Manassès est le fils de Helpuin II, comte
d’Arcis-sur-Aube, seigneur de Ramerupt et de Pougy (ce dernier frère du comte
de Montdidier) et d’Hersende, comtesse d’Arcis, dame de Ramerupt, qui bâtit une
église dans son château de Ramerupt et y mit les reliques de saint Balsème.
Manassès est l’un des plus puissants seigneurs de la
Champagne méridionale du Xe siècle, dont le domaine s’étend sur la vallée de
l’Aube en amont d’Arcis. Sa mère, la pieuse comtesse Hersende, se retire sur
ses terres de Ramerupt lorsque plus tard elle devient veuve et que le comté
passe à leur autre fils, Hilduin.
Dès sa tendre jeunesse, Manassès se fait remarquer
par sa bonne nature, sa douceur, sa belle simplicité. La comtesse sa mère,
voyant en lui des signes remarquables de dévotion, lui donne une excellente
éducation, et s’emploie à le donner à Dieu. Il est confié à l’évêque de Troyes,
qui l’élève avec le plus grand soin. Il voit ainsi entreprendre par l’évêque Milon,
la reconstruction de la cathédrale. Le voyant formé à toutes les vertus
ecclésiastiques (l’aménité de son caractère, sa piété, cultivée par l’évêque
Milon), le clergé de Troyes jette les yeux sur lui en 985, pour remplacer
Milon, évêque depuis 974. « Ce choix fut généralement applaudi ».
Il faut savoir qu’à cette époque, les évêques sont
élus par le chapitre cathédral, et d’ordinaire ses membres ne vont pas chercher
loin : un homme vertueux qu’on a pu éprouver et, qui plus est, allié à une
famille puissante et riche du diocèse. Manassès est le premier de nos évêques
appartenant à l’une des grandes familles féodales de la Champagne. La charge
est lourde, les invasions normandes ont fait de profonds ravages, matériels et
économiques, moraux surtout, d’où un relâchement de la discipline dans le
clergé et de la vie chrétienne des fidèles
A peine est-il le chancelier de l’église, qu’il
prend soin de régler son clergé et de lui donner un nouveau lustre, parce que
les courses des Normands et les troubles de l’Etat ont causé un dérangement
dans la discipline, surtout dans le chapitre de la cathédrale. Pour exécuter
ses pieux desseins, il se compose un conseil, dont les membres les plus
distingués sont Adson de Montier-en-Der, Hadric, trésorier de son église, et
saint Adérald, chanoine, qu’il fait son archidiacre. Ce projet de réforme
essuie d’abord beaucoup de difficultés. En effet, suite aux ruines occasionnées
par les Normands, les chanoines de la cathédrale avaient dû exercer quelque métier afin de se procurer les
ressources indispensables Mais Adérald, qui est riche, se dépouille d’une
partie de son patrimoine en faveur de cette église, et bientôt le pontife « a
la consolation de voir son chapitre embrasser la vie commune », suivant la
règle du Concile d’Aix-la-Chapelle de 816 qui réglait la vie canoniale. Pour
témoigner sa reconnaissance à l’abbé de Montier-en-der, il lui accorde ainsi
qu’à ses successeurs, la prétention aux cures de Lassicourt, de Dodinicourt
(aujourd’hui Saint-Christophe) et de Requinicourt (à présent
Saint-Léger-sous-Brienne). Manassès
rappelle également les prescriptions du concile de 802 faisant aux
prêtres un devoir « de ne point laisser mourir les malades sans leur avoir
administré le viatique, de tenir propre leur église et d’instruire leur peuple
les fêtes et dimanches. De s’instruire eux-mêmes d’abord ».
Manassès fonde le prieuré d’Arcis-sur-Aube en y
bâtissant une église en l’honneur de la Vierge Marie. Le monastère est confié
aux religieux de Marmoutier. Il se trouve à l’extrémité de la rue Notre-Dame,
c’est-à-dire de la route de Brienne. Le site et les fondations sont transférés
à la chapelle de la Sainte-Vierge de l’église paroissiale en 1780. Les
bâtiments disparaissent peu de temps après.
On dit que sous le pontificat de Manassès II
(1180-1190), « un homme ayant été pendu innocemment, une génisse qu’il avait
donné à un de ses filleuls, soutint de ses cornes la plante des pieds du
patient et lui sauva ainsi la vie. De là vint l’usage de donner aux filleuls
des présents que le peuple nomme la roulée et le cogneu ».
Manassès décède en 993, le 11 juin, après 10 ans
d’épiscopat et une vie remplie d’actions saintes. Son tombeau ne semble pas
avoir été conservé dans notre cathédrale.
« C’était un homme plein de sainteté, un homme saint
».