mercredi 29 mai 2024

Saint-André... Hier

Chez Dupuy auberge créée vers 1810 par la famille de ma Gd mère paternelle

 L’Ancien Saint-André, aujourd’hui Saint-André-les-Vergers

L’étude du cadastre (celui de 1870 révisé en 1958 et celui de 1828), l’observation des voies de communications et des différents lieux-dits de la commune nous donnent une étude assez précise du village tel qu’il existait au XVIIIe et du début du XIXe siècle.

La partie basse de Saint-André (qui occupe une surface importante) était couverte par un marais qui gênait considérablement le développement de la vie rurale de l’agglomération et ses relations avec la ville voisine.

Un plan ancien nous permet d’avoir une plus juste idée de l’importance de ce marais. Nombre de lieux-dits en attestent l’existence :

Rue du gué : (rue Médéric) endroit dans le marais où l’on peut passer à pied sec

Rue de la Grande Planche : (rue Jeanne d’Arc) , accès à Troyes

Lieudit La Grande Planche : difficile à cause des marécages, les Grandes planches permettaient de sortir du marais.

Les Ouises : voir LOUISE

Les Suivots : (chemin et lieudit) chemin qui contourne le marais

L’Ile Germaine : Elle émerge au-dessus du marais. Appellation en souvenir de Saint-Germain d’Auxerre qui aurait rencontré Saint Loup à cet endroit.

Rue du Pont aux prêtres : passage entre l’habitation des prêtres et l’église

Chemin des Marivots : chemin dans le marais

D’autres lieux-dits sont le reflet des activités rurales des habitants de Saint-André

La Linchère (le chemin des Roises) les trous d’eau où l’on faisait rouir le lin

Les Vignots. Moque bouteille : lieux plantés de vignes. Ces vignes produisaient, disaient les moines, un vin de mauvaise qualité. [La vigne a disparu à St André]

Les Vieux Cortins : Les cortins désignent l’endroit où l’on trouvait des jardins maraîchers

Cliquat : Moulin à aubes, sur les ruisseaux, à la limite avec La Rivière de Corps. Le cliquetis des engrenages a donné son nom au lieudit.

 

Quelques-unes de ces appellations font état d’activités liées à la proximité de l’Abbaye :

Les tuileries. Rue du four : (aujourd’hui rue de la République) Les vastes bâtiments monastiques, avec leurs églises et chapelles, auxquelles s’ajoutaient des celliers, des écuries, des forges et autres habitations diverses, exigeaient briques, tuiles et faitières. Il était donc habituel de voir des tuileries s’installer à proximité des grandes abbayes du Moyen-Age.

La Fourche aux Moines : terrains cultivés

Les Vergers : entre le Bas Clos et l’Abbaye de Montier-la-Celle, terrain fertile planté de fruitiers

Les Bas Clos : Pâtures entourées de haies en clôtures, situées entre la route d’Auxerre et la rue Thiers. Dans ces prés, on allait conduire les moutons et les vaches

Les Hauts Clos : c’est l’endroit le plus élevé du village, près de Troyes. L’Hôpital de Troyes ouvert en 1961 se nommait Hôpital des Hauts Clos. Il a été rebaptisé le 28 septembre 2018 : Hôpital Simone Veil.

 

LIEUX-DITS DRYATS

Lieux-dits de Saint-André


Les lieux-dits portent des désignations qui remontent souvent fort loin dans le temps car les hommes ont eu très tôt le besoin de définir les terrains qu’ils parcouraient. Quel meilleur signifiant pouvaient-ils trouver que celui qui caractérisait géologiquement ou géographiquement ce qu’ils voyaient  forêt, marais, colline, source, etc. Plus tardivement ce sont des faits remarquables qui définiront certaines parcelles : maisons brulées, moulin brulé, homme mort, etc. ou des activités spécifiques : moulin, four, tuilerie, forge, église, lavoir, etc.

Les vieux cortins : ce sont d’anciens jardins au sens large de domaines ruraux, du vieux français cort (1080), cortil, cartin. Le latin populaire cortis, du latin cohors, cohortis, avait le sens plus restrictif de cours de ferme. La même racine Gher , signifiant enfermer, a formé le francique gardo, d’où l’anglais garden, l’allemand Garten et le champenois gart et jart.

Les clos. Hauts-clos, Bas-clos sont également d’anciens lieux de culture bordés de haies, des enclos de type gaulois. Clos au XIIe désignait les jardins et enclos. La racine européenne Klew, donnant l’idée de fermer se retrouve dans le latin claudere et l’anglais close, fermer. Il est amusant de noter à ce sujet que le vieux français cloet (1309), petit endroit, est passé à l’anglais pour désigner les cabinets… et nous est revenu sous forme de W.C. !

Les planches. Grande-planche. Planche-verbale : désignent des terrains plats, de petites plaines, du gaulois plania, plaine. Le mot dialectal planche est d’ailleurs toujours bien connu des jardiniers amateurs ou professionnels qui ne manquent jamais de vanter la qualité de leurs planches de fraises ou de leurs planches de poireaux. La racine européenne Pela, plat, étendu, est également à l’origine de l’homonyme latin planca et de l’allemand Planke, planche de bois.

La linchère : c’est le champ semé de lin, du latin lineum, lin. Il y eut ensuite confusion phonique entre linière (XIIe) et linge (1125) pour former lingère puis linchère.

Les Roises (XIVe) sont les rouissoirs, de l’ancien roer (XIIIe), rouir, de roir (1265), croupir, issu du francique rotjan, haut-allemand Rotten,  pourrir.

Le Voué est un gué, d’où la rue-du-gué et le chemin-du-voué qui y conduisent. Le vieux français guaer, guéer, mouiller, vient du latin vadum, gué, par gutturalisation de la vélaire. On retrouve des lieux-dits similaires à Troyes, le Véon, le Grand-Véon, le Véon-à-l’Ane où des fouilles archéologiques ont permis de découvrir des armes de la période gauloise.

La Noue, Noue-cliquat, du gaulois nauda, désigne un pâturage, une prairie humide. C’est sans doute pour cette raison que le chemin qui longe la noue se nomme la Voie-aux-vaches. Une autre évolution du mot nauda a donné le lieu-dit les Noës (Les Noës-près-Troyes). Lequel, par la fantaisie des « releveurs » de cadastre est devenu « Noël », dixit le Chemin-des-Noëls à Troyes !

L’Ile Germaine : comme son nom l’indique (presque),  c’est une ile naturelle située au milieu des marais car le mot germaine vient du latin germane, évolution de genuine, genuinus qui signifie inné, naturel.

La Fontaine Nagot : ce nom a sans doute été déformé par aphérèse. C’est la « source-qui-goutte »,  du latin fontana et gutta, en français du XIIe s. fontaine à gote. Cela pourrait toutefois être également la « source-d’eau-sale », la fontaine agot, car agot (1280) signifiait canal, égout… ?

Il y aurait beaucoup à dire encore sur les nombreux lieux-dits de Saint-andré-les-Vergers… Je termine en mentionnant le chemin des Pituites, nom caractéristique des lieux humides et marécageux puisque la pituite, du latin pituitara est un des anciens noms de la scrofulaire, plante connue dans la médecine traditionnelle sous ces deux espèces : la scrofularia aquatica, dire herbe-aux-poux, herbe carré ou nief et la scrofularia nodosa, dite herbe-aux-hémorroïdes ou herbe-aux-écrouelles.


Jasées…  en passant



Des précisions sur la faux

Faux et usage de faux

« Lame d’acier légèrement recourbée, fixée à un long manche dont on se sert pour faucher : la faux est l’attribut de la mort.

Le faux en matière civile et commerciale est un crime. Tout ce qui est faux sent la torture.

C’est avec ces connaissances, ce langage intellectuel, puisé dans le petit Larousse scolaire que, de chez moi au quincailler, et de là à mon pré, je suis enfin arrivé en tremblant, pensant à la mort et au crime.

On m’avait assuré que la faux s’emmanchait avec une bague, une cale et un marteau. J’ai essayé de bien des façons ; cela ne marchait pas. Aucun danger de couper les pattes aux fourmis.

Heureusement, j’ai vu le vieux père Emile Cocagne, tout bossu, mais expérimenté par les temps du siècle passé où l’on fauchait des hectares à la main. Il s’écria :

« - Idiot de jeune ! Ne vois-tu pas que ta faux est trop « ouverte » ? Débride-là !

Au marteau, je desserre le talon de la lame en frappant la pointe du coin. Et je fixe à nouveau la lame après lui avoir donné un angle plus aigu par rapport au manche. Et j’essaie.

- ça va encore plus mal !

- Bien sûr et je t’attendais là ; ta faux est trop « fermée » maintenant.

J’ai enfin su régler mon instrument de torture. On fait pivoter sur le genou l’extrémité du manche. La pointe doit passer à quelques doigts en arrière du talon. Après, essayez de bloquer fermement le coin avec le marteau, sans rien dérégler ; Vous m’en direz des nouvelles. Il faut jurer pour y arriver, et encore !

- Faucher n’est pas piocher, dit le père Emile

- La faux n’est pas un avion, riposte le père Henri, son voisin et conscrit.

Si la faux est tenue trop haut, on a l’air de piocher et on fauche au petit bonheur. L’herbe se couche mais ne se coupe point. Si l’on se lance trop fort, on risque d’empiquer la lame dans le sol. La retirer n’est pas aisé et l’on risque de casser le talon. L’acier est sec et fragile aux chocs.

Le secret est de tirer doucement la faux en la faisant pivoter autour de la main gauche. C’est un travail d’art.

Mais en aiguisant la faux avec la coue sortie d’une antique corne de vache, je me suis profondément entaillé l’index et le sang gicle ; je sens mon cœur battre et cela me fait mal à chaque pulsation.

Oui, la faux est bien l’attribut de la mort »

Extrait des Miettes paysannes, poignées d’humus

 

Une bonne coue :

« Selon certains, une bonne coue devait répondre favorablement à l’épreuve de la salive, épreuve supérieure à celle du toucher et à celle du regard.

L’acheteur crachait sur la pierre et posait sur le liquide un tout petit fétu de paille. Celui-ci devait tourner rapidement sur lui-même, témoignant ainsi que la pierre était bonne ».

L’embauche des moissonneurs

C’étaient les manouvriers du village qui aidaient à la fenaison puis à la moisson. La louée se faisait à la Pentecôte chez les patrons. Il y avait bonne table et jeu de quilles sur la place… Cette embauche correspondait avec la dégustation des « roulées », le lendemain de Pâques. (voir ce chapitre)


Une précision d’importance 

M. J. Gallant précise :

« Vous indiquez qu’à Charbuy on moissonnait avec le quian (ou cueillon). En fait, il s’agissait du second passage, de la seconde coupe des seigles pour récupérer le jaume servant de litière. La partie noble, la belle paille était sciée à la faucille.

Le seigle était, vous le voyez, l’objet d’un travail particulier puisque la technique du battage était également spéciale ».

C’est une ancienne coutume que de couper les céréales en deux fois : l’épi d’abord la paille ensuite. Marc Bloch dans son livre  « les caractères originaux de l’histoire rurale française », explique que cette façon de pratiquer tenait au fait que l’ensemble des habitants partageaient souvent autrefois, avec le propriétaire, le produit de la récolte. La vaine pâture en est un exemple plus proche de nous.

« Rien de plus significatif que le droit d’éteule. Une fois libre des moissons, la terre n’est pas immédiatement abandonnée aux bêtes ; les hommes d’abord, s’y répandent à la recherche des chaumes – c’est le sens déteules – qu’ils emploient à couvrir leurs maisons, dont ils font des litières pour leurs étables, parfois qu’ils brûlent à leurs foyers : ils la prélèvent sur les labours, sans se préoccuper les limites de parcelles. Et cette faculté parait si respectable que l’exploitant n’a pas la permission d’en réduire le profit en faisant couper les blés trop près du sol. La faux est réservée aux prairies : sur les emblavures… seule est autorisée la faucille qui tranche haut… L’épi est « au maître de la terre », la paille à tout le monde ».

 


les anciennes fermes dryates


Autrefois, il n'y avait que des maraichers et des fermes à Saint-André, aujourd'hui il n'y a presque plus de souvenirs....


 

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