jeudi 23 mai 2024

Rumilly - un petit village des bords de l'Hozain

 


Rumilly est un village situé entre Troyes et Bar-sur-Seine, à 3 km de la rive gauche du fleuve, traversé par la rivière Hozain, avec trois atouts majeurs : un antique manoir, une magnifique église du XVIème siècle et une forêt de plus de 2000 ha, domaniale dans sa plus grande partie. (voir blason de Rumilly )

Il y a bien longtemps, bien plus loin que de mémoire d’homme, plusieurs millions d’années avant notre ère, les eaux de la mer occupaient l’emplacement du village. Tout au fond de l’eau se sont accumulées des argiles brunâtres, grises ou bleues, souvent rougeâtres, parfois blanchâtres. Elles ne se retirèrent que pour laisser place à un fleuve d’environ 3 km de large, de Rumilly jusqu’à Chappes, véhiculant des sables, des graviers qui, eux aussi se déposèrent en couches, alternant avec les bancs de glaise ou s’amalgamant avec elle.                            

Les nombreux «trous» qui, en forêt, retiennent l’eau quand il pleut, rappellent qu’en ces endroits, nos ancêtres ont cherché la pierre pour construire leurs habitations. Dans l’argile, des milliers de minuscules coquillages, sortes de très petits mollusques, se sont agglomérés en une pierre dure, la lumachelle, bleue quand elle est fraîchement cassée mais qui brunit à l’air. Elle a servi, avec le bois, à la construction des maisons anciennes.                                               

Les murs du manoir des Tourelles et ceux de l’église Saint-Martin sont ainsi maçonnés de lumachelle. Le sous-sol du village date en grande partie de cette époque que les géologues appellent le néocomien, bas étage du crétacé qui, lui-même est la dernière période de l’ère secondaire, celle pendant laquelle vivaient ces huîtres énormes appelées exogyres.                

M. Dart a retrouvé la trace de nos premiers ancêtres, à la limite entre Rumilly et Jully, près de l’étang de la ferme Saint-Jacques. Il a recueilli quantité de pierres finement taillées que les spécialistes datent du chalcolithique : fers de lance, racloirs... qui sont déposés au musée de Troyes, ainsi que divers coups de poing et une massue percée d’un trou pour un manche. Qui étaient-ils, ceux-là de nos très anciens aïeux ? Quels pigments coloraient leur épiderme ? Leurs lèvres étaient-elles épaisses, leurs yeux en amande ? Comment vivaient-ils ?

Était-il parmi eux, celui qui a égaré non loin de la Place du Turot, une pierre polie, noire, et percée d’un trou, vraisemblablement une amulette ou bien la pièce d’un collier?

A la lisière de la forêt se sont groupées les huttes de nos ancêtres qui, avec le bois; disposaient ainsi de la possibilité de construire. Ils avaient aussi l’assurance de toujours pouvoir entretenir le feu qui permettait de lutter contre le froid et la peur. Sous les hautes forêts, ils pouvaient chasser et aussi mener paître porcs et chèvres. A l’orée du bois quelques champs étaient probablement ensemencés. On commençait à cuire l’argile. En témoigne la coupelle découverte à la jonction de la Voie aux Ânes et de la Route de Chaource.

Les Gaulois (ou Celtes) connaissaient les arbres, spécialement les chênes, sur lesquels croît le gui, la plante bénie, la plante salvatrice. Il existe encore, de nos jours, des chênes à gui en forêt de Rumilly. C’est l’époque où naît le christianisme. Au début du troisième siècle, saint Potentin, saint Savinien, saint Parre évangélisent notre région.                                                

De ces temps, Rumilly conserve le nom de son église. Saint Martin y est présent. En soldat romain sur son cheval : deux statues sur la façade ouest, et peint sur un vitrail du chœur, évêque de Tours, revêtu de ses habits sacerdotaux, à droite, au-dessus du retable.

Les Goncourt dans l'Aube

 


Les Goncourt à Rumilly-lés-Vaudes

A la fin du XVIIIe siècle, Antoine Huot acquiert la Papeterie, un petit domaine du village de Goncourt en Haute-Marne.

Son fils a deux enfants. Du mariage de l'un naissent deux garçons : Edmond et Jules. Le second, est l'époux de Virginie Henrys (de la Grange aux Dîmes-Rumilly).

Leur fille Augusta prend pour mari, en 1834 Léonidas Labille du manoir des Tourelles-Rumilly dit alors "des abbés de Molesme."

Voici quelques extraits tirés de leur Journal et de leur nouvelle, intitulée "l'ex maire de Rumilly", dans lesquels Edmond et Jules trouvent prétexte à se moquer d’un personnage aux mœurs très particulières, une occasion surtout de très joliment parler de ce joli village.

 Et tandis que Jean Colet échafaude derrière les peupliers,la tour blanche de son église, cinq petites tourelles élancent dans le ciel leurs pointes d'ardoise pour l'abri et l'habitation du seigneur abbé.

 9 juillet 1849. Hier, j'étais dans un château qui appartient à mon cousin, c'était le manoir des abbés de Molesme, cinq tourelles, des cheminées géantes, de charmants escaliers en escargot, des sculptures, des écussons tout rappelait cette époque que 89 a guillotinée. Et j'évoquais les  seigneurs, les dames, les pages, les valets, tout ce monde magnifique de soie, de velours, d'or, superposé sur un monde de manants.

 19 août 1878. Donc hier, il y a eu un dîner à Rumilly, visite de l'église et au castel, longue pérégrination en voiture.

Sur les chapiteaux des colonnes qui soutiennent le promenoir d'été, des enfants à cheval sur des cygnes font cabrer leurs montures et les Amours à ailes rognées qui jouent du psaltérion semblent chanter, en leurs musiques inattendues, le credo mythologique du XVIe siècle.

 A midi, le mardi gras, quand M. Jousseau passe en cabriolet d'osier devant le portail de l'église, saint Martin sous son dais festonné ajusté aux meneaux lève son petit bras de pierre et met sa main devant des yeux en auvent pour mieux voir. Le soleil, jusque là endormi dans son lit de nuages gris, s'éveille et met une mouche d'or au nez de la Vierge qui fait vis-à-vis à  l'ange de l'Annonciation.

Pour entendre une voix chanter la Seine, il faut remonter aux frères Goncourt (Edmond et Jules), qui la descendaient chaque été, jusqu’au havre (petit port) de Bar-sur-Seine.

Leur journal, férocement cancanier quand il s’agit des hommes, devient un hymne quand ils parlent de promenades en barque…

« A la Seine, on peut préférer les canaux ».

Canal d’Argentolles, canal des Marais, canal du Labourat ou canal abandonné de Saint-Etienne.

Un temps, il m’arrivait de traîner là aux premiers soleils, à suivre les anciens chemins de halage, à éviter les flaques d’averses, à méditer sur une enfance penchée sur le long trait noir du canal du Rhône au Rhin…

On ne dit jamais assez la puissance de mélancolie d’un canal.

On devrait prévenir le promeneur solitaire du danger qu’il court à les longuement fréquenter, l’avertir par de grands écriteaux rouges et or de leur degré de nuisance, comme on le fait sur les paquets de cigarettes et les bouteilles d’alcool :

« Canal interdit aux nostalgiques », « Neurasthéniques s’abstenir », « L’abus de ce canal peut nuire gravement à la santé », « Chemin déconseillé aux dépressifs », « Canal pour peintre du dimanche, seulement ».

Prévenu, le promeneur peut alors rester les fesses aux pierres des écluses mortes, les jambes ballant au-dessus de l’eau verte, à observer les tignasses des algues, les feuilles sournoises des nénuphars, la fragilité vibrionnante (qui vibrionne, qui bouge sans arrêt dans tous les sens) des libellules, et chercher dans l’immobilité glauque le jet de lumière d’une ablette et le fugace d’une perche soleil…

Un autre canal, neuf de ses flancs blancs, relie la Seine en un long tuyau ennuyeux au réservoir du lac de la Forêt d’Orient.

Mais c’est un canal vierge, sans poissons et sans noyés…

Il y a aussi l’immense poésie des mails.

Ce sont les promenades que suivent les bras de Seine. Ils font le tour de la partie basse de la ville et tissent un collier à leur reine.

Leur dessin, disent les dévots, forme la tête d’un bouchon de Champagne, les insolents y devinent davantage une tête phallique.

En contre bas, l’eau n’y est pas farouche. Elle passe, comme les touristes, parce qu’il faut bien passer quelque part.

Le baladin Charles Nodier aimait cette Seine qui s’effiloche dans ces vallons miniatures où, paraît-il, Charles le Chauve et Louis le Débonnaire aimaient à se baigner…».

Les frères Goncourt, Edmond de Goncourt et Jules de Goncourt, ces écrivains français du XIXe siècle, ont naturellement été classés dans « l'école naturaliste ». Ils aimaient beaucoup l’Aube, et chaque été, ils descendaient la Seine jusqu’au petit port de Bar-sur-Seine.


L'ex maire de Rumilly

 



NOUVELLES

DE

EDMOND ET JULES DE GONCOURT

 

 

QUELQUES

CRÉATURES

DE

CE TEMPS

 

 

NOUVELLE ÉDITION

 

 

PARIS

G. CHARPENTIER, ÉDITEUR

13, RUE DE GRENELLE-SAINT-GERMAIN, 13

 

 

1878

 

L'EX-MAIRE DE RUMILLY

C'était, après tout, des gens d'esprit essayant de faire l'hôtellerie de la vie bien fournie, montée, pourvue, garnie de toutes sortes de plaisances, charmes et agréments, dormant grasses nuitées, riches et argentés comme des mendiants qui reçoivent de tout le monde, écrémant le plaisir et la satisfaction du mariage pour laisser au prochain ses charges, ennuis, chagrins et déboires, se gagnant magnifiques, et bien-sonnants, et doux-flattants, revenus de leur ferme du ciel, ayant à portée de la main toutes bonnes et désirables choses. Les belles plaines, avec fraîches eaux, beaux prés valants, terres fertiles, salubres et délicieuses, étaient leurs douaires et leurs hoiries prédestinés. «O gens heureux! ô demy-dieux!»--leur disait l'autre, les voyant autour des dix-sept cent mille clochers de France, seigneurs de toutes les bonnes pâtures, beaux aspects de feuillade, et belles granges et basses-cours, et bois, et rivières, bien ameublés de tous gibiers, poissons, poulailles, bien vivant, mangeant, humant: «O demy-dieux! ô gens heureux! c'est paradiz en cette vie et en l'aultre pareillement avoir!»

Habiles gens que ces épicuriens du maigre et du jeûne! Des étangs à ne pas les compter, où le filet n'avait qu'à se laisser tomber pour ramasser, à se rompre, brochets, carpes, brochetons, anguilles! Viviers de pierres de taille pour garder le tout bien vif et en santé! Allées sablées pour l'abbé, de l'abbaye jusqu'à la belle vigne, folie et joie et réconfort des soirées d'hiver, attendant les buveurs dominicaux, couchés sur les coteaux de pierre à fusil! Domiciles d'élection, de paix, de pitancerie, et de bien-être, et de belle vue champêtre, avec le gai soleil pour éveilleur et sonneur de matines aux fenêtres joyeuses, avec le gai soleil pour compagnon mûrisseur des espaliers à six étages! Vergers frutescents, tout rougeauds de fruits; plantureux terrages, chauds nourriciers des grainées opulentes; forêts qui font l'horizon vert, et le garde-manger encombré; rivières échappées à travers les peupliers, pour le babil des battoirs, et le tic-tac du moulin; chènevières mettant fine toile au corps; prairies d'émeraude, donnant bon beurre, bon fromage, et bonne viande: toutes gaudisseries de la gueule et des yeux, cherchées et trouvées en ces châteaux bénis!--«Bien de moines!» à tous charmants coins de nature; «Bien de moines!» à tous riches terroirs, c'est le refrain populaire; aux prés de feutre: «Bien de moines!» aux guérets serrés: «Bien de moines!» aux étangs grands comme des lacs: «Bien de moines!» aux saulées bruissantes: «Bien de moines!» «Bien de moines!» dira toujours le plus vieux du village. «Bien de moines!» ont dit les acheteurs des biens nationaux. «Bien de moines!» se disent les fermiers de leurs héritiers.

Quel rêve entrevu, la première fois qu'ils entrèrent au pays de Rumilly! C'était splendide jour de printemps, ou clair temps d'automne. Quelle ambition éveillée par toutes les promesses de la gente contrée! Et comme, leur quête finie, les moines la quittent pensifs, tout songeant à un retour. Donations à insérer au cartulaire, indulgences à donner aux peccadilles de ces temps héroïques et brutaux, ils ruminent la clef qui leur ouvrira le petit Éden. Et dès 1104, ce sont moines de Molesmes entrant à Rumilly de par Hugues de Champagne. Hugues a retiré de son doigt son anneau. Il a juré sur les Évangiles, devant Pascal de Rome, Rithal, évêque d'Albe, légat du pape, Milon de Bar, l'acte de donation du village de Rumilly; et vite de Molesmes, pays raboteux, abrupte, tempétueux, pays de grand vent et de montées où les mules se déferrent,--ils s'installent en cette patrie nouvelle à pentes molles, à promenades point essoufflantes aux bedaines béates. L'air y ventile, frais et doux, et la forêt pare la bise. Benoîtement, les bonnes gens s'arrondissent à la sourdine d'un arpent, de deux, de cinquante, envahissant, de ci, de là, tout le pays. Gauthier de Fresnoy leur accorde la moitié de ses dîmes. Un autre jour, c'est le village de Saint-Parres qui leur est donné; un autre, c'est le Bouchot; un autre, c'est Nice; un autre encore, Villeneuve-sur-Terrien; un autre, le Long-du-Bois; un autre, c'est le château de la Motte; un autre, c'est une verrerie à souffler larges flacons pour enserrer la purée septembrale, et verres généreux pour porter les santés du souper. Pour des chemises, c'est Adèle de Rumilly qui leur accorde la dîme sur le chanvre. Ce ne sont, en ce temporel de Carabas, que milliers de boisseaux de blé et d'avoine; les arpents de terre, de bois, de prés ne s'y comptent plus que par centaines. Sous le poids de la dix-septième gerbe, du vingt et unième du chanvre et de la navette, crèvent les granges. Vers les basses-cours trop étroites, on amène des quatre points cardinaux du lieu, en longues processions, oies, chapons, gélines. Trois moulins, pour l'abbaye, tournent sur l'Hozain. Et pendant que Jean Collet échaffaude entre les peupliers la tour blanche de son église, cinq petites tourelles élancent dans le ciel leurs pointes d'ardoises pour l'abri et l'habitation d'honneur du seigneur abbé. Et de tant de jouissances charnelles, conquises en si peu de temps, le cantique de reconnaissance se lit aux murs tout égayés de paganisme. Sous les figures emmédaillonnées dans les grandes cheminées, c'est la devise: Jupiter Custos. Sur les chapiteaux des colonnes qui soutiennent le promenoir d'été, des enfants à cheval sur des cygnes font cabrer leurs montures, et les Amours, à ailes rognées, qui jouent du psalterion, semblent chanter, en leurs musiques inentendues, le Credo mythologique du XVIe siècle; même au-dessus de la porte, passage particulier de l'abbé, le tailleur de pierre jette, dans les lambrequins, la tête échevelée d'Ariane.

Les Statuts Synodaux de Jean Colet

 




Il s’agit d’un ouvrage important, daté de 1530, édité chez Jean Lecoq sous l’autorité de l’évêque de Troyes. C’est une œuvre de Jean Colet, juriste au tribunal épiscopal, natif et curé de Rumilly-les-Vaudes (de 1465 à 1479), qui rassemble les statuts promulgués par Jean Bracque (1370-1375), Jean Léguisé (1426-1450) et Odard Hennequin (15258-1544), évêques de Troyes.

Le texte est imprimé en lettres gothiques, d’une qualité parfaite. La plupart des 300 pages de ce livre est rédigé en latin. Une quinzaine cependant sont écrites en français : une innovation à porter à l’actif de Jean Colet qui tenait à ce que les curés de nos campagnes puissent, d’une meilleure et plus compréhensible façon, retransmettre à leurs ouailles, les instructions et recommandations de leur évêque.

Ce sont ces 15 pages que je vais présenter en donnant des extraits. « C’est un peu à l’intention des prêtres ignorants et des curés paresseux que Jean Colet a rédigé ces pages en français », pour les inciter à respecter les instructions et recommandations promulguées par les évêques, pour les aider à les faire connaître et respecter dans leur paroisse : « Voilà ce qu’il faut savoir, voilà comment le dire ». En quelque sorte, Jean Colet a rédigé, au XVIe siècle, un catéchisme destiné aux recteurs de nos campagnes.

La première préoccupation de l’évêque, transcrite par le chanoine Colet, est le salut des âmes des fidèles  qui sont sous sa garde. C’est à cette fin qu’ont été promulgués les statuts synodaux.

Comment mener sa vie pour obtenir le paradis ? « En respectant les dix commandements de la loi et de la Sainte Eglise, en ayant recours aux sacrements, en pratiquant la prière », toutes règles que nous découvrons, dites par Jean Colet il y a 500 ans !

Ces statuts de 1530 sont suivis d’une longue partie en français, intitulée : « S’ensuit la manière comment les curés et recteurs des églises paroissiales doivent publier et déclarer à leurs paroissiens les susdits préceptes ». C’est donc une adaptation faite « à l’intention du pauvre peuple chrétien », des statuts qui les concernent. Elle est mise entre les mains des curés qui ne sauraient le faire eux-mêmes.

Par exemple, le curé ne se contentera pas de rappeler aux paroissiens leur devoir pascal, il doit aussi les exhorter à se confesser et à communier pour les fêtes de Pentecôte, Assomption  de Notre-Dame, Toussaint et Noël. Il recommandera de payer les dîmes, mais aussi d’accompagner le Corpus Christi quand il est porté aux malades. A la messe, les fidèles devront se tenir agenouillés aussi longtemps que le précieux Corps de N.S. ou son Sang se trouvent sur l’autel. Pour la dignité du sacrement de mariage, défense sous lourdes peines de faire le charivari. De même, les fidèles  doivent respecter le caractère sacré du cimetière, sans y danser, jouer ou  faire le marché. De lourdes peines sont ordonnées contre les blasphémateurs…

Un long passage est consacré aux excommuniés qui, si l’on en croit la diversité des cas d’excommunication, devaient être fort nombreux.

Enfin, l’évêque fait recommander par ses curés l’œuvre (c’est-à-dire la fabrique) de la cathédrale de Troyes, en promettant aux donateurs non seulement des indulgences, mais participation à « toutes les prières, messes et oraisons qu'ont fait les ordres mendiants de l’évêché de Troyes et en tous convents de l’ordre de Citeaux ». A partir de toutes les indulgences concédées par les derniers papes aux fidèles qui célèbrent la Fête-Dieu, le chrétien qui ne manquera rien pourra gagner : « 11.300 jours d’indulgence, qui valent 30 ans et 300 jours » !

Le formulaire de prône que les curés sont invités à lire tous les dimanches à la messe paroissiale est riche d’authentique substance chrétienne. Il invite à prier successivement : pour la paix et union de l’Eglise, pour le pape, les évêques et tout le clergé, pour le roi et son conseil, pour tous autres seigneurs terriens, pour les fidèles rassemblés à la messe, pour les fruits de la terre, pour ceux qui offrent le pain bénit, pour les bienfaiteurs de l’église paroissiale, « pour tous loyaux laboureurs et loyaux marchands », que Dieu bénisse leur travail, pour tous les habitants de la paroisse, pour les femmes enceintes, pour les pèlerins, pour les prisonniers, « après nous prierons pour tous ceux et celles qui sont en état de grâce, que Dieu les y tienne jusqu’à la fin. Et pour tous ceux et celles qui sont en péché mortel, que Dieu par sa sainte grâce les en veuille sortir brièvement ». Et encore, pour les trépassés, ceux de nos familles, et généralement pour toutes âmes qui sont en peine du purgatoire. Puis, avant la dénonciation (sans porter de nom) de tous les pêcheurs publics, les fidèles qui auront entendu cette belle conclusion : « Ceux et celles que les commandements de Notre Seigneur tiennent et gardent soient bénis et absouts du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen. Et ceux et celles qui ne les suivent pas, que Dieu les veuille convertir et réduire à bien ».

  « Prions doit dire le prêtre, chaque dimanche, pour que nous soyons délivrés du péché mortel qui nous mène droit à l’enfer. Pensons à l’heure où nous devrons mourir ». « Le paradis, ce royaume de paradis, le prêtre doit l’offrir au pêcheur sur son lit de mort, après l’avoir interrogé et confessé ».

Tout au long de son commentaire, Jean Colet manifeste l’inquiétude qu’il a pour les enfants qui risquent de mourir sans baptême. « Pas plus que jurer, les chrétiens ne doivent railler les choses qui concernent et engagent l’Eglise ». « Donnez, doit dire le curé, donnez pour que vivent les prêtres, donnez pour le service du culte mais aussi et surtout, bien expressément, respectez les ministres de Dieu et de l’Eglise. En même temps, fuyez ceux qui, contrairement à eux, cherchent à vous tromper ».

Un chapitre spécial est consacré à la lèpre, ce mal impitoyable qui sévissait alors.

A travers les statuts synodaux, l’Eglise de Troyes, en 1530, propose au peuple dans un langage qui sait s’adapter à lui, une religion forte, centrée sur Dieu juste et miséricordieux, et sur le Christ rédempteur. L’Eglise institutionnelle y détient le monopole des moyens de salut, par la liturgie et par les sacrements, surtout les sacrements de pénitence et d’eucharistie. Cela exige un clergé zélé et instruit.

 

Ecoutons Jean Colet dans « Les regrets de l’âme damnée » :

«  Hélas ! Chrétiens, qui lisez cette histoire,

Autant vous en prend à l’œil,

Laissez, laissez, tandis qu’avez le temps,

Vos ordures et péchés.

N’attendez à demain à faire pénitence ».




La Rocatelle devenu lieu de recueillement

 


Située au sud-est de Rumilly-lès-Vaudes, dans la direction de Jully-sur-Sarce, sur la route de Fouchères à Vougrey, cette vielle maison de maître est pleine d’histoire de ses anciens occupants. La plus ancienne mention les concernant nous reporte à la fin du XVIe siècle, et l’on découvre un Jean Petitpied, seigneur, entre autres, de la Rocatelle. Sa fille Hélène épouse Jacques le Boucherat, qui devient ainsi nouveau seigneur de ce domaine en 1601. Autorisé par le roi, en 1609, à élever sur ses terres, des « fourches patibulaires », il meurt en 1625.

 Son fils Jacques II lui succède, l’année suivante. Membre de l’élection de Troyes, il devient ensuite « maître d’hôtel du roi » et cède bientôt la place à son fils Charles qui naquit de Gabrielle Rémond, son épouse. Auparavant, il avait donné, en échange d’un arpent de pré de l’Eglise, 5 quartiers de pré, lieudit le Poirier au Héron, tenant d’un bout à la rivière d’Hozain et d’autre sur les champs de Molesme, avant de léguer, en 1650, tous ses biens à ses enfants, ce qui lui permettra d’évoquer son âge, 75 ans en 1674, et le fait de n’avoir plus rien qui lui appartienne, pour ne pas répondre à la convocation qui lui sera faite de partir au service du roi. Il est vrai que c’était l’époque de la Fronde, et que Jacques et Charles Boucherat, père et fils, se targuaient de n’être pas d’accord avec le monarque. Ils avaient suivi en 1649, au Palais royal à Troyes, cette assemblée générale préparatoire aux Etats-Généraux, qui avait voulu se prendre plus au sérieux qu’il n’aurait fallu. Un auteur anonyme en a raillé les participants :

 « Les seigneurs de la Rocatelle

 Couverts de clinquants et de dentelles,

 Leurs panaches sur leurs chapeaux

Parurent presque les plus beaux ».

 

Charles avait donc hérité du fief quand il épousa, en 1650, Anne de Chastellux, baronne d’Avignot. C’est lui qui fit, sinon reconstruire la maison, « autrefois toute simple, avec grange et pourpris (enceinte, enclos), 250 arpents de terre, pré et bois », mais qui la fit transformer, puisqu’en 1718, c’était un château qu’il habitait. Charles Boucherat eut à répondre plusieurs fois à des convocations adressées par le Bailli de Troyes. L’une d’entre elles ordonne « aux gentilshommes et autres sujets au ban et arrière ban de Sa majesté ci après nommés… de se trouver au mardi 24 du présent mois (en 1691), 4 heures après midi, au devant du palais royal de Troyes, montés et équipés, pour l’exécution des ordres du Roi... ». Il fut maître d’hôtel du roi, cornette, puis capitaine. En 1693, un an avant sa mort, il occupait la place de « guidon », c’est-à-dire la seconde place après l’officier d’une compagnie de cavalerie. Il meurt sans laisser de descendance. Son épouse le suivit jusqu’au 1er août 1713. Elle était âgée de 75 ans, et fut inhumée « proche son banc, dans le chœur de l’église de Rumilly ».

Blason de Rumilly

 


 Elles représentent, d'une part le manoir des Tourelles avec, en chef, les armes de Jean Colet, le curé bâtisseur de l'église Saint-Martin :

D'or au chevron d'azur chargé en chef d'une étoile aussi d'or et accompagné de trois œillets de gueules tigés et feuillés de sinople.

 

Pierre Pion qui, vers 1530, a donné au manoir sa touche renaissance, portait :

D'azur à la croix patriarcale d'or accompagnée à dextre d'une étoile d'or.



 Hors les armoiries de ces deux personnages importants pour l'histoire monumentale de Rumilly, le manoir et l'église en renferment à profusion.

Pour les ecclésiastiques.

Au manoir, celles, d'Antoine II de Vienne, abbé de Molesme.

De gueules à l'aigle éployée d'or, membrée d'azur.

Antoine II

Chronologie de Rumilly

 


Vème siècle. La carruca, charrue à roues, mentionnée pour la première fois. A Dauzat La vie rurale en France.

888 - Les reliques de saint Loup sont transportées de Troyes jusqu’à Chappes pour y être à l’abri de l’invasion des Normands.

973 – Les premiers « Rumilly » en France.

1000 - Famine. On mange des racines, des herbes. Dauzat.

1075  - 4ème dimanche de l’Avent.  St Robert s’installe à Molesme.  

1093-1125 - Hugues prend en charge le comté de Champagne

 XIIème siècle. Apparition des moulins à vent. On commence à cultiver la vigne

 1101 - Hugues et Constance, sa femme, apportent à l’église de Molesme, l’un la moitié de son domaine à Rumilly et l’autre, quatre bœufs.

1104 - Le 2 avril, le comte abandonne cette fois toute sa terre de Rumilly. 

1108 - De retour de Terre Sainte, il confirme l’ensemble de ses dons avant de rejoindre l’ordre des Templiers.

1140 - On note Rumeli pour nom du village, au lieu de Rumiliacum .

1147 – Ermajarde de Chaussepierre déclare tenir son fief des Templiers.

1150 vers… - Saint Bernard passe à,Fouchères et à Vaudes où il opère miracles.

1152 - 1180 - Henri le Libéral, comte de Champagne.

1160 - Le comte accorde … tous les droits d’usage dans ses bois sauf le droit de vente.

1164 - (1170) - Barthélemy du Plancy dit Haîce, évêque de Troyes, à qui, cette année-là, le couvent de Molesme engage sa « grange » de Rumilly

1196 – Les Templiers prennent pied à Serre-lés-Montceaux.

Cour des Grands Jours

 

*La Cour des Grands-Jours



 La Cour des Grands-Jours, la plus haute des juridictions, est née à Troyes.

Après la, réunion de notre province à la couronne de France, elle est maintenue par Philippe-le-Bel jusqu’à Charles VI, soit par 8 rois successifs, comme une institution spéciale à notre province. Elle se continue ainsi pendant tout le XIV° siècle. Les Grands-Jours de Troyes sont ensuite reportés au sein du Parlement siégeant à Paris, et ainsi s’éteint la primitive institution des Grands-Jours, après sa session de 1409.

 Les Grands-Jours de Troyes sont une institution permanente, au même titre que le Parlement de Paris. 

  Cette Cour existe au moins depuis 1212, quand la comtesse Blanche, assistée de 34 barons décide du mode de partage, entre filles, des successions nobles, et pose des règles relatives au duel judiciaire.  

Jeanne, l’héritière de Champagne, épouse en 1284, le petit fils de Saint-Louis qui, l’année suivante, monte sur le trône de France sous le nom de Philippe-le-Bel.

Les institutions de Champagne sont maintenues et conservées. Et on trouve des comptes-rendus des sessions des Grands-Jours tenus à Troyes de 1278 à 1409.

Pour recevoir les magistrats de Paris, la couronne dispose de l'ancien château des comtes de Champagne, dont la distribution intérieure est à adapter, notamment pour la salle des plaidoyers et les prisons. Cette construction du XII° siècle reçoit des aménagements. L'échevinage rend le palais plus confortable, il fournit la tapisserie destinée à parer les chambres et décide de livrer un tapis pour les parquets où se font les plaidoyers. Un tableau avec le Christ occupe le milieu du mur du fond de la salle des audiences.

Château de la Motte

 




En 1518, on parle « d’une motte fermée de fossés pleins d’eau, en laquelle maison, grange, colombier et autres édifices, séant à Rumilly, tenant d’une part à la rivière d’Oze, d’autre part aux contours de plusieurs terres ».

Ce sont Jehan de Gand et Bernarde Le Bégat qui sont seigneurs de cette motte de Rumilly, en même temps que de Villemorien, et ce sont eux que l’on voit, représentés en un vitrail de l’église qu’ils ont offert en 1527. On les voit agenouillés, accompagnés de leur fils et de leurs six filles.

En 1532, Jehan de Gand est maître forestier, garde des Eaux et Forêts de Bar-sur-Seine. Il décède en 1543. Son fils Jehan porte lui aussi le titre de seigneur de la Motte de Rumilly et doit, de ce fait, hommage au marquis de Praslin. Il est gentilhomme de la vènerie du roi.

Entre 1586 et 1618, c’est Etienne fils de Jehan, qui demeure au château. Il s’y marie avec Claude de Richebourg, fille de Pierre de Richebourg, seigneur de Pouan et de Courcelles, maître d’hôtel ordinaire du Roi, et d’Anne de Balavoyne. Leur contrat date du 8 juillet 1594. Mais les affaires du ménage ne prospèrent guère, et Etienne de G       and est obligé d’emprunter 2.400 livres le 16 juin 1620, ce qui l’oblige à consentir  hypothèque, et par conséquent, inventaire de ses biens, qui se fait sur sa déclaration, le 30 octobre 1627. Pour la défense de sa maison forte, Etienne de Gand dispose d’une « arquebuse à mèche, de 3 mousquets, d’une arquebuse à roue, d’une petite carabine et de 2 pistolets à roue ».

Il sort en carrosse, et possède 8 chevaux. Le domaine abrite aussi : « 5 vaches mères, 2 génisses de l’âge de 2 ans, 4 bouvillons et 1 veau de l’année, 4 cochons, 37 brebis mères et 3 agneaux ».

Pierre, fils d’Etienne, hérite de son père, en particulier du château et du titre de seigneur de la Motte-Rumilly. Ses 2 sœurs se partagent avec lui et le domaine et les charges dont il est grevé. Charlotte qui épouse Antoine d’Arfillères seigneur de la Cour Saint Fal et qui vendra par la suite à Louis Piot seigneur de Beauvais, et Anne dont le mari Jehan de Regnard est capitaine des bois et forêts de la baronnie de Maraye.

Le fils Pierre, Charles et Georges de Regnard héritent de leur oncle et de leur père tous les ennuis attachés à la succession. Malgré bien des artifices de procédure, malgré la séparation de biens entre Pierre et sa femme Marie Rousselet, malgré la vente par Pierre et Charles à Georges, de leurs droits sur la maison seigneuriale de la Motte-Rumilly, le 24 octobre 1668, ce dernier ne peut éviter la saisie.

Comme tous les gentilshommes, il est tenu de répondre à la levée du ban et de l’arrière-ban, mandement public adressé de par le roi aux baillis royaux, qui est publié et crié par un sergent pour convoquer les vassaux et arrière-vassaux de la couronne qui doivent ensuite se rendre en armes à l’armée du roi. « Pierre de Regnard, écuyer, sieur des Angles, demeurant à Maraye en personne se déclare aux ordres du Roi. Georges de Regnard, sieur de la Motte remontre qu’il ne peut servir, ses chevaux ayant été saisis et vendus et son fief étant en bail judiciaire et requiert surséance et provision de 1.000 livres sur son bien pour fournir son équipage suivant sa qualité ». C’est la ruine définitive de la famille Regnard, dont les biens à Rumilly, passent aux mains de créanciers, dont le plus important est Michel Noël de Buchères, en 1688.

Pâques à Troyes autrefois

 



Le 2ème Concile, réuni à Troyes après 429, composé de 24 évêques, décide que les Juifs ne sortiraient pas de leurs maisons, depuis le Jeudi-Saint jusqu’au lendemain de Pâques et n’auraient pendant ce temps, aucune communication avec les chrétiens.

Charles II-le-Chauve se rend à Troyes pour y passer les fêtes de Pâques en 840. Le Samedi-Saint, il se passe un fait qui est considéré comme un heureux présage. Le roi arrive à Troyes sans bagages, et n’a avec lui que les vêtements qu’il porte. Au moment où il sort du bain, on lui apporte tous ses vêtements, sa couronne et autres signes royaux, dont il se pare pendant la célébration des fêtes de Pâques. L’arrivée des bagages royaux, protégée par un petit nombre d’hommes, qui avaient couru de grands dangers, en revenant d’Aquitaine, ranima le courage du roi. qui met en fuite l’armée de Lothaire. Louis de Bavière vient pour conférer avec lui.

La ville et le bailliage de Troyes avaient au XIVe siècle des artisans qualifiés royaux, tels que charpentiers, maçons… Comme les officiers du Roi, ils recevaient leurs robes d’été à Pâques.

En 1374, la Cour des Grands* Jours édicte dans ses statuts qu’aucune brebis ne peut être tuée depuis Pâques jusqu’à l’Ascension.

Le chapitre de Saint-Pierre, depuis un temps immémorial se rend en l’église de l’abbaye, le mardi de Pâques.

L’ouvrage de " limes " est interdit de la Saint-Remy jusqu’à Pâques, " après 8 h du soir, sonnées à l’horloge commune ", et de Pâques à la Saint-Remy", après l’heure de Complies, sonnée à Saint-Urbain, et le matin avant 4 heures.

Une bulle de Paul V, de 1452, porte rémission pleine et entière de leurs péchés à ceux qui visiteront dévotement l’église de Saint-Pierre, le jour de Pâques.

En 1464, les barbiers ne peuvent " saigner ni peigner " le jour de Pâques.

En 1482, les échevins sont élus chaque année, le mardi ou le mercredi de Pâques, par les conseillers de ville et 64 notables.

Le jeu de la Pelote, pratiqué le jour de Pâques dans un grand nombre d’églises est supprimé en 1506 dans la collégiale Saint-Etienne (en 1564 à Saint-Pierre). Le jour de Pâques " après None ", le chapitre allait chercher l’évêque processionnellement pour chanter les Vêpres. Le cortège se rendait dans la salle capitulaire. Le doyen apportait une balle et une toupie « avec une tiare aux armes de l’évêque ». Le cloîtrier plaçait la toupie sur une bancelle et 3 fois l’évêque lançait la balle sur la toupie. Cette balle passait ensuite aux assistants qui, chacun 3 fois, jetaient la pelote sur la toupie. Le jeu fini, l’évêque offrait du vin rouge, du vin blanc, des oublies et des pommes. Le cloîtrier présentait le verre au doyen, buvait après lui, et le verre lui appartenait.

Au XVIe siècle, le jour de Pâques, à la cathédrale, on représentait à l’office de Matines, la scène des Trois Marie au tombeau de Jésus Christ.

Les draps de Troyes ont un pli déterminé qui ne doit pas être imité pour la mise en vente de draps fabriqués ailleurs. Ces statuts, en 70 articles, sont donnés à Pâques 1510, par Louis XII, pendant son séjour à Troyes. Le roi donne aussi une ordonnance sur l’alignement des rues.

A Pâques 1562, Les 2 partis calvinistes et catholiques demeurent relativement calmes. Ces derniers s’abstiennent de faire comme de coutume, des processions fraternelles.

La tradition d’offrir des œufs décorés teints ou travaillés est bien antérieure au christianisme. L’œuf est sans doute le plus vieux et le plus universel symbole de vie et de multiples rituels lui ont été associés depuis la nuit des temps. Chez les catholiques, depuis le VIII° s., les cloches cessent de sonner à partir du Jeudi Saint. La tradition prétend qu’elles sont parties à Rome. Elles reviennent dans la nuit de Pâques, chargées d'œufs multicolores qu'elles déversent dans les jardins, où les enfants vont les découvrir.

Au XIIIe siècle, le jour de Pâques, à Troyes, les clercs des églises, les étudiants ainsi que les jeunes gens des différents quartiers s’assemblent sur les places et forment un long cortège en tête duquel on retrouve bannières, tambours et trompettes. Ils se rendent en chœur sur le parvis de la cathédrale, où ils chantent une partie de l’office appelée "Laudes" puis ils s’éparpillent dans les rues où ils font la quête des oeufs de Pâques.

Plus tard, les cloches sont remplacées par des crécelles, et les enfants de chœur parcourent le village en les faisant tourner, et remplissant des paniers à vendanges d’œufs, qu’ils se partagent. C’est ce que l’on appelle les roulées. Cette coutume existe encore dans de nombreux villages aubois.

A cette époque, lors du carême, l'Église interdit la consommation d'œufs pendant cette période de quarante jours. Il s'agissait donc à l'issue du jeûne de consommer les œufs qui s'étaient accumulés pendant le carême, en les mangeant normalement pour les plus récents et en les cuisant puis en les décorant pour les plus vieux.

Avant la démocratisation du chocolat, les œufs étaient naturels et décorés par les enfants. À l'œuf est associée la poule, qu'on trouve maintenant sous forme de statuette en chocolat. Les confiseries ne sont maintenant plus limitées, à la forme de l'œuf mais peuvent être de véritables sculptures de chocolat et de sucre et représentent parfois des personnages ou des objets qui n'ont aucun lien avec le modèle d'origine.

La "chasse aux œufs " est une tradition ancienne. A Troyes, c’est dans les petits jardins que cela se produisait, de même que dans la plupart des villages aubois ! Il faut découvrir le maximum d'œufs avant une heure donnée. 



FABERGÉ


Les œufs impériaux

La célèbre série de 50 œufs de Pâques impériaux a été créée pour la famille impériale russe de 1885 à 1916, lorsque l'entreprise était dirigée par Peter Carl Fabergé. Ces créations sont inextricablement liées à la gloire et au destin tragique de la dernière famille Romanov. Elles constituent l'ultime réalisation de la célèbre maison de joaillerie russe et doivent également être considérées comme les dernières grandes commandes d'objets d'art. Dix œufs ont été produits de 1885 à 1893, sous le règne de l'empereur Alexandre III ; 40 autres furent créés sous le règne de son fils dévoué, Nicolas II, deux chaque année, un pour sa mère, la douairière, le second pour son épouse.

La série a commencé en 1885 lorsque l'empereur Alexandre III, par l'intermédiaire de son oncle, le grand-duc Vladimir, commanda à Fabergé un œuf de Pâques comme cadeau de Pâques pour son épouse, l'impératrice Maria Feodorovna. Initialement prévue par Fabergé pour contenir une bague en diamant, la version finale, suivant les instructions spécifiques de l'Empereur, comprenait un pendentif en rubis de grande valeur. Après la première commande, Fabergé fut nommé « orfèvre spécialement nommé à la couronne impériale », et la légende se poursuivit au cours des 31 années suivantes. Selon la tradition de la famille Fabergé, l'entreprise disposait d'une totale liberté pour les futurs œufs de Pâques impériaux. Même l’Empereur ne savait pas quelle forme ils prendraient. La seule condition était que chacun contienne une surprise.

L'œuf de poule, 1885

Inspiré d'un original du XVIIIe siècle, l'œuf de poule possède une « coquille » extérieure émaillée blanc opaque, qui s'ouvre par torsion pour révéler une première surprise : un jaune d'or jaune mat. Celui-ci contient à son tour une poule en or ciselé émaillée qui contenait autrefois une réplique de la couronne impériale avec un précieux œuf pendentif en rubis à l'intérieur. La goutte à elle seule a coûté plus de la moitié du prix total de l’œuf (les deux étant perdus, n’étant connus que par une vieille photographie).


Œuf de couronnement, 1897

Cet œuf, peut-être le plus emblématique de Fabergé, a été offert par l'empereur Nicolas II à son épouse, l'impératrice Alexandra Feodorovna, en souvenir de son entrée à Moscou le 26 mai, jour de leur couronnement dans la cathédrale Ouspenski. Sa coque extérieure est en or multicolore, agrémentée d'émail guilloché jaune translucide et d'aigles à deux têtes en émail noir sertis de diamants, un motif rappelant la lourde robe en Drap d'Or qu'elle portait lors de la cérémonie. Le monogramme bijou de l’impératrice apparaît au sommet de l’œuf sous un diamant portrait, avec la date à la base. L'œuf s'ouvre pour révéler une surprise sous la forme d'une réplique miniature en or émaillé sertie de diamants du carrosse original du XVIIIe siècle de Buckendahl qui contenait autrefois une goutte d'émeraude, remplacée plus tard par un diamant briolette jaune (tous deux perdus). Il a fallu 13 mois à l'artisan Georg Stein pour réaliser l'autocar de 9,4 cm (3 11/16 po).



C'est quoi Pâques pour les chrétiens ?

Le dimanche de Pâques, les chrétiens célèbrent la Résurrection de Jésus. La fête de Pâques survient juste après la Semaine sainte, qui s’achève par la mort de Jésus et sa mise au tombeau.

 « Nous vous annonçons la Bonne nouvelle : la promesse faite à nos pères, Dieu l’a accomplie en notre faveur à nous, leurs enfants : il a ressuscité Jésus » (Ac 13, 32-33)

Pour les chrétiens, la Résurrection de Jésus est la vérité culminante de leur foi dans le Christ. Elle symbolise la victoire de la vie sur la mort et l’entrée, pour tout chrétien, dans une nouvelle ère. Les catholiques la célèbrent lors d’une messe. La recherche des œufs de Pâques en chocolat relève, elle, d’une tradition folklorique culturelle.



 Quelle est la différence entre Pâque et Pâques ?

« Pâques » vient de l’hébreu pesah, signifiant « passage », et qui a été traduit en grec (paskha) et en latin (pascha).

 La Pâque juive (au singulier) commémore le passage du peuple hébreu à travers la mer, alors qu’il est poursuivi par l’armée de Pharaon. Selon le père Yves Combeau, dans l’imaginaire biblique, la mer symbolise la mort. La Passion, la mort et la résurrection de Jésus se déroulent pendant la fête juive. Il fait alors son propre passage, de la mort vers la vie.

L’ajout d’un « s » à la fin de Pâques sert donc à différencier la Pâque juive de celle chrétienne. Cette différence permet aussi d’évoquer les différents moments commémorés, dans le christianisme, à ce moment de l’année : la Cène, la Passion, la mort du Christ puis sa Résurrection.

Que signifie le mot "Pâques" ?

Aux origines de Pâques

Récit de la Résurrection du Christ

Trois jours après la mort de Jésus, des femmes puis quelques disciples se rendent au tombeau pour « achever d’embaumer le corps de Jésus » (Mc 16, 1; Lc 24, 1). En effet, celui-ci avait été déposé rapidement dans un linceul le vendredi soir, car le sabbat juif commençait et on ne pouvait plus travailler ni s’occuper des morts (Jn 19, 31-42). Mais ils voient que quelqu’un a roulé la lourde pierre : le tombeau est vide.

Ses amis, les Apôtres et Marie, sa mère, tous ensemble font éclater leur joie dans Jérusalem : « Jésus le crucifié, Dieu l’a ressuscité, il est vivant. » (Mt 28, 1-10).

Ces témoins courent chercher Pierre et Jean qui constatent eux aussi que le tombeau est vide (Jn 20, 1-10). Jean, dans son Évangile, note qu’ils trouvent posé à terre dans le tombeau les linges qui couvraient le corps. Pour Jean, c’est à la fois un indice et un signe. En effet, si on avait volé le corps, on aurait pris les linges qui recouvraient le cadavre, donc ce n’est pas un vol. Ensuite, les linges de la mort sont restés dans le tombeau, mais lui, Jésus n’est pas là. Alors Jean comprend que ce que Jésus avait annoncé ; « il vit et il crut » (Jn 20, 8) : Jésus est vainqueur de la mort.

Le témoignage des apôtres

Saint Paul (1Co 15) raconte que la Résurrection n’est pas juste une sorte de croyance, mais qu’elle a bel et bien eu lieu devant témoins. La foi de la première communauté de croyants est fondée sur le témoignage d’hommes et de femmes, connus des chrétiens et, pour la plupart, vivant encore parmi eux.

Parmi ces « témoins de la Résurrection du Christ », Marie-Madeleine est la première à qui Jésus est apparu, devant le tombeau vide. Apparaissant également aux apôtres, Paul précise qu’en réalité plus de 500 personnes auraient vu Jésus. Par exemple, deux disciples partant vers Emmaüs le reconnaissent pendant leur repas, à la fraction du pain (Lc 24, 13-35).

Comment reconnaissent-ils que c'est bien lui ? Jésus les mène surtout à constater que son corps ressuscité est celui qui a été martyrisé et crucifié, il porte encore les traces de la Passion du Christ (Lc 24, 40 ; Jn 20).

Les tablettes de la foi – La résurrection

Diffuser la Bonne nouvelle

Ces journées pascales engagent chacun des apôtres, et Pierre particulièrement, dans la construction d’une ère nouvelle. Comme témoins du Ressuscité ils demeurent les pierres de fondation de son Église. La Résurrection accomplit l’adoption filiale car les hommes deviennent frères du Christ, par don de la grâce. Cette filiation adoptive procure une participation réelle de l’homme à la vie du Christ, comme Jésus appelle ses disciples après sa Résurrection : « Allez annoncer à mes frères » (Mt 28-10, Jean 20-17).

Le mystère pascal

Pâques est au cœur de la foi chrétienne. Elle est l’accomplissement des promesses de l’Ancien Testament (Lc 24, 26-27) et elle confirme la divinité de Jésus. Jésus n’est pas simplement revenu à une vie terrestre comme cela avait été le cas de Lazare (Jn 11-44). Elle est liée au mystère de l’Incarnation du fils de Dieu.

Il y a un double aspect dans le mystère pascal : par sa mort, Jésus libère l’homme du péché, par sa Résurrection il lui ouvre l’accès à une nouvelle vie. Elle consiste en la victoire sur la mort du péché (Ep 2-4, 5). Elle s’est faite par l’œuvre de Dieu le Père et par l’œuvre de l’Esprit sur le Fils ; elle est donc l’œuvre de la Sainte Trinité. Enfin, la Résurrection du Christ est principe et source de la Résurrection future de l’homme. Dans l’attente de cet accomplissement, le Christ vit dans le cœur de ses fidèles. C’est le cœur de la Foi et de l’Espérance chrétienne.

 Les tablettes de la foi - Le temps pascal

Si nous connaissons bien l’avant Pâques, le Carême, qu’en est-il de l’après Pâques, le temps Pascal ?

Ces cinquante jours n’ont apparemment pas beaucoup d’importance dans notre temps liturgique. Autant le carême et ses quarante jours d’austérité sont soulignés avec la couleur violette, autant le temps Pascal semble bien pâle avec sa couleur blanche ! Et pourtant, l’Eglise, régénérée par la Pâque du Christ, donne à ses fidèles ces cinquante jours pour quitter le temps de la pénitence du Carême et celui de la Passion.

Le temps pascal est comme la revanche de la Vie sur la mort. A grand renfort d’Alléluia, c’est donc le temps de la joie par excellence.

Depuis le jour de Pâques jusqu’à la Pentecôte, les chrétiens sont invités, à la suite du Ressuscité, à quitter leurs vêtements de carême pour revêtir ceux de la lumière de Pâques et montrer leurs visages de ressuscités. Le temps Pascal est donc ce temps missionnaire où tout notre être devrait exprimer le cœur de notre foi : oui, le Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité.


Une artiste en Pologne

Œuf peint à la main pour les Pâques Orthodoxes 


La Résurrection du Christ, Geerart Seghers (Anvers 1591-1651)  en 1620

Traditionnelle iconographie du Christ ressuscité, en soldat vainqueur de la Mort et du Mal, brandissant l’oriflamme rouge et blanche décorée d’une croix (comme au temps des croisades).

Sans doute peint encore en Italie, juste avant le retour de l’artiste à Anvers à l’automne 1620, Seghers s’affirmant ici dans une spectaculaire démonstration de grande peinture baroque italo-flamande.

Armoiries b.d., non identifiées.

Huile sur toile : Hauteur : 3,24 m ; Largeur : 2,4 m

Peint pour le maître-autel de l’église des Jésuites de Courtrai (devenu paroissiale en 1785 sous le vocable de Saint-Michel) aux frais de Jeanne van Balberghem, veuve de Gerard van Kerckhoven, 1620 (voir le document d’archives cité par Coekelberghs, qui ne comporte pas, il est vrai, de nom de peintre) ; toujours en place en 1769 (cf. Descamps, comme Seghers) ; prévu pour figurer dans les ventes des biens des Jésuites à la suppression de la Compagnie de Jésus, en 1776, mais resté finalement en place pour des raisons matérielles ; présenté sans succès dans une vente publique à Courtrai en 1800 (cf. Debrabandere) ; toujours en place en 1824 et 1876 (inventaires de l’église Saint-Michel) ; vendu en 1885-1886 lors de la rénovation gothicisante de l’église ; De Foere, marchand d’art à Bruges ; déposé dans un couvent de Bruges où De Foere avait une fille religieuse ; acquis par le Dr Goossens (1882-1950), médecin des religieuses de ce couvent, Bruges, 1928 ; déposé par ses descendants à l’église Notre-Dame de Courtrai de 1984 à 1989 ; vendu par ces derniers à la Galerie d’Arenberg (Ph. Carlier et D. Coekelberghs), Bruxelles, 1989 ; acquis de cette galerie avec le concours des Amis du Louvre, 1990.

Musée du Louvre – Paris 




Des symboles de l’église catholique

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