Bien rares sont sur notre territoire les cités aussi
riches en vestiges anciens autant visibles et si remarquables. Encore plus
rares sont les villes où ce patrimoine fait l'objet de tant d'attention et de
protection. On peut même qualifier sans hésiter la ville de Troyes comme
"le modèle français qu'il faut suivre par excellence" en matière de
préservation des belles choses anciennes.
En effet, même les longues et vieilles cheminées
d'usines en briques, dont personne ne veux, sont protégées au titre de monument
historique dans ce paysage urbain, ce qui semble être un cas unique en France.
Paradoxalement, le manque de pierre à bâtir dans la
région, qui fait normalement l'apanage des villes prestigieuses, en fait encore
une exception car la brique et le bois qui se sont progressivement développés
ont su très bien la remplacer et ont fait sa renommée.
On retrouvera le souci du détail et la tradition
ancestrale maintenue jusque sur les tampons d'assainissement en fonte par
exemple, qui sont actuellement les seuls du pays à être recouverts
d'incrustations en bois, ce qui nous rappel avec nostalgie l'époque où
circulaient les carrosses aux bruyantes roues en fer sur le pavé de grès et que
cette isolation estompait de manière dérisoire.
Si la vieille ville est pratiquement constituée de
belles façades à colombages du XVIe
siècle que les incendies et la guerre ont épargnés, la majeure partie des caves
situées juste en dessous a une origine bien souvent médiévale. C'est dire tout
le mystère qui reste encore à découvrir en explorant toutes ces vieilles caves
aujourd'hui oubliées ou remplies d'immondices.
Quelques
puits dans la ville
A partir de 1856 fut commis le pire des crimes qu'il
puisse y avoir eu lieu dans cette vieille ville. Il fut en effet décidé par
arrêté municipal de raser tous les puits pour laisser place à de modernes
fontaines qui drainaient une eau soit disant bien plus pure pour
l'alimentation.
Plusieurs centaines de puits, publics ou privés
furent ainsi détruits, anéantissant en quelques années un patrimoine
inestimable qui fut irrémédiablement perdu à jamais.
Une commission historique tout de même décréta le
sauvetage de treize margelles présentant un caractère historique exceptionnel.
Ce sont en partie (puisque certains ont disparu !) ces quelques vestiges,
sauvés du vandalisme des hommes qui trônent encore aujourd'hui de-ci de-là dans
les vieilles rues et que la bienveillante administration municipale actuelle
tente de réhabiliter avec ardeur et savoir-faire, comme pour se faire pardonner
de son irréparable faute commise dans le passé.
Ce grand puits, avec sa margelle octogonale armoriée, de facture récente, mais qui reproduit assez fidèlement le puits original de 1467 aujourd'hui détruit, occupe son ancien emplacement sur l'ancienne place du Marché-aux-Oignons. La belle ferronnerie à triple poulie que nous voyons ici a été miraculeusement préservée et rapportée il y a peu d'un autre puits situé dans la cour de l'hôtel du Petit Louvre lors de travaux d'aménagement. Cette ferronnerie date de 1473.
J'ai gardé le meilleur pour la fin :
Cuve baptismale du XVe siècle, provenant de l'ancienne église St-Jacques-aux-Nonnains, démolie en 1796.
Cette cuve fut réutilisée ensuite comme margelle de puits dans la cour d'une maison troyenne avant de trôner à son emplacement actuel.