L’Hôtel
de Chapelaines
Avant la construction de ce bâtiment, le terrain est
occupé depuis le XIIIe siècle par des bouchers, des teinturiers et des drapiers
et appartient pour partie à l'abbaye de Clairvaux, et pour partie à l'abbaye
Notre-Dame des Prés.
Il est limité à l’est par le Grand-Ru de la Seine, à
l’ouest par la rue de Croncels, et au nord par une maison qui faisait partie
d’un hôtel dit du Château, maison devenue Hôtel de Noël. Il semble qu'il y ait
eu à cet emplacement un bâtiment dit « maison de Clairvaux » dès la fin du XIIe
siècle, situé sur le côté Est de la rue de Croncels - voie menant vers le bourg
de Croncels à l'extérieur des murs de la ville. La porte de Croncels (une des
portes de la ville) se trouvait à une centaine de mètres au sud du futur hôtel.
En 1470, l'abbaye de Clairvaux loue par bail
emphytéotique les terrains lui appartenant à Pierre Largentier, teinturier de
draps faisant partie de la noblesse marchande, et à sa femme Gilette Festuot.
Trois ans après, en 1473, Pierre Largentier et sa femme prennent également à
bail emphytéotique de l'abbaye de Notre-Dame des Prés un terrain avec un jardin
et une maison dont la façade donnait sur la rue du Gros-Raisin. La location de
ces biens passe en 1487 au fils du couple, Nicolas Largentier (II), également
teinturier de draps, et à sa femme Babelette (Élisabeth) Le Tartier.
Survient le grand incendie de Troyes en 1524, à la
suite de quoi les baux consentis par les deux abbayes sont convertis en une
vente à titre perpétuel. Nicolas Largentier (II) fait alors construire l'hôtel
en pierre au n° 9 de la rue Turenne.
En 1535 cet hôtel est appelé « Grand hôtel de
Clairvaux » et son propriétaire est Nicolas Largentiern, petit-fils du
précédent et époux de Simonette Maillet. Il prend vis-à-vis de l'abbaye de
Clairvaux l'engagement de parachever les travaux, « si parachevez ne sont ». Le
gros œuvre est vraisemblablement terminé l'année suivante, 1536.
Pendant son absence, la maison est pillée en 1586
par les corps de métiers ameutés contre les commissaires chargés de lever un
impôt sur les métiers ; mais après la fin des hostilités, le roi le dédommage
avec un don de 20 000 livres en assignations. Il devient seigneur de Vaucemin,
baron de Chapelaines, seigneur de Vassimont et Haussimont, de Vaurefroy, de
Lenharée en partie, de Vauchassis et Thennelières en partie, etc., vicomte de
Neufchâtel-sur-Aisne, seigneur de Ternon et de Léguillon. Il devient seul
adjudicataire des fermes de France et s'en enrichit considérablement.
Il achète en 1597 de Catherine de Clèves, duchesse
de Guise, la terre de Chapelaines à Vassimont dans la Marne, et y fait
construire un vaste château. A cette époque, la maison de la rue de Turenne
prend le nom de Chapelaines.
À la mort de Marie Le Mairat en 1628, l'hôtel passe
à l'un de leurs fils, Louis Largentier (1581-1639), qui dissipe toute sa
fortune dans des recherches d'alchimie - y compris de faire exploser le château
de Chapelaine.
Le roi Louis XIII, en chemin vers le Dauphiné pour y
secourir le duc Charles Ier de Mantoue (guerre de succession de Mantoue), y est
reçu le 23 janvier 1629 par Louis Largentier et sa femme Marguerite d'Aloigny.
Il y reste jusqu'au 26 janvier. Son choix de logis est un choix politique :
Louis Largentier est son bailli et le roi réaffirme ainsi la préséance de son
officier sur les autres corps de la ville.