Les
mots d’antan
ou
Quelques mots du Parler Champenois
Ce sont des mots encore dans la mémoire des anciens.
Remarque:
Ces mots, utilisés à l’oral, n’étant pas habituellement
écrits, l’orthographe en est parfois variable et aussi la prononciation.
Le patois n’a pas droit de cité à l’école.
Certains mots qui n’ont pas d’équivalents en français
standard nous paraissent si familiers que l’on ne les considère pas comme du
patois ainsi s’entrucher.
Il y a parfois confusion entre parler dialectal et registre
familier, argotique
Il y a
les mots qui désignent un usage perdu sans être du parler champenois ainsi
paillasse
pour désigner une enveloppe garnie de paille qui sert de matelas, ou encore :
les (chaussettes) russes qui étaient des morceaux de toile, chiffons, servant à
envelopper les pieds, à l’origine utilisées par les soldats de l’armée russe et
n’ont été que récemment remplacées par des chaussettes normales mais coquassier
est bien un mot de la Marne.
A cabido, à cabidos : Sur le dos de quelqu’un. Porter un
enfant à cabidos.
Affutiaux, Futiaux: Les vêtements. Habits usagés
Argannier, arcannier: Personne gauche, maladroite. Mauvais
ouvrier
Altopier: Mauvais ouvrier
S’accouver: S’accroupir
Anhotter, ahotter: Être embourbé, empêché d’avancer
Une attelée: Durée de travail dans la journée.
Avoindre, aveindre: Attrapper un objet, atteindre en faisant
un effort
Avoinée: une raclée, une volée de coups, mettre une avoinée
Avoéner: nourrir à profusion. Donner de l’avoine aux chevaux
(est-ce un autre mot que le précédent? L’idée d’une grande quantité de coups ou
de nourriture))
Avoir les bloquets: Avoir des courbatures, des crampes
Bâche: Serpillière (la loque aux confins des Ardennes. En
Suisse, vaudois: panosse)
Badrée: Pâtes à gaufres, à crêpes. Grande quantité de
mélange, éventuellement mélange pour le
sulfatage des vignes.
Bagnolet: Coiffe avec une large visière, portée par les
femmes pour se protéger du soleil lors du travail à l’extérieur. Faite de
cretonne avec une armature de rotin ou d’osier fin. (A Vertus on dit la
hâlette, titre du journal des “ragraigneux”)
Barbiche: Avoir de la barbiche, se dit d’un enfant qui s’est
barbouillé en mangeant, avoir quelque chose autour de la bouche…Le mot barbiche
figure dans le dictionnaire du français standard. Il s’agit plus probablement
d’un usage familier de ce mot)
Bassière: Flaque d’eau. Liquide dans un fond de tonneau
Bètin: Bestiole, drôle d’animal
Boudine: le nombril
Bouvreu: Raisin encore vert à la vendange
Brousiner, broussiner: : Une petite pluie fine
Brouillasser, ça brouillasse: Pluie fine
Ça dégaille, dégailler: Au moment du dégel, ça dégaille.
Terre boueuse, glissante
Un caillot: Une noix
Catherinette: Coccinelle
Carteler: Dans un chemin éviter de rouler dans des ornières
trop profondes, en choisissant de rouler sur un bas-côté et le milieu du chemin.
Charbonnée: Morceaux de cochon distribués aux voisin lors de
l’abattage
Charculot: Malvenu d’une portée, d’une couvée, le dernier né
Chanlatte: Gouttière
Cochelet: Repas de fête à la fin des vendanges
Coquassier, cocassier ou coquetier: le commerçant qui
ramassait dans les fermes des oeufs, des volailles, des lapins et puis les revendait
…
Coquemar: Bouilloire sur le coin de la cuisinière
Corasse: Grenouille
Crouni, être crouni: Fatigué, épuisé, fourbu
Cuider, ça cuide, ça décuide: Vendange plus importante que
prévue, ou moins importante (vient sans doute du vieux français
“cuider”:croire)
Dedrussir: Enlever des herbes, des plantes en trop pour que
la plantation soit moins drue. Desserrer
Ça dégaille, dégailler: Au moment du dégel, ça dégaille.
Terre boueuse, glissante
Déloqueter: déshabiller (dialectal ou argotique?)
Derne, darnu, les darnus de mai: Avoir la tête qui tourne,
pris de vertige. Être un peu fou.
Drapiot: Couche, lange pour bébé
Empierger (s’): Se prendre les pieds dans quelque chose (Canton
de Vaud, Suisse: s’encoubler)
Entrucher (s’): Avaler de travers (le français standard
n’offre pas de mot pour cela)
Escarter, essarter: nettoyer le bois dans la coupe
Epantiau, Epantail : Epouvantail
Fouire, déclichette: La diarrhée
Ferloque: Des objets sans valeurs, des guenilles
Fier: Acide, un vin fier
Gadouille, gadouiller, gadouilleux: Boue liquide terre
détrempée, patauger dans la boue
Gouille, gouiller: Flaque d’eau
Gôyer: se salir, salir
Galette: Employé pour: tarte
Galipes: Les vignes
Geindeux: Désigne quelqu’un qui se plaint souvent. “Un bon
geindeux vit vieux”
Godine: Génisse, vache
Gougnafier: Personne qui se comporte salement, qui gâche les
choses
Hoché: Secoué, ivre. Sur le point de mourir. Il est
complètement hoché
Hocher: Faire. Quoi que t’hoches?
Hocques: Souche de vigne, cep sec coupé au moment de la
taille
Hordon: Equipe de vendangeurs
Mahonner: Marmonner
Mai: Bouquet de muguet que l’on accroche au premier mai
Maumûr, les maumûrs: Raisins qui ne sont pas mûrs. Le panier
de
maumûrs. Les maumûrs sont (étaient) destinés à la rebêche, à
la piquette
Menteries: Mensonges, racontars
Midauguée: Mélange de sulfate de cuivre et de chaux vive
pour le sulfatage des vignes.
Mingrelle: Gros moustique
Mouziner: Bruiner, brouillasser, brousiner. Ca mousine
Moyère: Tas d’échalas dans les vignes
Nareux: Une personne sourcilleuse, difficile, exigeante, sur
les aliments
Nature (vin): vin blanc avant la champagnisation. Vin nature
de la Champagne
Nicasser: Rire bêtement, ricaner
Odé-e, hodé-e: Complètement fatigué-e, épuisé-e
Ourser: Il est entrain d’ourser aux champs. Travailler dans
son coin
Papinette: Cuillère en bois avec un long manche pour la
cuisine
Passette: Petite passoire
Patasser: Piétiner, marcher sur place
Patichonner: Malaxer maladroitement
Pétériot: Genèvrier. Autrefois attaché sur la façade des
cafés, sorte d’enseigne.
Poireau: Verrue
Queurce: Pierre à affuter
Racoin: Endroit difficile d’accès. “dans tous les coins et
les racoins”
Ragrainer: Ramasser les petits morceaux. Ragrainer son
assiette,
ramasser les miettes sur la table, au fond du plat.
Ratabouiller: Rebouillir le vin
Récoué: Fini, mort. Défleuri
Relavette: Chiffon à laver la vaisselle
A tantôt: À tout à l’heure, à bientôt. À cet après-midi
Taugnée, brossée, avoinée: Des coups. Râclée, volée
Trésalé: Grain trop mûr, ridé
Verder, envoyer verder: projeter, aller vite
Anciennes
mesures:
L’arpent 42 ares (environ) ou 8 denrées
Mot d’origine gauloise a donné: arpenter, arpentage,
arpenteur. Lemot arepennem désignait ce qui est devant, l’extrémité d’un champ avant
de désigner une surface 2 arpents et demi = un hectare
La denrée
La perche
Le boisseau: 12 litres (matière sèche)
Pour la semaison : six boisseaux l’arpent
Le muid : i8 hl 28
Le demi-muid
La feuillette: 137 litres
Pour
mémoire, le mètre
Naissance du mètre en 1791.
Les cahiers de doléance rédigés lors de la Révolution de
1789 réclamaient une mesure universelle pour s'affranchir de l'arbitraire des
unités de mesure seigneuriales.
(…) 26 mars 1791, date de création du mètre qui est défini
comme la dix millionième partie du quart du méridien terrestre.
(…) il faudra attendre la loi du 4 juillet 1837, sous le
ministère de François Guizot, pour que le système métrique décimal en France2
soit adopté de manière exclusive.
Prononciation
Timbre
des voyelles:
Argot pour ergot
Alle (elle) a venu
Ratourner pour retourner
Les
voyelles nasales parfois plus fermées
Permutations
ou métathèse:
Bertelles (bretelles)
Ortrie, ostrie (ortie)
Palatalisation:
Biau (beau)
Tyuré (pour curé)
Gadouille (gadoue)
Compter
les œufs :
1 oeuf, 2 “deuzeu”, 3 “trwazeu”, 4 “katroeuf”, 5 “sinkoeuf”,
6 “sizeu”,
7 “setoeuf”, 8 “huitoeufs”, 9 “neufoeuf”, 10 “dizeu”….
Et vous
? Comment comptez-vous les œufs ?
La règle étant : œuf “œuf” au singulier, œufs au pluriel
prononcé avec changement du timbre de la voyelle, ouvert/fermé, et suppression
du “f” en finale. “lezoeu”.
Or à date ancienne, en Champagne comme dans quelques autres régions
de France, la prononciation représentée ci-dessus était courante. A Villevenard il en était encore ainsi dans
les années 50,60.
C’était si naturel que ce fut une grande surprise pour
l’auteure de ces lignes de découvrir, très tard, qu’elle comptait,
spontanément, les œufs de cette manière. La différence vient de la liaison en
“Z” qui entraîne la modification du timbre de la voyelle et la disparition du
“f” final.
Cette manière de compter semble avoir disparu chez les plus
jeunes. Il faut dire aussi que l’on ne va plus guère ramasser les œufs…
Emploi
des auxiliaires : être et avoir
Tendance à généraliser l’emploi de l’auxiliaire avoir.
Il(s) ont venu. il’ont venu pour ils sont venus
Il(s) ont mangé pour ils ont mangé (normalement avec liaison
en Z)
Proverbes
/ expressions
T’es comme à Gourgançon à table jusqu’au menton
Un bon geindeux vit vieux
Les darnus de mai
Des pruneaux M’sieur l’curé, not’ cochon n’en veut plus.
Et les nombreux proverbes en rapport avec le calendrier et
les saints liés à la culture et à la vigne…
Quel
est le nom des habitants de Villevenard ?
Le sobriquet connu est : les cossiers…
Dans: Le lexique du paysan et du vigneron champenois de Lise
Bésème-Pia, la définition proposée est : vigneron, mangeur de cosses ou fèves.
Mais dans ce cas ce nom de cossier désigne tous les
vignerons champenois, pourquoi seulement les habitants de Villevenard ?
On est tenté en premier lieu de rapprocher ce mot d’un mot
familier connu: cosse, avoir la cosse (être paresseux) mais le dérivé serait cossard
et sincèrement on ne voit pas le moindre rapport.
Dans le dictionnaire Littré, figure le mot cosser
signifiant: se heurter la tête l’un contre l’autre en parlant des béliers. Sens
figuré: Il ne fait point bon cosser avec de telles gens.
Cela remet en mémoire une opinion formulée par un notaire de
la région selon lequel la réputation générale des gens de Villevenard est que
ce ne sont pas des gens faciles, qui ont la tête dure.
Qu’en pensez-vous?
Et pourquoi appelle-t-on les Rémois cornichons?, Les
habitants de Troyes, les ribauds?
Quelques
généralités…
Le français langue d’origine latine, s’est répandue, sur des
bases écrites à partir de la région parisienne. À côté de cette langue commune
des langues régionales n’ont pas totalement disparu. Le basque, une des plus anciennes
langues d’Europe aux origines inconnues, le breton qui appartient à la branche
celtique, l’alsacien, le flamand qui appartiennent à la branche germanique et
des parlers romans qui appartiennent à la branche latine. Dans cette branche on
distingue les parlers du domaine d’oïl, au nord de la France, du domaine d’oc,
au sud et du domaine francoprovençal, Savoie, Suisse . “oïl” et “oc” sont les
deux manières de dire “oui“au Nord et au Sud de la France.
Chacune de ces langues a sa propre histoire. Plusieurs
d'entre elles ne sont quasiment plus parlées. Il s'agit presque toujours de
langues ayant perdu toute unité, éparpillées en de nombreux patois variant
parfois d'un village à l'autre. C'est le cas de la plus grande partie des
langues d'oïl. Il n’existe que de rares exceptions comme le gallo qui survit
grâce à l'appui des mouvements identitaires bretons ou le picard sous la forme
d'un patois du nord : le chti. langues d'oïl : le francien, l'orléanais, le
tourangeau, le berrichon, le franc-comtois, le wallon, le picard, le
champenois, le normand, le gallo, le poitevin-saintongeais, l'angevin, et le
bourguignon (cf. Henriette Walter)
Un parler: variété de
langue parlée sur un territoire restreint tout comme le patois.
Un patois: variété de langue restreinte à un petit nombre de
locuteurs et parlée sur un territoire également restreint, généralement rural.
Un dialecte: ensemble de plusieurs patois partageant des caractéristiques
communes.
Le dialecte champenois faisait partie des langues d’oïl.
Mais sa grande proximité avec la région parisienne a fait qu’il a eu du mal à survivre.
Ce qui en subsiste concerne généralement le travail de la vigne, du vin et des
champs et varie souvent d’un village à l’autre.
Au XIIème siècle, Chrétien de Troyes, à la cour des comtes
de Champagne est considéré comme le premier romancier de langue d’oïl. Il écrit
dans une langue déjà dominée par les usages de Paris.
La Champagne linguistique correspond aux départements de la Marne,
de l’Aube et de la Haute-Marne.
Bibliographie:
Lexique du paysan et du vigneron champenois, Lise
Bésème-Pia, chez Jean-Luc Binet.
Le parler de Champagne, Michel Tamine, chez Christine
Bonneton, 2009
Le Parler Champenois, Gustave Philipponnat, 1941
Petit vocabulaire du langage champenois, G.Crouvezier, 1959
Janvry-Germigny, Les mots oubliés, Guerlin-Martin& fils,
Reims, 1998
Aventures et mésaventures des langues de France, Henriette
Walter, éditions Honoré Champion, 2012
Revue “Lou Champaignat”, Troyes
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