Georges de Vaudrey, marquis de st-Phal par Louis le
Nain.
musée Saint Loup de Troyes
La généalogie de Vaudrey
produite en 1670 devant M. De Caumartin (Louis-François
Le Fèvre de Caumartin de Boissy d'Argouges 1624-1687), intendant de Champagne (1667 à 1673), nous
voyons que deux membres de cette famille ont porté le prénom de
Georges et possédé la seigneurie de Saint-Phal, que l’un était mort
en 1608 et que l’autre, fils du premier, mourut en 1616.
Georges
II de Vaudrey était le fils de Georges 1er de Vaudrey,
gouverneur et bailli de Troyes en 1853, et de Jeanne du Plessis de Beaupréau. Cette dernière mourut à
Paris en avril 1854, et ses restes mortels furent transférés à Troyes et
inhumés en l’église collégiale de Saint-Etienne. Tout le clergé, tous les corps
de la ville, les pauvres des hôpitaux de Saint-Nicolas, de la Trinité et de
Saint-Bernard, 100 autres pauvres, dont 50 étaient de la terre de
Saint-Phal, avec des torches, se rendirent en cette église pour le convoi.
Le
père de Georges II, en qualité de bailli de Troyes, fonction qu’avait
également remplie Anne de Vaudrey, son grand-père, seigneur de Saint-Phal
et bailli de Troyes, était le premier personnage du pays. On sait en effet
que les baillis, malgré les restrictions apportées à leurs attributions
primitives, étaient encore dans les derniers siècles de la monarchie, des
fonctionnaires occupant une haute situation. C’est ainsi que la reine de
France, Louise de Lorraine (1553-1601), épouse d’Henri III, roi de
France (de 1575 à 1589), passant à Troyes le 7 juillet 1582, revenant de
son pays natal, après avoir été se loger à Saint-Lyé, maison de campagne de
l’Evêque de Troyes, le lendemain, elle alla coucher au château de
Saint-Phal, où elle fut reçue somptueusement par Georges de Vaudrey,
marquis de Saint-Phal. Elle en partit ensuite pour se rendre en Bourbonnais, où
le roi devait se trouver.
Georges
II épousa en 1608 Anne Largentier, fille de Nicolas Largentier, baron de
Chapelaine, seigneur de Chamoy et de Vauchassis, et de Marie La Mairat. Il
était alors chevalier de l’ordre du Roi. Son grand-père, Anne de Vaudrey,
bailli de Troyes du 28 novembre 1559 au mois de février 1579, époque de sa
mort, fut élu député de la noblesse du baillage de Troyes aux
Etats-Généraux de 1560 et 1576. Il prit part au siège de Vézelay en 1569,
en qualité de maréchal de camp, et se signala par son intolérance envers
les protestants. Enfin, il acquit un triste renom en devenant l’un
des exécuteurs de la Saint-Barthelemy à Troyes. Le 4 septembre 1572, il
fit massacrer 45 personnes qu’il avait fait incarcérer peu de jours
auparavant et qui étaient convaincues ou simplement soupçonnées, d’avoir
favorisé la propagande des idées de la Réforme.
Le
bailli Anne de Vaudrey tombe malade en janvier 1579, et meurt au
château de Saint-Phal fin février. " Avant d’aller rendre son compte
à Dieu, il fut les 8 derniers jours de sa vie, agité d’horribles frayeurs, d’un
grand effroi, de tremblements et de chagrin. Pendant celle qui précéda son
décès, il blasphémait, furent entendus en sa chambre des cris fort
épouvantables de voix horribles et confuses, qui ne cessèrent qu’à
sa mort ". Un service fut célébré en son honneur, à Saint-Etienne, le
bailli étant paroissien né de cette collégiale de fondation royale. Anne
de Vaudrey eut pour successeur son fils Georges, seigneur de Saint-Phal,
marquis de Beaupréau, dans sa fonction de bailli. Le château de Saint-Phal
fut contesté par sa mère. Il se fait alors appuyer, dans ses prétentions, par
l’échevinage, en raison de la sûreté que ce château donne à la ville contre les
ennemis venant de Tonnerre et de l’Auxerrois.
Georges
1er, fils d’Anne et père de Georges II, se rallia au Béarnais, et
lorsqu’en 1592, le duc de Guise mit le siège devant le château de Saint-Phal,
la garnison résista courageusement sous les ordres du capitaine La Planche. Le
duc de Guise dut lever le siège. Ses soldats se vengèrent de leur insuccès
en mettant le feu au pays dont un tiers fut brûlé.
Voici
un fait, dont le principal auteur est Georges-Anne-Louis de Vaudrey,
chevalier, seigneur de Saint-Phal, descendant de 2 anciens baillis de
Troyes, assisté de 22 de ses domestiques ou sujets. La plainte lui
reprochait d’être, en 1660, entré dans la chapelle de Mâchy, pendant les
vêpres, d’avoir interrompu le service, fait sortir le prêtre et cesser
l’office, d’avoir maltraité les habitants de saint-Phal,
d’avoir enlevé, sur le grand chemin, Jeanne Aubron, fiancée d’Etienne
Gauthier, d’avoir amené cette fille dans son château en la plaçant en croupe
sur son cheval, de l’avoir forcée et violée, d’avoir battu et excédé
ledit Gauthier qui s’opposait à l’enlèvement de sa fiancée, d’avoir avec
plusieurs de ses domestiques et Taulin, son fils naturel, battu dans sa
maison une femme, laissée pour morte, d’avoir abattu et démoli, dans
Saint-Phal, plus de 20 maisons et la halle, où se tenait le marché et
l’auditoire (enceinte où l’assemblée se réunit), d’avoir obligé les habitants à tenir leurs plaids (assemblées) dans son château, et exigé d’eux chacun 3
livres pour avoir le droit de vendanger, d’avoir saisi
chevaux, voitures et vendange et emmené les gens prisonniers au
château, de les avoir battus et maltraités, mis au cachot pendant 15
jours, et exigé d’eux 3 livres pour leur rendre la liberté, d’avoir fait
dépouiller et vendanger 12 arpents de vigne, et d’avoir battu et
emprisonné plusieurs habitants pendant 7 mois… …
Pendant
l’instruction, de Vaudrey fut arrêté et retenu prisonnier. Il obtint sa
remise en liberté sous caution et ne reparut plus. Les complices
furent laissés en liberté et tous furent condamnés par défaut. Ils furent
bannis par le Parlement, les grands-Chambres, la Tournelle et celle de l’Edit
assemblées, à cause de la qualité du principal coupable, pour 3 années de la
prévôté de Paris, du bailliage de Troyes et de celui de Saint-Phal, avec
injonction de garder leur ban (terme de féodalité, convocation
des vassaux directs du roi pour le service militaire), sous peine de la hart (la corde dont on étranglait les
criminels). Ils furent condamnés à 800
livres parisis de dommages-intérêts envers le sieur et dame de Portebize,
plaignants, 400 livres d’amende, applicables au pain des prisonniers de la
conciergerie du Palais. De Vaudrey fut condamné, aussi par défaut,
en 8.000 livres de dommages-intérêts, 2.400 livres pour le pain des
prisonniers, à tenir prison pour lesdites sommes. Il lui fut fait défense
de récidiver, sous peine de la vie, ni de tenir les prisons et auditoire
de sa seigneurie, dans l’enceinte de son château. Il fut condamné
à construire d’autres prisons, qui ne pouvaient être plus basses que
le rez-de-chaussée, et aussi un auditoire. Les plaignants sont déclarés
exempts de tous droits seigneuriaux envers le condamné et sont placés sous la
sauvegarde du roi (arrêt du 13 février 1665).
Georges-Anne-Louis
de Vaudrey n’était pas
seulement violent et emporté, car d’autres faits de cette sorte lui
sont reprochés. Il régit mal ses domaines, se mésallie en épousant Jeanne
Aubron, qu’il avait enlevée et enfermée dans son château, et dont il eut 2
filles qui firent des mariages en dehors de la condition de leur père, qui
déjà avait un enfant naturel, qui, sous le nom de Jean Taulin, prenait
part aux nobles actions de son père.
Enfin,
en 1672, la seigneurie de Saint-Phal fut saisie sur lui, achetée sur
décret par le comte d’Avaux, qui bientôt revendit cette belle seigneurie
au comte d’Aiguilly, Nicolas Dauvet Desmarets, grand-fauconnier de
France. Pendant cette dernière procédure, Georges de Vaudrey commit contre les
gardiens en grand nombre des violences extrêmes, s’empara du château de
Machy (18 km de Troyes) et se réfugia dans celui de Chamoy, d’où
il menaçait sans cesse les gardiens de Saint-Phal et les nouveaux acquéreurs.
le château de St Phal aujourd'hui disparu
La châtellenie relevait
des terres de l'Isle et recouvrait les terres de Crésantignes, Machy,
Motte-Félix et de la Cour-saint-Phal. Les seigneurs de Saint-Phal étaient une
puissante famille de la cour de Champagne aux XIIe et XIIIe siècles, on relève
cinq abbesses de l'abbaye Notre-Dame-aux-Nonnains et leurs armes étaient d'or à
la croix ancrée de sinople, au franc canton de gueules.
Jeanne d'Arc écrivait de
ce château, en 1429 aux habitants de Troyes.
En 1440 Saint-Phal
appartenait à Pierre de Montot qui fit entrer la seigneurie dans la famille
Vaudrey en mariant sa fille à Arthur de Vaudrey chambellan à la cour de France
et maître d'hôtel des rois Charles VII, Louis XI et Charles VIII. Il fut la
propriété de Anne de Mont-Gomery, époux de Anne de Vaudrey en 1555 et ses
armes, emmanchées de gueules et d'argent se voyaient encore au château. La
seigneurie devint un marquisat sous le règne de Louis XIII.
En 1675 il est la
propriété de Nicolas Dauvet, comte de Marets, grand fauconnier de France.
Il entre dans la Maison de
Hénin-Liétard en 1705 par Jacques-Antoine marquis de Blaincourt et de
Saint-Phal, baron de Dienville et mestre de camp de cavalerie. Puis en 1765 à
Marie de Félix-Dumuy, comtesse de Ribière et à Charles marquis de Créqui son
époux.
Le château passe ensuite
dans les mains de Jacques Corps, seigneur de Saint-Phal, conseiller du roi au
Grand Conseil, mort en 1798. Le dernier propriétaire est le gendre de celui-ci,
M. de Mazin de Bouy.
Le marquisat de Saint Phal