mardi 16 avril 2024

l'Hôtel de Chapelaines

 

L’Hôtel de Chapelaines

 

dessin de 1889

Avant la construction de ce bâtiment, le terrain est occupé depuis le XIIIe siècle par des bouchers, des teinturiers et des drapiers et appartient pour partie à l'abbaye de Clairvaux, et pour partie à l'abbaye Notre-Dame des Prés.

Il est limité à l’est par le Grand-Ru de la Seine, à l’ouest par la rue de Croncels, et au nord par une maison qui faisait partie d’un hôtel dit du Château, maison devenue Hôtel de Noël. Il semble qu'il y ait eu à cet emplacement un bâtiment dit « maison de Clairvaux » dès la fin du XIIe siècle, situé sur le côté Est de la rue de Croncels - voie menant vers le bourg de Croncels à l'extérieur des murs de la ville. La porte de Croncels (une des portes de la ville) se trouvait à une centaine de mètres au sud du futur hôtel.

En 1470, l'abbaye de Clairvaux loue par bail emphytéotique les terrains lui appartenant à Pierre Largentier, teinturier de draps faisant partie de la noblesse marchande, et à sa femme Gilette Festuot. Trois ans après, en 1473, Pierre Largentier et sa femme prennent également à bail emphytéotique de l'abbaye de Notre-Dame des Prés un terrain avec un jardin et une maison dont la façade donnait sur la rue du Gros-Raisin. La location de ces biens passe en 1487 au fils du couple, Nicolas Largentier (II), également teinturier de draps, et à sa femme Babelette (Élisabeth) Le Tartier.

Survient le grand incendie de Troyes en 1524, à la suite de quoi les baux consentis par les deux abbayes sont convertis en une vente à titre perpétuel. Nicolas Largentier (II) fait alors construire l'hôtel en pierre au n° 9 de la rue Turenne.

En 1535 cet hôtel est appelé « Grand hôtel de Clairvaux » et son propriétaire est Nicolas Largentiern, petit-fils du précédent et époux de Simonette Maillet. Il prend vis-à-vis de l'abbaye de Clairvaux l'engagement de parachever les travaux, « si parachevez ne sont ». Le gros œuvre est vraisemblablement terminé l'année suivante, 1536.


A la mort de Nicolas Largentier (V) et de sa femme, la propriété passe à l'un de leurs enfants, Nicolas Largentier (VI) (†1610) et sa femme Marie Le Mairat (†1628). C'est l'époque des guerres de religion, et il quitte femme, commerce et maison pour se mettre au service du roi Henri IV en combattant la Ligue.

Pendant son absence, la maison est pillée en 1586 par les corps de métiers ameutés contre les commissaires chargés de lever un impôt sur les métiers ; mais après la fin des hostilités, le roi le dédommage avec un don de 20 000 livres en assignations. Il devient seigneur de Vaucemin, baron de Chapelaines, seigneur de Vassimont et Haussimont, de Vaurefroy, de Lenharée en partie, de Vauchassis et Thennelières en partie, etc., vicomte de Neufchâtel-sur-Aisne, seigneur de Ternon et de Léguillon. Il devient seul adjudicataire des fermes de France et s'en enrichit considérablement.

Il achète en 1597 de Catherine de Clèves, duchesse de Guise, la terre de Chapelaines à Vassimont dans la Marne, et y fait construire un vaste château. A cette époque, la maison de la rue de Turenne prend le nom de Chapelaines.

À la mort de Marie Le Mairat en 1628, l'hôtel passe à l'un de leurs fils, Louis Largentier (1581-1639), qui dissipe toute sa fortune dans des recherches d'alchimie - y compris de faire exploser le château de Chapelaine.

Le roi Louis XIII, en chemin vers le Dauphiné pour y secourir le duc Charles Ier de Mantoue (guerre de succession de Mantoue), y est reçu le 23 janvier 1629 par Louis Largentier et sa femme Marguerite d'Aloigny. Il y reste jusqu'au 26 janvier. Son choix de logis est un choix politique : Louis Largentier est son bailli et le roi réaffirme ainsi la préséance de son officier sur les autres corps de la ville.


A sa mort en 1639, l'hôtel de la rue de Turenne est saisi à la requête des créanciers et vendu pour 14 300 francs à Louis de la Fertey, achetant pour le compte de l'épicier de Troyes Sorel (on notera, cependant, que le 16 juillet 1642, c'est bien Louis Largentier, en tant que "légataire universel" de feu Nicolas Largentier et de Marie Le Mairat, ses père et mère, qui vend l'hôtel particulier des Chapelaines à Paris, sis rue Beaubourg). A terme, il arrive par héritage à sa nièce Edmée Denise, femme de Louis de La Fertey. Pendant son veuvage elle le vend à M. Rapault, mais François Camusat de Riancey exerce son droit de retrait lignager et l'achète le 31 juillet 1697. Cette maison passe ensuite à ses héritiers Jean Camusat de Riancey et Marie-Claude Camusat, femme de François-Joseph de Loynes de la Potinière (1704-1762), auditeur des comptes à Paris.

En 1774, Marie-Claude Camusat est veuve et habite l'hôtel, qui est alors connu sous le nom d'hôtel de Loynes. Sa fille - ou sa petite-fille -, Élisabeth-Louise de Loynes, épouse de Victor Paillot, maire de Troyes (1800-1803) et député de l'Aube (1815-1820), hérite de l'hôtel.

Elle y accueille l'empereur François Ier  d'Autriche (père de Marie-Louise, et s’y réunirent les « Trois Empereurs », c’est-à-dire François Ier, le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III et le Tsar de Russie Alexandre Ier) le 8 février 1814. Ils se concertèrent sur la suite à donner à la campagne de France qui devait aboutir à la chute de Napoléon. L’empereur d’Autriche, pour remercier son hôtesse de son hospitalité, lui offrit un magnifique diamant avec lequel il grava sur une des vitres du bâtiment un mot mystérieux – Henrig – ( ?) Le propriétaire actuel de l’hôtel de la maison a conservé cette vitre et la famille Paillot de Montabert le diamant…

L'hôtel passe ensuite à son fils, Jacques-Eugène Paillot-Lemuet (†1860), secrétaire général de la préfecture de l'Aube. Lors de la transformation de la grande pièce principale en appartements, dès avant 1853, la cheminée est déménagée au musée Saint-Loup, dans la section Arts décoratifs (sculpture, 1re salle).

En 1889 l'hôtel appartient à la descendance de Jacques-Eugène Paillot.

 


 La façade sur la rue de Turenne est  construite en ligne brisée. Elle est divisée en cinq parties par des pilastres dont les intervalles sont percés de hautes fenêtres, accompagnées de colonnettes portant des frontons triangulaires surmontés de vases.

Sur le couronnement, à la hauteur du chêneau, courre une balustrade à jour, divisée par des piédestaux portant des vases cannelés et couverts appelés « pots à feux ».

A l'angle sud-ouest, à la hauteur du premier étage se voit une niche Renaissance avec cul-de-lampe et clocheton sculpté à jour. Du même côté, à la hauteur des combles, deux énormes gargouilles à tête monstrueuse.

La façade postérieure du bâtiment est principalement de brique et pierre en forme de damier champenois.

La cheminée

Au premier étage, une grande salle contenait une splendide cheminée car à l’époque la cheminée constituait le principal ornement de l’habitation. Cette cheminée se trouve maintenant au musée des Beaux-Arts de Troyes.

Cheminée de l'Hôtel de Chapelaines - Musée St Loup - Troyes 

 La cheminée se compose de deux jambages en retrait sur lesquels s’appuient deux colonnes portant un entablement divisé en trois parties, trois bas-reliefs représentant des sujets empruntés à l’Ecriture Sainte : de gauche à droite : Le Massacre des Innocents, l’annonciation, la Fuite en Egypte.

Au-dessus de l’entablement, repose un soubassement divisé aussi en trois parties, trois sujets également empruntés à l’Ecriture Sainte occupent les panneaux : ce sont le Mauvais riche, la Femme Adultère, la Résurrection de Lazare.

 

Détails cheminée Hôtel de Chapelaines



Jeu de Paume d’Anvers

Dans le jardin, à quelques mètres du bâtiment XVIIIe, passait le Grand-Ru. Au-delà et à droite (sud), un bâtiment XVIe était à usage du jeu de paume, c’était le « jeu de Paume d’Anvers » ; il fut transformé ensuite en écuries. Il avait son entré rue de l’Eau Bénite qui était autrefois la rue de Mouilleron et aussi de Mouilleçon puis la rue des Planches ou du Pont des Planches, traversée qu’elle était par la rivière Vienne, à laquelle a succédé un bras de Seine. Elle doit son nom actuel à une enseigne qui a disparu. Elle est devenue une impasse depuis le 4 février 1972, après la construction de la nouvelle perception.

Il y avait à Troyes et ailleurs un grand nombre de ces jeux de paume ou tripots ; ces lieux dédiés à un sain exercice physique servaient aussi à des rencontres dont on a dit qu’elles n’étaient pas toujours conformes à la morale ; en 1543 pour cette raison, on alla jusqu’à faire défense d’établir de nouveaux jeux de paume.

Quant au mot tripot, nous ne l’avons gardé qu’en mauvaise part ; il avait au départ la même origine que trépigner, taper du pied.

 

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