Correspondance
de Napoléon 1er depuis Troyes
Fontainebleau, 1er avril 1805
A M. Champagny
M. Champagny fera faire un mémoire sur ces
différentes idées :
1° Il faut des écluses pour rendre la Seine
navigable depuis Méry jusqu'à Troyes. Puisque les gens de l'art l'ont déterminé
ainsi, on n'y objecte rien; mais l'on demande à connaître les inconvénients
qu'il y aurait à ne faire d'abord que des écluses impaires, pour fait profiter
ainsi beaucoup plus vite la ville de Troyes des avantages de la navigation, et
immédiatement après, s'il est reconnu que le halage est trop difficile, on fera
des écluses paires.
2° Il n'y a point de pierres de Troyes à Méry;
donner à connaître ce que coûterait une écluse en bois, puisqu'on ne peut y
construire des écluses en pierre qu'après que la navigation sera établie depuis
Bar-sur-Seine; ce qui priverait Paris et Troyes, pendant un grand nombre
d'années, de la jouissance de la navigation, après avoir dépensé beaucoup
d'argent. Jusqu'à ce que toutes les écluses soie] faites, Paris ne jouira de
rien.
3° Dans le projet qui a été présenté, on ne porte la
largeur des écluses qu'à 18 pieds. On désire connaître le rapport de la valeur
d'une écluse en bois et pierre, de 18 à 24 pieds, et on pense que si cela ne
devait produire qu'une différence d'un cinquième ou d'un quart en sus, et qu'il
n'y eût d'ailleurs aucun autre inconvénient, serait préférable de les faire à
24 pieds.
4° S'il pouvait être convenable de faire des écluses
en bois, on voudrait faire les cinq écluses impaires dans cette campagne et
dans celle de l'an XIV, de manière qu'en fructidor an XIV la navigation entre
Troyes et Paris fût établie; et l'on voudrait avoir fait, de Bar-sur-Seine à
Troyes, la moitié des huit écluses impaires, (c'est-à-dire quatre écluses
pendant le même temps. Connaître quel inconvénient il pourrait y avoir à cet
ordre de travail, et la somme qu'il faudrait.
5° Les deux écluses sur l'Aube n'ayant été faites à
18 pieds de largeur qu'à cause des pertuis, examiner si on est à temps de les
faire encore à 24 pieds, pour rendre la navigation de l'Aube semblable à celle
de la Seine, et ce qu'il en coûterait de dépense de plus.
Troyes, 3 avril 1805
(Du 2 avril au 11 juillet 1805,
Napoléon entreprend un long voyage qui va l'emmener en Italie, où il va se
faire couronner roi d'Italie, à Milan, le 26 mai)
A M. Cambacérès
Mon Cousin, je suis arrivé à Troyes hier à quatre
heures après midi. J'ai été très-content des chemins, de l'agriculture, et
surtout de l'esprit du peuple. C'est un des départements que j'ai traversés
dont je sois le plus satisfait. J'ai déjà vu ce matin tout ce que je désirais
voir. Je partirai à deux heures après midi pour Brienne, où je coucherai. Je
reviendrai demain à Troyes pour assister à une petite fête que l'on m'y donne.
Je me mettrai en route après-demain.
Si vous voulez aller à Bordeaux à mon retour, tâchez
que le code judiciaire soit entièrement terminé. Il y a au Conseil d'État
plusieurs affaires dont M. Lacuée est rapporteur et que je désire voir terminer
promptement. Il y a un projet relatif à l'appel de quelques vélites pour la
cavalerie, que je désirais voir discuter devant moi; M. Lacuée ne m'en a plus
reparlé.
Troyes, 3 avril 1805
A M. Lebrun
Mon Cousin, c'est une simple et très simple
recommandation que je veux donner à M. Denina. Si les membres de l'Institut,
qui sont meilleurs juges que moi, ne le trouvent pas digne, je n'ai rien à dire
de plus.
Troyes, 3 avril 1805
A M. Fouché
Monsieur Fouché, Mon Ministre de la police, le sieur
Goujon avait droit à une gratification de 2,000 louis pour les services qu'il a
rendus à l'occasion de l'arrestation de Georges. Il la refusa. Mon intention
n'est pas que ce refus lui préjudicie. Faites-lui payer 48,000 francs des
premiers fonds de la police. Cette dette est sacrée.
Troyes, 3 avril 1805
Au maréchal Berthier
Je reçois le compte que vous me rendez sur les
revues des 26e et 27e régiments de dragons. J'ai ordonné simplement que ces
inspections fussent faites et que le projet de la formation des trois escadrons
vous fût envoyé. Veillez à ce qu'il ne soit fait aucun mouvement. Je vous
renvoie ces états pour que vous me les remettiez lorsque le revues des généraux
Nansouty et Baraguey d'Hilliers seront faites; je me déterminerai à cette
époque. Jusqu'alors il ne faut faire aucun changement, et les régiments doivent
rester comme à l'ordinaire. On m'assure cependant qu'on a déjà commencé à payer
des gratifications de campagne, ce que je ne saurais croire.
Troyes, 3 avril 1805
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, le 21e régiment d'infanterie légère a
plus de 300 déserteurs, tous du département du Puy-de-Dôme. Ces déserteurs
engagent les autres soldats à déserter, en leur écrivant qu'on est parfaitement
tranquille chez eux. Faites connaître le mécontentement que j'éprouve, et
ordonnez qu'un chef d'escadron de la gendarmerie avec une quarantaine d'hommes
de la réserve, parcoure le département et arrête tous ces déserteurs.
Troyes, 3 avril 1805
Au maréchal Berthier
L'évacuation des bouches à feu de l'armée de Hanovre
me parait convenable. Cependant gardez ce qui est nécessaire pour la défense
des côtes et des embouchures de l'Elbe. Je désirerais, si cela est possible,
que l'évacuation se fit par mer. On m'assure qu'elle est praticable par
Cuxhaven, et que les Anglais ne peuvent y mettre obstacle. Si cela est, il
convient que le maréchal Bernadotte préfère cette voie car je serais fâché
qu'il fatiguât ses attelages de manière à ne plus les voir disponibles à la
moindre circonstance. Quant aux cartouches et à la poudre, il faut qu'il les
garde, ainsi que les équipages de pontons; bien entendu que ces objets feront
partie de l'équipage de campagne et suivront tous ses mouvements. Si l'armée
venait à recevoir ordre de rentrer, le général aurait soin de les faire évacuer
sur la France. Ces observations se résument à ceci : évacuer par mer tout ce
qui est inutile à l'équipage de campagne; évacuer par la même voie, autant
qu'on le pourra, toute l'artillerie de siège; garder toutes les munitions dont
il se peut qu'on ait besoin ; garder les équipages de pont mis en état de
suivre l'armée; faire porter les munitions par le parc de campagne, afin
qu'elles en fassent partie.
Troyes, 3 avril 1805
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, chaque chaloupe canonnière portera 130
hommes; restera donc dans chaque bâtiment de la place pour 20 ou 30 hommes,
pour embarquer, à tant par bâtiment et en les disséminant le plus possible, la
gendarmerie, les guides interprètes de l'armée, les troupes de l'artillerie de
la réserve. L'artillerie à cheval s'embarquera à pied et n'emmènera pas de
chevaux; les troupes du parc général embarqueront sur les bâtiments du matériel
de l'artillerie. La maison et les chevaux de l'Empereur seront embarqués sur
les paquebots. Les prames seront destinées à embarquer chacune 25 chevaux
d'artillerie, 25 chevaux de cavalerie. La cavalerie de la réserve s'embarquera
sur les écuries qui sont à Calais, et les deux bataillons à pied sur les mêmes
bâtiments, vu qu'on peut embarquer plus d'hommes que de chevaux sur chaque
écurie. Le grand état-major de la flottille ne doit pas avoir de bâtiments
d'écurie pour son service; mais on mettra deux chevaux d'officiers sur chacun
des bâtiments destinés aux équipages de l'état-major. Si cependant cela était
nécessaire, on pourrait affecter une écurie à chaque division; cette opération
peut se faire au dernier moment. On doit embarquer le moins d'équipages et le
plus petit nombre d'hommes inutiles possible. Le reste des équipages viendra ensuite
comme les circonstances le permettront. Je donnerai, quand il le faudra, des
ordres pour que les détachements de la 8e escadrille soient fournis par les
dragons; mais, en attendant, les choses doivent rester dans l'état où elles
sont.
Troyes, 3 avril 1805
Au maréchal Davout, commandant le camp de Bruges
Mon Cousin, je viens d'appeler 5,000 conscrits de la
réserve de fan XII destinés au recrutement des corps des trois camps. J'ai
avantagé votre camp, en conséquence des maladies que vous avez eues. Je ferai
également, dans le courant de germinal, un appel des 15,000 hommes de la
réserve de l'an XIII. Ainsi tous vos corps seront portés à 1,000 hommes par
bataillon. Il est nécessaire, sans écrire officiellement, d'avertir les
colonels, pour qu'ils aient de quoi habiller promptement ces hommes, au moins
en vestes et culottes.
Je désire que vous vous rendiez à Ambleteuse. Les
ingénieurs m'ont assuré qu'avec une dépense de 40,000 francs on remettrait ce
port dans l'état où il était, et qu'il y aurait plus d'eau qu'à Boulogne. Voyez
ce qu'il en est. Je pense que le major général aura donné des ordres pour qu'au
moment de l'arrivée de votre division à Ambleteuse votre commandement s'étende
jusque-là. Je vois , par l'état de la flottille batave, que vous êtes très-mal
et que vous n'avez pas d'équipages. Écrivez à l'amiral Ver Huell qu'il fasse
son possible pour que vous ayez les moyens d'embarquer vos équipages et vos
chevaux d'état-major conformément à la lettre que le major général a dû vous
écrire. Le plus important est de faire équiper promptement vos écuries et de
les faire venir toutes à Dunkerque; appliquez-vous principalement à les tenir
prêtes.
Troyes, 3 avril 1805
A M. Fontanelli, commandant de la garde italienne à
Milan
J'ai reçu vos états de situation. Faites exercer ma
Garde deux fois par semaine, tant à pied qu'à cheval; faites-lui faire
l'exercice à feu; instruisez les chefs et les officiers supérieurs. Vous savez
quelle exactitude et quelle célérité j'exige dans les mouvements.
Troyes, 3 avril 1805
Au vice-amiral Decrès
Monsieur Decrès , mon Ministre de la marine, je vous
envoie un projet (Projet proposé par le chevalier de Dellon de Saint-Aignan
pour la prise de la Trinité) qui m'a été adressé; il présente des chances.
Voyez la personne dont il s'agit; causez avec elle, et faites-moi connaître
votre opinion.
Troyes, 3 avril 1805
Au vice-amiral Decrès
Monsieur Decrès, mon Ministre de la marine, un
courrier m'arrive de Toulon et m'annonce le départ de l'escadre. On m'apprend
que le chanvre est très-mauvais. Ce sera donc toujours la même ose ? Quand il
s'agit de payer, le chanvre est excellent; quand il s'agit de s'en servir, il
ne vaut plus rien. On m'assure aussi que l'escadre manque de linge à pansement,
d'huile et d'autres petits objets de la même nature.
Je désire que vous accordiez une gratification de
300 francs à M. Royer, maître charpentier, constructeur du Pluton, pour lui
témoigner ma satisfaction de la célérité de l'armement de ce vaisseau. J'ai
ouvert la dépêche du préfet maritime pour voir si elle contenait d'autres
nouvelles. Le courrier était chargé de lettres que je vous envoie et que vous
ferez remettre dans huit jours.
Troyes, 3 avril 1805
Au vice-amiral Ganteaume
Monsieur le Vice-Amiral Ganteaume, l'escadre de
Toulon a mis à voile le 9 germinal, composée de 11 vaisseaux, 6 frégates et 2
bricks; le vent était nord-ouest; on l'avait perdue de vue. Le télégraphe m'a
instruit de votre sortie à Bertheaume. J'espère que, si vous êtes encore en
rade, vous ne tarderez pas à mettre à la voile. Tout est de donner pour point
de ralliement des parages où il n'y point d'ennemis, et alors vous avez peu à
craindre de sortir de nuit, n'ayant pas à redouter les séparations. Si vous
passez devant le premier point où vous devez aller, ne faites que passer et ne
restez plus de douze heures en panne et à tirer des bordées. J'imagine vous
aurez expédié votre courrier à Rochefort; écrivez-le-moi par retour de mon
courrier, que vous dirigerez sur Lyon, et apprenez-moi que vous mettez à la
voile. Dites au préfet maritime de donner au courrier une dépêche qui me fasse
connaître la situation des affaires douze heures après votre départ.
Troyes, 4 avril 1805
A M. Cambacérès
Mon Cousin, le roi de Prusse vient de me notifier la
mort de la reine douairière; il est donc nécessaire de prendre le deuil. On le
prend à Berlin pour trois semaines. Je ne sais ce que faisait dans de telles
circonstances la cour de Versailles, dont je veux suivre l'usage. M. Ségur, qui
avait fait un travail sur les deuils, n'est pas ici. Cependant il faut se
décider promptement, afin que le deuil soit fixé avant mon arrivée à Milan.
Réunissez-vous à M. l'architrésorier pour me proposer un projet sur la manière
dont je dois porter le deuil et sur celui que doivent prendre les grands
officiers, l'impératrice, les dames, etc. Examinez s'il doit s'étendre aux
généraux et aux préfets; s'il doit être donné à la livrée, et de quelle
manière. Je ne pense pas que ce projet soit long à faire, puisque je veux faire
ce qui se pratiquait il y a quinze ans. Rédigez-le dans la forme d'une
instruction que je puisse faire imprimer dans le Moniteur. Étant dans l'usage
de porter l'uniforme, je ne crois pas devoir changer d'habit. Lorsque vous
aurez déterminé le deuil que doit prendre l'impératrice, informez-en madame
Lavalette, afin qu'elle ait à faire préparer sur-le-champ les vêtements et les
ajustements nécessaires, et qu'ils soient envoyés dans les vingt-quatre heures.
Troyes, 4 avril 1805
A M. Lebrun
Mon Cousin, je suis fâché que M. Denina ait fait une
balourdise comme celle que vous m'annoncez. Si je devais voter, après une
inconvenance pareille, je ne lui donnerais pas ma voix.
Troyes, 4 avril 1805
A M. Gaudin
Monsieur Gaudin, mon Ministre des finances, le
secrétaire d'État vous envoie un projet de rapport que vous pourrez faire
imprimer ,avec celui de Mollien, que j'ai retouché, et les deux arrêtés, sans
parler de la Légion d'honneur, dont il bon de ne rien dire en ce moment. Cette
conservation étant une des plus productives en bois, j'ai fixé particulièrement
mon attention sur cet objet du revenu public, et je me suis convaincu que les
bois ne sont pas du tout dans la bonne situation où vous les croyez. On y chasse
plus qu'il ne faudrait; mais, ce qui est plus important, tous nos bois sont
vendus vingt-cinq pour cent de moins que ceux des particuliers. Cet objet
mérite toute votre attention, et je crois qu'il y a beaucoup à faire dans la
partie de l'administration forestière. On m'assure qu'une grande partie des
bois marqués pour la marine sont vendus par les fournisseurs de la marine à
Paris; ils ont sans doute un intérêt sur cette espèce de négoce, qui nous est
préjudiciable sous plusieurs points de vue. Je vous recommande la vente des
bois du Prytanée. Poussez la vente dans les quatre départements, surtout pour
les biens de l'administration de Heidelberg. Enfin faites mettre sur-le-champ
en vente tout ce qu'il y a de biens de la dotation de la Légion l'honneur qui
n'ont pas été réservés pour la dotation des cohortes; bien entendu qu'il ne
faut rien vendre de la 4e cohorte. J'ai signé les états des biens conservés
pour deux ou trois cohortes, et j'en attends d'autres par le prochain courrier.
A mesure que ces états vous arrivent, faites mettre en vente. L'argent sera
versé dans la caisse d'amortissement, mais ce sera toujours de l'argent qu'on
pourra utiliser pour le service.
Le département de la Côte-d'Or rendra 300,000 francs
pour les droits réunis; faites-moi connaître si vous avez compté sur cette
somme. Si cela était général, les départements rendraient plus de 35 millions,
et cependant il n'y a que du vin et point de tabac et de distilleries. On a
déjà versé 160,000 francs, et cependant je ne les ois pas dans les états du
trésor public.
Troyes, 4 avril 1805
A M. Barbé-Marbois
Monsieur Barbé-Marbois, je vous envoie une
réclamation du général Mathieu Dumas(Mathieu Dumas, 1753-1837, chef
d'état-major de Davout. Sera ministre de la guerre de Joseph, à Naples puis en
Espagne. Intendant général durant la campagne de Russie) sur la solde. Il est
bien urgent de pourvoir à ce premier de tous les services, surtout dans un camp
où la grande réunion d'hommes indique assez qu'on ne peut trouver aucune
ressource. Mettez au courant la solde des camps de Saint-Omer, Montreuil et
Bruges.
Troyes, 4 avril 1805
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, je vous avais ordonné de faire partir
cinq compagnies du 79e pour le Ferrol; ces compagnies devaient former entre
elles plus de 700 hommes; elles n'étaient pas encore arrivées au 26 ventôse.
Faites-moi connaître quand elles sont parties et de quel point vous avez eu les
dernières nouvelles. Je vous avais ordonné de faire embarquer 600 hommes sur
l'escadre du général Magon; cependant il écrit, en date du 29 ventôse, que ces
forces n'étaient pas encore à son bord.
Troyes, 4 avril 1805
Au vice-amiral Decrès
Monsieur Decrès, Ministre de la marine, expédiez un
nouveau courrier an Ferrol. Faites connaître que mon intention est que les
quatre vaisseaux partent. Prescrivez qu'on se tienne prêt à partir. Ordonnez à
vos courriers de faire un peu plus de diligence, car ils sont bien longs en
route. Qu'il vous apporte à son retour l'état de situation exact de la flotte
espagnole; n'aurait-elle que pour quinze jours de vivres, il faut qu'elle
sorte; expliquez-vous-en avec Gourdon. Écrivez au prince de la Paix par un
courrier extraordinaire; dites-lui que j'attache la plus grande importance à ce
que l'escadre espagnole sorte avec les vaisseaux du Ferrol; que je lui ai fait
dire mes motifs par le général Junot et par d'autres; qu'il faut sortir,
n'eût-on qu'un mois de biscuit ou de farine; que l'escadre leur en fournira;
que, s'il n'a pas envoyé l'ordre à Cadix, il n'est peut-être plus temps; qu'il
n'y a pas un moment à perdre pour que l'on sorte.
Troyes, 4 avril 1805
A M. Fouché
Monsieur Fauché, Ministre de la police, je partage
votre opinion sur les révélations de Bretagne; mais il faut les avoir sous les
yeux pour les combiner avec d'autres indices qui se présentent, qui pourraient
faire supposer une ruse ou tout autre événement. Je m'en rapporte bien
entièrement sur tout cela à votre zèle et à votre attachement à ma personne.
Troyes, 4 avril 1805
DÉCISION
Mesabki, ancien interprète à l'armée d'Egypte, fait
connaître à l'Empereur qu'il est dans la misère, et le prie de lui accorder les
cinquante sous par jour dont jouissent les Égyptiens réfugiés.
Renvoyé à M. Talleyrand. Cet homme sait l'arabe; lui
faire une pension de 600 francs; savoir toujours où il est pour en disposer
dans les circonstances; il peut accompagner des individus dans quelques
missions.
DÉCISION
Bigarne, adjudant de place à Cologne, âgé de
trente-deux ans, demande à l'Empereur l'autorisation de continuer sa carrière
militaire dans la cavalerie et dans son grade de capitaine.
Renvoyé au ministre de la guerre, pour me faire
connaître pourquoi cet officier, qui est jeune encore, a été fait adjudant de
place à Cologne. Ce serait une mauvaise mesure, dans le cas où l'on aurait été
mécontent, de le faire adjudant de place, et, si l'on n'en est point mécontent,
il est tout aussi peu convenable de le priver de son activité.
DÉCISION
Ferrand, matelot mutilé, demande à l'Empereur une
augmentation de sa retraite, fixée à 14 francs par mois.
Renvoyé au ministre de la marine : 14 francs par
mois ne sont pas assez, s'il a perdu la jambe et la cuisse.
Troyes, 4 avril 1805
A M. Cambacérès
Mon Cousin, je suis allé hier à Brienne; j'en suis
revenu aujourd'hui à deux heures. J'irai tout à l'heure à un bal que donne la
ville. Demain, de bon matin, j'entendrai la messe avant de partir, et j'irai
coucher à Semur. M. Cretet me manque ici; je ne sais s'il est encore à Paris.
Le ministre de l'intérieur a donné ordre à Prony de se rend à Troyes; veillez à
ce qu'il parte sur le champ. Si M. Cretet est encore à Paris, dites-lui que j'ai
besoin de deux ingénieurs qui connaissent bien le mouvement des ports; que la
marine a besoin de tous ceux qu'elle emploie; qu'on en cherche deux et qu'on
les dirige sur Milan. Vous me ferez passer leurs noms, et je leur enverrai des
instructions. Si M. Cretet n'y est point, consultez auprès des chefs de ce
corps, et faites-leur donner des ordres pour que les ingénieurs partent. Vous
pourrez dire dans la conversation, sans l'écrire, sans le dire trop
ouvertement, que le roi de Prusse, l'électeur archichancelier, les électeurs de
Bavière, de Hesse, de Saxe, de Bade, m'ont fait connaître qu'ils m'ont reconnu
comme roi d'Italie.
