mardi 9 avril 2024

Prieuré de Foissy

Le prieuré de Foissy (ou Foicy)


Fondé en 1134 par le comte Thibaud II aux portes de Troyes (Saint-Parre-aux-Tertres), le prieuré de Foissy, sous le vocable de Notre-Dame, appartenait à l’ordre de Fontevrault. . Thibaud a succédé à son oncle Hugues entré en religion en 1125 dans l’Ordre des Templiers. Dans sa jeunesse, il a entendu parler de Robert d’Arbrissel qui a fait sur lui et les siens une très forte impression et c’est d’autre part le fait de sa femme Mathilde de Carinthie qui tient à mourir dans l’habit des religieuses de l’Ordre et que trois de ses filles la suivirent.

Suivant la coutume de cet ordre, il comportait 2 communautés, l’une d’hommes, l’autre de femmes, ayant chacune son église, ses bâtiments claustraux et son jardin. La première, celle des hommes disparut en 1484, mais la seconde a subsisté jusqu’à la Révolution, et elle était un des rares prieurés demeurés conventuels.

1129 : Renaud d’Epagne, chevalier, et Colin de Ramerupt sont témoins d’une charte de donation faite au prieuré de Foicy, par Guy du Mesnil consistant en 4 setiers de grains à prendre sur le four de Précy. Renaud d’Epagne est l’oncle d’Agnès prieure de Foicy et Colin de Ramerupt son cousin.

1134 : Thibaud II et avec le consentement de Mathilde, sa femme, donne aux religieuses deux fours à Troyes avec les maisons adjacentes

1136 : le prieuré de Foicy est cité dans le privilège de 1136 comme devant son origine à Alix, dame de Chappes et au comte de Champagne, Thibaud II, qui, en tant que comte de Blois, quatrième du nom, avait aussi favorisé le prieuré de L’Epine-aux-Autels au diocèse de Chartres. L’abbesse Pétronille vient visiter ce prieuré accompagné d’Hugue du désert récemment rallié à Fontevraud avec ses frères de la Chaise-Dieu ; ce fut en leur présence et celle de Guy, frère de Saint-Bernard, qu’au chapitre de Saint-Martin-ès-Aires, Guillaume, abbé de cette abbaye augustine de Troyes, céda aux moniales de Foicy des terres, bois et prés à Jully-sur-Sarce.

1139 : sous le sceau de Geoffroi de Rochetaillé, évêque de Langres, qui constate une donation de Gauthier de Maleterre pour la dot de sa fille quand elle entra en religion à Foicy, Il promet de servir tous les ans, sa vie durant, une rente de 3000 oignons à la communauté.

La prieure la plus anciennement connue (1155) était la veuve d’Anseau 1er de Traînel. Non seulement, Anseau appartenait à l’une des plus illustres familles champenoises (son fils Anseau II, fut bouteiller de Champagne sous Henri le Libéral) mais il se signala par d’importantes libéralités envers divers établissements religieux du diocèse, parmi lesquels l’abbaye de Saint-Loup dont un de ses petits-fils fut abbé, et surtout la seconde des maisons religieuses, l’abbaye très intellectuelle du Paraclet.

1159 : Henri, comte de Troyes, confirme la donation faite par son père à Foicy, des usages dans le bois d’Isles.

1165 : Henri le Libéral, fils et successeur du comte Thibaud II de Champagne : « Mon père donna aux moniales de Foissy sa garenne, au milieu de laquelle est une chapelle et un ermitage ; c’est là qu’elles habitèrent. Puis poussé par sa piété et son zèle, il leur construisit un monastère et une église en l’honneur de la bienheureuse marie. Pour l’entretien de ses religieuses, qui se consacraient là au service de Dieu, il leur donna des vignes et d’autres terres »

1184 : Mathilde d’Anjou (1149-1155) fait confirmer par la papauté qu’elle est indiscutablement le chef de l’Ordre tout entier, la même bulle a compensé la dépendance de l’abbesse à l’égard de l’évêque de Poitiers pour sa bénédiction. Réitérée sous Gilette (1180-1189) par Lucius III en 1184 cette dernière est respectée puisque l’évêque de Troyes, Manassès, le jour de la Saint-Thomas (21 décembre) vient bénir les vierges du prieuré de Foicy : de la reine-mère de France Adèle de Champagne- fille de Thibaut II – de la « reine d’Angleterre » Marguerite de France et de la demi-sœur de cette dernière, la comtesse régente de Champagne, Marie, qui fait à cette occasion, don de ses droits  de pécher à volonté dans l’eau de la seine jusqu’à Payns.

1220 : Haya, sœur de Geoffroy de Villehardouin, et damerons, sa fille, toutes deux religieuses à Foicy, abandonnent leurs droits de la dîme de Chesley en faveur des religieux de Molême. Acte ratifié en 1229 par Hugues, évêque de Langres.

1360 : Eléonore de Parthenay, fille de Jean de Parthenay, âgée de 27 ans rentre en religion de Saint-Benoît au Bourg de Saint-Jean à l’âge de 5 ans, y porte le voile jusqu’à l’âge de 15 ans et est reçue en religion à Fontevraud en 1451. En 1360, elle devient prieure de Foicy.

1453 : le 2 mars Marie de Montmorency, 24ème abbesse (1451-1457), demande à la prieure et au prieur de Foicy d’aller recevoir sœur Catherine de Saint-Amand avec le congé de son abbesse, à la requête de madame la comtesse de Vendôme et d’Harcourt.

En 1460, Marie de Bretagne, pour réformer tout l’ordre, donne au père Guillaume Bailleul, grand prieur de Fontevraud l’ordre de visiter tout l’ordre et de rapporter un compte exact du nombre de personnes religieuses qu’il trouvera dans chaque prieuré, l’état des maisons tant pour le spirituel que pour le temporel. La ruine des bâtiments, la perte des revenus à cause des guerres avec les Anglais provoque un grand désordre dans l’ordre. Nous voyons dans quel abandon se trouve la grande majorité des prieurés. Le prieuré de Foicy est habité par une prieure et 8 religieuses et un prieur avec un revenu de 1800 livres

Mentionné dans la bulle papale d’Eugène III, du 16 septembre 1145

Depuis un siècle, la prépondérance de Fontevraud a été accrue par le pouvoir royal, qui a décidé d’étendre à presque toute la France la réforme de Fontevraud instauré par Marie de Bretagne.

Foicy est réformé sous Anne d’Orléans (1477-1491)

1499 : Renée de Bourbon  (1491-1534) confirme l’élection à Foicy en la personne de Sœur Françoise du Pont.

En 1501, frère Olivier Maillard, vicaire général des Franciscains de France expédia au prieuré de Foissy certains privilèges qu’il avait obtenus du légat en faveur de cette maison.

1577-1580 : les catholiques bénéficient au XVIe siècle d’une possibilité d’enrôlement dans la Confrérie du Rosaire dressée entre 1577 et 1580 dans le prieuré de Foicy? C’est Louise de Bourbon (1534-1575) qui en fait la demande à Séraphin Caballi, général des dominicains. Au cours de la démarche apparait le nom de Jean Millet, prêtre natif de Troyes et résidant à Rome où il tient la signature des brefs apostoliques. Dès 1577, la prieure de Foicy met en place une chapelle du Rosaire. Il faut orner les murs d’une Représentation des 15 Mystères de la Vierge et fait peindre un tableau sur lequel Saint-Dominique reçoit à genoux le Rosaire de la Vierge . Les Troyens peuvent s’y inscrire pour manifester à un culte contre-réformateur

1542 le 18 octobre : Incendie entre 10 H et 11 H du soir, le feu pris par accident à la ramée de l’église de Foicy. Le clocher, la moitié des dortoirs et une grande quantité de joyaux et d’ornements servant à l’église sont brûlés, les cloches fondues. Mais les habitants des villages voisins sauvent les provisions du monastère.

En 1544, les bâtiments, incendiés avec la plupart des titres, furent rétablis avec l’aide des aumônes d’un jubilé ordonné à cet effet par le Souverain Pontife.

1609 : 60 religieuses qui font jusqu’en 1793 l’édification de Saint-Parres-aux-Tertres.

1647 : 70 religieuses

En 1688, Jeanne-Baptiste de Bourbon, abbesse de Fontevrault, envoie une partie des reliques de Sainte-Radegonde, reine de France. Les populations environnantes venaient en foule les vénérer le lundi de Pâques. C’était une des fêtes chrétiennes les plus populaires des alentours de Troyes.

Jeanne-Baptiste de Bourbon - Fresque de la salle capitulaire de l'Abbaye de Fontevraud

Ermitage dans l'Aube (10)

 L’Ermitage du Hayer de Chennegy



En 1343, Messire de L’Hospital, seigneur de Saint-Liébault et de Chennegy, fait construire une église dans les circonstances suivantes : une statue de la Sainte Vierge a été trouvée dans les bois qui couvrent le Hayer.

A cette époque, on dit que c’est la preuve que Marie demande des honneurs et un sanctuaire en ce lieu : « Nous avons à 4 lieues de Troyes, à Chennegy, Notre Dame du Hayer, ermitage et beau pèlerinage de notre diocèse, où il y a si bonne affluence du peuple le jour de l’annonciation, pour vénérer cette image de la Sainte Vierge qui, de temps immémorial, a été trouvée en ce lieu, où beaucoup de personnes reçoivent assistance en leurs mal… ».

En 1553, Messire de Courcelles, gendre du précédent et seigneur comme celui de Chennegy, voulant compléter l’œuvre, fait construire autour de l’église un petit logement pour 2 solitaires, dont la mission est de veiller à la garde et à l’entretien du lieu saint.

En 1608, l’ermite aux soins duquel est dévolue la garde du sanctuaire de Marie, est le frère Jean Grados. Ce solitaire s’est retiré au Hayer, au retour d’un pèlerinage aux Lieux-Saints. Habile en chirurgie, il a l’occasion de rendre de nombreux services aux habitants de la contrée. Pour lui témoigner sa reconnaissance, le peuple le comble de générosité. Il en emploie le produit à l’achat de plusieurs héritages, dont il gratifie son église.

En 1638, le Père Claude Gombault (né à La Rivière de Corps, et ayant pendant son jeune âge vénéré très souvent en pèlerinage la Vierge du Hayer), supérieur des Ermites de Saint-Augustin, établis en l’ermitage de Saint-Charles du diocèse de Langres, vient demander au frère Grados de transporter sa communauté sous son toit. En effet, la France est en guerre avec la couronne d’Espagne, et les solitaires sont plus d’une fois en danger de mort. La demande ayant été agréée et réglée par les notaires royaux, le Hayer sort de cette situation d’institution précaire, faute de membres pour en assurer la perpétuité. Les ermites changent leur nom d’Ermites de Saint-Charles en celui d’Ermites de Notre-Dame-de-Grâce du Hayer, par honneur pour la Sainte Vierge, patronne de ce lieu. Mgr René de Breslay, évêque de Troyes, alors en son château d’Aix-en-Othe, accorde en octobre 1639, l’autorisation sollicitée. Il est stipulé que le nombre des frères ne pourra être inférieur à 4, et qu’ils s’adjoindront pour se procurer un service religieux sûr et permanent, un prêtre qui prendra le titre de chapelain. Mgr François Malier en 1659 donne son approbation et fait sa première visite au Hayer en 1660, les 8 solitaires renouvelant leurs vœux entre ses mains. Mgr François Bouthilier de Chavigny en 1684, donne lui aussi son approbation. La sanctification par la prière et le travail des mains, à l’exemple des anciens anachorètes, tel est le but poursuivi par les solitaires. Tout le temps qu’ils n’accordent pas à la prière, ils le consacrent aux travaux des champs, c’est-à-dire plus de 7 heures par jour. En été, lever à 4 heures, en hiver, à 5 heures : prières et oraisons. La messe se dit à 7 h 15 en été, et à 8 h en hiver. Tous les jours, le dîner à lieu à 10 h, on ne prend rien avant. Pendant le Carême et les jours de jeûnes,  le repas n’a lieu qu’à 11 h 30. Le dîner est suivi d’une lecture à la Chapelle. Les vêpres et complies se disent à 3 h 15, excepté les dimanches et jours de fête, où les vêpres sont récitées à 2 h et les complies à 3 h 45. Le souper, en tout temps, est servi à 6 heures. A 8 h 45, matines et laudes, ensuite lecture du sujet d’oraison pour le lendemain, puis le coucher. Les jeûnes sont fréquents, à ceux observés dans l’église universelle, les frères ajoutent celui des mercredis et vendredis de l’année, et les veilles des fêtes de Notre-Seigneur, de la Sainte Vierge, de saint Michel et saint Augustin. La confession et la communion fréquentes sont en usage au Hayer.

1 mois ou 6 semaines après leur entrée au couvent, les novices déposent l’habit séculier pour en prendre l’habit des religieux qui est de drap ou de serge de couleur blanche. Il consiste en une robe, une tunique, un scapulaire attaché au capuce, une ceinture de cuir et un manteau blanc. Lorsque les frères sont occupés aux travaux des champs, ils portent d’autres habits, plus en rapport avec leurs occupations. Chaque religieux à sa cellule, modestement meublée, de 7 pieds sur 8.

L’hospitalité était généreusement donnée à tous ceux qui venaient frapper à la porte du Hayer. La ferme était attenante à l’ermitage dont elle n’était séparée que par l’église, avec ses dépendances : grange, écuries, remises, corps de logis.

L’église, de style gothique, construite tout en bois, mesurait 14 toises sur 3. La toiture était en ardoise. Derrière le maître-autel, il y avait un chœur à l’usage des religieux. Le sanctuaire et le chœur des religieux étaient recouverts de boiseries. Une grille de fer séparait le chœur de la nef. Le clocher abritait 3 cloches et une horloge dont les aiguilles et la voix servaient à régler les heures de la prière et du travail.

Le 5 septembre 1761, la Conseil d’Etat rend un arrêt par lequel « Sa Majesté ordonne que, par le sieur évêque de Troyes, supérieur majeur, et par le sieur duc d’Estissac, seigneur temporel et fondateur, il soit choisi, nommé un économe séquestre, avec défense aux religieux de troubler l’économe comme aussi de recevoir des novices » ; 22 septembre : « … en raison de leurs dettes criardes, il ne reste plus que 881 livres pour vivre ; c’est l’impossibilité d’aller plus loin… » ; 27 octobre : « Signification est faite aux religieux de l’arrêt du Conseil d’Etat portant extinction et union du Hayer au Petit Séminaire… » ; 12 novembre 1763, le roi porte un décret : « à partir de ce jour, tout est consommé : l’Ermitage du Hayer a cessé, le Petit Séminaire en a recueilli l’héritage, il a duré 137 ans ».

Après la suppression de l’Ermitage du Hayer de Chennegy, il y est établi un pénitencier ou renfermerie, tant il y a de misère et de mendiants de 1767 à 1770.

 En juillet 1772, le duc d’Estissac autorise la démolition de la maison du Hayer, à condition que le prix de la vente des matériaux soit consacré au remboursement du capital des rentes dues par les religieux.

Pendant les 137 ans de sa durée, la maison du Hayer a abrité 59 religieux.

Les Ermites du Hayer ont toujours été les amis des pauvres, des malheureux. Jamais l’infortune ne frappa en vain à leur porte. L’exercice de la charité leur était familier. Ils nourrissaient un pauvre du pays, et, quand celui-ci était mort, ils faisaient pour un autre ce qu’ils avaient fait pour lui. Cela ne les empêchait pas de faire l’aumône à quiconque venait la solliciter. De plus, en temps de disette, de mauvaises récoltes, ils distribuaient des semences aux laboureurs dépourvus, partageant avec les maigres ressources dont ils disposaient.

En 1889, l’Abbé Masson écrit : « Ils ne sont plus… des nécessités malheureuses ont mené leur déchéance et précipité leur ruine. Mais, en face de leur vie exemplaire et sainte, de leur esprit de sacrifice et de générosité, nous n’en sommes pas moins obligés de proclamer qu’ils ont bien mérité de la Religion et de la Société ! ».

 

Chapelle du Hayer construite en 1867 sur l'ancienne entrée de l'Ermitage du Hayer en 1639 à la sorite du village. Restaurée par l'Association SVP
 



Association SVP (Sauvegarde et vie du Patrimoine Chennegy-le-Valdreux


Congrégations, couvents, Carmel, dans l'Aube (10)

 

Congrégation du Bon Secours

 


Paul-Sébastien Millet naît dans le petit village aubois, le Mériot, le 21 mai 1797, dans les remous de la Révolution française. Il entre au Petit Séminaire de Troyes, le 12 janvier 1816. Il est ordonné prêtre le 31 août 1823, et devient vicaire d’Arcis-sur-Aube, le 1er juin 1824.

Il découvre que les malades de toutes catégories sociales manquent de soins efficaces et sont souvent abandonnés dans les campagnes mais aussi dans les villes. Mal soignés, la mort est précoce et la cellule familiale se détériore rapidement, tant au niveau de la cohésion de la famille qu’au niveau de la vie de foi.

 

Il est inspiré de fonder une congrégation de religieuses qui, selon lui, pourraient porter remède au dépérissement de l’esprit de foi et de la famille, par la garde et le soin des malades à domicile, dans un service gratuit.

Une anecdote peu connue : le 15 mars 1840, la maison d’Arcis du Maréchal Ludot est à vendre : mise à prix, plus de 10.000 fr. Se portent acquéreurs : la ville d’Arcis, M. Lasnier marchand de grains, tous deux voulant absolument l’acheter et Pierre Néty le charpentier. M. Lasnier vient de mettre 100 fr, ce qui porte à 12.500 fr l’enchère. M. Néty ajoute 100 fr, cela fait 12.200 fr. A ce moment, M. Lasnier se trouve mal : on le sort de la salle, on lui donne de l’air, on se procure de l’eau sucrée… Enfin, on oublie l’adjudication… et la petite chandelle allumée pour la mise de Néty s’éteint ! La maison lui est adjugée ! Mais pour qui M. Néty enchérissait-il ? Pour l’abbé Millet !

Le 25 mars 1840, l’abbé fonde pour le soin des malades à domicile, la congrégation de Notre-Dame du Bon Secours, qui célèbre chaque année, le 25 mars, son entrée dans l’église. Ce prêtre se dévoue sans compter auprès des enfants pour leur instruction et auprès des malades pauvres, et il souhaite que sa communauté prenne racine à Troyes, chef-lieu du diocèse.

En 1841, une maison de Saint-André-les-Vergers offerte pour des religieuses institutrices, devient libre. Le curé l’offre au Père Millet.

Dix sœurs en voile à Arcis, c’est beaucoup pour les besoins d’une petite ville, même si elles vont parfois dans les villages avoisinants. Les habitants de Troyes n’ont pas réclamé les sœurs, qui ne sont connues que d’un petit nombre de Troyens. Elles sont donc reçues sans enthousiasme, mais sans hostilité. Bientôt, mieux connues, les sœurs sont beaucoup demandées et ne suffisent plus à la tâche. Il faut du renfort. Heureusement, les vocations commencent à venir plus régulièrement. Le renom des sœurs s’établit en ville, et les prêtres ne sont pas les derniers à en faire l’éloge.

La décision est prise : il faut que les sœurs se consacrent au soin des malades à domicile. C’est le pressentiment que le milieu est un facteur de guérison, l’hospitalisation à domicile le dit assez aujourd’hui ! La sœur ira donc à domicile, souvent et longuement. Le Père Millet sait bien qu’une amitié ne se noue pas en un jour ou par de brèves visites, le temps d’administrer un remède. Il ne s’agit pas de porter le pain de la boulangère malade, ni de traire une vache, mais suppléer la ménagère défaillante dans les mille petits travaux quotidiens, va établir un lien profond qui permettra l’échange au-delà des soins. C’est une véritable solidarité avec tous ces pauvres gens que la Congrégation a rencontrés. Pauvres, sans espoir, vaincus de la vie qui allaient sombrer dans le découragement et l’oubli.

Le 24 octobre 1843, la communauté s’installe dans des locaux provisoires, rue Hennequin, et en octobre 1849, rue du Cloître Saint Etienne.

 Lors des épidémies qui éclatent dans le département en 1846 (200 malades sur 800 habitants à Bligny), elles y gagnent leurs premières médailles (il y en a plein une armoire !), mais y laissent leurs premières martyres.

Le 24 février 1863, c’est reconnaissance par le Saint-Siège.

A la veille de la Séparation de 1903, cette congrégation compte 119 maisons répandues en France : Algérie, Tunisie, Belgique, Italie, Espagne, Angleterre, Suisse et États Unis, et 7 dans l’Aube.

Au 31 décembre 1989, il n’en subsiste plus que 27, dont 3 dans l’Aube.

 Troyes est la Maison Mère.

 Le centre de soins infirmiers Bon Secours est une  association loi 1901 créée en 2008. Initialement gérée par des religieuses, le personnel laïc a repris l'activité des sœurs depuis 2009.

 

Ordres, communautés - Aube (10)

 

Notre-Dame-en-l'Isle

 


Les chanoines réguliers du Val des écoliers se proposent pour établir à Troyes une maison de leur ordre, sous l’épiscopat d’Hervée (1206-1223). On leur indique à cet effet " un lieu proche les murs de la ville, nommé Marais du Cul-chaud ", sur la paroisse de Saint-denis.

En 1222, les frères Ecoliers font bâtir leur monastère et leur église sous le vocable de l’annonciation de la sainte Vierge, d’où elle prend le nom de Notre-Dame-en-l’Isle, parce qu’en effet, elle est comme une île, environnée de divers canaux de la Seine.

Cette maison doit sa plus grande magnificence au zèle de Simon Pépin qui reçut ce prieuré de son oncle vers 1650. Simon fait de Notre-Dame-en-l’Isle un séjour très agréable par les jardins ornés de charmilles, remplis de parterres et coupés par des canaux, où il fait venir l’eau d’une division de la Seine. M. Huez, maître de langue latine à Troyes chante les beautés de cette habitation et dédie son poème au prieur Pépin, dont il exalte la piété, le caractère et l’affabilité. Il compare la Seine qui environne la ville de Troyes aux Xanthe ou Scamandre qui arrose l’ancienne Troie, en Phrygie.

En 1653, les chanoines réguliers du Val des Ecoliers sont réunis à la Congrégation de France.

Le prieuré de Notre-Dame-en-l’Isle devient un prieuré simple à collation royale.

En 1703, les Jésuites veulent l’acheter et établir une maison de leur société, mais la ville n‘a jamais voulu recevoir ces religieux.

En 1720, Mgr Bossuet évêque obtient un brevet du roi, et établit dans cette maison, les prêtres de la Mission, directeurs du Grand-Séminaire, fixés dans le diocèse (faubourg Croncels) depuis un siècle. Les conditions de cette fondation avaient été acceptées en 1643, par " l’instituteur saint Vincent-de-Paul, lui-même, qui était alors à Troyes ".

En 1733, les Missionnaires ou Lazaristes entrent à Notre-Dame-en-l’Isle. Les premiers bâtiments ayant été construits à la hâte, ne sont pas trouvés solides, et menacent ruine. Mgr Bossuet fait reconstruire en entier le séminaire.

Pour subvenir aux dépenses qu’entraîne l’administration du Séminaire, et afin de procurer plus de bourses aux jeunes ecclésiastiques pauvres, Mgr de Barral y réunit deux prieurés : celui d’Isle-Aumont et celui de Saint-Flavit de Villemaur. Cela est confirmé par brevet du roi de 1777, et une bulle du pape Pie VI de 1778.

 En 1791, les directeurs du séminaire refusent d’adhérer à la Constitution Civile du Clergé. Les Lazaristes abandonnent le Grand Séminaire, qui est déclaré bien national à la Révolution. Sous la Terreur, il sert de prison pour les "  suspects ", puis pour les prisonniers de guerre.

 En 1801, la réouverture des séminaires est autorisée par le Concordat, et le culte peut de nouveau s’exercer dans notre ville. Mais le séminaire de Troyes est affecté par les consuls au logement des troupes.

En 1803, Mgr de la Tour-du-Pin consacre une partie du Palais Episcopal à l’installation du séminaire. Cela dure 15 ans.

Louis XVIII, sur les instances Mgr de Boulogne, lui remet en 1815, les bâtiments du grand séminaire. Notre évêque fait toutes les réparations nécessaires, et achète les maisons contiguës pour y installer le petit séminaire en 1819.

En 1850, Mgr Cœur obtient du ministère une allocation pour exécuter des travaux importants, dont la chapelle.

Depuis 1791, le Grand Séminaire était dirigé par des prêtres du clergé diocésain. En 1876, Mgr Cortet fait appel aux lazaristes.

Expulsés en 1901, par la Loi sur les Associations, les lazaristes sont à nouveau remplacés par les prêtres séculiers.

En 1905, la Loi de la Séparation de l’Eglise et de l’Etat désaffecte l’établissement. L’ancien séminaire est alors le siège des patronages laïques. Pendant la guerre 1914-1918 , il abrite l’hôpital militaire.

 En 1906, les prêtres trouvent asile dans une partie de l’ancienne abbaye de Saint-Martin-ès-Aires, devenue pensionnat de jeunes-filles. L’Etablissement n’ayant pas le droit de porter le nom de Grand Séminaire, prend celui d’Institut Saint-Loup, Ecole Supérieure d’Etudes Religieuses et Morales, qui y reste jusqu’en 1945.

En 1943, suite au décret signé par Pierre Laval et Mgr Lefebvre, l’évêché rachète l’établissement. Le Grand Séminaire retrouve sa destination première en 1945. Il s'y était installé en 1722.

En 1960, faute de vocations, les séminaristes sont regroupés au Grand Séminaire de Reims.

Les bâtiments reçoivent de nouveaux services :

- " Maison Notre-Dame-en-l’Isle ", maison d’accueil spirituel,

- l’Association Diocésaine occupe en 1982 une aile du bâtiment,

- une autre partie plus récente, abrite une communauté des Sœurs de la Congrégation de Notre-Dame,

- RCF, la radio diocésaine.        

En 1994, Mgr Daucourt souhaite regrouper dans ce patrimoine les services diocésains qui sont alors éclatés

D’importants travaux de réhabilitation pour la mise en conformité des lieux sont alors réalisés.

Mgr Stenger inaugure en 1999, la " Maison Diocésaine Notre-Dame-en-l’Isle ", lieu d’accueil, de rencontre, de formation.

La chapelle désaffectée de Notre-Dame-en-l’Isle est devenue une vaste salle polyvalente de 200 à 240 places, pour des conférences, des concerts.

Dans le jardin, s’élève une petite chapelle construite en bois, du XVIII° siècle, dite de " l’Enfant Jésus " ou de " l’Horloge ".

 

 

Les Antonins de Troyes

 

 L’Ordre de Saint-Antoine de Vienne avait pour but le soulagement des malades affligés de l’affreux mal qu’on appelait le feu sacré, le feu infernal ou le feu de Saint-Antoine, feu étrange qui brûlait tout noir et desséchait le membre qu’il atteignait.

 L’Ordre de Saint-Antoine est établi en 1095, au bourg de Saint-Antoine en Dauphiné, par un gentilhomme nommé Gaston et par son fils Girinde, miraculeusement guéri du feu sacré par l’intercession de saint Antoine.

 

Saint Antoine abbé XVe s. - Musée de Louvre - Paris

 Les religieux Antonins s’appellent Frères, et le supérieur Grand-Maître. Ce n’est qu’en 1218 qu’ils obtiennent du pape Honorius III, la permission de faire les 3 vœux de religion. Ils portent au côté gauche, sur l’habit noir et sur le manteau long, la figure du tau couleur d’azur. A Troyes, le tau est surmonté de flammes.

 Les documents relatifs aux Antonins de Troyes sont fort rares. Le plus ancien titre qui se trouve dans les archives, est de 1268. Ce sont des lettres-patentes de Thibaut V, « roy de Navarre, comte Palatin de Champagne et de Brie,  du lendemain de Pâques, 9 avril,  par lesquelles il permet à frère Durand, maître de l’hôpital de Troyes, de faire entrer chacun an dans la ville, 3 tonneaux de vin pour la boisson, francs et quittes de portage, avec défense de lui faire, pour raison de ce, aucun tort ni grief ». L’année suivante, au mois de mars, ce prince renouvelle, par lettres-patentes, la même grâce aux frères de Saint-Antoine de Viennois. Il est clair, d’après ces 2 actes, que les Antonins ont, en 1268, un établissement à Troyes. Thibaut V, prince croisé avec saint Louis vient de prendre la route de Marseille pour s’embarquer. De Chaumont le 15 avril 1270, par de nouvelles lettres patentes, il donne au maître et aux frères de l’hôpital Saint-Antoine, 120 arpents de bois à prendre dans la forêt d’Isle. Plus tard, les Antonins font bâtir sur des terrains, une métairie qui est appelée Saint-Antoine-aux-Bois. Le 25 juin, de Marseille, Thibaut adresse des lettres-patentes, il leur donne 100 sous de rente sur le portage de Troyes. Les religieux devront célébrer pour lui, une messe tous les ans tant qu’il vivra, et après sa mort, il feront son anniversaire. En 1286, messire Aldobrandin de Sienne, médecin à Troyes, donne aux Antonins plusieurs biens, entre autres, quelques maisons, vergers et jardins, situés sur la rue de Saint-Abraham.

Où les religieux de Saint-Antoine de Vienne sont-ils établis à Troyes ? Sans doute dans la rue des Bûchettes (quartier de Comporté, s’est aussi appelée Clos-de-la-Madeleine), « tenant à la maison du Maître de l’Hôpital de Saint-Antoine », d’après la donation d’une maison qui leur est faite en 1294.

Au XIIIe siècle, comme plus tard, les quêtes sont, pour les Antonins de Troyes, la principale source de leurs revenus. Ces religieux doivent recueillir d’abondantes aumônes, car ils paient à la Cathédrale, pour le droit de quête dans le diocèse, une redevance annuelle de 22 livres, somme considérable au XIII° siècle. Après 200 ans de vie florissante, l’Ordre de Saint-Antoine tombe en décadence. Le pape Boniface VIII, en 1297, soumet les Antonins à la règle des chanoines réguliers de Saint-Augustin, déclarant : « que le premier supérieur s’appellerait abbé, et que toutes les maisons de l’ordre dépendraient et relèveraient de l’abbaye ou maison mère de Saint-Antoine en Dauphiné, qu’il déclarait chef de tout l’ordre et soumise entièrement au Saint-Siège ».

En 1338, les Antonins de Troyes sollicitent la permission de s’établir près des murs de la ville, à l’entrée du faubourg Saint-Martin, dans la maison qui leur a été donnée dans la rue de Saint-Abraham, par le médecin Aldobrandin. Il leur est permis d’avoir un oratoire ou une chapelle, avec cimetière et hôpital pour eux, ceux de leur Ordre et pour les infirmes de la maison du feu de la saint Antoine. L’évêque de Troyes Jean d’Aubigny accepte, à condition que ces religieux ne reçoivent pas chez eux les habitants de Saint-Martin, en qualité de paroissiens, à moins qu’ils ne soient attaqués de la maladie du feu. Les Antonins  font bâtir une maison et une église avec cimetière en 1341. L’hôpital en faveur des pauvres malades de Saint-Antonin est construit en même temps

En 1590, les Troyens appréhendent que la ville ne soit assiégée à cause des guerres civiles qui troublent le royaume et que les ennemis s’approchent à la faveur de l’église et des bâtiments des Antonins. Ils les font raser.

L’une des principales gloires de l’Ordre de Saint-Antoine au XV° siècle, est Pierre de Provins, précepteur de Troyes, docteur en droit canon.

Dans le cours du XV° siècle, la Commanderie ou préceptorie de Saint-Antoine, placée à l’entrée de la ville, sur la route de Paris, sert souvent de pied à terre aux rois et aux princes, lorsqu’ils viennent à Troyes et font leur entrée solennelle. En 1486, le 12 mai, le jeune roi Charles VIII venant visiter la ville de Troyes, reçoit l’hospitalité à Saint-Antoine.

Le 25 mars 1553, le corps du duc de Guise, assassiné devant Orléans, est reçu solennellement par toute la ville de Troyes, dans l’église de Saint-Antoine.

Lorsqu’en 1554, Charles IX et Catherine de Médicis se rendent à Troyes pour les conférences de la paix avec l’Angleterre, le roi trouve à Saint-Antoine un festin qui lui a été préparé et un cheval frais pour faire son entrée dans la ville.

En 1590, leur église fut démolie en même temps que celle de la paroisse et la chapelle des Trinitaires de Preize, pour fournir des pierres au boulevard de Chevreuse. A la suite de cet événement, les Antonins, forcés d’émigrer, « jettent les fondements de l’église et bâtiments de Saint-Martin-ès-Vignes ». Ils construisent une maison « dans une belle et commode situation ». En 1625, le roi Louis XIII le Juste, ayant résolu de faire solennellement son entrée à Troyes, choisit cette maison pour y recevoir les hommages des habitants. Il se fait une joie de voir, d’une fenêtre de son appartement, défiler devant lui et tous les seigneurs qui l’accompagnent, la milice de la ville et des faubourgs, qui précède ensuite le cortège royal jusqu’à la cathédrale.

Mais bientôt, c’est le relâchement dans toutes les maisons de l’Ordre, les sujets manquent dans les noviciats, et en 1771, il est demandé de fermer toutes les maisons où ne se trouvent pas 20 religieux.

En 1777, les Antonins de Troyes s’unissent à l’Ordre de Malte et sont remplacés par les Ursulines acquéreurs de la maison en 1780.

 Pendant plus de 500 ans, les Antonins de Troyes se sont dévoués au soulagement des pestiférés et des pauvres malades.

 

 

Communauté du Bon Pasteur

 


Toutes les informations ci-dessous sont tirées de documents authentiques conservés aux archives du Bon Pasteur et du registre de l’ancienne maison et de celui de la nouvelle, ainsi que la vie manuscrite de M. de la Chasse, premier directeur de la maison.

En 1692, six dames de Troyes « distinguées par leur piété, plus encore que par leur naissance, entreprirent une grande œuvre ». Touchées de l’état malheureux  dans lequel végétaient les filles enfermées à l’hôpital Saint-Nicolas, qui avait été transformé en maison de correction, et d’ailleurs désirant réunir et « ramener à la vertu un grand nombre de jeunes personnes engagées dans le désordre », elles demandèrent à cet effet l’hôpital Saint Bernard (maison 33, rue de la Monnaie), que les administrateurs des hôpitaux cédèrent volontiers.

L’œuvre commença. Mais on comprit bientôt que la maison ne pouvait marcher si quelques personnes ne se dévouaient à cette œuvre d’une manière toute spéciale. Alors, une bonne veuve, Madame Arson avec sa fille, et 2 dames Legrin, rentrèrent à la maison, pour en prendre la conduite, et Denis François 1er Bouthillier de Chavigny, évêque de Troyes, confia la direction spirituelle de Saint Bernard, à un saint personnage, Nicolas de la Chasse, chanoine de la cathédrale. Toutefois, pendant plusieurs années, le bien se fit d’une manière presque insensible parce que la maison avait conservé à son ancien caractère, celui d’une maison de force. Pour remédier à cet inconvénient et introduire un autre esprit, l’Evêque de Troyes, sans déclarer sa pensée intime, proposa de faire venir une religieuse de la communauté du Bon Pasteur, créée pour venir en aide aux jeunes filles et femmes en difficulté, désireuses de se convertir et de changer de vie, qui venait d’être fondée au faubourg Saint-Germain, à Paris, par Madame de Combé (en quelques années, le Bon Pasteur de Paris prit une extension considérable et eu des maisons de dépendance dans les principales villes de France. Les archives de la maison de Paris sont perdues). Cet avis ayant été goûté par les personnes qui s’occupaient de l’œuvre, on pria Madame Lapostole, deuxième supérieure générale de Paris, de donner une de ses religieuses pour former et diriger la maison de Troyes, et une fille pénitente pour servir de modèle aux recluses. Le choix tomba sur la sœur Péclavé qui arriva à Troyes avec sa compagne au mois de janvier 1695. Quelques jours après son arrivée, la sœur Péclavé représenta avec toute l’énergie qu’inspire une charité ardente, qu’elle ne voulait avoir auprès d’elle, que des pénitentes volontaires et disposées à servir Dieu par amour comme des enfants, et non par crainte comme des esclaves. « Je ne suis pas une geôlière, dit-elle, mais une sœur du Bon Pasteur, il faut ouvrir les portes à toutes les personnes qui sont ici par force ». Alors, la division qui existait depuis longtemps entre dames, par rapport à la direction à imprimer à l’Œuvre, augmenta. Elles se retirèrent peu à peu, et elles retirèrent en même temps, les secours qu’elles procuraient. Pendant 5 ans, il fallut à M. de la Chasse des efforts inouïs de charité et de dévouement, pour soutenir cette Œuvre menacée de périr à son berceau.  Enfin, le 2 février 1700, Madame Arson, sa fille et les 2 dames Legrin, qui étaient encore supérieures en titre, abandonnèrent définitivement la maison, mais elle était fondée !

 Le 11 mars 1700, la sœur Lavallée, venue du Bon Pasteur de Paris, prenait la direction de la maison de Troyes, dont elle fut la première supérieure en nom. M. de la Chasse, jusqu’à sa mort, qui arriva le 29 novembre 1734, se dévoua généreusement  à consolider et à développer cette Œuvre qui devait être si utile à la ville et au diocèse de Troyes. « Il fit fleurir au Bon Pasteur, l’esprit religieux aussi bien que l’esprit de pénitence », et il sut préserver la maison des doctrines jansénistes qui, à cette époque « infectèrent de leur venin », la plupart des communautés religieuses de notre ville.

Après avoir habité l’hôpital Saint Bernard pendant 55 ans, les religieuses du Bon Pasteur furent transférées, le 6 janvier 1750, à la rue du Bourg Neuf (du Palais de Justice), dans la maison que venaient de quitter les Carmélites. La cour, qui essayait par tous les moyens, depuis plus de 16 ans, d’amener ces religieuses à adhérer à la bulle « Unigenitus », venait enfin, en désespoir de cause, de les expulser et de les disperser dans d’autres communautés. Les religieuses habitaient depuis 15 ans la rue du Bourg Neuf, lorsque la ville demanda leur établissement légal.  Il fut autorisé, par lettres patentes de Louis XIV, datées de Versailles du mois de Juin 1765 :« Joseph Claude de Barral, évêque de Troyes, et nos chers et bienaimés les maire et échevins de la ville, nous ont fait représenter que les Sœurs dites du Bon-Pasteur qui, depuis plus de 70 ans, s’étaient toujours comportées avec la plus grande édification, s’occupent continuellement d’œuvres de charité et spécialement de retirer et de ramener à Dieu des filles repenties qui voulaient faire pénitence. Cette communauté, refermant plus de 50 de ces filles dirigées par les religieuses, le succès de cet établissement faisant désirer aux habitants de la ville de Troyes… ».

En 1766, les religieuses du Bon Pasteur quittent la rue du Bourg Neuf et sont transférées à la rue des bains, dans la maison occupée par des religieuses de la Congrégation qui donnaient l’enseignement gratuit aux jeunes filles de la ville. Attachées d’une manière forcenée au jansénisme, ces religieuses, après plusieurs mémoires justificatifs de leur désobéissance et après d’insolentes remontrances, venaient d’être supprimées par arrêt épiscopal de Claude-Mathias de Barral, le 5 juin 1766. Par le même arrêt, il leur avait donné une maison et une partie de leurs biens aux sœurs du Bon Pasteur, cela confirmé en août par lettres patentes de Louis XIV. Par décret, 2 sœurs devaient être chargées de tenir une école publique pour les jeunes filles. A peine installées dans leur nouvelle maison, les religieuses du Bon Pasteur furent tracassées par le curé de la paroisse qui adressa une requête au Parlement contre elles, parce qu’elles refusaient de se soumettre aux devoirs paroissiaux (présentation du pain bénit, assistance aux offices de la paroisse, confession annuelle au propre prêtre, communion pascale de la main du curé, derniers sacrements et sépulture par le curé). Le 9 Janvier 1768, sœur Marie-Jeanne de Sainte-Marthe, supérieure, et sa communauté adressèrent à leur tour au Parlement une requête solidement appuyée, à l’effet d’être dispensées de ces mêmes devoirs paroissiaux. Le 1er mars 1768, le Parlement envoya l’affaire à l’évêque de Troyes qui décida en faveur des religieuses.

 Le Bon Pasteur fut fermé le 2 novembre 1792. Il y avait à cette époque 70 religieuses et pénitentes et 2 domestiques dans la maison. Dans l’espace de 99 ans, 60 religieuses firent profession dans cette communauté qui servit de refuge à 650 repenties.

Le 13 juin 1796, la municipalité de Troyes fait dresser un état des bâtiments nationaux. Les locaux du Bon Pasteur abriteront les déserteurs étrangers, et un local sera destiné à la gendarmerie.

Sœur Constance et sœur Augustine, de l’ancienne maison, ayant conservé leur vocation, sollicitent le rétablissement du Bon Pasteur. Le 11 juin 1818, Monseigneur de Boulogne, évêque de Troyes, leur donne la permission de se réunir dans la maison de M. Lalauze, curé de Sainte Madeleine, à l’entrée de la rue du Cloître Saint-Etienne, cette maison leur était léguée. Le 23 juin, les 2 religieuses entrent dans la nouvelle maison avec 2 jeunes personnes, sœur Constance Roizard 17 ans et sœur Constance  Germaine 16 ans, rejointes quelques jours après par Mademoiselle Cécile Fournerot, nièce de M. l’abbé Fournerot. Louis XVIII, par lettres patentes du 2 septembre 1815, autorise la communauté du Bon Pasteur. Le 23 avril 1827, Charles X le confirme, et sanctionne les constitutions. De 1818 à 1868, 49 religieuses ont fait profession au Bon Pasteur et elles ont eu sous leur conduite, 200 jeunes filles, qu’elles ont nourries et entretenues gracieusement. La maison n’ayant aucun revenu, c’est à la pointe de leur aiguille que les religieuses ont soutenu leur vie et celle des enfants que les familles leur confiaient.

En 1818, l'ancien "Bon-Pasteur", dispersé par la tourmente révolutionnaire, se reconstitue, sous une forme nouvelle, à Troyes, rue du Cloître Saint-Etienne. Les sœurs  du Bon-Pasteur d'Angers reviendront, il est vrai, à la prière de Mgr Cortet, évêque de Troyes, le 6 juillet 1879, et ouvriront un Refuge, rue des Terrasses. Mais elles devront se retirer au début de 1907, du fait des lois anticléricales.

 

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