CARACTÈRES GÉNÉRAUX
La Champagne compte dans ses régions Est et Sud
quatorze églises ou chapelles construites entièrement en pans de bois et
environ autant d’autres associant ce matériau à la pierre. Ces chiffres en
font, bien avant la Normandie, le principal ensemble français d’églises en bois
et l’un des tout premiers d’Europe occidentale. Mais l’essentiel tient à
l’intérêt de ces édifices, remarquables non seulement pour des qualités
d’authenticité et de fraîcheur attendues de construction rurales, mais aussi
pour leur diversité, leur originalité, leur valeur monumentale et leur
environnement souvent séduisant. Ces mérites s’observent surtout dans une
douzaine d’édifices principaux, d’allure variée, mais sensibles à l’évolution
générale de l’architecture et qui témoignent d’une utilisation savante et
méditée des techniques d’édification en colombage.
Marne et la Meuse, ont gêné l’exploitation
touristique, mais elles bénéficient aujourd’hui de la proximité des lacs
artificiels de Champagne humide et du Parc Naturel Régional de la Forêt d’Orient.
L’intérêt des historiens et des amateurs ne s’est porté qu’assez tardivement
sur ces curieux édifices. Le pan de bois ne présentait pas au XIXe siècle le
caractère pittoresque qu’on lui a reconnu depuis, d’autant que sur la grande
majorité des églises – à la notable exception de celle de Lentilles
Les églises champenoises à pan de bois subsistant de nos jours s’étendent sur un arc de cercle de plus de 200 km menant des crêtes pré-ardennaises au sud-ouest de l’Aube, en passant par Vitry-le-François, Brienne-le-Château et Troyes.
Carte de localisation des églises et chapelles à pans de bois par rapport à la géologie champenoise.
Du nord au sud, plusieurs ensembles sont repérables. Tout d’abord, si l’on met à part la modeste église de Montmeillant, au nord de Rethel, un groupe argonnais aujourd’hui représenté, après plusieurs destructions, par les églises de Givry-en-Argonne, du Claon et du Chemin. L’essentiel commence, après le passage de la Saulx et de l’Ornain, dans le Perthois avec une série d’édifices assez modestes situés le long de la Marne (Bignicourt, Neuville, Moncetz) et de son affluent la Blaise (Arrigny, Sainte-Marie-du-Lac et Nuisement-aux-Bois).
Une insensible transition conduit dans la cuvette argileuse du Der, où s’élèvent les plus belles constructions : Drosnay
Toutes les églises que l’on vient de citer
appartiennent à la Champagne humide, longue et étroite (20 à 25 km de large)
auréole d’affleurements de roches argileuses du Crétacé. Très particularisé, ce
pays d’eau et de forêts est la terre d’élection de l’architecture religieuse en
bois régionale, qui en est l’ornement le plus caractéristique et la plus belle
expression. Les autres édifices n’en sont jamais éloignés, qu’il s’agisse des
chapelles du Barrois calcaire de l’Aube (Soulaines-Dhuys,
Colombé-le-Sec) ou surtout des églises de la plaine crayeuse, situées à l’ouest
de la Côte de Champagne, dans des bas-fonds humides. Parmi celles-ci, il faut
citer Longsols,
construction de grand intérêt, et les sanctuaires s’échelonnant dans la vallée
du Meldançon (Saint-Léger-sous-Margerie,
Dommartin-le-Coq,
Morembert.
Cette localisation explique, comme on l’a toujours noté, la présence de lieux de culte en bois. Dans cette région de vastes forêts riches en bois d’œuvre – le vocable Der, racine du mot druide, signifie en langue celtique forêt de chênes -, le colombage a été jusqu’à la fin du XIXe siècle la technique usuelle dans l’architecture civile et s’est trouvé naturellement utilisé pour des édifices religieux. Cependant la majeure partie des églises de cette zone ont été construites en pierre, généralement aux XIIe –XIIIe siècles dans un style roman et de transition, ou au XVIe siècle en gothique flamboyant, ou encore au XIXe siècle. La question est donc de comprendre dans quelles circonstances les responsables ont choisi pour leur sanctuaire le procédé des pans de bois.Commençons par quelques données d’ordre historique. Ces églises furent élevées entre le XVe et le XIXe siècle : les plus anciennes Nuisement, Soulaines ne remontent pas au-delà de 1480 et les dernières construites furent celles de Fays-la-Chapelle en 1828 et de Givry-en-Argonne (1829-1835). Durant cette plage quadri-séculaire, la grande période de construction s’étendit, comme l’ont montré les résultats de la dendrochronologie pratiquée sur une douzaine d’édifices, des années 1480 au milieu du XVIe.
Un premier commentaire s’impose : ces édifices, qui ne sont pas de haute époque, s’interprètent en majorité, au moins pour la catégorie principale des églises paroissiales, comme des reconstructions de bâtiments antérieurs, datant vraisemblablement de la structuration du réseau paroissial aux XIIe et XIIIe siècles. Ces bâtiments d’après l’an mil avaient dû souvent être édifiés en bois, puisque aucune église actuelle à colombage ne semble – en l’état des connaissances– avoir succédé à un édifice de pierre. Le fait, démontré à Nuisement, est probable à Outines, où les récents travaux de restauration, ont surtout mis au jour, parmi les pierres d’assise, des fragments de dalles funéraires.
Pourquoi ces reconstructions ?
L’explication majeure semble être d’ordre démographique,
plus des trois-quarts des églises en pan de bois subsistantes ayant été édifiés
sous les règnes de Charles VIII, Louis XII et François Ier : or c’est une
époque de paix intérieure dans le royaume, qui prend fin avec les dévastations
causées en 1544 dans la vallée de la Marne et ses abords par la guerre entre
François Ier et Charles Quint. Mais précisément les constructions s’arrêtent
après 1540, du moins pour s’en tenir aux églises aux bois bien datés, et l’on
ne constate plus ensuite, durant la 2e moitié du XVIe et tout le XVIIe, que des
reconstructions partielles, conséquences des guerres (Arrigny) ou du mauvais
entretien des bâtiments. Par contraste avec la longue période de troubles et de
calamités qui l’a précédée – Grande Peste, Guerre de Cent Ans, comme avec celle
qui l’a suivie – guerres civiles de religion puis de la Fronde, guerres
étrangères avec la maison d’Autriche – la fin du XVe siècle et le début du
suivant furent vraiment en Champagne un temps de Renaissance à tous les sens du
terme – humaine, économique et artistique. On le savait déjà, s’agissant de la
floraison d’églises en pierre, de vitraux et de statuaire, on en a désormais
aussi la preuve pour les édifices, plus modestes, en pan de bois.
Ceci précisé, comment expliquer la présence de
sanctuaires en bois dans certains villages ?
Les églises en bois : les raisons de
leur édification
Le choix de ce matériau s’imposa pour certaines
catégories de lieux de culte. Négligeons les édifices provisoires, attestés
pourtant à Vitry-le-François, où la première église construite lors de la
fondation de la ville et consacrée en 1557 était en bois ; elle fut démolie fin
XVIIe, vu l’avancement de la grande église de pierre commencée en 1629. Le pan
de bois a été largement employé pour les chapelles, dont bien des types
apparaissent dans notre relevé : chapelles de faubourg urbain (Saint-Gilles à
Troyes), de prieuré bénédictin (Villemaur, Passeloup à Saint-Dizier), de grange
cistercienne (le Cellier de Colombé-le-Sec,
Saint-Fiacre de Ponthon à Nuisement-aux-Bois), de maladrerie (Soulaines - Ervy-le-Châtel),
d’ermitage (Montier-en-Der), de pèlerinage (Boulancourt, Auxon, Bar-sur-Seine),
de dévotion ajoutée à une église en pierre (Thonnance lès-Joinville). À
l’évidence, la rapidité et le faible coût de construction du colombage l’ont
favorisé pour cette catégorie d’édifices.
La situation de certains de ces petits sanctuaires à la périphérie de la région, là où le pan de bois est resté exceptionnel (Vallage, Barrois, Othe), suggère que les nombreuses chapelles existantes aux XVIe et XVIIIe siècles en Champagne du sud étaient très généralement en torchis, et aussi qu’il s’en trouvait bien d’autres de ce type en France septentrionale. Le colombage se justifie plus difficilement dans le cas des églises paroissiales, en raison de la tendance ancienne du clergé, s’appuyant sur la tradition biblique, à considérer la pierre comme le seul matériau digne d’un grand lieu de culte. L’explication classique, celle de la pauvreté des communautés villageoises ayant fait ce choix, s’impose parfois : pour de petites paroisses, surtout pour des hameaux tard érigés en unités autonomes, le bois a été le seul moyen de posséder un sanctuaire. L’on songe à une équation récemment réexprimée à propos de la province allemande de Hesse : la carte des églises en bois révèle une géographie de la misère. Mais cette interprétation n’emporte pas l’adhésion. La Champagne humide, notamment dans sa partie relevant de l’ancien diocèse de Troyes, ne peut passer pour une zone économiquement déprimée : pour garder un même critère, on y découvre des édifices romans et flamboyants d’une particulière ampleur. Surtout, nombre des églises en bois sont des constructions importantes et soignées, dont le coût n’a pu être négligeable, et certaines se dressent au sein de villages aussi peuplés que d’autres pourvus de grandes églises en pierre. La pauvreté ne saurait tout expliquer.
Il faut plutôt chercher dans le domaine de
l’organisation et de l’administration paroissiales. La grande majorité des
églises en bois relevaient de deux situations institutionnelles spécifiques.
Plusieurs d’entre elles – ainsi Lentilles,
Outines, Bailly-le-Franc et presque toutes les églises du diocèse ancien de Châlons en Champagne –
étaient des succursales rattachées à une paroisse mère. On pressent que lorsque
l’église de plein droit avait été reconstruite, les établissements religieux
responsables en tant que décimateurs d’une partie au moins des édifices aient
hésité à engager des grosses dépenses pour les annexes. Un exemple : l’abbaye
de Montier-en-Der disposait de la cure de Montmorency-Beaufort et de ses annexes de Villeret et de Lentilles.
Ces trois églises furent reconstruites à la même époque (début du XVIe siècle),
Lentilles ne l’étant qu’en bois, probablement pour ne pas peser sur le budget
du monastère au profit d’un district déjà bien pourvu.
Seconde situation, que l’on constate à Drosnay,
Châtillon-sur-Broué, Saint-Léger-sous-Margerie,
Perthes et Longsols,
celle des églises dont le décimateur était le curé du village lui-même. Or la
reconstruction des églises paroissiales en Champagne méridionale fut
généralement assurée par les établissements religieux : l’abbaye de
Montier-en-Der fit réédifier en pierre vers 1500-1550 les choeurs et les
transepts de plus des deux tiersde ses églises du diocèse de Troyes. Il est
possible que les curés responsables aient été incapables d’assumer à eux seuls
les frais d’un édifice en pierre. Là encore un cas peut en témoigner : l’église
de Hancourt, dont le desservant était seul décimateur, fut commencée au début
du XVIe siècle avec choeur et transepts ; même réduite peu après à un schéma
rectangulaire, elle ne put être ni voûtée ni terminée en pierre, un grand mur
en bois fermant hâtivement au Nord le bâtiment. De telles mésaventures ont dû
faire réfléchir : en cas d’incertitudes financières, mieux valait choisir
d’emblée une église en bois qu’un édifice de maçonnerie menacé d’inachèvement.
Ces observations, qu’il faudrait établir
définitivement par une étude sur les modalités d’édification des églises dans
les diocèses anciens de Troyes et de Châlons-en-Champagne, font mieux
comprendre comment le pan de bois a pu être retenu pour la construction de
sanctuaires paroissiaux jusque dans des villages relativement importants. Ce
n’est qu’à partir du milieu du XIXe siècle environ, comme on le verra, que
l’enrichissement et l’ouverture des campagnes, le dégagement d’une élite rurale
et les exigences d’un clergé confronté à des problèmes nouveaux feront
apparaître comme peu acceptable le colombage. Avant cette date, le pan de bois
fut sans doute considéré comme une solution normale, dès lors qu’une raison
empêchait de bâtir en pierre. Enfin, dans ces conditions qui ne furent pas de
véritable pauvreté, ont pu être construits des édifices vastes et élégants,
capables de rivaliser quelquefois avec les sanctuaires en pierre ou de
s’inspirer de leur architecture. En particulier il est clair que, loin d’avoir
été dressés par les paroissiens eux-mêmes, ces églises furent l’oeuvre
d’entreprises spécialisées, comme l’attestent, dans la seconde moitié du XVIIIe
siècle, les plus anciens documents disponibles. Ces mêmes équipes
construisirent les maisons bourgeoises et les halles marchandes de Troyes et
des villes environnantes : ce sont ces bâtiments de qualité, et non pas les
constructions rurales environnantes, qui constituent les véritables
correspondants des églises champenoises à pans de bois.
Solutions architecturales et procédés de
construction
Cependant la formule reine est celle de la nef à bas-côtés terminée par un choeur et une abside à pans coupés. Un transept s’intercale parfois entre nef et choeur (Longsols, Outines, Mathaux, et Dommartin-le-Coq. La construction se complète d’éléments secondaires : porches établis le long des façades et quelquefois habilement intégrés au bâtiment, clochers dressés au milieu de l’édifice et constitués de flèches octogonales aiguës souvent sur base carrée. Mais la définition du volume vient surtout du type de couverture : il peut s’agir d’un ensemble articulé de trois toitures, la principale sur le vaisseau central et deux petites en appentis sur les bas-côtés, ce dernier système permettant l’éclairage direct de la grande nef par des fenêtres hautes. D’autres fois on rencontre une grande couverture unique à double rampant, mais on verra plus loin que ce dispositif est souvent une transformation du précédent.
Il ne peut être question d’entrer dans le détail des
techniques de construction. Rappelons seulement quelques points essentiels.
Toutes ces églises sont bâties selon la technique du pan de bois, dite aussi du
colombage ou localement du torchis. À la différence des églises de Scandinavie
ou d’Europe orientale, le bois n’intervient que pour l’ossature, les éléments
de remplissage ou de couverture étant constitués d’autres matériaux. De
l’ossature en bois, les pièces principales, dans le cas d’une église à nef
unique, sont :
- la
poutre principale inférieure, ou sablière basse, reposant sur un muret de
pierre qui empêche la remontée de l’humidité
- les
poteaux verticaux qui montent depuis la sablière basse, délimitent les
travées et portent la charpente
- les
autres pièces horizontales, entretoises - en nombre variable selon la
hauteur du bâtiment – et sablière haute articulée sur le poteau
d’ossature et l’entrait de la charpente.
Le cadre ainsi formé est renforcé par des pièces
secondaires verticales (tournisses) ou inclinées (décharges), celles-ci pouvant
être assemblées en croix de Saint-André pour former un motif décoratif d’un bel
effet. Ces pièces de bois sont en chêne et de dimensions restreintes : 30 à 40
cm de côté pour les sablières, 25 à 35 pour les poteaux et entretoises, 15cm
pour les écharpes et décharges. Dans les intervalles entre les pans de bois –
où trouvent également place les fenêtres – est disposé le torchis, mélange de
terre et de paille, maintenu par de courtes planchettes (palsans) coincées à
force entre les faces latérales des bois. Les restaurations des années
1970-1980 ont parfois remplacé ce torchis par des briques creuses. Un mortier
de chaux grasse est enfin appliqué des deux côtés du torchis. Dans les églises
à bas-côtés, l’assise de pierre est rejetée en bas des murs extérieurs et la
nef centrale est portée par deux files de poteaux portés par un dé de
maçonnerie. Ces poteaux reçoivent les entraits des collatéraux, la sablière
haute et les diverses entretoises, dont la plus basse détermine l’arcade de la
nef.
Sur les murs ainsi constitués s’articulent les charpentes, presque toujours de type à chevrons porteurs, dite tramée, car les fermes avec entrait et poinçon alternent (à raison de une sur cinq en moyenne) avec les chevrons fixés sur des blochets. Une double sablière est portée par les entraits, mais les poteaux sont habituellement à l’aplomb des sablières intérieures, la sablière extérieure déterminant une avancée du toit qui protège les murs des intempéries.
Sur un certain nombre de charpentes, aisseliers et jambes de forces, fixés d’une part sur les chevrons, de l’autre sur les faux-entraits ou sur les blochets permettent de poser une fausse voûte, soit en garnissant de torchis l’espace entre les chevrons – mise en oeuvre que l’on ne voit plus guère que dans la chapelle de Soulaines ou la nef de Chaufour-lès-Bailly – soit plus simplement en posant un lambris sur la face inférieure de ces pièces de bois. Ce dernier mode, que l’on observe encore dans quelques édifices (Le Chemin, Nuisement, par exemple) semble surtout se répandre au XVIIIe siècle (mais on le trouve à Dommartin-le-Coq, - dès le XVIe) et se trouve encore employé à Givry-en-Argonne en 1830. Dans l’un et l’autre système, restent surtout visibles poinçons et entraits, parfois moulurés. Parfois la pose de cette fausse voûte semble prévue – à voir l’extrémité moulurée des poinçons courts ou la face inférieure des sous-faîtières, destinés à rester apparents – mais ne fut pas réalisée pur une raison inconnue.
Les éléments de couverture et de revêtement jouent un rôle essentiel dans l’allure extérieure des bâtiments. Les toitures débordantes, formant auvent, sont couvertes de tuiles plates, la tuile courbe « romaine », plus lourde mais autorisant des pentes de toit plus faibles, intervenant parfois sur les porches et bas-côtés, surtout dans l’Argonne et le Perthois, où il arrive qu’elle recouvre la nef elle-même (Givry-en-Argonne). L’ardoise est quant à elle réservée aux clochers. Sur les parois verticales, le pan de bois – souvent recouvert au XIXe siècle d’un crépi de sable jaunâtre, et au XXe de ciment, aujourd’hui systématique ment enlevé – peut rester apparent, mais une protection est nécessaire sur les parties exposées aux intempéries comme les façades Ouest et Sud. Furent souvent utilisés des esseintes ou bardeaux,écailles de bois de 6 à 20 cm de large clouées sur un support de planches, parfois taillées et rassemblées en d’heureux motifs décoratifs (Lentilles -, Mathaux -) ; moins coûteuses, les ardoises les ont souvent remplacées, notamment sur les clochers. Plus rustique est le voligeage, appelé localement tavillon, revêtement de planches généralement horizontales, clouées sur les poteaux et se recouvrant partiellement ; une baguette verticale, cachant les joints, en anime parfois la surface. Enfin le bardage de planches verticales se rencontre aussi parfois (Le Chemin).
La trentaine d’églises en bois ne constitue qu’une
partie – peut-être moins réduite qu’on ne l’a cru – de celles qui s’élevaient
dans cette région il y a deux ou trois siècles : des recherches non exhaustives
ont fait repérer vingt-huit églises disparues. Dans de nombreux cas la
disparition s’explique par la destruction pure et simple de l’édifice,
facilitée par la nature du matériau, sensible au feu et à l’absence
d’entretien. Les guerres ont joué leur rôle funeste : l’église du Buisson brûla
en 1914, Saint-Gilles de Troyes fut anéanti par un bombardement en juin 1940,
et Saint-Nicolas du Bas-Village (à Vitry-le-François), si endommagé durant la
Seconde Guerre mondiale qu’on la reconstruisit presque entièrement en pierre.
Mais ces destructions touchèrent surtout la catégorie des chapelles, dont
quatre à peine subsistent sur plus d’une douzaine connues. Le processus qui y
mena se reconstitue aisément : la suppression des établissements religieux
pendant la Révolution et l’effacement des cultes locaux ont entraîné l’abandon
de ces lieux de dévotion et, à terme, leur inévitable démolition. Parmi les
édifices conservés, deux sont encore menacés. La chapelle Sainte-Asceline de
Boulancourt, centre dès le XVIe siècle d’un petit pèlerinage réanimé avec peine
au début du XIXe siècle, n’existe plus, après démontage et transfert vers 1880
que sous la forme attristante d’une remise attenante à une ferme. La chapelle
Saint-Aubin de la Maladrerie à Ervy-le-Châtel fut vendue en 1979 avec le terrain environnant à la municipalité, à charge pour
celle-ci de procéder à une démolition qui ne fût heureusement pas mise à
exécution. Souhaitons qu’elle échappe à celui de la chapelle Saint-Berchaire de
Montier-en-Der, anéantie dans l’indifférence presque générale vers
1960, bien que protégée monument historique en 1947.
Seconde cause classique de disparition, la
reconstruction en pierre : une dizaine d’exemples sont connus, concernant
surtout les églises paroissiales et essentiellement datés du Second Empire,
époque à la fois de prospérité et de changement dans les mentalités. C’est
aussi à partir de cette période que se constate, dans l’architecture rurale, le
premier retrait des techniques traditionnelles et le recours, notamment en
façade, à des matériaux jugés plus dignes, la brique et la pierre. Toutefois
ces réédifications paraissent avoir principalement touché des constructions
modestes, comme ces sanctuaires d’entre Der et Perthois (Allichamps,
Les Petites Côtes, Chantecoq, Champaubert)
signalés comme petits et sans collatéraux dans les visites pastorales d’Ancien
Régime. Les églises en bois spacieuses et de belle allure furent, semble-t-il,
généralement épargnées.
Églises mixtes
Parmi ces églises en bois, une partie entre dans la
catégorie des édifices mixtes, associant maçonnerie et colombage. Les limites
de ce groupe ne peuvent être fixées précisément, tant on rencontre de cas de
figures divers. Très nombreuses en effet sont en Champagne les églises en
pierre comportant des parties secondaires - sacristies, tourelles d’escalier,
pignons, et plus encore porches et clochers - à pans de bois. Une étude
scientifique se devrait de les prendre en compte. Une mention spéciale est due
à trois types de constructions où le bois intervient plus nettement dans la
structure :
- les églises de maçonnerie fermées par une façade en colombage, souvent pourvue d’un porche et sans doute considérée à l’origine comme provisoire : sont dans ce cas Moncetz-l’Abbaye, La Ville-aux-Bois et Barberey-Saint-Sulpice.
- les
édifices dont les murs de maçonnerie anciens ont été complétés dans leur
partie supérieure par des pans de bois. Ce procédé fut très utilisé dans
le Perthois – où il se remarque également dans l’architecture civile –
aussi bien sur les nefs (Écriennes) que sur des absides (Cloyes, Norrois,
Saint-Eulien). A Favresse, les potelets assemblés en croix de Saint-André
ajoutent une note pittoresque au-dessus d’une belle nef à bas-côtés du
XIIe siècle.
- les
églises à murs de maçonnerie doublés intérieurement par des files de
poteaux supportant la charpente. Trois églises de ce type sont connues
dans la Montagne de Reims. Elles semblent plus rares en Champagne humide,
sauf peut-être vers l’Argonne, où la nef centrale de Vanault-le-Châtel
est bordée de poteaux de bois habillés de demi-cylindres de céramique
donnant l’illusion de grosses colonnes, et où la nef de Verrières semble
avoir fait l’objet d’un aménagement comparable.
Si ces trois types de constructions s’apparentent
aux églises étudiées, elles s’en écartent par l’allure générale, et ne figurent
donc pas dans notre inventaire.
À l’autre extrémité, si l’on peut parler ainsi,
prennent place les églises où le bois domine largement, mais où la brique ou la
pierre peuvent être présents pour deux raisons différentes : à
Givry-en-Argonne, la façade en pierre, présente dès l’origine, cherche à cache
le pan de bois du reste de l’édifice, ce qui est bien dans l’esprit de l’époque
tardive où elle fut édifiée. À Faÿs-la-Chapelle,
le cas semble identique, mais la façade en brique et pierre ne fut en fait
ajoutée qu’une génération après la construction. On rejoint là le second cas de
figure, encore plus fréquent : celui où la pierre et la brique ne furent
introduites qu’à l’occasion de travaux de restauration de pans de bois abimés.
C’est ce que l’on constate avec le pignon de l’église du Chemin ou bien avec le
transept de celle de Perthes-lès-Brienne.
Reste une dizaine d’édifices véritablement mixtes, pourvus de parties en bois bien individualisées. Le fait marquant à leur propos est la prédominance de l’association d’une nef en bois à un chœur en pierre généralement plus ancien. Un bon exemple est l’église de Pars-lès-Chavanges.
L’explication de ce partage se situe sans doute dans la coutume de Champagne, qui plaçait les nefs sous la responsabilité des paroissiens, et les chœurs et transepts sous celle des établissements patrons et décimateurs. Le bois a donc été pour les communautés villageoises un moyen de compléter sans frais excessifs un sanctuaire déjà existant. La greffe des deux parties n’est pas choquante et semble avoir été conçue pour durer si les volumes de la nef et du chœur sont assez comparables. Elle est moins naturelle lorsque, comme à Épagne ou à Villiers-le-Brûlé, la nef basse et sombre se greffe sur un chœur aux hautes baies munies d’un remplage soigné : on a particulièrement dans ce cas l’impression que le voisinage n’était pas fait pour se pérénniser et que la nef aurait été depuis longtemps reconstruite si les moyens de la paroisse l’avaient permis. Il faut enfin noter qu’il y a des contre-exemples à la partition nef en bois / chœur en pierre, tels Juzanvigny et Dommartin-le-Coq, où c’est la nef qui est en pierre et le chœur en pan de bois, ce qui laisse la porte ouverte à la recherche d’explications. Ces églises mixtes sont rarement des édifices importants. En-dehors de celles citées, trois surtout retiennent l’attention : Chauffour-lès-Bailly, avec sa nef unique élancée et sa voûte brisée en bois bien accordée aux parties orientales flamboyantes ; les édifices voisins d’Arrigny et de Sainte-Marie du Lac, avec leur vaisseau à trois nefs large et d’un type élaboré complétant un chevet des XIIe – XIIIe siècles. Les autres ne sont que des bâtisses simples, sans bas-côtés.
L’évolution des formes
On a déjà signalé que la grande campagne
d’édification des églises en pan de bois de Champagne se situe entre 1480 et
1540. Toutes les constructions de ce groupe présentent, à quelques exceptions
près, des caractères communs. Leur élévation présente trois degrés de plus en
plus élancés et soulignés chacun par une couverture autonome : un étage
inférieur surmonté et défini par les toitures jointives des bas-côtés et du
porche, qui forment comme un soubassement continu au reste de l’édifice ; un
étage médian, constitué par la haute nef étroite, le pignon de façade aigu orné
d’une arcade en avancée et la grande toiture à pente rapide ; enfin une flèche
pointue dressée au centre du bâtiment. Avec le pignon supplémentaire de son
porche et les quatre étages de coyaux formant abat-son à la base de sa flèche,
Lentilles représente l’accomplissement d’un type tout d’élancement et de finesse, et qui
tranche à merveille sur les calmes horizons de Champagne. Ajoutons que, si le
schéma d’ensemble – une haute nef dominant les collatéraux – est celui de bien
des églises en pierre, l’emploi du bois donne à ces constructions un indéniable
caractère sui generis.
Le pignon aigu protégé par une arcade en bois en
plein cintre ou légèrement brisée se retrouve dans nombre d’églises
flamboyantes du diocèse de Troyes, notamment sur les caractéristiques transepts
à deux travées, et aussi sur les façades des maisons urbaines du XVIe siècle.
En définitive, ces églises se rattachent, par leur élancement, à la tradition
gothique. La forme de la charpente, à chevrons porteurs et double sablière
formant avancée pour protéger les murs sont une autre caractéristique de cette
génération.
Alors que certaines églises – Longsols,
Bailly-le-Franc ou encore Lentilles – ont conservé jusqu’à notre époque leur silhouette originelle, d’autres ont
connu des modifications plus ou moins importantes, que révèlent aussi bien les
archives que la datation des bois. Ces modifications semblent pouvoir
s’expliquer par trois raisons différentes. Celle à laquelle on pense en premier
lieu est le besoin d’agrandissement du sanctuaire lié à un accroissement de la
population. Ce fut vraisemblablement le motif de l’allongement, dans les années
1660, de trois travées de l’église de Nuisement qui n’en comprenait
primitivement que deux, de l’ajout d’une travée à la nef de Lentilles (à une
époque indéterminée) tandis qu’à Morembert,
on se contenta, lorsque la chapelle devint au XIXe siècle église paroissiale,
d’intégrer le porche à la nef. Les agrandissements d’édifices restèrent donc
des cas isolés, sans doute parce que, lorsque le niveau démographique atteint
dans la 1ère moitié du XVIe siècle fut de nouveau dépassé – soit au cours du
XVIIIe siècle – on préféra généralement une reconstruction en pierre à
l’agrandissement d’un sanctuaire en bois. Cela demanderait à être confirmé par
de nouvelles recherches.
Un autre motif de modification de la silhouette des
églises serait le souci de mieux éclairer la nef, soit en supprimant les
bas-côtés Saint-Léger-sous-Margerie,
soit en relevant le mur de ceux-ci (ce fut sans doute le cas à Sainte-Marie du
Lac lors des importants travaux des années 1750). Une dernière transformation
importante est la réunion des toitures de la nef et des bas-côtés, originellement
étagées : on a de nombreux indices d’une telle modification à Outines comme à
Drosnay (IA51000519), qui peut s’expliquer par des problèmes d’infiltration
liés à la trop faible pente des toitures des bas-côtés. Ce genre de
modification s’observe fréquemment sur les églises en pierre, et pour les mêmes
raisons. En-dehors des modifications que l’on vient d’indiquer sur les
constructions de la Renaissance, on rencontre, entre 1750 et 1850, de rares
constructions neuves.
Les bâtisseurs s’éloignent alors des solutions traditionnelles pour s’inspirer de la grande architecture en pierre. La grande et basse église de Givry-en-Argonne (1829-1835) développe en des volumes géométriques trois nefs terminées par un chevet rectangulaire. Quant à Fays-la-Chapelle, son aspect cubique, son fronton et ses fenêtres rectangulaires (au chevet) la font davantage ressembler à une mairie qu’à un lieu de culte. Ces deux églises sont du reste précédées de façades en pierre ou en brique.
Il faut cependant signaler comme une intéressante
adaptation aux canons nouveaux l’église de Mathaux,
élevée en 1761 et heureusement reconstruite après le catastrophique
effondrement de sa nef en 1983. En forme de croix latine, sans bas-côtés et peu
élevée, elle étonne par ses hautes et larges fenêtres, par son transept très
débordant – 22 m de profondeur contre 26 dans l’axe, et par sa haute tour sur
plan barlong coiffée d’un lanternon, implantée sur la première travée de la
nef. Plus rien ne rappelle les églises du XVIe siècle, caractérisées par les
baies étroites, l’absence de transept ou leurs dimensions réduites et les
flèches élancées placées vers le milieu des bâtiments. L’influence des édifies
en maçonnerie se lit aisément, mais par la vigueur de ses formes, Mathaux est
bien la dernière grande église champenoise à colombage.
Les aménagements intérieurs et leur
évolution
L’étude des aménagements intérieurs et de leurs
modifications successives est une des plus révélatrices, car elle renseigne sur
l’appréciation portée au cours des siècles par les autorités paroissiales sur
leur église en bois. On s’intéressera moins ici au mobilier, peu différent de
celui des églises en pierre et qui sera évoqué dans les notices individuelles,
qu’au décor et au revêtement des surfaces murales et éléments de structure.
Cette manière élégante d’atténuer la rusticité des
intérieurs parut insuffisante après 1850. Dans deux localités, de coûteux
travaux furent engagés pour masquer les éléments structuraux. En 1861 à
Outines, où les modifications accompagnant une restauration ne touchèrent que
les nefs : au-dessus du vaisseau central, sous le plafond d’origine, fut jetée
une voûte continue en planches, portée par d’imposantes colonnes en bois
entourant les piliers. Entre celles-ci s’élevèrent des arcades brisées portées
par des colonnes à chapiteaux. Les collatéraux firent l’objet d’un arrangement
comparable. Restée nue et inachevée, cette décoration donnait à l’intérieur une
curieuse atmosphère nordique. Plus énergique encore fut, en 1873, le nouvel
aménagement de l’église de Lentilles,
où l’on flanqua de colonnettes les poteaux, lança entre ceux-ci des arcades
surbaissées et surmonta chaque travée d’une fausse voûte d’arêtes en plâtre,
l’ensemble étant recouvert de peintures claires de style sulpicien. Après ces
travaux, rien à l’intérieur ne distinguait plus l’édifice de l’église en pierre
qu’auraient aimé posséder prêtre et paroissiens. La date de ces interventions
est significative : c’est à cette époque qu’on couvrit d’un crépi la plupart
des églises en bois et qu’eurent lieu de nombreuses reconstructions en pierre.
La deuxième moitié du XIXe siècle apparaît comme l’âge critique des sanctuaires
à colombage, celui des complexes et du dédain.
Si le premier XXe siècle respecta les dispositions
en place, la période actuelle fait au contraire preuve d’une grande activité.
Dans bien des églises, les pans de bois ont été remis au jour, et les «
cache-misère » du XIXe siècle enlevés. Ces initiatives inspirent des réserves,
dans la mesure où les aménagements d’époque ne laissaient jamais ou presque le
colombage apparent à l’intérieur. Mais reconnaissons que rien n’illustre mieux
l’actuelle faveur pour les sanctuaires en bois que ce désir sincère de leur
faire retrouver leur beauté d’antan.
LA DENDROCHRONOLOGIE
La datation par dendrochronologie (en grec, l'étude
du temps à travers la croissance des arbres) de structures en bois, se déroule
en plusieurs étapes.
1 - L'analyse de la structure
L'anatomie du bois est différente selon les espèces.
Dans nos régions, le chêne est l'essence la plus utilisée en architecture
(charpente, plafond, plancher, pan-de-bois, linteau...). Il fabrique de gros
vaisseaux au printemps, puis une zone fibreuse en été. La croissance radiale
cesse à la fin de l'été pour ne reprendre qu'au printemps suivant. L'ensemble
du bois fabriqué au cours de la période de végétation est appelé cerne de
croissance. Il en existe un par an.
Pour dater un édifice par dendrochronologie, on doit
réaliser un échantillonnage représentatif des structures étudiées, afin que les
dates obtenues soient extrapolables à l'ensemble des bois. Pour respecter les
contraintes méthodologiques, chaque ensemble homogène – repéré en particulier
au moyen des marques d’assemblages utilisées par les charpentiers - est
représenté par un lot de 5 à 10 prélèvements livrant 50 à 80 cernes, de façon à
assurer la sécurité du résultat de datation. Une partie des échantillons doit
présenter de l’aubier pour assurer la précision du résultat. Ces 2 notions
(sécurité et précision) sont indépendantes.
2 - Les prélèvements
Des carottes de bois sont extraites à l'aide d'une
mèche montée sur une perceuse, en partant de l'extérieur de la bille (dans un
angle de l'élément) et en visant le cœur de l'arbre. Le dommage occasionné
reste limité à un orifice équivalent à un trou de cheville (diamètre de 25 mm).
Cette étape consiste à mesurer la largeur des cernes
annuels, pour obtenir une série de croissance radiale par échantillon. Celui-ci
est placé sur un chariot qui défile sous une loupe binoculaire. Un logiciel
spécifique permet alors la mesure des largeurs de cernes, au 1/100e de mm près.
4 - Datation
Construction des références
Le principe de datation par dendrochronologie repose
sur le postulat que les arbres d'une même espèce et d'une même région ont un
profil de croissance radiale similaire, influencé par des facteurs climatiques
régionaux identiques. Quelques paramètres plus locaux peuvent cependant nuancer
ce profil : les attaques d'insectes, le type de gestion sylvicole, la
topographie, un microclimat...
Toute référence débute par l'étude d'arbres vivants.
Il faut ensuite trouver des bois d'architecture qui ont en commun avec les
arbres vivants une partie de leur croissance, dont les variations
interannuelles sont semblables. Puis on remonte le temps en étudiant la
croissance de bois provenant de structures de plus en plus anciennes.
Pour dater une structure, le même principe est
utilisé. Les séries de largeurs de cernes obtenues sont comparées par paire.
Une chronologie moyenne est ensuite calculée à partir des séries synchrones,
puis comparée à un ensemble de références disponibles en base de données. Des
tests statistiques permettent de juger objectivement de la qualité de la
ressemblance entre la chronologie à dater et les références.
5 - Précision
Après synchronisation de la chronologie moyenne sur
les références, une année de formation peut être attribuée à chaque cerne. La
précision de la datation ne dépend alors que de l’anatomie du dernier cerne
conservé sur les échantillons. Optimiser la précision nécessite donc que
l’aubier n’ait pas été totalement détruit par le charpentier sur la pièce de
bois travaillée et que les galeries d'insectes ne l'aient pas trop fragilisé
pour qu'il soit préservé lors du prélèvement. Trois cas de figures existent
(figure) :
- Si
la surface située juste sous l’écorce est conservée, l'année de formation
du dernier cerne d'aubier correspond à celle de l'abattage de l'arbre.
- Si
l'aubier est incomplet, le nombre de cernes faisant défaut peut être
estimé, à partir des résultats d'une étude, qui a montré chez les chênes
que l'aubier comprend 21 cernes en moyenne et de 2 à 40 cernes dans 95 %
des cas.
- Si
l'aubier est totalement éliminé, l'abattage de l'arbre est nécessairement
postérieur à l'année de formation du cerne le plus récent, mais aucune
estimation calculée du nombre de cernes perdus n'est possible.
6- Mise en œuvre des bois
Le développement des analyses par dendrochronologie
en parallèle des études d’histoire de l’art, d’architecture et d’archéologie du
bâti, permet de montrer que les arbres sont exploités dans l’objectif d’être
mis en œuvre, dans une période d’une à quelques saisons, sans longue période de
séchage. La séquence la plus couramment observée est l’exploitation des arbres
au cours de l’automne/hiver, les bois étant disponibles dès le printemps
suivant. Cette hypothèse est parfois étayée par des documents d'archives ou une
date portée sur un bois. À partir du XVIIIe siècle, le charpentier a la
possibilité d'acheter ses bois chez un marchand, qui constitue un stock sur
plusieurs années. Dans cette configuration, les bois sèchent une à quelques
années, avant d'être mis en œuvre.
La
Route des Églises à pans de bois de Champagne
1 - Mathaux située dans le sud de la Champagne, au sein du Parc naturel
régional de la forêt d'Orient, en bordure du lac du Temple. Le canal reliant le
lac du Temple à l'Aube traverse la commune du sud au nord tandis que le canal
reliant le lac du Temple au lac Amance coupe l'extrémité sud de la commune. L'église Saint-Quentin de Mathaux est construite
en 1761. C’est le plus tardif des édifices entièrement en pans de bois de
Champagne. Des documents d’archives permettent de la dater avec précision.
Dotée d’un transept débordant, l’édifice a la forme d’une croix latine. Le
clocher surprend par la masse imposante de sa tour carrée entièrement
recouverte d’écailles de bois (essentes) et surmontée d’un étonnant campanile.
2 - Longsols est l’une des plus pittoresques églises à pans de
bois de Champagne, située un peu à l’écart des vastes forêts de chêne de la
Champagne humide. La datation de ses bois révèle qu’elle fut édifiée entre 1483
pour le chœur et 1493 pour la nef. L’église Saint-Julien et Saint-Blaise de
Longsols avec sa flèche imposante et extrêmement élancée, son transept
important lui donne une forme de croix latine. Cette église de caractère
présente également un remarquable travail de charpenterie ainsi qu’un mobilier
de grande qualité. Elle abrite plusieurs retables et quelques belles statues.
3 - Morembert où vous trouverez l'église Saint-Jean-Baptiste. Elle
était au doyenné de Margerie et une dépendance de la paroisse de Vaucogne. L'église
Saint-Jean-Baptiste de Morembert est nichée dans un cadre verdoyant et
tranquille, ce petit sanctuaire aux dimensions modestes était à l’origine une
chapelle seigneuriale. Il est devenu église paroissiale en 1841. Son toit à
deux pans est campé d’un court clocher octogonal recouvert d’ardoises, ce qui
est rare sur les églises en pans de bois.
4 - Saint-Léger-sous-Margerie L'église était du type de celle de
Drosnay, mais des travaux au XVIIIe siècle ont supprimé les trois premières
travées des bas-côtés, ce qui lui donne depuis la forme d’une église à transept
à l’allure massive. L’ensemble nef, transept et chœur est enserré dans une
seule et même toiture dont émerge un clocher trapu recouvert de tavillons,
tavillons recouvrant également la façade et une partie des murs de la nef.
5 -Drosnay (51) situé à proximité du lac du Der-Chantecoq, dans le sud-est de la Marne. Cette partie du territoire est occupée par les bois, les étangs et les Grandes Côtes à 142 m. L'église de Drosnay est caractérisée par une toiture à double versant qui la recouvre en totalité. Elle a été construite à proximité d’une motte castrale. À l’intérieur se trouve un ensemble des lambris du XVIIIe siècle ainsi que le maître-autel et son retable datés de 1667. Dans une de ses fenêtres, un beau vitrail du XVIe siècle, issu des ateliers de peinture sur verre de la ville de Troyes voisine, représente l’arbre de Jessé, du nom employé pour désigner l’arbre généalogique du Christ.
Mise à jour : l’église de Drosnay
a disparu lors d’un incendie en juillet 2023
6 - Sainte-Marie-du-Lac-Nuisement, L'église Saint-Jean-Baptiste de Nuisement, l’église provient de Nuisement-aux-Bois, village disparu lors de la mise en eau du Lac du Der. Démontée pièces par pièces et réédifiée à l’identique à Sainte-Marie-du-Lac en 1969, elle fait aujourd’hui partie intégrante du village-musée du Pays du Der, aux côtés d’autres bâtiments à colombages et de leurs jardins.
La région fut défrichée dès le Moyen Âge par les
moines de Montier-en-Der. Ils creusèrent des étangs et construisirent des
moulins.
Le lac du Der (chêne en celte) fut creusé pour
éviter les grandes inondations subies par la capitale "Paris" au
début du XXe siècle. Le lac était en pourparlers depuis des années, cependant,
la nécessité d'amputer la belle forêt du Der, associé à la disparition de trois
villages révoltaient les Champenois. Maintenant, le plus grand réservoir
d'Europe occidentale participe beaucoup au renouveau des villages.
En chapelet, les étangs du Grand Coulon, des Landres
et de la Forêt, sont tous pourvus d'observatoire. Plus loin, l'étang d'Outines
est une réserve naturelle, vous apercevrez peut-être les milans, les foulques,
les grèbes, les hérons, en automne les grues cendrées viennent en nuages
tapageurs, les oies, les canards et même les cygnes sauvages.
7
-Châtillon-sur-Broué. Confortablement installée
dans le bocage champenois, Châtillon-sur-Broué peut être fière de ses ravissantes
maisons à colombages. Son église à pans de bois possède un surprenant clocher
carré. Longtemps délaissées, les églises de Champagne sont maintenant très bien
restaurées.
L'église de la Nativité-de-la-Vierge de
Châtillon-sur-Broué date des XVIe et XVIIe siècles. Elle compte un intéressant
clocher à doubles pans, sur portique, et des vitraux du XIXe siècle. Cette
église est la seule du circuit à présenter un porche entièrement fermé. Autre
originalité, le porche est surmonté d’un clocher trapu, plaqué au pignon de la
nef. Le porche entièrement fermé, unique en son genre, doit son éclairage aux
deux larges ouvertures joliment décorées de balustres sculptés. Lorsque
l’église est illuminée, l’éclairage intérieur apparaît au travers de ces
balustres. Bien que sans bas-côtés, l’édifice présente un volume important,
bien éclairé par deux niveaux de fenêtres. A observer, les pans de bois de
l’abside formant des croix de Saint-André.
8 - Outines. Le village d'Outines a fait l'objet d'un arrêté de protection le 7
février 1970, pour son habitat traditionnel particulièrement remarquable et
bien conservé. Son architecture rurale en pans de bois et torchis typique de la
Champagne humide, où la pierre manquait pour la construction, se retrouve aussi
bien dans les maisons peu élevées du village que dans l'Église Saint-Nicolas. Cette
église Saint-Nicolas d'Outines classée est la plus grande des églises à pans de
bois et l'une des plus spectaculaires. Elle date du milieu du 16ème siècle et
possède un porche devant la façade, une flèche élancée, des fenêtres en arcs
outrepassés et un Christ en croix datant de la fin du 13ème siècle-début du
14ème. L’église possède également un mobilier original qui s’échelonne sur
plusieurs siècles. Les volumes intérieurs transposent ceux d'une église en
pierre : nef, bas-côtés, transept et choeur polygonal ; mais les piliers sont
remplacés par des poteaux et les arcs par des poutres horizontales. Elle est
équipée d'un système audio pour la visite. L’intérieur est vaste et monumental,
garni de poutres massives et de lourds piliers, éclairés par une après-midi
ensoleillée par les verrières de la rosace.
9 -Bailly-le-Franc Église
Sainte-Croix-en-son-Exaltation de Bailly-le-Franc. De même type architectural
que l’église de Lentilles, mais avec une nef plus courte d’une travée, ce
sanctuaire est également dominé par une flèche élancée recouverte d’ardoises. L’arcade
sur pignon, la montée d’escalier et la base du clocher sont recouverts
d’écailles de bois (essentes). A observer, les pans de bois formant des croix
de Saint-André, qui encadrent les fenêtres hautes. L’intérieur rustique a
conservé ses enduits masquant presque tous les colombages. Plus Les sept
verrières de l’abside et de la nef, datant du XIXe siècle, portent les noms de
leurs généreux donateurs.
10 -Lentilles. Le petit village de Lentilles, est un des plus beaux exemples
des fameuses églises à pans de bois, en Champagne, en vous dévoilant la beauté
de l’Eglise Saint Jacques et St Philippe. L’église témoigne du soin apporté aux
revêtements de bardeaux sur la façade de son église, et la nouveauté de
certains éléments, inconnus encore à l’époque comme son décor losangé au
plafond, son oculus ouvert au-dessus des baisses de son chevet, et son pignon
avec sa statue de St Jacques en hauteur, sur la travée centrale du porche. C'est la plus typique et harmonieuse du
circuit avec sa superbe flèche pointue, ses quatre niveaux d’abat-son et son
revêtement original et unique d’essentes de châtaigniers. Sa construction
remonte sans doute à la première moitié du XVIe siècle. L’édifice comporte en
plus de son porche sur la façade, un chœur à 5 pans, bordé de 2 sacristies plus
récentes, une nef encadrée de collatéraux achevés sur un mur plat. L’élément le
plus surprenant est le plafond continu en lambris admirablement décoré de
pattes losangées. Cet ensemble harmonieux donne une impression de finesse avec
une haute flèche, qui apporte à cet ensemble toute sa grâce. Les fidèles comme
les touristes sont accueillis par St Jacques du haut de son porche. L’équilibre
parfait de ses proportions, ses deux toitures séparées, celle de la nef et
celle des bas-côtés, ses verrières circulaires en font un édifice remarquable. A
l’intérieur, une luminosité fort agréable est diffusée par les fenêtres hautes
encadrées de croix de Saint-André. Observez pendant votre visite les cinq
verrières des fenêtres circulaires. Le vitrail de la fenêtre ronde centrale
représente le donateur et sa femme. Datant du XVIe siècle, ce vitrail est
l’œuvre des ateliers troyens de peinture sur verre.
11 - Soulaines-Dhuys. À la limite de la Champagne humide argileuse et du Barrois aubois
calcaire, le pays de Soulaines est boisé, parsemé d'étangs mais aussi sec et
proche du vignoble champenois. Chaque rue dans Soulaines-Dhuys vous emporte
dans un rêve, la rivière Laines, aux ponts et bordures fleuris, traverse la
ville. Le plus petit coin ou courette de verdure est une invitation au regard.
Les habitants participent à ce conte de fée. Soulaines-Dhuys vous accroche, où
parfois les rues sont semées d'intéressantes maisons à colombages.
La chapelle Saint-Jean de Soulaines-Dhuys, bâtie sur
un plan rectangulaire, elle en majorité du XVIe siècle, mais son porche fut
bâti jusqu'au XVIIIe. Elle a aussi une flèche qui s'élève au centre de l'édifice
et des verrières du XVIe siècle. Toute proche de l’église du village, la
chapelle SaintJean est le plus petit des édifices en colombages de la région. Ancienne
chapelle d’une maladrerie, l’une de ses particularités réside dans la
décoration du porche en façade. Encadrant la porte, la présence de baies ornées
de barreaux de bois permettait aux lépreux, restés dehors, de suivre les
offices. Sur la voûte du sanctuaire, subsistent les vestiges des séries de
motifs réalisés au pochoir : fleur de lys, arabesques encadrant des feuillages
et motifs stylisés.
Pour poursuivre la visite, un circuit balisé
sillonnant les rues du village s’impose pour découvrir les ponts de bois de la
« Venise verte de l’Aube » et les maisons traditionnelles.
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