L’église Saint-Remy est une des plus anciennes églises de Troyes, une paroisse-mère.
Selon l'Historia Inventionis Corporis Sanctae Mastidiae Virginis, elle existait déjà au début du XIe siècle. Les fouilles archéologiques de la fin des années 1980 montrent que l'église a été bâtie sur les ruines d'un édifice gallo-romain détruit à la fin du IIe siècle ou au début du IIIe siècle, situé en bordure d'une voie antique qui a perduré jusqu'au Moyen Âge.
Des tombes ont aussi été découvertes, démontrant que Saint-Rémy se trouvait dans le suburbium occidental de Troyes au Xe siècle, la paroisse et l'église n’ayant été englobées dans la nouvelle enceinte qu'au XIIIe siècle.
Autre preuve de son ancienneté et donc de son importance, Saint-Rémy était une paroisse-cardinale : elle avait sous son aile deux succursales (église dépendante d'une autre): l'église Sainte-Madeleine et l'église Saint-Frobert. La première fut rattachée avant le XIIe siècle à Saint-Rémy et à deux reprises, en 1590 et 1724, l'évêque voulut y créer une cure qui aurait été détachée de Saint-Rémy mais sans succès.
Il faut attendre
la seconde partie du XVIIIe siècle pour que la Madeleine soit érigée en
paroisse curiale, tout comme l'église Saint-Frobert, vidée pendant la
Révolution française et devenue depuis immeuble d'habitations, qui avait été
rattachée à Saint-Rémy sous le Comte Thibaut III de Champagne, à la fin du XIIe
siècle.
Le curé de Saint-Rémy était donc un prêtre-cardinal
: il se devait d'assister l'évêque pour la consécration des saintes huiles, le
lavement des autels et la bénédiction des fonts la veille de Pâques et de la
Pentecôte à la cathédrale, à l'image de ce qui se faisait à Rome.
Le premier curé recensé de Saint-Rémy est Pierre
Oyn, en 1378 ; il était issu comme tous les curés de Saint-Rémy des chanoines
de la cathédrale, puisque l'évêque Milon, également appelé Philippe de Pont,
leur en accorda la collation à la suite d'une décision du pape Innocent II.
Le curé devait prêter serment au Chapitre et lui
obéir, en promettant de maintenir l'église dans ses droits, de ne rien aliéner
et de payer la pension qui fut longtemps de 56 livres et 10 sous.
En 1610, l'église avait 8 prêtres habitués qui
acquittaient les services, les salaires étant répartis ainsi :
40 sous par mois pour le sonneur
100 sous par an pour la conduite de l'horloge
30 livres par an pour l'organiste
60 sous par an pour les souffleurs
25 livres par an pour le taillandier
De par son titre de prêtre-cardinal, le curé de
Saint-Rémy se voyait recevoir une assez importante rente : en 1730, elle était
de 1 130 livres, et en 1761 de 1 400 livres.
Atelier Édouard-Amédée Didron (fin XIXe siècle)
La peinture murale que l’on voit sur la paroi méridionale de la tour représente un cadran d’horloge décoré des rayons du soleil. L’Aiguille est unique ne pouvant indiquer que les heures et les demies. Le mécanisme ne fonctionne plus. Dans les écoinçons on remarque en haut deux anges tenant, l’un une colombe qui s’envole, symbole de la naissance du jour, l’autre un flambeau allumé, symbole de la nuit ; en bas, le blason de France et celui de Mgr Cortet, évêque de Troyes à l’époque de la restauration de la peinture (1886). Les personnages qui se trouent de chaque côté sont : à droite, saint Rémy, à gauche sa mère sainte Célinie.
Sur
le contrefort voisin un cadran solaire indique l’heure du soleil. L’inscription
latine que l’on lit en –dessous :
SICUT UMBRA DIES NOSTRI SUPER TERRAM
signifie : « Sur terre, nos jours passent comme l’ombre »
St Remy est riche de nombreuses œuvres d’art dont le principal auteur est notre peintre Jacques de Letin, né dans cette paroisse, et le plus célèbre peintre de Troyes du XVIIe siècle ! Comme tous les artistes de l’époque, il séjourna à Rome entre 1622 et 1625, époque où la peinture sur toile fait place à la peinture sur bois. De retour à Troyes, Jacques de Letin remplit de ses vastes toiles les églises de notre ville et de ses environs.
« Jésus chez Marthe et Marie de Béthanie »
L'auteur,
Jacques de Létin, est un peintre troyen du XVIIe siècle. Son style se rapproche
de celui de Simon Vouet, avec des ombres et des clairs-obscurs qui font penser
au Caravage.
La scène : Jésus se trouve dans la demeure de
Lazare, Marthe et Marie. On y voit Marthe pointer le doigt vers un endroit à
gauche : elle demande à Jésus de faire comprendre à sa sœur Marie qu'elle doit
aider au service de la table au lieu de se pâmer devant lui... Les évangiles de
Luc et Jean rapportent que Jésus réprimanda Marthe ! Cet épisode fut ensuite
considéré comme une preuve de la supériorité d'une vie consacrée à la
contemplation et à l'adoration sur une vie banalement consacrée aux soucis de
l'existence terrestre.
Dans la demeure de Béthanie qu'occupaient les trois
frères et sœurs, la Légende dorée rapporte que Marthe s'occupait d'administrer
la maison. Quand ils recevaient Jésus de Nazareth, elle faisait tout pour
l'accueillir au mieux et aurait voulu que sa sœur Madeleine (i.e. Marie de
Béthanie) fît comme elle. D'où la scène décrite par Jacques de Létin.
Compte tenu de son rôle dans les évangiles, Marthe est devenue la sainte patronne des ménagères et des sœurs converses. Elle est représentée habillée de vêtements modestes, parfois avec un panier, des clés, une louche ou un balai.
Notre sculpteur François Girardon, né lui aussi dans cette paroisse, a réalisé entre autres, le célèbre Christ en bronze du maître-autel, prêté pour plusieurs expositions à Paris et à l’étranger.
Fin novembre 2020, deux conservatrices-restauratrices sont intervenues in situ, dans l’église Saint-Rémy de Troyes pour rendre son éclat à une œuvre en bronze de la fin du XVIIe siècle, attribuée à François Girardon, sculpteur du roi Louis XIV « Le Christ en croix ».
Vous pouvez consulter le dossier de restauration de ce magnifique Christ sur le lien ci-dessous.
Dossier Drac RestaurationFamille Cochot, seigneurs de Villacerf : blason de gueules à une bande d'or soutenant un oiseau d'or. En chef, un lambel de sinople
Date, au-dessus du blason : Mil Ve Liiau-dessous : Aouet vi.
6 août 1552.
Agencement par Valtat (19e siècle). Restauration : 1957 par Malessel.
La famille Cochot fut l'une des donatrices de l'église Saint-Rémy (voûtes).
On trouve dans l’église des reliques de sainte Mâthie, née à Troyes, dès les premiers temps du christianisme, vierge et patronne de notre ville, fille d’un " gouverneur de la ville de Troyes et de tout le pays des tricasses ". Reliques également de notre Grand Saint Bernard de Clairvaux.
En 1248, le curé de Saint-Remy décide que les
Cordeliers " ne confesseraient aucun malade de la paroisse de Saint-Remy,
sans que préalablement le curé ou ses vicaires n’eussent entendu le malade dans
sa confession et sans que les Cordeliers en eussent reçu la permission ".
En 1435, une bande de pillards ruinent Troyes et ses
environs. La misère est telle que la paroisse de Saint-Remy " vend pour la
grande nécessité de l’église, un calice moyennant 8 livres ".
En 1561, un apothicaire dénonce les soi-disant
miracles de la Belle-Croix devant la mairie. Il est pillé, " un jeune
homme coupable est pendu, arraché de la potence donnant encore des signes de
vie. Il est transporté dans l’église Saint-Remy, où il est saigné. Il meurt le
lendemain et son corps est inhumé dans l’église ".
En 1562, des protestants " brisent des images
au cimetière de Saint-Remy ".
En 1706, les compagnons tisserands se constituent en
communauté en l’église Saint-Remy.
Pour cause d’insalubrité, le cimetière jouxtant
l’église, est " transféré au faubourg de Preize " en 1778.
Pendant la Révolution, l’église est transformée en
magasin de subsistances et en atelier de salpêtre. Le mobilier de l’église et
l’argenterie sont vendus à l'encan à partir du 17 janvier 1793, ses cloches
envoyées à Paris pour y être fondues afin de les transformer en canons. Le 20
janvier 1798 la municipalité décide de vendre en vue d'une destruction, toutes
les églises de Troyes, hormis la cathédrale; décision annulée par le ministre
alors en place.
En 1792, bien qu’assermenté, le curé résiste à l’arrêté de suppression du culte, et alors qu’il s’apprête à chanter la grand’ messe, il est emmené au comité. Mais un grand nombre de paroissiens l’y rejoignent en protestant : il revient à l’église et officie !
En 1793, le plomb du clocher est enlevé, en
spoliation, et en 1796, la maison des sonneurs de Saint-Remy transformée en
école primaire.
Après la mort de Robespierre et la loi de 1795 sur
la liberté des cultes, l’église est rouverte au culte, mais le maire et
l’inspecteur des Domaines, procédant par surprise, s’enferment dans l’église et
font l’inventaire.
L'église, dépouillée de tous ses vitraux et de tout
son mobilier, ne retrouvera son appareil que petit à petit durant le XIXe
siècle: en 1804 par une décision préfectorale les toiles de De Létin provenant
d'autres églises de Troyes, sont attribuées à l'église Saint-Rémy; dans les
années 1830, les autels sont reconstruits et en 1859, on pose le premier
vitrail dans la chapelle absidiale, premier d'une longue série de vitraux dont
le dernier sera posé en 1904.
Mais c'est dans la troisième partie du XIXe siècle que tout s'accélère: en 1884, un ouragan s'abat sur l'église. La flèche menacée d’éboulement, le conseil municipal vote la démolition entière de l'église le 23 août de la même année; les paroissiens se révoltent et ouvrent une souscription et l’Etat intervient pour faire exécuter les travaux.
Celle-ci en 1885 atteint les 12 197 francs.
On décide donc la restauration de l'édifice qui se déroule
de 1884 à 1904; sur les vingt années de ce chantier, entre les différentes
souscriptions des paroissiens, les dons de grands mécènes et le financement de
l'État (15 000 F), la restauration aura coûté en tout 241 646 francs et 45
centimes (pour détail, le financement des vitraux de 1891 à 1897 aura coûté à
lui seul la somme de 46 625 francs). Grâce à la volonté des paroissiens, la
générosité de deux de ses curés et la restauration complète de l'édifice,
l'État classe officiellement l'église le 6 avril 1908 comme Monument
Historique.
La flèche a été entièrement refaite en 1950. St Remy est classée monument historique en
1908.
A voir, la chaire d'époque Louis XIII, issue du couvent de la Visitation, tout comme l'exceptionnelle porte de la sacristie, entourée de pilastres cannelés à chapiteaux corinthiens, où deux anges tiennent une couronne de fleurs, alors que saint Rémi baptisant Clovis se tient au-dessus d'eux.
Dans la partie nord du transept, se trouve une sainte Geneviève du XVIe siècle, de l'école troyenne, au sourire discret, tenant de la main gauche un livre, et son pendant au transept sud, un saint Michel Archange du XVIIe siècle en costume de la Comédie italienne, terrassant un démon. Juste à côté, se trouve une statue de saint Frobert et son dais du XVe siècle, tous les deux issus de feue l'église Saint-Frobert.
Les boiseries du baptistère sont-elles, du XVIIIe siècle, les fonts baptismaux en marbre de 1781, remplaçant les anciens en cuivre, devenus inutilisables.
De nos jours, l'église Saint-Rémy fait partie de la
paroisse de Saint-Bernard, la paroisse du centre-ville. Chaque dimanche et
jours de fêtes, elle accueille à 10h30, la messe chantée en grégorien, selon la
forme extraordinaire du rite romain, c'est-à-dire en latin. Cela est notamment
possible grâce à l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, dont le prieur
général, l'abbé Gilles Wach, est originaire de Troyes.
L'orgue est de Charles Gadault, livré en 1853 a deux claviers et douze jeux; la balustrade par Valtat.
L’implantation du parking souterrain du marché a
nécessité une consolidation des fondations qui a été effectuée au moyen de
micro-pieux par injection de ciment sous pression à une profondeur de 20
mètres.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire