessin est fait approximativement d'après les descriptions des anviens textes et les éléments d'architecture, trouvés dans les fouilles de 1943 à 1961.

1 porte fortifiée. 2 Église romane XIIe s. 3 Le Prieuré bénédictin. 4 Colombier sur cave conservée.  5 Four. 6 Cave cellier. 7 Cloître et cimetière des bénédictins. 8 Puits. 9 Dortoir. 10 Salle capitulaire. 11 Ancien bâtiment du comte Hugues (XIe s.). 12 Chapelle du château construite après la donatin de 1097. 13 Salle des audiences, construction postérieure appelée l'Auditoire où l'on rendait encore la justice tous les jeudis au temps où Isle-Aumont était le chef-lieu du Duché d'Aumont. (Archives du Palais de Monaco). 14 Donjon du XIIe s. 15 Prison avec tombe clandestine d'une femme. 16 Bâtiment principal du château XIIe s. 17 Entrée des caves conservées sous la partie du château rebâtie avec les pierres gtrovuées dans les ruines lors des fouilles (le châtel). 18 Puits. 19 Bâtiment avec petite cave ou glacière. 20 Emplacement présumé de la Lanterne des Morts. 

Nota : l'Église Saint Thibault ayant été ravagée par un incendie causé par la foudre en 1924, a été restaurée dans des proportions réduites et les matériaux de démolition inutilisés ont été vendus par la Commune par petits lots à des particuliers du pays. C'est ainsi que dans un lot acquis par M. Raffa, j'ai récupéré et sauvé le fenestrage gothique de la fin du XVe siècle qui éclaire le pignon du "Châtel" actuel d'Isle ; c'est un souvenir du lieu où étaient installés primitivement les moines de saint Robert avant leur transfert à Isle en 1097 ; sur la Butte, elle s'accorde par son style avec le portail actuel de l'église qui est de la même époque.


M. Jean Scapula, en 1943, abandonne les fouilles productrices et révélatrices de Clérey et Gyé-sur-Seine, et prospecte à Isle-Aumont, berceau de sa famille maternelle où, en 1937, il avait, en se référant à la découverte faite en 1847 d’un cimetière des premiers âges, commencé des recherches dans une carrière du hameau de Roche, et extrait des ustensiles domestiques de la fin de la période néolithique (époque de la  nouvelle-pierre polie, période la plus récente de la Préhistoire) et du début de l’âge du bronze (première période de la Protohistoire, appelée aussi âge des Métaux).

Il en déduisit que l’espace compris entre l’Hozain et la Mogne, formant butte, devait être lui aussi, à cette époque primitive, un lieu habité. Il savait, par les livres, qu’un château-fort de l’époque féodale y avait existé, qu’un prieuré y avait été construit sur l’emplacement d’une abbaye du VIe siècle. Il en acquit la preuve par la découverte des caves, la trace de fondations, et la récupération d’objets variés et de vases.

La butte, haute d’une dizaine de mètres, large de 100 à 120 mètres, vers le VIe siècle, s’appelait « Insula oppidum » et devait être un refuge déjà ancien. Jean Scapula s’y livra à des sondages méthodiques. Il tira sarcophages, pots, vases, ustensiles, armes, bijoux, bouts de poteaux, cendres… datant d’au moins 3.000 ans, et que l’on retrouve au Musée de Troyes.

La stratigraphie lui fit découvrir plusieurs niveaux archéologiques des temps préhistoriques, d’époque gallo-romaine et du moyen-âge. Il a identifié des huttes rondes de la période hallstatienne (entre 1200 et 500 avant J-C.) de l’an 700, grâce aux vases en terre cuite et en bronze, aux pointes de flèches, aux fibules, aux anneaux, aux rouelles (rondelles de fer ou d'acier qu'on ajoutait à certaines armures, pour couvrir les articulations de l'épaule, du coude et du genou), aux monnaies en potin au sanglier ou au taureau (monnaies gauloises).

Les Romains, saisis par la majesté du lieu, y ont établi un luxueux monument, sans doute un Temple en l’honneur de Mercure (dieu du commerce dans la mythologie romaine), dont on retrouve des fragments de plaques de marbre aux couleurs variées, des cubes de mosaïque, des tuiles rondes à rebord…

Le cataclysme des invasions a fait pour un temps le désert sur la butte : le christianisme s’y est implanté au VIe siècle et un moine y a fondé en 375, le plus ancien monastère de la Gaule.

Autour se sont groupées des maisons rudimentaires, à demi-souterraines, une chapelle a fait place au temple et les hommes ont ouvert un cimetière pour leurs morts. M. Scapula a relevé plus de 600 sépultures, dont les plus anciennes sont du Ve siècle.

Les morts étaient inhumés dans des cercueils en bois sans clous ou dans des sarcophages faits de matériaux provenant des ruines gallo-romaines. Ceux du VIe au VIIIe sont plus beaux et très variés. Une belle collection, est alignée dans l’église. Ils renfermaient, à côté des squelettes, des parures de vêtements, des bijoux, des ustensiles de toilette, des couteaux, des poignards, tous remarquables par leur qualité et leur ornementation.

Au Xe siècle, les Normands ravagèrent le monastère, et les habitants abandonnèrent les lieux, tout en continuant à y enterrer leurs défunts, sans ordre, en pleine terre, ou dans des cercueils de planches.

La vie y repris sous la féodalité. Le comte de Champagne Hugues 1er établit sur la butte une maison-forte avec une tour de guet et y fonda un prieuré. Les serfs y accolèrent leurs cabanes où, dans les caves, M. Scapula trouva épars des ustensiles de ménage : lampes à graisse en terre cuite, outils de tisserand en cornes de cerf, clefs, haches…

Au XIIe siècle, un puissant château féodal avec donjon et chapelle, remplaça la maison-forte. On accédait aux caves et souterrains par un escalier de pierre du temps de Saint Louis (1214-1270).


Plan des bâtiments du château construits après la donation de 1097 sur la partie du Castrum conservée par Comte Hugues. La cloison qui divise la grande salle en 2 pièces et la cave de 2,40 m x 2,20 m qui figure dans l’angle de l’une de ces pièces, sont des additions postérieures datant des XVIe ou XVIIe siècles.

« Le bâtiment principal du château était long de 30 mètres ; ses murs de pierre épais de 2 mètres à la base étaient renforcés de puissants contreforts. Il comprenait une grande salle longue de 15 m et large de 7,50 m et la salle basse du donjon qui servait de prison. Cette dernière était jadis pavée de dalles de pierre dont il restait quelques vestiges sous lesquels fut trouvée, à 1 m de profondeur, dans l’angle Sud-Ouest, une tombe clandestine contenant le squelette d’une femme âgée, d’une cinquantaine d’année. Au-dessus de la grande salle étaient des appartements, ainsi que dans l’aile gauche bâtie au-dessus de la grande cave. D’après la grande quantité de débris de tuiles retrouvée dans les décombres qui comblaient la grande cave presque jusqu’au ras du sol, ces bâtiments devaient être couverts de tuiles du Comte Henri. »

M. Scapula a reconstitué l’emplacement du donjon et de ses contreforts, les bâtiments principaux et annexes, le prieuré, le logement du prieur et des clercs, la prison, le cellier, la salle capitulaire, le cloître, le puits, le cimetière et trouvé de beaux robinets, des bronzes et des vases funéraires en terre cuite, contenant encore charbons et cendres, exhumés de la tombe d’un moine.

« Au pied du donjon était le four à céramique à double foyer, rappelant le type des beaux fours gallo-romains. C’était une coutume répandue au Moyen-Age d’établir un four à tuiles et carrelages sur le chantier de construction lorsque celui-ci était important. Des « dalles de cuisson » en terre trouvées dans le four indiquent que l’on y cuisait également des vases de terre. En relation avec ce four furent découvertes dans la cour du château 2 fosses à « pourrir » l’argile, profondes d’environ 1,60 m. Elles étaient encore à moitié pleines de belle terre glaise de 2 qualités différentes mêlées par couches horizontales : l’une grise, semblait provenir de la région de Clérey, l’autre ressemblait au limon argileux jaune et rouge des pays de la forêt d’Aumont-Chaource. L’une de ces fosses avait été établie à l’angle du bâtiment principal et l’autre se situait, tout à côté, derrière la salle des audiences. A la terre glaise étaient mêlés de gros morceaux de tuiles non cuites ratées et rejetés dans les fosses. 




A : niveau du sol actuel. B : Niveau du sol ancien. C : Terre végétale. D : gravier. E : fondations du château d'Isle (propriété des Comtes de Champagne au XIIIe s.) F : Talus. G : Four à cuire. H : Four à vernir - Ce four, vers 1200, était destiné principalement à la fabrication de tuiles plates et de carreaux de terre cuite épais vernissés unis, jaunes ou verts, de 9,5 cm de côté.

C’est dans la salle des audiences, construite en pans de bois sur soubassements de pierre, que se tenaient les plaids du baillage et où l’on rendait la justice tous les jeudis ».

Henri II succéda à son père Henri le Libéral en 1181. Laissant la régence à sa mère Marie de France, il partit en terre Sainte où il mourut après avoir été roi de Jérusalem.

Son frère Thibaut III lui succéda (1197-1201) épousa blanche, fille du roi de Navarre. A la mort de Thibault III, Blanche fit aussitôt hommage du comté au roi Philippe-Auguste qui lui accorda la régence en lui promettant de respecter ses états et d’élever l’enfant qui vint au monde et le roi Louis VIII remplit les engagements pris par Philippe-auguste.

Avant la majorité de Thibaut IV, qui devint réellement comte de Champagne en 1222, Blanche de Navarre s’était occupé de fortifier le château d’Isle. Ainsi, en 1216, elle fit travailler les habitants de Daudes (près de Montaulin) aux fossés du château. D’ailleurs, la construction de ce deuxième château (le premier avait été le castrum du comte Hugues) ne fut peut-être définitivement terminée que sous sa régence, tout au début du XIIIe siècle. Travailler aux fortifications du château chef-lieu de châtellenie dont leur village faisait partie était une charge imposée aux roturiers vassaux ; une charte fixait la durée de ces corvées à une semaine par an.

Le service de guerre en Champagne était également une charge imposée à ces mêmes vassaux. Vers 1215, plusieurs chartes fixaient à 60 ans l’âge auquel le service de guerre cessait d’être obligatoire ; on admettait en certains cas le remplacement militaire. Chacun était obligé de se procurer des armes à ses frais. Des règlements imposaient dans plusieurs villages à tout bourgeois propriétaire d’un capital de 20 livres ou plus, l’obligation d’avoir chez lui une arbalète et cinquante Carreaux. (La puissance des Carreaux ou flèches d’arbalète était telle qu’elles perforaient les armures ; plusieurs exemplaires de ces flèches en fer de section carrée furent retrouvés sans la cour du château…

Dès le début de son règne, Thibault IV seconda le roi Louis VIII dans ses guerres contre le roi d’Angleterre ; on le trouve au siège de La rochelle en 1224. Il fit même campagne contre les Albigeois, mais il abandonna le roi au siège d’Avignon. Les barons l’accusèrent alors de trahison, se liguèrent contre lui et envahirent la Champagne. Troyes assiégé allait succomber lorsque la régente du royaume, Blanche de Castille, dont le comte était le meilleur appui et le plus profond admirateur, envoya des troupes à son secours ; c’est dit-on dans cette campagne que le roi Louis IX alors âgé de 15 ans, fit ses premières armes.

Dans ses mémoires sur Saint Louis, le sire de Joinville rapporte qu’en 1230, lors de cette campagne, Saint Louis roi de France, vint camper à Isle avec l’armée royale après avoir chassé les barons révoltés qui occupaient le château. « D’Isle, les barrons s’enfuirent jusqu’à Juilly-sur-Sarce. Puis le roi se logea à Isle dont il les avait chassés ; et quand ils surent que le roi était au château d’Isle, ils allèrent loger à chaource ; puis, n’osant attendre le roi, les barons s’en allèrent loger à Laignes, qui était au comte de Nevers, de leur parti ». La paix fut faite deux ans plus tard.

Sous Thibaut IV, dit le chansonnier, grand protecteur et animateur des fameuses foires de Champagne, les Comtes de Champagne atteignirent l’apogée de leur gloire. A la mort de Thibaut IV en 1253, son fils n’ayant que 18 ans, Marguerite de Bourbon, sa mère, prit la régence. Après son mariage avec Isabelle, fille de Saint Louis, Thibaut V se mit à la tête du comté en 1256, prit la croix, partit en Terre Saint en 1270 et mourut la même année.

Son frère, Henri III qui lui succéda épousa Blanche, fille du comte d’Artois, neveu de Saint Louis et mourut en 1274, laissant une fille e 1 an, Jeanne.

Blanche d’Artois fit aussitôt hommage du comté à son cousin Philippe III le Hardi, roi de France et prit la régence pendant un an. Le roi, pour la débarrasser des ennuis de la régence, la maria avec Edmond d’Angleterre père du roi Edouard 1er, prit le protectorat de la Navarre et fiança la petite Jeanne au Dauphin qui devint plus tard Philippe le Bel. Edmond prit la régence du comté de Champagne de 1275 jusqu’en 1284, l’année du mariage de Philippe le Bel avec Jeanne qui apportait ainsi le comté à la couronne. Dès lors réduit au rang de simple province, le comté de Champagne resta possession des rois de France jusqu’en 1328. »

Vers le milieu du XIVe siècle, le 19 octobre 1344, le duc de Bourgogne Eudes, lors d'un important voyage ayant pour objectif d'effectuer des visites à caractère politique, fait escale à Isle-Aumont88.

Désormais, les ducs de Bourgogne vont disposer d'un puissant moyen d'action en Champagne, renforcé plus tard par la possession du comté de Bar-sur-Seine en 1435 lors du traité d'Arras, par l'achat de Jaucourt en 1367 à Jeanne de Jaucourt héritière de cette seigneurie, par la possession de Beaufort en 1382-1404, et par les spoliations ou achats contraints effectués pendant la guerre de Cent Ans au profit des fidèles du duc alliés aux Anglais – donc aux dépens des partisans des rois Valois – tels que le chancelier Rolin, vidame de Châlons, seigneur de Gyé et Ricey-le-Bas.

La Seigneurie d'Isles passe au fils de Jeanne et Eudes, Philippe Monsieur, puis à son propre fils, le duc Philippe Ier de Rouvres, et elle est donnée en douaire à sa femme la duchesse de Bourgogne Marguerite de Flandre-Dampierre, deux fois duchesse de Bourgogne par ses mariages avec Philippe de Rouvres et Philippe le Hardi. À la mort du jeune Philippe de Rouvres en 1361 la première dynastie capétienne des ducs de Bourgogne s'éteint et le duché fait retour à la Couronne : sa veuve Marguerite de Flandre, alors âgée de 11 ans, ne peut conserver la Seigneurie, dont hérite alors une autre Marguerite : Marguerite de France, sœur de Jeanne de France, grand-tante et héritière de Philippe de Rouvre, et grand-mère... de Marguerite de Flandre. À la mort de Marguerite de France en 1382, la Seigneurie est héritée par sa petite-fille Marguerite de Flandre (qui donc possède la Seigneurie une deuxième fois, mais maintenant en propre, non en douaire), et à son deuxième mari le duc Philippe le Hardi, dernier fils de Jean le Bon, épousé en 1369. Ce deuxième Philippe est le premier des ducs Valois de Bourgogne.

L'année 1390 marque un tournant, puisque le duc de Bourgogne, après avoir obtenu notamment l'Artois, la Flandre, le Rethel, le Charollais en apanage, acquiert le fief islois.

La Seigneurie d'Isles va se transmettre aux descendants de Marguerite et Philippe issus de leur fils cadet Philippe de Nevers : les comtes ou ducs de Nevers et de Rethel des Maisons de Bourgogne-Valois, d'Albret d'Orval, de Clèves et de Gonzague.

Dans la seconde moitié du XVIe siècle, le statut d'Isle est transformé en marquisat par Henri II pour Jacques de Clèves duc de Nevers, comte de Beaufort et sire de Jaucourt, fils du duc François. Les quatre châtellenies d'Isle, dont le comte de Beaufort est alors propriétaire d’Isles, Villemaur, Maraye et Chaource, reviennent à sa sœur Marie princesse de Condé et première épouse du prince Henri Ier.

Dans les années 1590, ces biens domaniaux sont successivement acquis par Gabrielle d'Estrées (favorite d'Henri IV), puis passent à une autre sœur du duc Jacques, Henriette de Clèves, duchesse de Nevers, princesse de Mantoue, veuve de Ludovic de Gonzague, duc de Nevers et gouverneur de Champagne. Elle aliéna la terre de Chaource au profit de Charles de Choiseul, marquis de Praslin, par contrat du 3 février 1601, et la terre de Villemaur à Jacques de Villemaur. Après la mort d'Henriette, son fils Charles Ier de Gonzague, duc de Nevers et Rethelois, fut marquis d'Isles et seigneur de Maraye en 1628, et vendit cette dernière terre à M. de Bullion, surintendant des finances, avec la réserve de la mouvance à Isles.

Le duc de Nevers laissa, par son testament, la terre d'Isles à sa fille la princesse Louise-Marie de Gonzague, mariée au roi de Pologne Ladislas IV Vasa. Ultérieurement, le marquisat retourna à Charles II de Gonzague, petit-fils de Charles Ier, aussi duc de Nevers ; mais ce seigneur passa bientôt au duché de Mantoue, et « vendit Isles » à Antoine d'Aumont de Rochebaron, par contrat du 12 mai 1648 ; celui-ci fut maréchal de France en 1651, gouverneur de Paris en 1662.

Le roi Louis XIV, pour le récompenser de ses services, érigea son marquisat d'Isles en Duché-Pairie, par lettres-patentes de novembre 1665, sous le nom de duché d'Aumont, dont Isles devint le chef-lieu et prit le nom, qu'il porte encore aujourd'hui : ainsi, la réunion de ces deux termes donna « Isle-Aumont ».

Blason des Ducs d'Aumont

En mars 1789, pendant que se tiennent les États généraux, la commune, dont les habitants et leurs représentants viennent d'émettre leurs cahiers de doléances, est alors rattachée à l'intendance, à l'élection et à la généralité de Châlons. L'année suivante, en application du décret voté par l'Assemblée constituante et daté du 15 janvier 1790, le statut de la localité auboise est élevé au rang de chef-lieu d'un bailliage — équivalent d'un canton pour cette époque — relevant du district de Troyes.

De cet ensemble, militaire et religieux, il ne restait plus que « motte (place forte) et pourprins (enceinte) » et le puits des moines.


L'église actuelle et le cloître






Le cloître et son puits




extraits de : 

Un Haut Lieu Archéologique de la Haute Vallée de la Seine :

La Butte d'Isle-Aumont en Champagne

Prix Littéraire du conseil Général de l'Aube en 1977


Isle-Aumont Historique du Xe siècle à nos jours

D'après les fouilles de Jean SCAPULA
et les documents d'archives avec plans et reproductions de nombreuses pièces de fouilles.






Autodafé de Troyes de 1288

  Philippe le Bel et les juifs Larousse : autodafé : " Jugement sur des matières de foi. Exécution du coupable à la suite de cette sent...