Ce manuscrit, réalisé pour Charles V, raconte
l'histoire de la royauté française de manière à souligner la légitimité et la
puissance des Valois.
Fils de Charles le Chauve, Louis II le Bègue
(846-879) dit aussi « le Fainéant », est fait roi d'Aquitaine en 867 par son père.
À la mort de ce dernier en 877, l'empire est en proie à des révoltes
permanentes : la succession ne va pas de soi d'autant que Louis est jugé trop
faible. Mais par la volonté des Grands du royaume qui administrent le pays, il
est installé sur le trône de Francie sous la tutelle d'Hugues l'Abbé. Louis
tombe vite malade et meurt en 879.]
Le
concile de Troyes de 878 et le sacre de Louis le Bègue
En août 878, s’ouvre à Troyes un concile convoqué et
présidé par le pape Jean VIII
en personne, en présence du roi de France Louis II, dit Le Bègue.
On s’expliquerait mal ces augustes présences, si
n’étaient rappelés quelques éléments antérieurs et plus spécialement la
situation tragique que connaissent alors les deux hôtes illustres de la cité
troyenne.
Louis le Bègue, 32 ans, appelé parfois le Fainéant,
passe, de l’avis unanime pour un homme " simple et doux, aimant la paix,
la justice et la religion ". Son père Charles le Chauve lui lègue à sa
mort son royaume, mais, à cette époque, seule, l’adhésion des évêques et des
grands féodaux peut ouvrir au prétendant, le chemin du trône.
Louis n’ignore rien de ces réalités, et c’est à
coups d’abbayes, de comtés et de domaines, distribués à bon escient, qu’il se
ménage des fidèles, susceptibles de lui accorder le consensus dont il ne
saurait se passer.
De telles largesses ne peuvent manquer de porter
leurs fruits, et Louis le Bègue est couronné roi de France, en 877.
Jean VIII
est " d’une autre trempe que le roi de France : homme d’énergie peu
commune, qui entend assumer toutes les responsabilités que lui confère son
magistère ".
C’est bien en sa qualité de chef suprême de
l’Eglise, qu’à ce concile, il souhaite décider notamment de la succession
impériale et de la protection du domaine pontifical.
Fort décevant, seuls trente évêques et trois prélats
italiens répondent à l’appel du pape.
Avec cette participation étrangère si réduite, les
graves problèmes sont laissés en suspens, au bénéfice de questions moins
complexes, visant l’administration et la discipline ecclésiastique.
Quelques problèmes sont résolus : Lambert de Spolète
ayant trahi le pape est excommunié. Par contre, l’évêque de Laon, déposé en
871, obtient sa réhabilitation, encore qu’emprisonné au moment de sa disgrâce,
il ait eu les yeux crevés par ses ennemis. Vendeuvre relevant du diocèse de
Langres, réintègre notre diocèse…
A s’en tenir à ce bilan, en vérité fort modeste, des
actes du concile de Troyes, on serait tenté de croire que les décisions qui y
furent arrêtées demeurèrent de bien médiocre portée. Ce serait oublier que les
délibérations d’une telle assemblée se doublent d’entretiens officieux, de
négociations parallèles menées dans les " couloirs ", et dont les
conséquences sont décisives.
Le comportement de Jean VIII
dans notre ville est à cet égard des plus révélateurs.
Ces délicates négociations, menées en dehors des
sessions officielles, constituent la face cachée du concile de Troyes. Elles en
révèlent le véritable enjeu et lui confèrent une indéniable valeur historique,
et expliquent la fameuse cérémonie du sacre royal.
Louis le Bèque est de nouveau couronné empereur par
le pape Jean VIII,
le 7 septembre 878, en notre église Saint-Jean (et non le 4 août comme certains
historiens l’ont écrit !).
Un précieux vitrail commémore cet événement. Il est
sérieusement endommagé lors du terrible orage du 16 mai 1728 (qui détruit
20.000 ardoises, 76.000 tuiles et plus de 100 toises de vitraux dans cette
seule église).
Le 26 mai 1872, en présence du préfet et d’une foule
considérable, Monseigneur Ravinet, évêque de Troyes, bénit le vitrail du sacre
" si parfaitement restauré qu’on n’en distinguait à peine les parties
rénovées ".
En fait, la verrière est entièrement neuve. Elle est
aussi entachée d’une foule d’erreurs, le peintre-verrier y ayant transposé,
avec un incroyable sans-gêne, les sujets et les personnages.
Les protagonistes de ces événements de 878,
connurent un sort funeste.
Le jour du vendredi-saint 10 avril 879, meurt Louis
le Bègue à l’âge de 33 ans et au terme de deux années d’un règne éphémère.
Dès février 881, le pape Jean VIII
se voit contraint de sacrer empereur l’indolent Charles le Gros, fils de Louis
le Germanique. L’année suivante, il périt tragiquement, le crâne défoncé à
coups de marteau par l’un de ses familiers.
Le
concile de Troyes de 878 s'est tenu en août de cette
année-là sous l'égide du pape Jean VIII,
qui cherchait refuge en Francie occidentale après avoir été chassé de Rome par
les Sarrasins et des clercs romains. Ce concile avait pour objectif d'examiner
le cas de Bernard de Gothie, accusé d'avoir usurpé des biens de l'Église et
d'être en conflit avec Frotaire, évêque de Bordeaux, tout en se rebellant
contre le roi Louis II le Bègue.
Bernard de Gothie et son frère Emenon furent
destitués et excommuniés. La Gothie* passa sous le contrôle de Bernard
Plantevelue*, et la marche d'Espagne fut détachée du marquisat.
Le pape Jean VIII
tenta de proposer la couronne italienne à Louis II, qui refusa, puis à Boson,
qui se laissa tenter et retourna en Italie avec lui.
Ce concile illustre les luttes de pouvoir entre les
souverains francs et l'Église, ainsi que les efforts du pape pour maintenir son
autorité face aux troubles politiques et militaires de l'époque.
*
Le marquisat appelé Gothie (« pays des Goths »), est une partie de l'ancien
royaume wisigoth de Toulouse. Ce marquisat est établi par les Francs après 759,
occupait au moins le territoire correspondant actuellement aux départements de
l’Aude, de l’Hérault et du Gard.
*
Bernard
II d'Auvergne dit Plantevelue ou Bernart Plantapilosa en occitan, né le 22 mars
841 à Uzès, et mort en 886, est un grand seigneur d'époque carolingienne
appartenant à la dynastie des Guilhelmides. Comte d'Auvergne, il acquiert de
nombreux territoires et comtés du midi carolingien. De cette manière il réunit
les différentes principautés méridionales carolingiennes à son profit au sein
d'une grande Aquitaine dont le centre polarisateur est l'Auvergne. Son fils,
Guillaume le Pieux, fondateur de Cluny, reprendra la charge de son père, et
deviendra officiellement duc d'Aquitaine.
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