dimanche 25 mai 2025

Jean Léguisé Évêque de Troyes

 

Saint-Évêque - XIVe siècle

Jean Léguisé Évêque de Troyes, signe les Statuts Synodaux de Jean Colet avec Odar Hennequin.

Il s’agit d’un ouvrage important, daté de 1530, édité chez Jean Lecoq sous l’autorité de l’évêque de Troyes. C’est une œuvre de Jean Colet, juriste au tribunal épiscopal, natif et curé de Rumilly-les-Vaudes (de 1465 à 1479), qui rassemble les statuts promulgués par Jean Bracque (1370-1375), Jean Léguisé* (1426-1450) et Odard Hennequin (1525-1544), évêques de Troyes.

voir : STATUTS SYNODAUX DE JEAN COLET : ici


Odard Hennequin XVIe-XVIIe ( ?) Sacristie de la cathédrale de Troyes

Bandeau dans registre inférieur : OVDART . HENNEQVIN . AVMONIER . DE FRANCOIS . Pr . / EVESQVE . DE . SENLIS . PVIS . DE . TROIES . MORT . EN . 1544.


Jean Léguisé naît à Troyes et y fait ses études.

 En 1426, il est placé sur le trône épiscopal.

 En 1429, Troyes est "possédé par les Anglo-Bourguignons" qui tiennent garnison. Le 5 juillet, Jeanne d’Arc, conduisant l’armée française, se présente devant Troyes qui était forte par ses murailles.

A une lettre du Dauphin lui demandant d’ouvrir ses portes, la municipalité répond que les défenseurs résisteront jusqu’à la mort. Travaillés par l’évêque Léguisé, qui les exhorte vivement de se rendre, les éléments français restés en ville, avec les habitants, obligent la garnison à capituler.

 Le roi est reçu avec les témoignages de la joie la plus parfaite.

Tous les historiens disent que « les événements qui se passèrent à Troyes du 5 au 12 juillet 1429, décidèrent du sort de la France ».

L’entrée des troupes royales dans la ville ont un retentissement considérable : les villes situées sur la route de Reims se rallient alors au Dauphin.

C’est ainsi que " Troyes fut le triomphe du Droit et de la Justice. Ce fut la grande revanche du traité sacrilège et déshonorant livrant la France à l’étranger, qui y avait été signé en 1420, et que, de toutes les autorités politiques de l’époque, seule la Papauté, seul le pape Martin V, ne voulut pas reconnaître ".

Jean Léguisé décède à Paris le 3 août 1450, son corps est amené à Troyes et il est inhumé dans la chapelle du Sauveur de la cathédrale, avec une inscription sur son tombeau.

Par un testament aujourd’hui perdu, il lègue ses biens à sa mère Guillemette de la Garmoise, héritage qu’autorise la coutume de Champagne. Celle-ci avait alors confié certains objets liturgiques à Jacques de Roffey, lieutenant général du bailli de Troyes « pour et ou nom de Révérend père en Dieu monseigneur l’évesque de Troyes ».

Mais une charte du 9 janvier 1480 porte un conflit d’héritage à notre connaissance. Les descendants de la mère de l’évêque, décédée, souhaitent en effet récupérer les biens transmis au bailliage et appartenant soi-disant au défunt.


Cote G464 (Archives départementales de l'Aube)


S’engage alors, trente ans après la disparition de Jean Léguisé, un procès qui va durer huit années. Dans une cédule datée du 25 février 1450 [1451 n. st.] et recopiée dans la présente charte, Jacques de Roffey confessait avoir reçu de la mère de l’évêque :

« une mictre ensemble les deux lambeaulx servans à ladite mictre garnye de plusieurs pierres fines et pelles pesant ensemble douze marcs six onces et demye. Item une crosse ensemble trois bartons dargent fin à ladite crosse en laquelle y a des pierres et pelles fines pesant ensemble vingt et quatre marcs une once d’argent. Item deux agneaulx pontificaulx d’argent dorez où il y a des pelles et des pierres. Item les sandales et les soulers pontificaulx. Item deux paires de guans esquels a deux esmaulx d’argent dorez et esmaillez avec la tonaille. Item deux mictres blanches de boucassin ayens deux pendens. Item une chasuble de lin garnye d’estolle et manipulon. Item une tunique et dalmatique blanchez. Toutes ces choses dessus dites servans à un évesque et appartenant à ladite vesve ».

Les héritiers somment Jacques de Roffey de répondre de cette affaire. Ce dernier affirme avoir gardé les objets liturgiques pour l’exercice du culte de Louis Raguier, successeur de Jean Léguisé ; ce que Jean Pinette, procureur de l’évêque, confirme, avançant tous deux que

« lesdites crosses et mictres estoient des biens de feu maistre Estienne de Givry jadis évesque dudit Troyes prédécesseur immédiat de feu maistre Jehan Lesguisé ».

Les objets en question sont en effet dédiés au culte ecclésiastique, certains pouvant même faire partie du trésor de la cathédrale de Troyes.

Après plusieurs rebondissements, c’est finalement le Parlement de Paris qui statue en faveur de Louis Raguier, l’évêque pouvant conserver les objets de la querelle. Mais la famille Léguisé fait appel de cette décision, considérant qu’ils sont les « vrais héritiers de ladite Guillemectre et dudit feu maistre Jehan Lesguisé ».

L’affaire est définitivement close en 1488. D’autres membres de la parentèle Léguisé affirment avoir :

« bonne et vraye amour » pour leur nouvel évêque Jacques Raguier, successeur de Louis Raguier. Pour cette raison, « ilz ont donné, cédé, quinté, transporté et délaissé et par ces présentes donnent, cèdent, quinctent, transportent et délaissent par donacion irrévocable faicte entre vifz et sans le povoir ou vouloir jamais rappeller en aucune manière ». L’évêque peut désormais posséder ces biens « pour en faire et disposer comme des biens meubles appartenant audit évesché ».

Ce procès montre que la frontière entre les domaines privé et public est ténue. Elle est bien comprise des hommes d’Église et d’État : Jean Léguisé et sa mère, Louis Raguier et Jacques de Roffey ont conscience que ces biens appartiennent à l’évêché. Mais pour les Léguisé, cette frontière est plus floue.

Ironie du sort, Louis Raguier meurt le 19 août 1488, au moment de la rédaction des deux dernières chartes et de l’entière renonciation de la famille à hériter. Cette affaire aura donc durée 38 ans, de 1450 à 1488, sur une période de quatre épiscopats.

Le 5 décembre 1980, le conseil municipal donne son nom à une rue de Troyes.






Des troyens à Saint-Louis-des-français de Rome

 

Église St Louis des Français - Rome


St Louis sur la façade de l’église (en bas à gauche)


On lit, dans l’église de Saint-Louis-des-Français, à Rome, 3 épitaphes qui rappellent le souvenir d’autant de personnages originaires du diocèse de Troyes.

 1ère Epitaphe

Jean Milet, français, originaire de Troyes, est devenu citoyen romain par un séjour prolongé dans la Ville-Eternelle, après y avoir exercé, pendant toute sa vie, les fonctions de maître de la signature des brefs apostoliques. Il décède en 1577, à l’âge de 62 ans. 

2ème Epitaphe

Daniel Hannier, également aubois, originaire de Dosnon en notre diocèse, qui acquit le titre de citoyen romain, en remplissant à Rome, l’emploi de scribe des brefs apostoliques. Il décède en mai 1577, âgé de 59 ans.

 Cette communauté d’origine, cette similitude de fonctions, expliquent les « relations amicales et intimes qui ont existé entre ces deux diocésains ».

 Jean Milet est le protecteur de Daniel Hannier, ayant sur son compatriote, la supériorité de l’âge et celle de la position qu’il occupe.

 Ils décèdent  tous les deux, la même année. Jean Millet a deux fils, Augustin et Alexandre. Lors de son décès, Hannier teste en faveur d’Augustin qu’il a adopté. C’est ce dernier qui consacre, dans l’église de Saint-Louis-des-Français, un souvenir de reconnaissance à l’ami de son père dont il a été constitué l’héritier, par une épitaphe qui relate ses titres de citoyen romain et de scribe des brefs apostoliques. La qualification de : Viro officii ac fidei pleni, qui précède l’indication de ses bienfaits, constate simplement sa constance dans l’amitié et le penchant naturel de son cœur toujours disposé à rendre des services.

Jean Milet appartient à une très ancienne famille, dont les membres exerçaient, à Troyes, depuis de longues années, la charge de notaires. Un de ses ancêtres, joua un certain rôle pendant la domination des Anglais en France. Il était notaire et secrétaire d’Henri VI, roi d’Angleterre, et du duc de Bedford, régent du royaume. De plus, il remplissait les fonctions de secrétaire auprès de la haute commission gouvernementale de la Champagne, dont il était membre.

 Jean Millet né à Troyes en 1514, arrive fort jeune à Rome, puisqu’il remplit toute sa vie les fonctions de maître de la signature des brefs apostoliques. Cet emploi a beaucoup d’analogie avec la charge de notaire. C’est Clément VII (1523-1534) qui le lui a conféré. Par conséquent, le titulaire a tout au plus 20 ans, à l’époque de la mort de son illustre protecteur.

 Des événements politiques ont peut-être forcé le père de Jean Millet à s’expatrier, en raison du rôle compromettant et peu honorable pour sa famille, qu’avait joué à Troyes, un de ses ancêtres. Il aurait emmené, dans son voyage, avec son fils, le jeune Daniel Hannier, qui lui était étroitement uni par les liens d’une amitié d’enfance. Ce dernier, au moment du départ de notre ville, était attaché à l’étude du père.

3ème Epitaphe

 Jacques Vignier, fils de J. Viguier, Marquis des Riceys, Comte de La-Chapelle-Gonthier, Baron de Juilly, Villemaur et Saint-Liébault, Seigneur de Chennegy, Maître des requêtes, Conseiller d’Etat et privé, Intendant des finances, et Président aux Etats de Bourgogne, et de Marie de Mesgrigny, fille d’Eustache de Mesgrigny de Villebertin. Jeune, il a été pourvu des prieurés de Saint-Martin-des-Champs et de Notre-Dame-d’Argenteuil.

 Il a à peine 20 ans, lorsqu’il est désigné pour occuper le siège épiscopal de Troyes, en remplacement de Mgr René de Breslay, démissionnaire en 1621. Après sa nomination, le nouveau prélat se rend à Rome, afin d’obtenir lui-même ses bulles, en attendant qu’il ait atteint l’âge canoniquement requis pour recevoir l’ordre de prêtrise et la consécration épiscopale.

 Pendant ce voyage, la Sorbonne le proclame Docteur en théologie. Ce titre n’a jamais été accordé à aucun absent, ni à personne aussi jeune que lui. La Faculté, en le lui conférant, a eu égard à ses talents extraordinaires.

 Il a soutenu et expliqué, en quatre exercices publics, tous les mystères de la théologie, « avec une érudition merveilleuse et au-dessus de son âge ». Par son savoir prodigieux, « il a excité l‘étonnement, comme l’admiration, de la France entière, à un tel point, qu’on le comparait à Jean Pic de la Mirandole ».

 Marie de Mesgrigny, sa mère, établit à Troyes (14 septembre 1620), avec l’aide du cardinal de Bérulles, une communauté de carmélites, qu’elle reçut dans la maison paternelle d’Eustache de Mesgrigny de Villebertin. Jacques désirait vivement assister à la canonisation de sainte Thérèse, fondatrice de cet ordre religieux. Il eut cette satisfaction pendant son séjour à Rome.

En effet, le 12 mars 1622, le pape Grégoire XV, à la sollicitation du Sacré-Collège, des rois de France et d’Espagne, et des généraux des différents ordres, canonisa, dans une seule solennité, 5 illustres personnages, recommandables par leurs vertus et la sainteté de leur vie : saint Isidore l’agriculteur, saint Philippe de Néri, florentin, fondateur de la congrégation de l’Oratoire, saint Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus, saint François-Xavier,  associé de saint Ignace, pour la fondation de la Compagnie de Jésus, et sainte Thérèse, fondatrice de l’ordre des Carmes-Déchaux. Cette solennité, dont Jacques Vignier fut témoin, se fit avec la plus grande pompe. Annoncée et préparée longtemps à l’avance, elle attira à Rome une foule considérable d’étrangers, avec beaucoup de Français.

 Six semaines après son arrivée à Rome, et 16 jours après la canonisation de sainte Thérèse, Jacques Vignier, atteint d’une maladie mortelle, succombe le lundi de Pâques 28 mars 1622, à l’âge de 22 ans. Son corps est inhumé dans l’église de Saint-Louis-des-Français.


Chapelle Saint-Louis - Église Saint-Louis des Français de Rome

Retable représenant Saint-Louis roi de France


L’église est une exaltation de la France à travers la représentation de ses saints et de ses grands personnages historiques. Ainsi, en façade se trouvent les statues réalisées par Pierre de l’Estache qui représentent Charlemagne, Saint Louis, Sainte Clotilde, et Jeanne de France. En outre la salamandre de François Ier est présente aux extrémités.

A l’intérieur des fresques représentant l’Apothéose de Saint-Louis et de Saint-Denis ainsi que des histoires de la vie de Clovis et des Francs.

Elle est formée de trois nefs avec cinq chapelles de chaque côté, une décoration baroque d’un foisonnement de marbres, dorures et sculptures.

Les chapelles sont dédiées à saint Denis, sainte Cécile, Jeanne de Valois, Saint Louis, Saint-Sébastien, à l’Immaculée Conception et à la confrérie des Lorrains. La toile du maitre-utel est une Ascension de la vierge de Francesco Bassano.

Dans la chapelle Sainte Cécile, des fresques du bolonais Dominiquin représente des passages de l’histoire de Sainte-Cécile (1616-1617), et sur l’autel est exposé une copie de la Sainte Cécile de Raphaël réalisée par Guido Reni.

C’est dans la cinquième chapelle de gauche, la chapelle Contarelli, que se trouvent trois chefs-d’œuvre de Caravage: Le Martyre de saint Matthieu (1601), Saint Matthieu et l’ange (1602) et la Vocation de saint Matthieu (1601).

Une fresque au plafond de cette chapelle, la Résurrection de la fille d’un roi, représente un autre épisode de la vie de saint Matthieu, réalisée par le Cavalier d’Arpin, ancien maître de Caravage.

La quatrième chapelle côté sud est consacrée à Clovis et à sa conversion au catholicisme avec son baptême à Reims par Saint Rémi en 496, qui fit de lui le premier roi chrétien de France. Les œuvres de la chapelle datent du XVIe siècle. Au-dessus de l’autel, le tableau où Clovis détruit les idoles est de Jacopino del Conte. A droite, le baptême de Clovis est de Sermoneta, peintre de l’école de Raphaël. Sur la voûte sont présentés des épisodes narrés par Grégoire de Tours comme la prise de Soissons, le vase de Soissons et la bataille de Tolbiac.

La chapelle baroque dédiée à Saint-Louis est l’œuvre de Plautilla Bricci, une femme peintre, sculpteur et architecte, qui y travailla entre 1644 et 1680. A gauche, Catherine des Médicis présente à Saint Louis le plan de l’église de Nicola Pinson et à droite saint Louis apporte à Paris la couronne d’épines de Luigi Giminiani.

L’église conserve aussi plusieurs tombes, comme celle Pauline de Beaumont construite par son amant François-René de Chateaubriand, ou encore un monument dédié au peintre du XVIIe siècle Claude Lorrain, ainsi que la tombe du cardinal François Joachin de Bernis, qui était ambassadeur des rois de France (Louis XV et Louis XVI). Un monument aux morts est consacrés aux français ayant péri à Rome lors du siège de 1849.



Monument aux soldats français morts sous les murs de Rome 
Hommage du pape Pie IX


En contre-façade, le très bel orgue fut construit par Joseph Merklin en 1881.





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