jeudi 23 mai 2024

Rumilly - un petit village des bords de l'Hozain

 


Rumilly est un village situé entre Troyes et Bar-sur-Seine, à 3 km de la rive gauche du fleuve, traversé par la rivière Hozain, avec trois atouts majeurs : un antique manoir, une magnifique église du XVIème siècle et une forêt de plus de 2000 ha, domaniale dans sa plus grande partie. (voir blason de Rumilly )

Il y a bien longtemps, bien plus loin que de mémoire d’homme, plusieurs millions d’années avant notre ère, les eaux de la mer occupaient l’emplacement du village. Tout au fond de l’eau se sont accumulées des argiles brunâtres, grises ou bleues, souvent rougeâtres, parfois blanchâtres. Elles ne se retirèrent que pour laisser place à un fleuve d’environ 3 km de large, de Rumilly jusqu’à Chappes, véhiculant des sables, des graviers qui, eux aussi se déposèrent en couches, alternant avec les bancs de glaise ou s’amalgamant avec elle.                            

Les nombreux «trous» qui, en forêt, retiennent l’eau quand il pleut, rappellent qu’en ces endroits, nos ancêtres ont cherché la pierre pour construire leurs habitations. Dans l’argile, des milliers de minuscules coquillages, sortes de très petits mollusques, se sont agglomérés en une pierre dure, la lumachelle, bleue quand elle est fraîchement cassée mais qui brunit à l’air. Elle a servi, avec le bois, à la construction des maisons anciennes.                                               

Les murs du manoir des Tourelles et ceux de l’église Saint-Martin sont ainsi maçonnés de lumachelle. Le sous-sol du village date en grande partie de cette époque que les géologues appellent le néocomien, bas étage du crétacé qui, lui-même est la dernière période de l’ère secondaire, celle pendant laquelle vivaient ces huîtres énormes appelées exogyres.                

M. Dart a retrouvé la trace de nos premiers ancêtres, à la limite entre Rumilly et Jully, près de l’étang de la ferme Saint-Jacques. Il a recueilli quantité de pierres finement taillées que les spécialistes datent du chalcolithique : fers de lance, racloirs... qui sont déposés au musée de Troyes, ainsi que divers coups de poing et une massue percée d’un trou pour un manche. Qui étaient-ils, ceux-là de nos très anciens aïeux ? Quels pigments coloraient leur épiderme ? Leurs lèvres étaient-elles épaisses, leurs yeux en amande ? Comment vivaient-ils ?

Était-il parmi eux, celui qui a égaré non loin de la Place du Turot, une pierre polie, noire, et percée d’un trou, vraisemblablement une amulette ou bien la pièce d’un collier?

A la lisière de la forêt se sont groupées les huttes de nos ancêtres qui, avec le bois; disposaient ainsi de la possibilité de construire. Ils avaient aussi l’assurance de toujours pouvoir entretenir le feu qui permettait de lutter contre le froid et la peur. Sous les hautes forêts, ils pouvaient chasser et aussi mener paître porcs et chèvres. A l’orée du bois quelques champs étaient probablement ensemencés. On commençait à cuire l’argile. En témoigne la coupelle découverte à la jonction de la Voie aux Ânes et de la Route de Chaource.

Les Gaulois (ou Celtes) connaissaient les arbres, spécialement les chênes, sur lesquels croît le gui, la plante bénie, la plante salvatrice. Il existe encore, de nos jours, des chênes à gui en forêt de Rumilly. C’est l’époque où naît le christianisme. Au début du troisième siècle, saint Potentin, saint Savinien, saint Parre évangélisent notre région.                                                

De ces temps, Rumilly conserve le nom de son église. Saint Martin y est présent. En soldat romain sur son cheval : deux statues sur la façade ouest, et peint sur un vitrail du chœur, évêque de Tours, revêtu de ses habits sacerdotaux, à droite, au-dessus du retable.

Les Goncourt dans l'Aube

 


Les Goncourt à Rumilly-lés-Vaudes

A la fin du XVIIIe siècle, Antoine Huot acquiert la Papeterie, un petit domaine du village de Goncourt en Haute-Marne.

Son fils a deux enfants. Du mariage de l'un naissent deux garçons : Edmond et Jules. Le second, est l'époux de Virginie Henrys (de la Grange aux Dîmes-Rumilly).

Leur fille Augusta prend pour mari, en 1834 Léonidas Labille du manoir des Tourelles-Rumilly dit alors "des abbés de Molesme."

Voici quelques extraits tirés de leur Journal et de leur nouvelle, intitulée "l'ex maire de Rumilly", dans lesquels Edmond et Jules trouvent prétexte à se moquer d’un personnage aux mœurs très particulières, une occasion surtout de très joliment parler de ce joli village.

 Et tandis que Jean Colet échafaude derrière les peupliers,la tour blanche de son église, cinq petites tourelles élancent dans le ciel leurs pointes d'ardoise pour l'abri et l'habitation du seigneur abbé.

 9 juillet 1849. Hier, j'étais dans un château qui appartient à mon cousin, c'était le manoir des abbés de Molesme, cinq tourelles, des cheminées géantes, de charmants escaliers en escargot, des sculptures, des écussons tout rappelait cette époque que 89 a guillotinée. Et j'évoquais les  seigneurs, les dames, les pages, les valets, tout ce monde magnifique de soie, de velours, d'or, superposé sur un monde de manants.

 19 août 1878. Donc hier, il y a eu un dîner à Rumilly, visite de l'église et au castel, longue pérégrination en voiture.

Sur les chapiteaux des colonnes qui soutiennent le promenoir d'été, des enfants à cheval sur des cygnes font cabrer leurs montures et les Amours à ailes rognées qui jouent du psaltérion semblent chanter, en leurs musiques inattendues, le credo mythologique du XVIe siècle.

 A midi, le mardi gras, quand M. Jousseau passe en cabriolet d'osier devant le portail de l'église, saint Martin sous son dais festonné ajusté aux meneaux lève son petit bras de pierre et met sa main devant des yeux en auvent pour mieux voir. Le soleil, jusque là endormi dans son lit de nuages gris, s'éveille et met une mouche d'or au nez de la Vierge qui fait vis-à-vis à  l'ange de l'Annonciation.

Pour entendre une voix chanter la Seine, il faut remonter aux frères Goncourt (Edmond et Jules), qui la descendaient chaque été, jusqu’au havre (petit port) de Bar-sur-Seine.

Leur journal, férocement cancanier quand il s’agit des hommes, devient un hymne quand ils parlent de promenades en barque…

« A la Seine, on peut préférer les canaux ».

Canal d’Argentolles, canal des Marais, canal du Labourat ou canal abandonné de Saint-Etienne.

Un temps, il m’arrivait de traîner là aux premiers soleils, à suivre les anciens chemins de halage, à éviter les flaques d’averses, à méditer sur une enfance penchée sur le long trait noir du canal du Rhône au Rhin…

On ne dit jamais assez la puissance de mélancolie d’un canal.

On devrait prévenir le promeneur solitaire du danger qu’il court à les longuement fréquenter, l’avertir par de grands écriteaux rouges et or de leur degré de nuisance, comme on le fait sur les paquets de cigarettes et les bouteilles d’alcool :

« Canal interdit aux nostalgiques », « Neurasthéniques s’abstenir », « L’abus de ce canal peut nuire gravement à la santé », « Chemin déconseillé aux dépressifs », « Canal pour peintre du dimanche, seulement ».

Prévenu, le promeneur peut alors rester les fesses aux pierres des écluses mortes, les jambes ballant au-dessus de l’eau verte, à observer les tignasses des algues, les feuilles sournoises des nénuphars, la fragilité vibrionnante (qui vibrionne, qui bouge sans arrêt dans tous les sens) des libellules, et chercher dans l’immobilité glauque le jet de lumière d’une ablette et le fugace d’une perche soleil…

Un autre canal, neuf de ses flancs blancs, relie la Seine en un long tuyau ennuyeux au réservoir du lac de la Forêt d’Orient.

Mais c’est un canal vierge, sans poissons et sans noyés…

Il y a aussi l’immense poésie des mails.

Ce sont les promenades que suivent les bras de Seine. Ils font le tour de la partie basse de la ville et tissent un collier à leur reine.

Leur dessin, disent les dévots, forme la tête d’un bouchon de Champagne, les insolents y devinent davantage une tête phallique.

En contre bas, l’eau n’y est pas farouche. Elle passe, comme les touristes, parce qu’il faut bien passer quelque part.

Le baladin Charles Nodier aimait cette Seine qui s’effiloche dans ces vallons miniatures où, paraît-il, Charles le Chauve et Louis le Débonnaire aimaient à se baigner…».

Les frères Goncourt, Edmond de Goncourt et Jules de Goncourt, ces écrivains français du XIXe siècle, ont naturellement été classés dans « l'école naturaliste ». Ils aimaient beaucoup l’Aube, et chaque été, ils descendaient la Seine jusqu’au petit port de Bar-sur-Seine.


L'ex maire de Rumilly

 



NOUVELLES

DE

EDMOND ET JULES DE GONCOURT

 

 

QUELQUES

CRÉATURES

DE

CE TEMPS

 

 

NOUVELLE ÉDITION

 

 

PARIS

G. CHARPENTIER, ÉDITEUR

13, RUE DE GRENELLE-SAINT-GERMAIN, 13

 

 

1878

 

L'EX-MAIRE DE RUMILLY

C'était, après tout, des gens d'esprit essayant de faire l'hôtellerie de la vie bien fournie, montée, pourvue, garnie de toutes sortes de plaisances, charmes et agréments, dormant grasses nuitées, riches et argentés comme des mendiants qui reçoivent de tout le monde, écrémant le plaisir et la satisfaction du mariage pour laisser au prochain ses charges, ennuis, chagrins et déboires, se gagnant magnifiques, et bien-sonnants, et doux-flattants, revenus de leur ferme du ciel, ayant à portée de la main toutes bonnes et désirables choses. Les belles plaines, avec fraîches eaux, beaux prés valants, terres fertiles, salubres et délicieuses, étaient leurs douaires et leurs hoiries prédestinés. «O gens heureux! ô demy-dieux!»--leur disait l'autre, les voyant autour des dix-sept cent mille clochers de France, seigneurs de toutes les bonnes pâtures, beaux aspects de feuillade, et belles granges et basses-cours, et bois, et rivières, bien ameublés de tous gibiers, poissons, poulailles, bien vivant, mangeant, humant: «O demy-dieux! ô gens heureux! c'est paradiz en cette vie et en l'aultre pareillement avoir!»

Habiles gens que ces épicuriens du maigre et du jeûne! Des étangs à ne pas les compter, où le filet n'avait qu'à se laisser tomber pour ramasser, à se rompre, brochets, carpes, brochetons, anguilles! Viviers de pierres de taille pour garder le tout bien vif et en santé! Allées sablées pour l'abbé, de l'abbaye jusqu'à la belle vigne, folie et joie et réconfort des soirées d'hiver, attendant les buveurs dominicaux, couchés sur les coteaux de pierre à fusil! Domiciles d'élection, de paix, de pitancerie, et de bien-être, et de belle vue champêtre, avec le gai soleil pour éveilleur et sonneur de matines aux fenêtres joyeuses, avec le gai soleil pour compagnon mûrisseur des espaliers à six étages! Vergers frutescents, tout rougeauds de fruits; plantureux terrages, chauds nourriciers des grainées opulentes; forêts qui font l'horizon vert, et le garde-manger encombré; rivières échappées à travers les peupliers, pour le babil des battoirs, et le tic-tac du moulin; chènevières mettant fine toile au corps; prairies d'émeraude, donnant bon beurre, bon fromage, et bonne viande: toutes gaudisseries de la gueule et des yeux, cherchées et trouvées en ces châteaux bénis!--«Bien de moines!» à tous charmants coins de nature; «Bien de moines!» à tous riches terroirs, c'est le refrain populaire; aux prés de feutre: «Bien de moines!» aux guérets serrés: «Bien de moines!» aux étangs grands comme des lacs: «Bien de moines!» aux saulées bruissantes: «Bien de moines!» «Bien de moines!» dira toujours le plus vieux du village. «Bien de moines!» ont dit les acheteurs des biens nationaux. «Bien de moines!» se disent les fermiers de leurs héritiers.

Quel rêve entrevu, la première fois qu'ils entrèrent au pays de Rumilly! C'était splendide jour de printemps, ou clair temps d'automne. Quelle ambition éveillée par toutes les promesses de la gente contrée! Et comme, leur quête finie, les moines la quittent pensifs, tout songeant à un retour. Donations à insérer au cartulaire, indulgences à donner aux peccadilles de ces temps héroïques et brutaux, ils ruminent la clef qui leur ouvrira le petit Éden. Et dès 1104, ce sont moines de Molesmes entrant à Rumilly de par Hugues de Champagne. Hugues a retiré de son doigt son anneau. Il a juré sur les Évangiles, devant Pascal de Rome, Rithal, évêque d'Albe, légat du pape, Milon de Bar, l'acte de donation du village de Rumilly; et vite de Molesmes, pays raboteux, abrupte, tempétueux, pays de grand vent et de montées où les mules se déferrent,--ils s'installent en cette patrie nouvelle à pentes molles, à promenades point essoufflantes aux bedaines béates. L'air y ventile, frais et doux, et la forêt pare la bise. Benoîtement, les bonnes gens s'arrondissent à la sourdine d'un arpent, de deux, de cinquante, envahissant, de ci, de là, tout le pays. Gauthier de Fresnoy leur accorde la moitié de ses dîmes. Un autre jour, c'est le village de Saint-Parres qui leur est donné; un autre, c'est le Bouchot; un autre, c'est Nice; un autre encore, Villeneuve-sur-Terrien; un autre, le Long-du-Bois; un autre, c'est le château de la Motte; un autre, c'est une verrerie à souffler larges flacons pour enserrer la purée septembrale, et verres généreux pour porter les santés du souper. Pour des chemises, c'est Adèle de Rumilly qui leur accorde la dîme sur le chanvre. Ce ne sont, en ce temporel de Carabas, que milliers de boisseaux de blé et d'avoine; les arpents de terre, de bois, de prés ne s'y comptent plus que par centaines. Sous le poids de la dix-septième gerbe, du vingt et unième du chanvre et de la navette, crèvent les granges. Vers les basses-cours trop étroites, on amène des quatre points cardinaux du lieu, en longues processions, oies, chapons, gélines. Trois moulins, pour l'abbaye, tournent sur l'Hozain. Et pendant que Jean Collet échaffaude entre les peupliers la tour blanche de son église, cinq petites tourelles élancent dans le ciel leurs pointes d'ardoises pour l'abri et l'habitation d'honneur du seigneur abbé. Et de tant de jouissances charnelles, conquises en si peu de temps, le cantique de reconnaissance se lit aux murs tout égayés de paganisme. Sous les figures emmédaillonnées dans les grandes cheminées, c'est la devise: Jupiter Custos. Sur les chapiteaux des colonnes qui soutiennent le promenoir d'été, des enfants à cheval sur des cygnes font cabrer leurs montures, et les Amours, à ailes rognées, qui jouent du psalterion, semblent chanter, en leurs musiques inentendues, le Credo mythologique du XVIe siècle; même au-dessus de la porte, passage particulier de l'abbé, le tailleur de pierre jette, dans les lambrequins, la tête échevelée d'Ariane.

Les Status Synodaux de Jean Colet

 




Il s’agit d’un ouvrage important, daté de 1530, édité chez Jean Lecoq sous l’autorité de l’évêque de Troyes. C’est une œuvre de Jean Colet, juriste au tribunal épiscopal, natif et curé de Rumilly-les-Vaudes (de 1465 à 1479), qui rassemble les statuts promulgués par Jean Bracque (1370-1375), Jean Léguisé (1426-1450) et Odard Hennequin (15258-1544), évêques de Troyes.

Le texte est imprimé en lettres gothiques, d’une qualité parfaite. La plupart des 300 pages de ce livre est rédigé en latin. Une quinzaine cependant sont écrites en français : une innovation à porter à l’actif de Jean Colet qui tenait à ce que les curés de nos campagnes puissent, d’une meilleure et plus compréhensible façon, retransmettre à leurs ouailles, les instructions et recommandations de leur évêque.

Ce sont ces 15 pages que je vais présenter en donnant des extraits. « C’est un peu à l’intention des prêtres ignorants et des curés paresseux que Jean Colet a rédigé ces pages en français », pour les inciter à respecter les instructions et recommandations promulguées par les évêques, pour les aider à les faire connaître et respecter dans leur paroisse : « Voilà ce qu’il faut savoir, voilà comment le dire ». En quelque sorte, Jean Colet a rédigé, au XVIe siècle, un catéchisme destiné aux recteurs de nos campagnes.

La première préoccupation de l’évêque, transcrite par le chanoine Colet, est le salut des âmes des fidèles  qui sont sous sa garde. C’est à cette fin qu’ont été promulgués les statuts synodaux.

Comment mener sa vie pour obtenir le paradis ? « En respectant les dix commandements de la loi et de la Sainte Eglise, en ayant recours aux sacrements, en pratiquant la prière », toutes règles que nous découvrons, dites par Jean Colet il y a 500 ans !

Ces statuts de 1530 sont suivis d’une longue partie en français, intitulée : « S’ensuit la manière comment les curés et recteurs des églises paroissiales doivent publier et déclarer à leurs paroissiens les susdits préceptes ». C’est donc une adaptation faite « à l’intention du pauvre peuple chrétien », des statuts qui les concernent. Elle est mise entre les mains des curés qui ne sauraient le faire eux-mêmes.

Par exemple, le curé ne se contentera pas de rappeler aux paroissiens leur devoir pascal, il doit aussi les exhorter à se confesser et à communier pour les fêtes de Pentecôte, Assomption  de Notre-Dame, Toussaint et Noël. Il recommandera de payer les dîmes, mais aussi d’accompagner le Corpus Christi quand il est porté aux malades. A la messe, les fidèles devront se tenir agenouillés aussi longtemps que le précieux Corps de N.S. ou son Sang se trouvent sur l’autel. Pour la dignité du sacrement de mariage, défense sous lourdes peines de faire le charivari. De même, les fidèles  doivent respecter le caractère sacré du cimetière, sans y danser, jouer ou  faire le marché. De lourdes peines sont ordonnées contre les blasphémateurs…

Un long passage est consacré aux excommuniés qui, si l’on en croit la diversité des cas d’excommunication, devaient être fort nombreux.

La Rocatelle devenu lieu de recueillement

 


Située au sud-est de Rumilly-lès-Vaudes, dans la direction de Jully-sur-Sarce, sur la route de Fouchères à Vougrey, cette vielle maison de maître est pleine d’histoire de ses anciens occupants. La plus ancienne mention les concernant nous reporte à la fin du XVIe siècle, et l’on découvre un Jean Petitpied, seigneur, entre autres, de la Rocatelle. Sa fille Hélène épouse Jacques le Boucherat, qui devient ainsi nouveau seigneur de ce domaine en 1601. Autorisé par le roi, en 1609, à élever sur ses terres, des « fourches patibulaires », il meurt en 1625.

 Son fils Jacques II lui succède, l’année suivante. Membre de l’élection de Troyes, il devient ensuite « maître d’hôtel du roi » et cède bientôt la place à son fils Charles qui naquit de Gabrielle Rémond, son épouse. Auparavant, il avait donné, en échange d’un arpent de pré de l’Eglise, 5 quartiers de pré, lieudit le Poirier au Héron, tenant d’un bout à la rivière d’Hozain et d’autre sur les champs de Molesme, avant de léguer, en 1650, tous ses biens à ses enfants, ce qui lui permettra d’évoquer son âge, 75 ans en 1674, et le fait de n’avoir plus rien qui lui appartienne, pour ne pas répondre à la convocation qui lui sera faite de partir au service du roi. Il est vrai que c’était l’époque de la Fronde, et que Jacques et Charles Boucherat, père et fils, se targuaient de n’être pas d’accord avec le monarque. Ils avaient suivi en 1649, au Palais royal à Troyes, cette assemblée générale préparatoire aux Etats-Généraux, qui avait voulu se prendre plus au sérieux qu’il n’aurait fallu. Un auteur anonyme en a raillé les participants :

 « Les seigneurs de la Rocatelle

 Couverts de clinquants et de dentelles,

 Leurs panaches sur leurs chapeaux

Parurent presque les plus beaux ».

 

Charles avait donc hérité du fief quand il épousa, en 1650, Anne de Chastellux, baronne d’Avignot. C’est lui qui fit, sinon reconstruire la maison, « autrefois toute simple, avec grange et pourpris (enceinte, enclos), 250 arpents de terre, pré et bois », mais qui la fit transformer, puisqu’en 1718, c’était un château qu’il habitait. Charles Boucherat eut à répondre plusieurs fois à des convocations adressées par le Bailli de Troyes. L’une d’entre elles ordonne « aux gentilshommes et autres sujets au ban et arrière ban de Sa majesté ci après nommés… de se trouver au mardi 24 du présent mois (en 1691), 4 heures après midi, au devant du palais royal de Troyes, montés et équipés, pour l’exécution des ordres du Roi... ». Il fut maître d’hôtel du roi, cornette, puis capitaine. En 1693, un an avant sa mort, il occupait la place de « guidon », c’est-à-dire la seconde place après l’officier d’une compagnie de cavalerie. Il meurt sans laisser de descendance. Son épouse le suivit jusqu’au 1er août 1713. Elle était âgée de 75 ans, et fut inhumée « proche son banc, dans le chœur de l’église de Rumilly ».

Blason de Rumilly

 


 Elles représentent, d'une part le manoir des Tourelles avec, en chef, les armes de Jean Colet, le curé bâtisseur de l'église Saint-Martin :

D'or au chevron d'azur chargé en chef d'une étoile aussi d'or et accompagné de trois œillets de gueules tigés et feuillés de sinople.

 

Pierre Pion qui, vers 1530, a donné au manoir sa touche renaissance, portait :

D'azur à la croix patriarcale d'or accompagnée à dextre d'une étoile d'or.



 Hors les armoiries de ces deux personnages importants pour l'histoire monumentale de Rumilly, le manoir et l'église en renferment à profusion.

Pour les ecclésiastiques.

Au manoir, celles, d'Antoine II de Vienne, abbé de Molesme.

De gueules à l'aigle éployée d'or, membrée d'azur.

Antoine II

Chronologie de Rumilly

 


Vème siècle. La carruca, charrue à roues, mentionnée pour la première fois. A Dauzat La vie rurale en France.

888 - Les reliques de saint Loup sont transportées de Troyes jusqu’à Chappes pour y être à l’abri de l’invasion des Normands.

973 – Les premiers « Rumilly » en France.

1000 - Famine. On mange des racines, des herbes. Dauzat.

1075  - 4ème dimanche de l’Avent.  St Robert s’installe à Molesme.  

1093-1125 - Hugues prend en charge le comté de Champagne

 XIIème siècle. Apparition des moulins à vent. On commence à cultiver la vigne

 1101 - Hugues et Constance, sa femme, apportent à l’église de Molesme, l’un la moitié de son domaine à Rumilly et l’autre, quatre bœufs.

1104 - Le 2 avril, le comte abandonne cette fois toute sa terre de Rumilly. 

1108 - De retour de Terre Sainte, il confirme l’ensemble de ses dons avant de rejoindre l’ordre des Templiers.

1140 - On note Rumeli pour nom du village, au lieu de Rumiliacum .

1147 – Ermajarde de Chaussepierre déclare tenir son fief des Templiers.

1150 vers… - Saint Bernard passe à,Fouchères et à Vaudes où il opère miracles.

1152 - 1180 - Henri le Libéral, comte de Champagne.

1160 - Le comte accorde … tous les droits d’usage dans ses bois sauf le droit de vente.

1164 - (1170) - Barthélemy du Plancy dit Haîce, évêque de Troyes, à qui, cette année-là, le couvent de Molesme engage sa « grange » de Rumilly

1196 – Les Templiers prennent pied à Serre-lés-Montceaux.

Cour des Grands Jours

 

*La Cour des Grands-Jours



 La Cour des Grands-Jours, la plus haute des juridictions, est née à Troyes.

Après la, réunion de notre province à la couronne de France, elle est maintenue par Philippe-le-Bel jusqu’à Charles VI, soit par 8 rois successifs, comme une institution spéciale à notre province. Elle se continue ainsi pendant tout le XIV° siècle. Les Grands-Jours de Troyes sont ensuite reportés au sein du Parlement siégeant à Paris, et ainsi s’éteint la primitive institution des Grands-Jours, après sa session de 1409.

 Les Grands-Jours de Troyes sont une institution permanente, au même titre que le Parlement de Paris. 

  Cette Cour existe au moins depuis 1212, quand la comtesse Blanche, assistée de 34 barons décide du mode de partage, entre filles, des successions nobles, et pose des règles relatives au duel judiciaire.  

Jeanne, l’héritière de Champagne, épouse en 1284, le petit fils de Saint-Louis qui, l’année suivante, monte sur le trône de France sous le nom de Philippe-le-Bel.

Les institutions de Champagne sont maintenues et conservées. Et on trouve des comptes-rendus des sessions des Grands-Jours tenus à Troyes de 1278 à 1409.

Pour recevoir les magistrats de Paris, la couronne dispose de l'ancien château des comtes de Champagne, dont la distribution intérieure est à adapter, notamment pour la salle des plaidoyers et les prisons. Cette construction du XII° siècle reçoit des aménagements. L'échevinage rend le palais plus confortable, il fournit la tapisserie destinée à parer les chambres et décide de livrer un tapis pour les parquets où se font les plaidoyers. Un tableau avec le Christ occupe le milieu du mur du fond de la salle des audiences.

Château de la Motte

 




En 1518, on parle « d’une motte fermée de fossés pleins d’eau, en laquelle maison, grange, colombier et autres édifices, séant à Rumilly, tenant d’une part à la rivière d’Oze, d’autre part aux contours de plusieurs terres ».

Ce sont Jehan de Gand et Bernarde Le Bégat qui sont seigneurs de cette motte de Rumilly, en même temps que de Villemorien, et ce sont eux que l’on voit, représentés en un vitrail de l’église qu’ils ont offert en 1527. On les voit agenouillés, accompagnés de leur fils et de leurs six filles.

En 1532, Jehan de Gand est maître forestier, garde des Eaux et Forêts de Bar-sur-Seine. Il décède en 1543. Son fils Jehan porte lui aussi le titre de seigneur de la Motte de Rumilly et doit, de ce fait, hommage au marquis de Praslin. Il est gentilhomme de la vènerie du roi.

Entre 1586 et 1618, c’est Etienne fils de Jehan, qui demeure au château. Il s’y marie avec Claude de Richebourg, fille de Pierre de Richebourg, seigneur de Pouan et de Courcelles, maître d’hôtel ordinaire du Roi, et d’Anne de Balavoyne. Leur contrat date du 8 juillet 1594. Mais les affaires du ménage ne prospèrent guère, et Etienne de G       and est obligé d’emprunter 2.400 livres le 16 juin 1620, ce qui l’oblige à consentir  hypothèque, et par conséquent, inventaire de ses biens, qui se fait sur sa déclaration, le 30 octobre 1627. Pour la défense de sa maison forte, Etienne de Gand dispose d’une « arquebuse à mèche, de 3 mousquets, d’une arquebuse à roue, d’une petite carabine et de 2 pistolets à roue ».

Il sort en carrosse, et possède 8 chevaux. Le domaine abrite aussi : « 5 vaches mères, 2 génisses de l’âge de 2 ans, 4 bouvillons et 1 veau de l’année, 4 cochons, 37 brebis mères et 3 agneaux ».

Pierre, fils d’Etienne, hérite de son père, en particulier du château et du titre de seigneur de la Motte-Rumilly. Ses 2 sœurs se partagent avec lui et le domaine et les charges dont il est grevé. Charlotte qui épouse Antoine d’Arfillères seigneur de la Cour Saint Fal et qui vendra par la suite à Louis Piot seigneur de Beauvais, et Anne dont le mari Jehan de Regnard est capitaine des bois et forêts de la baronnie de Maraye.

Le fils Pierre, Charles et Georges de Regnard héritent de leur oncle et de leur père tous les ennuis attachés à la succession. Malgré bien des artifices de procédure, malgré la séparation de biens entre Pierre et sa femme Marie Rousselet, malgré la vente par Pierre et Charles à Georges, de leurs droits sur la maison seigneuriale de la Motte-Rumilly, le 24 octobre 1668, ce dernier ne peut éviter la saisie.

Comme tous les gentilshommes, il est tenu de répondre à la levée du ban et de l’arrière-ban, mandement public adressé de par le roi aux baillis royaux, qui est publié et crié par un sergent pour convoquer les vassaux et arrière-vassaux de la couronne qui doivent ensuite se rendre en armes à l’armée du roi. « Pierre de Regnard, écuyer, sieur des Angles, demeurant à Maraye en personne se déclare aux ordres du Roi. Georges de Regnard, sieur de la Motte remontre qu’il ne peut servir, ses chevaux ayant été saisis et vendus et son fief étant en bail judiciaire et requiert surséance et provision de 1.000 livres sur son bien pour fournir son équipage suivant sa qualité ». C’est la ruine définitive de la famille Regnard, dont les biens à Rumilly, passent aux mains de créanciers, dont le plus important est Michel Noël de Buchères, en 1688.

Pâques à Troyes autrefois

 



Le 2ème Concile, réuni à Troyes après 429, composé de 24 évêques, décide que les Juifs ne sortiraient pas de leurs maisons, depuis le Jeudi-Saint jusqu’au lendemain de Pâques et n’auraient pendant ce temps, aucune communication avec les chrétiens.

Charles II-le-Chauve se rend à Troyes pour y passer les fêtes de Pâques en 840. Le Samedi-Saint, il se passe un fait qui est considéré comme un heureux présage. Le roi arrive à Troyes sans bagages, et n’a avec lui que les vêtements qu’il porte. Au moment où il sort du bain, on lui apporte tous ses vêtements, sa couronne et autres signes royaux, dont il se pare pendant la célébration des fêtes de Pâques. L’arrivée des bagages royaux, protégée par un petit nombre d’hommes, qui avaient couru de grands dangers, en revenant d’Aquitaine, ranima le courage du roi. qui met en fuite l’armée de Lothaire. Louis de Bavière vient pour conférer avec lui.

La ville et le bailliage de Troyes avaient au XIVe siècle des artisans qualifiés royaux, tels que charpentiers, maçons… Comme les officiers du Roi, ils recevaient leurs robes d’été à Pâques.

En 1374, la Cour des Grands* Jours édicte dans ses statuts qu’aucune brebis ne peut être tuée depuis Pâques jusqu’à l’Ascension.

Le chapitre de Saint-Pierre, depuis un temps immémorial se rend en l’église de l’abbaye, le mardi de Pâques.

L’ouvrage de " limes " est interdit de la Saint-Remy jusqu’à Pâques, " après 8 h du soir, sonnées à l’horloge commune ", et de Pâques à la Saint-Remy", après l’heure de Complies, sonnée à Saint-Urbain, et le matin avant 4 heures.

Une bulle de Paul V, de 1452, porte rémission pleine et entière de leurs péchés à ceux qui visiteront dévotement l’église de Saint-Pierre, le jour de Pâques.

En 1464, les barbiers ne peuvent " saigner ni peigner " le jour de Pâques.

En 1482, les échevins sont élus chaque année, le mardi ou le mercredi de Pâques, par les conseillers de ville et 64 notables.

Le jeu de la Pelote, pratiqué le jour de Pâques dans un grand nombre d’églises est supprimé en 1506 dans la collégiale Saint-Etienne (en 1564 à Saint-Pierre). Le jour de Pâques " après None ", le chapitre allait chercher l’évêque processionnellement pour chanter les Vêpres. Le cortège se rendait dans la salle capitulaire. Le doyen apportait une balle et une toupie « avec une tiare aux armes de l’évêque ». Le cloîtrier plaçait la toupie sur une bancelle et 3 fois l’évêque lançait la balle sur la toupie. Cette balle passait ensuite aux assistants qui, chacun 3 fois, jetaient la pelote sur la toupie. Le jeu fini, l’évêque offrait du vin rouge, du vin blanc, des oublies et des pommes. Le cloîtrier présentait le verre au doyen, buvait après lui, et le verre lui appartenait.

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