dimanche 4 août 2024

Châtellenie de Villemaur (Aube-10)

 

Châtellenie de Villemaur


Son précédent nom datant du XVIIe siècle s'écrivait VilleMort.Ville : de l'ancien français ville dans son sens originel de « domaine rural » issu du latin villa rustica. Des auteurs se piquant de toponymie pensent que la terminaison en "-maur" signifie fonds marécageux (Du vieux norrois maurr). De fait, les villages de Vaumort (Yonne) et l'habitant de Fossemor (à Theil - Yonne) donnent du crédit à l'hypothèse. La Vanne est une rivière traversant la commune qui donne son nom à l'aqueduc de la Vanne desservant Paris.

Villemaur, aujourd’hui Villemaur-sur-Vanne est une petite commune bâtie sur un ancien cimetière. Au Moyen Âge, une fosse commune était située à l'entrée du village afin de dissuader les fourbes d'y pénétrer. Villemaur est situé sur la voie romaine de Sens à Troyes sur la Table de Peutinger*.

Durant tout le XIIe siècle, le village est le siège d'une seigneurie qui dispose d'un certain relief. Un chemin conduit directement à Joigny, comté qui intègre la vassalité du comté de Troyes dès l'année 1100. Ce chemin passe par Coulours où les Templiers installent leur première commanderie, et par Rigny-le-Ferron, où les vicomtes de Joigny installent le siège de leur vaste seigneurie.

La famille de Villemaur possède la seigneurie durant tout le XIIe siècle. Son autorité est néanmoins cantonnée par d'autres seigneurs des environs : les Trainel à Pouy et Villeneuve-l'Archevêque; les de Mauny à Bagneaux, vassaux des Trainel; les vicomtes de Joigny à Rigny-le-Ferron ; l'évêque de Troyes à Aix-en-Othe; le sire de Marigny (cadet de la famille de Trainel) au Nord. La seigneurie sous la suzeraineté du comté de Troyes qui se fond dans le comté de Champagne à partir des années 1160.

Le premier titulaire connu est Manasses. En épousant Ermensent, veuve d'un vicomte de Sens, il portera courtement le titre vicomtal (de Sens) en 1103. Il vit en 1125 et est peut-être décédé avant 1127. Il semble être le frère d'un Hilduin de Marolles (sur-Seine ?). Son fils puîné Manasses sera chanoine de Sens (1164) et archidiacre de Troyes (1131), mettant à profit la paix retrouvée après 1152 entre le domaine royal et la Champagne pour faire une carrière à cheval sur la frontière. Son fils aîné Eudes de Villemaur décède avant 1154. Sa veuve Hélie se remarie à Guillaume Le Roi maréchal de Champagne (1158).

Les seigneurs disposent d'un château à Villemaur. Deux familles de chevaliers sont vouées à sa garde : les le Louche et les le Chasseur. Une collégiale dotée de chanoines démontre la volonté de prestige de la famille.

À la fin du XIIe siècle, le lignage disparaît à la quatrième génération.

La seigneurie entre dans le domaine comtal champenois vers 1195. Le comte choisit d'ériger Villemaur au rang de châtellenie. On lui rattache ainsi des fiefs dont les titulaires n'ont plus à se rendre à Troyes pour accomplir leur devoir féodal. De cette petite châtellenie dépendra la seigneurie de Marigny (propriété d'une branche de la famille de Trainel) ; le fief de la Mothe, à la sortie Nord de Rigny-le-Ferron. Un prévôt comtal succède au prévôt seigneurial.


Villemaur  village fortifié

 À la fin du XIIIe siècle le comté de Champagne passe à la Couronne de France par le mariage de la comtesse Jeanne* avec Philippe IV le Bel. En 1316, leur fils aîné le Roi Louis X le Hutin décède, rapidement suivi dans la tombe par son fils posthume Jean Ier.

Sa fille, Jeanne de France, est dépossédée de la couronne de France et de ses droits en Champagne-Brie par son oncle Philippe de Poitiers (Philippe V) : son tuteur et oncle, le duc de Bourgogne, puis son mari Philippe d'Evreux, lui font ménager par plusieurs traités passés avec Philippe V, Charles IV et Philippe VI, un dédommagement financier sous forme de rentes et assignations. À cette occasion, on découvre l'existence de forges, sans doute alimentées en combustible et en minerai par la forêt d'Othe voisine.

L'assiette de ce dédommagement successoral est arrêtée en 1328. Jeanne de France reçoit la châtellenie de Villemaure, et celles de Chaource, d'Isle (-Aumont) et de Payns. Elle résulte du travail conjoint du bailli de Troyes et du doyen de la cathédrale de Troyes missionnés par Philippe VI. Devant l'insuffisance de l'assiette de la seule châtellenie de Villemaure, les autorités parisiennes ont donné l'autorisation de ponctionner les trois autres châtellenies. L'assiette de la seule châtellenie de Villemaure est vaste. Elle s'étend alors de Vauluisant, Les Sièges et Coulours jusqu'à Fontvannes, Messon, Sormery, Vauchassis. Il est de ce fait assuré que la châtellenie de 1328 dépasse largement la seigneurie indépendante dans ses éléments relevés au XIIe siècle. Par ailleurs, les experts chargés localement d'estimer le revenu des différents éléments constitutifs insistent pesamment sur le fait que la valeur du fermage de la prévôté est montée excessivement et que les derniers prévôts-fermiers "en ont été de leur poche". Cette difficulté économique un peu antérieure à 1328 est aussi relevée dans les autres châtellenies incluses dans l'assiette. Les estimateurs ont refusé d'assigner une valeur au revenu tiré des châteaux comtaux de la quasi-totalité de l'assiette (sauf Payns). Ils ont donc été cédés à Jeanne de France pour une valeur nulle. La charte originale de l'assiette se trouvait à la Chambre des Comptes de Paris et brûla avec elle en 1737. Par chance une copie avait été opérée un demi-siècle auparavant.

Aux XVe – XVIe siècles, Villemaur forme avec IsleChaource, Maraye, Payns, un groupe de châtellenies constituant un groupe féodal aux mains des ducs de Bourgogne, notamment la duchesse Marguerite, puis leurs descendants comtes ou ducs de Nevers.

Villemaure accueillait plusieurs administrations royales, dont un grenier à sel et un siège particulier d'élection.

Aux XVIIe – XVIIIe siècles, Villemaur forme avec Saint-Liébault le duché de Villemaur pour le chancelier Séguier, puis le duché d'Estissac pour les descendants du chancelier membres de la famille de La Rochefoucauld-d'Estissac. Cette dernière famille a conservé des documents sur Villemaure depuis le XVIe siècle.

 

*La Table de Peutinger (Tabula Peutingeriana ou Peutingeriana Tabula Itineraria), appelée aussi carte des étapes de Castorius, est une copie du XIIIe siècle d'une ancienne carte romaine où figurent les routes et les villes principales de l'Empire romain qui constituaient le cursus publicus. Ce document était également connu autrefois sous le nom de « table théodosienne » (ou tabula theodosiana), nom qui fait référence à l'empereur Théodose car, selon d'Aigueperse, une copie affiche des vers écrits du temps de cet empereur.

Elle est conservée à la Bibliothèque nationale autrichienne de Vienne (Autriche).

Depuis 2007, elle est inscrite au Registre international Mémoire du monde de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, les sciences et la culture (Unesco), en tant que patrimoine documentaire de l'Autriche.


*Jeanne Ière de Navarre

Blason bi-partie : France - Navarre et Champagne

 Jeanne Ière de Navarre est née le 14 janvier 1273 à Bar-sur-Seine (Aube-10) et  morte le 2 avril 1305 à Vincennes.  Princesse de la maison de Champagne, fut reine de Navarre et comtesse de Champagne de 1274 à 1305, et reine de France de 1285 à 1305

 Reine de France 5 octobre 1285 – 2 avril 1305 (19 ans, 5 mois et 28 jours)

Couronnement 5 janvier 1286 en la cathédrale Notre-Dame de Reims

Prédécesseur   Marie de Brabant

Successeur Marguerite de Bourgogne

Reine de Navarre 22 juillet 1274 – 2 avril 1305 (30 ans, 8 mois et 11 jours)

Avec   Philippe Ier (1284-1305)

Prédécesseur   Henri Ier

Successeur      Louis Ier

Comtesse de Champagne 22 juillet 1274 – 2 avril 1305 (30 ans, 8 mois et 11 jours)

Prédécesseur   Henri III

Successeur      Louis Ier

Dynastie         Maison de Blois-Champagne

Nom de naissance      Jeanne de Champagne

Date de naissance       14 janvier 1273

Lieu de naissance       Bar-sur-Seine, (Aube -10) - Champagne

Date de décès 2 avril 1305 (à 32 ans)

Lieu de décès Vincennes,

Sépulture        Église des Cordeliers de Paris

Père     Henri Ier de Navarre

Mère    Blanche d'Artois

Conjoint          Philippe IV de France

Enfants           Louis X Roi de France

Philippe V Roi de France

Charles IV Roi de France

Isabelle de France



Jeanne Ière était la fille du roi Henri I de Navarre et de Blanche d'Artois, de lignée capétienne. Encore au berceau à la mort de son père, elle est proclamée reine de Navarre à Pampelune sous la régence de sa mère. Aussitôt, deux factions navarraises apparaissent. L'une loyale à Jeanne et à sa mère, l'autre favorable à une régence castillane du roi Alphonse X. La tension augmentant, la régente demande des soutiens au roi de France, qui lui envoie au début 1276 une troupe commandée par Eustache de Beaumarchais, sénéchal de Toulouse. L'arrivée de cette troupe ne fait qu'aggraver la situation et Blanche quitte alors la Navarre avec sa fille pour la cour de France.

Pour faire respecter aux factions en présence les droits légitimes de la régente et de sa fille de trois ans, le roi Philippe III, son cousin, confia à Robert II d'Artois, le frère de Blanche, le soin de rétablir la paix. Robert ayant réuni une forte armée, il descendit en Navarre durant l'été 1276, assiégea la capitale Pampelune, prit et détruisit une partie de la ville et rétablit dès novembre 1276 l'autorité de la reine. Le chroniqueur et poète occitan Guillaume Anelier relata ces événements en détail dans son poème Histoire de la guerre de Navarre. Blanche, remariée depuis au prince anglais Edmond de Lancastre, assura le gouvernement du comté de Champagne, tandis que le royaume de Navarre était confié à des gouverneurs d'origine française. Jeanne est depuis lors élevée à la cour de France, qu'elle ne quitta plus. Le 16 août 1284, à l'âge de 11 ans, elle épousa l'héritier de la couronne de France, Philippe, qui devint ainsi roi de Navarre sous le nom de Philippe Ier (1284-1305). En octobre 1285, son époux devint roi de France sous le nom de Philippe IV le Bel. Elle lui donna six enfants, dont une fille, Isabelle, qui devint reine consort d'Angleterre et trois fils, tous devenus rois de France.

Malgré son mariage, elle continua de régner seule sur ses domaines. En 1286, son mari se déplaça jusqu'à Bayonne pour rencontrer Sanche IV de Castille qui ne se présenta pas. Une nouvelle réunion entre les deux souverains eut lieu finalement à Bayonne en 1290. Dans les deux cas, Philippe évita d'intervenir sans son épouse en Navarre. Lors de la guerre de Guyenne entre la France et l'Angleterre (1294-1303), elle fit en sorte que la Navarre reste à l'écart du conflit, bien que celui-ci se déroulât près de ses frontières.

Elle est à l'origine de la création du collège de Navarre et de l'hôtel-Dieu de Château-Thierry. À la veille de sa mort en 1305, elle s'assura que son fils aîné Louis soit bien reconnu comme roi de Navarre par son époux, ce qui fut fait, Louis étant couronné en 1307 à Pampelune.


Acte de fondation du collège de Navarre à Paris, donné à Vincennes le 25 mars 1305 
par Jeanne, reine de France et de Navarre, épouse de Philippe le Bel. 
Une petite charte est jointe à l’acte de fondation.


De son mariage avec Philippe le Bel sont issus sept enfants :

- Louis le Hutin (1289-1316), roi de Navarre (Louis Ier, 1305-1316) et roi de France (Louis X, 1314-1316) ;

- Marguerite (1290-1294), promise à Ferdinand IV de Castille ;

- Blanche (1291-peu après sa sœur aînée) ;

- Philippe le Long (1293-1322), roi Philippe V de France et également roi Philippe II de Navarre (1316-1322) ;

- Charles le Bel (1294-1328), roi Charles IV de France et également roi Charles Ier de Navarre (1322-1328) ;

- Isabelle (1295-1358), épouse du roi d'Angleterre Édouard II ;

- Robert (1296-1308).

Trois ans après la mort de sa mère Blanche d'Artois, elle meurt subitement elle aussi. À l'époque, la mort de Jeanne et de sa mère parurent suspectes. En 1308, une enquête fut ouverte et on arrêta un homme, l'évêque Guichard de Troyes, dont Blanche avait délaissé les services. Lors de son procès, Guichard s'était vanté de les avoir fait mourir avec l'aide d'une sorcière et d'un moine jacobin. Le Lombard Nossle fut arrêté, jugé et pendu en 1313 pour l'empoisonnement de la reine, Guichard fut absous.

Peu de temps avant sa mort, le jour de l'Annonciation 1305 (25 mars), elle fait rédiger son testament au château de Vincennes. Ce document comprend deux volets : le premier consacré à la création d'un collège au sein de son hôtel particulier parisien, l'hôtel de Navarre, le second fonde un hôtel-Dieu pour l'accueil et le soin des membres souffrants du Christ à Château-Thierry. Le collège conçu sur le modèle de celui fondé par Robert de Sorbon connaît la postérité en tant que collège de Navarre. L'hôtel-Dieu quant à lui voit le jour quelques années plus tard. Aujourd'hui transformé en musée, il est à l'origine de l'hôpital de la ville.

 

Sceau de Jeanne Ière de Navarre


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