Rumilly est un village situé entre Troyes et Bar-sur-Seine, à 3 km de la rive gauche du fleuve, traversé par la rivière Hozain, avec trois atouts majeurs : un antique manoir, une magnifique église du XVIème siècle et une forêt de plus de 2000 ha, domaniale dans sa plus grande partie. (voir blason de Rumilly )
Il y a bien longtemps, bien plus loin que de mémoire d’homme, plusieurs millions d’années avant notre ère, les eaux de la mer occupaient l’emplacement du village. Tout au fond de l’eau se sont accumulées des argiles brunâtres, grises ou bleues, souvent rougeâtres, parfois blanchâtres. Elles ne se retirèrent que pour laisser place à un fleuve d’environ 3 km de large, de Rumilly jusqu’à Chappes, véhiculant des sables, des graviers qui, eux aussi se déposèrent en couches, alternant avec les bancs de glaise ou s’amalgamant avec elle.
Les nombreux «trous» qui, en forêt, retiennent l’eau quand il pleut, rappellent qu’en ces endroits, nos ancêtres ont cherché la pierre pour construire leurs habitations. Dans l’argile, des milliers de minuscules coquillages, sortes de très petits mollusques, se sont agglomérés en une pierre dure, la lumachelle, bleue quand elle est fraîchement cassée mais qui brunit à l’air. Elle a servi, avec le bois, à la construction des maisons anciennes.
Les murs du manoir des Tourelles et ceux de l’église Saint-Martin sont ainsi maçonnés de lumachelle. Le sous-sol du village date en grande partie de cette époque que les géologues appellent le néocomien, bas étage du crétacé qui, lui-même est la dernière période de l’ère secondaire, celle pendant laquelle vivaient ces huîtres énormes appelées exogyres.
M. Dart a retrouvé la trace de
nos premiers ancêtres, à la limite entre Rumilly et Jully, près de l’étang de
la ferme Saint-Jacques. Il a recueilli quantité de pierres finement taillées
que les spécialistes datent du chalcolithique : fers de lance, racloirs... qui
sont déposés au musée de Troyes, ainsi que divers coups de poing et une massue
percée d’un trou pour un manche. Qui étaient-ils, ceux-là de nos très anciens
aïeux ? Quels pigments coloraient leur épiderme ? Leurs lèvres étaient-elles épaisses,
leurs yeux en amande ? Comment vivaient-ils ?
Était-il parmi eux, celui qui a égaré non loin de la
Place du Turot, une pierre polie, noire, et percée d’un trou, vraisemblablement
une amulette ou bien la pièce d’un collier?
A la lisière de la forêt se sont groupées les huttes
de nos ancêtres qui, avec le bois; disposaient ainsi de la possibilité de construire.
Ils avaient aussi l’assurance de toujours pouvoir entretenir le feu qui
permettait de lutter contre le froid et la peur. Sous les hautes forêts, ils
pouvaient chasser et aussi mener paître porcs et chèvres. A l’orée du bois
quelques champs étaient probablement ensemencés. On commençait à cuire l’argile.
En témoigne la coupelle découverte à la jonction de la Voie aux Ânes et de la
Route de Chaource.
Les Gaulois (ou Celtes) connaissaient les arbres, spécialement les chênes, sur lesquels croît le gui, la plante bénie, la plante salvatrice. Il existe encore, de nos jours, des chênes à gui en forêt de Rumilly. C’est l’époque où naît le christianisme. Au début du troisième siècle, saint Potentin, saint Savinien, saint Parre évangélisent notre région.
De ces temps, Rumilly conserve le nom de son église. Saint Martin y est présent. En soldat romain sur son cheval : deux statues sur la façade ouest, et peint sur un vitrail du chœur, évêque de Tours, revêtu de ses habits sacerdotaux, à droite, au-dessus du retable.
Les Romains s’installent bientôt chez nous après la
victoire de César sur Vercingétorix à Alésia. Pour asseoir l’impôt foncier, ils
imaginent d’attribuer une certaine étendue du territoire à quelque personnage
nommément choisi qui devient ainsi attributaire du sol. Le domaine tend alors à
être désigné par le nom du nouveau propriétaire. Le village a dû appartenir à
un certain Romilius ou apparenté. Il prend le nom de Rumiliacum, une
appellation qui le suivra jusqu'au XIème siècle. Le nom de Turot (limite de
propriété) date de cette époque.
Des envahisseurs venus de l’Est ou peut-être des
colons venus de Germanie ont donné son nom au village voisin, village proche de
la forêt : Wald, prononcé Vauldes, duquel on a depuis, oublié le l. C’est le grand
vitrail du transept sud de l’église qui nous l’apprend.
Il faut quitter Rumilly pour chercher à Chappes, dans
son église dédiée à saint Loup, le souvenir des invasions des premiers siècles
sur notre territoire : celles des Huns et des Normands. Les Huns, battus non
loin de Troyes, ont été reconduits jusqu’au Rhin par l’évêque Loup qui évite
ainsi la mise à sac de la ville. Au temps des invasions normandes, Chappes a
recueilli les reliques du saint évêque.
En l’an 1104, le comte Hugues offre sa terre de
Rumilly à l'abbé de Molesme, hors un homme, chargé de le recevoir en son château.
Les moines créent, ou aménagent, l’étang du Haut-Tuilot, réserve de poisson pour
les vendredis et le temps de carême. Ils créent la fausse rivière,
parallèlement à l’Hozain, pour y aménager deux moulins. Le moulin du bas a complètement
disparu.
1250 - L’abbaye de Molesme a du mal à assumer l’administration
des nombreux domaines qui lui ont été cédés. Elle passe alors contrat avec le
comte Champagne. Celui-ci prendra Rumilly en charge quitte à garantir à l’abbé
la moitié des revenus du village. Dans ce contrat, le partage des bois, pour le
comte, deux cantonnements qui, après lui, prendront le nom de Bois-le-Roi. Et
Bois l'Abbé quant au reste de la forêt.
Au Moyen-Age, non loin du château du comte de
Champagne, lieu-dit La Herse, (encore aujourd’hui matérialisé par un large fossé,)
étaient les demeures des manants et des artisans. Notamment celle d’un potier
dont le four s’est effondré et qui a été abandonné par son propriétaire. Les
pots à eau trouvés dans ce four datent du XIème siècle. En même temps était
exploité le minerai de fer. En a-t-il fallu brûler du bois et fondre du minerai
pour que le chemin des Riceys, en forêt, soit ainsi garni de scories, déchets
de cette industrie ?
Quand, en 1284-1314, la Champagne sera du domaine du
roi, celui-ci aura besoin d’une demeure qui lui soit propre ; il fera construire
une maison forte dont nous ne connaissons plus aujourd’hui que les quatre
tourelles percées de canonnières.
Aux Templiers, le sire de Chappes avait donné le
domaine de Chaussepierre. Le sceau (croix ancrée), trouvé dans les prés dits de
Chappes, au bas de la ferme, en témoigne. En 1308, Philippe IV le Bel ordonne
aux prud’hommes de la prévôté de Rumilly de nommer deux délégués aux États
(généraux) qui doivent se tenir à Tours pour entendre l’ordonnance de la volonté
du roi. Nos ancêtres ont-ils eu peur d’être trop mêlés au procès dirigé par celui-ci contre les riches
Templiers ? Ils désignent deux habitants de Vaudes pour y représenter le bailliage
de Rumilly. Pour différencier tous les Rémilly, Romilly, Rumilly du royaume on
a, à ce moment, pensé ajouter à notre Rumilly le nom du village de ces deux
délégués. Ce qui a donné : Rumilly près de Vaudes, Rumilly sur Vaudes, Rumilly
lés Vaudes.
C’est parce que Rumilly souffre que Charles V
s’intéresse au village ; il visite la région en 1378 et lui fait grâce de certains
impôts. Étant donné la misère extrême du village, Charles VI intervient de même
et enjoint ses commissaires, par lettres patentes en date du 11 novembre 1400,
de lui faire délivrance des anciens usages (le village en avait donc été privé
?). Usages consistant pour les dits
habitants de Rumilly et leurs successeurs à toujours le
« droit de prendre es bois appartenant
au roi et aux religieux de Molesme mort bois comme charme, tremble... bois
morts comme chênes, faugs (hêtres) de couper, battre, prendre et emmener...
bois vifs comme chênes, faugs... pour édifier, retenir et maintenir leurs
maisons, granges et autres édifices de mener pâturer ès dits bois d’usage, en
toutes saisons, leurs bêtes... Pour lesquels droits d’usage les dits habitants
ne seront tenus de payer au roi, ni aux religieux de Molesme, ni à aucun autre,
aucune redevance ». C’est là, la première des mentions connues, des
droits d’usage en forêt.
La Guerre de Cent Ans ruine l’ancien village de
Rumilly qui était alors situé sur le Grand Chemin, (route de Dijon actuelle).
La résidence du roi, elle aussi, a dû énormément souffrir et ne guère conserver
que ses quatre tourelles d’angle. De l’ancienne église, ont été sauvés : la
Vierge du XIVème siècle qui se trouve avec Ste Anne du côté de la porte de la sacristie,
le saint Martin du clocher, ainsi que deux statues accolées aux contreforts du
portail : une Vierge à droite et un saint Michel décapité à gauche. De 1493
date la bulle d’indulgences que Jacques Colet, le frère de Jean, est allé chercher
à Rome pour inciter les fidèles à œuvrer pour la réparation de son église. Elle
promettait à tous les chrétiens des deux sexes qui prêteraient une main
secourable à la réparation, à la conservation, à l’ornementation, à
l’agrandissement de l’église (celle qui se trouvait près du Grand Chemin)
d’être relevés de toutes les pénitences qu’ils auront encourues à l’heure
actuelle ou plus tard.
Le village se reconstruit là où nous le trouvons
actuellement, sur les bords de l’Hozain, à l’orée de la forêt, entre les deux châteaux,
celui du comte de Champagne et la résidence en bien mauvais état, réservée pour
le représentant du roi de France. La ferme des Places, aujourd’hui ferme aux
Rats, du nom de ses anciens occupants, semble l’une des plus anciennes demeures
du village actuel.
En 1483, Louis II d’Orléans est gouverneur de
Champagne.
Il semble que c’est avec lui qu’a commencé la
rénovation du manoir : en faisant construire la tourelle de l’escalier au haut
de la porte duquel il a fait graver ses armes (elles ont été mutilées) et
encore en le dotant de quatre cheminées monumentales puisque fleurs de lys et
couleuvres, figurent aussi (tailladées) sur l’une d’elles.
Jean Colet se retrouve donc curé de Rumilly mais il est aussi chanoine et official de Troyes. A ce titre, c’est lui qui fait publier en 1533, en français, les statuts synodaux (règlements ecclésiastiques du diocèse.) qui sont l’objet de préceptes destinés au peuple chrétien et que chaque curé est tenu de les déclarer et souvent dénoncer en son église en les exposant en français. C’est parce que certains curés ont fait au temps passé bien petitement leur devoir parce qu’ils ne voulaient pas prendre le loisir de quérir et chercher les dits préceptes... ou qu’ils ne savaient pas la manière comment on doit les dénoncer et déclarer.
Voilà ce qu’il faut savoir. Voilà comment il faut le
dire.
En quelque sorte, Jean Colet a ainsi rédigé un
catéchisme destiné aux recteurs de nos campagnes.
Au chevet de l’église est gravé le rappel de la pose de la première pierre d’une église toute neuve, voulue par Jean Colet pour remplacer celle que son frère avait pour ambition de rénover mais qui se trouvait hélas à quelques kilomètres du nouveau village.
« Icy dessoubs assez profond en terre L’an mil
cinq cent et vingt sept / assise à la fin d'août / fut la première pierre des
fondements. Dieu perface l’église . Amen »
Jean Colet, lui qui a partout en l’église fait
afficher son portrait, son nom et ses armes, l’orgueilleux curé de Rumilly,
fait là, preuve d’une certaine humilité. Il confie son église à Dieu à qui il
demande de la « parfaire ».
Le retable, véritable livre à l’usage des chrétiens, comporte trois volets : à gauche le portement de croix, au centre la crucifixion et à droite la résurrection. Il est daté de 1533 et a été peint en 1536. La taille des 70 personnages diminue au fur et à mesure qu’ils quittent le premier plan. Ils donnent ainsi à l’ensemble un relief saisissant.
Au bas de l’œuvre une
inscription latine peut s’interpréter, disant : « Mon Dieu ayez pitié de votre serviteur. Que tous ceux qui sont
paroissiens de Jean Colet habitent un jour le paradis ».
En 1548, au temps de l’évêque Odard Hennequin dont les armes portent vairé d’or et d’azur, au chef de gueules chargé d'un léopard d’argent, le grand vitrail du transept est dressé avec cette inscription : « Maître Jean Colet, prêtre, licencié en droit chanoine et official de Troyes, natif et curé de Remilly-sur-Vauldes donna cette verrière au mois d’avril 1548 devant Pâques. Priez Dieu pour lui ».
Devant Pâques : En ce temps l’année commençait à Pâques. L’année
1548 était terminée et Pâques (qui tombe le premier dimanche qui suit la pleine
lune après l’équinoxe de printemps) n’était pas encore là.
Au trumeau de la porte d’entrée de l’église, la plaque de consécration évoque la participation de deux évêques :
André Richer, le premier, évêque d’un pays païen, la Chalcédoine.
Le second, très illustre prince Louis de Lorraine évêque en titre depuis l’âge de 18 ans.
Consécration
de l’église et de ses treize autels, les 22 et 23 septembre 1549.
- Les châtelains de la Motte (fief des Duplessis-Praslin)
Il s’agit de Jean de Gand qui blasonne d’azur à la
bordure d’or, au chef d’argent chargé de trois merlettes de sable, et de son
épouse : de sable à la croix engrêlée d’argent avec une étoile au canton dextre
du chef.
Ce château, on peut l’imaginer grâce à une
description faite quelques cent ans plus tard.
[ Basti de pierre par le dehors environné... de fossez plains d’eau
Du côté de l’orient se présente le pont-levis
A la gauche est un grand corps de logis
Aux deux coins duquel sont deux petites tourelles, l’une de figure carrée, l’autre ronde.
La face qui regarde le midi est un bâtiment de bois dans lequel sont les fours, la laicterie et les escuries, jusqu’au colombier qui fait un des coins de ladicte maison.
Du dict colombier à tirer droit à une autre petite tourelle qui fait l’autre coin de la cour sont les seüies à porc et les granges
Et
du côté du septentrion sont des bâtiments de bois lesquels ont servi d’escuries
et d’estables, au bout desquels est une petite tournelle en ruine qui fait
l’autre coin.]
Pendant que s’élevait l’église, Pierre Pion, riche
boucher troyen, s’employait à rénover le manoir des Tourelles. Les quatre
lettres de son nom : PION, sont peintes sur le linteau de l’une des fenêtres de
la plus petite tourelle du bâtiment.
Chevalier du Saint Sépulcre, il a fait le voyage de Jérusalem,
il a offert à la cathédrale de Troyes deux énormes verrières, y a acheté une
chapelle dans laquelle, paraît-il, il est enterré assis. Ses armoiries portent
d’azur à la croix patriarcale d’or avec une étoile du même au canton dextre du
chef.
A l’égal du manoir de Rumilly, Pierre Pion a aussi fait restaurer celui de Ravières, dans
l’Yonne.
La légende dit que, du manoir, partent quatre souterrains. L’un rejoindrait la Grange aux Dîmes, un autre la ferme aux Rats, le troisième relierait le manoir au château de Chappes et le quatrième à l’église Saint-Martin.
En réalité, seuls trois caveaux existent en sous-sol, sous trois tourelles,
en hommage aux trois fondateurs qu’honorent les Compagnons. Trois caveaux qui
évoquent parallèlement le mouvement diurne du soleil : un caveau à l’est quand
le soleil se lève, le second au sud quand le soleil est au zénith et le troisième
à l’ouest quand il se couche.
Les Compagnons, justement, nous ont laissé là, de nombreux signes de leur participation à la construction et à la rénovation bâtiment. :
- un cul-de-lampe, le renard et la poule : le faux compagnon prend le travail qui me revient.
- le loup et le chien : le tailleur de pierre et le charpentier
- la colonne aux spires inversées, aux deux tiers de sa hauteur et une
erreur manifeste dans le dessin d’une plaque de cheminée.
Vers 1550, les abbés de Molesme envisagent de faire du
manoir leur demeure abbatiale. Ils en font décorer les cheminées.
Au premier étage sont les armes d’Antoine II de Vienne, l’abbé de l’époque : De gueules à l’aigle éployée d’or membrée d’azur.
Au rez-de-chaussée les médaillons plaqués sur la cheminée est, têtes
empanachées ou non, portent des inscriptions caractéristiques de l’époque :
Julius César, Jupiter, Isis : Credo mythologique du XVIème siècle, comme ont
écrit les Goncourt.
L’église est placée sous le patronage de Saint Martin alors que, curieusement, la paroisse fête saint Barthélemy dont la passion dit qu’il a été écorché vif. Sur un pilier, il est donné, le couteau (dont la lame est cassée) à la main. Son nom évoque le massacre dit de la saint Barthélemy, le 24 août 1572.
A
Bar, en 1588, « le mal est si
contagieux qu’il s’étend jusqu’aux femmes, que la mère contre la fille et les
propres sœurs s’en font la guerre et quelquefois s’en happer aux cheveux. Les petitz
enffans s’amassent par montceaulx, avec des pierres et des bastons et se
demandent : - Qui vive, puis cryent - Je suis pour le roy. Et les autres répondent
- Pour les princes. Et ainsi viennent à se battre es mains et coups de bastons. »
Henri IV, quelques jours avant d’être poignardé, signe un parchemin daté du 11 mai 1610.
« De par le roy... désirant
exempter le bourg et village de Remilly et les habitants d’iceluy, du passage
et logement de nos dits gens de guerre... sont assurés... de ne souffrir aucuns
de nos gens de guerre allans, passans, retournans par le bourg et village de
remilly, en iceluy prendre ou faire prendre fourrage, aucuns bleds, avoynes,
foings, lard, boeuf, vache, mouton ni autres bestiauls à eux appartenant et à
leurs gens, serviteurs, domestiques ains(i) les laisser en toute liberté faire
et cultiver leurs héritages. »
C’était autrefois le seigneur du lieu qui, dans une église, avait le devoir d’en entretenir le chœur, la nef restant à la charge des paroissiens.
Ainsi, le vitrail central de l’abside a-t-il été : « restably au mois de mars 1634 par Messire François
de Montmorency conseiller du roy en ses conseils d’état et prince abbé de Molesme. »
Les armes de ce seigneur abbé, surmontées de sa mitre sont d’or à la croix de
gueules cantonnée de seize alérions d’or.
1649. Le cardinal Mazarin veut asseoir son autorité et convoque les Etats Généraux.
On appelle au palais royal à Troyes, une
assemblée préparatoire et celle-ci se prend tellement au sérieux qu’un auteur
anonyme s’en amuse et, un par un, ridiculise les participants dont : « Les seigneurs de la Rocatelle, Couverts de
clinquants et dentelles, Leurs panaches sur leurs chapeaux, Parurent presque
les plus beaux ». Il s’agit là de Jacques II le Boucherat et de son
fils Charles.
Le maître d’école, dit aussi recteur, doit, non seulement faire la classe, mais aussi chanter au lutrin. En 1758, les garçons ont affaire à Edme Gatelier, choisi par les habitants qui s’engagent à lui payer tous les ans : les laboureurs un demi boisseau de bled méteil, les manouvriers chacun 12 sols et les femmes veuves six sols.
Au cours des années d’autres charges seront imposées au recteur comme : sonner l’angélus à l’horloge du campanile (matin,
midi et soir), avoir soin des ornements et du linge de la sacristie, mesurer
les terres de ceux qui en auront besoin. Et encore. Nettoyer avec l’aide des
sonneurs, les chanlattes et les voûtes de l’église par temps de neige, parer
les autels les jours de fête, accompagner monsieur le curé dans toutes ses
fonctions...
Les 17 et 18
janvier 1739, un ouragan se déchaîne qui renverse la flèche du transept,
laquelle enfonce le pan de la couverture de la tour de l’escalier, traverse les
voûtes en différents endroits et endommage toutes les couvertures en ardoise. Les
vitraux eux-mêmes subissent d’importants dégâts. Aucune autre maison n’est
épargnée. On impose les habitants ce qui, ajouté aux pertes qu’ils ont subies
personnellement, a pour conséquence de les plonger, aux dires du curé Henrion,
dans une profonde misère. Deux cloisons de torchis sont élevées autour de la
chapelle Saint Maur, sous le clocher, pour garantir les fidèles du froid. La
rose du portail est remplacée en 1746, en
pierre de Tonnerre d’au moins cinq branches.
Dans le milieu du XVIIIème siècle, en même temps qu’on restaure la toiture et les voûtes de l’église, la fabrique entreprend tout un aménagement intérieur.
En
1744, on confie à Alexis Harion menuisier à Clairvaux l’exécution des retables
et des autels de saint Claude, saint Nicolas et sainte Catherine. L’autel et le
retable de saint Barthélémy, ceux de la Vierge et de saint Jean avaient été
installés quatre ans auparavant. En 1745, le curé Henrion traite avec François
Shedler, de Chaumont (ouvrier de Girardon) qui, pour 140 livres, fournira 4
tableaux : st Nicolas, st Claude, ste Catherine et st Jean-Baptiste.
En 1750, Herluison de Troyes dote l’église de ce curieux autel en tombeau, peint
en façon marbre de Vence, tandis que Claude Dutertre de Rumilly s’engage à faire
installer des bancs, tant dans la nef que dans les chapelles. On le charge
aussi de menuiser et mettre en place les stalles du chœur.
Rumilly, l’un des foyers du jansénisme dans le
diocèse, a connu trois prêtres jansénistes :
Le curé Bailly (1694) adhère, malgré l’interdiction papale, à cette doctrine toute de révolte contre les abus de l’église. Il se plait à voir dans la bulle Unigenitus de 1713 une autorisation au relâchement des mœurs. C’est lui qui fonde une dotation pour les enfants pauvres qui ne peuvent payer le maître d’école.
Le curé Henrion, (1729) crée une école pour les filles. Son corps repose au chevet de l'église.
Le curé Navarre connaîtra la Révolution.
A la fin du XVIIIème siècle, devant l’église, sur la
tombe des curés, s’élève une croix en fer, forgée par le sieur Corrard, maître
serrurier. Elle défiera le temps puisqu’elle occupe actuellement la place d'honneur
au centre du nouveau cimetière.
Tout juste, avant la Révolution, Denis Geneviève de
la Clôture, lieutenant au bailliage royal de Rumilly et maître Nicolas Parent,
avocat aussi du roi, tous deux domiciliés à Troyes, viennent régulièrement en notre
village rendre la justice au nom du roi et en celui de l’abbé de Molesme. Ils
descendent en l’auditoire, à côté du manoir, qu’on désire reconstruire à neuf. Projet
dont le plan est prêt mais qui ne sera pas réalisé.
On apprend avec plaisir la décision du roi de réunir
les Etats Généraux pour le 1er mai 1789.
A Rumilly, une assemblée est convoquée le 15 mars pour le tiers-état, sous la présidence de De La Clôture, réunie pour discuter et signer les cahiers de doléances. Nicolas Parent est, à cette occasion, le conseiller, écouté et suivi.
Il présente en modèle l’un des imprimés qui circulent et reprennent les grandes idées de réformes.
Aussi, le cahier de Rumilly ressemble-t-il comme un frère à ceux des assemblées voisines. Les participants, pénétrés de la plus vive reconnaissance envers le monarque qui convoque les États Généraux... demandent qu’aucune partie de leurs propriétés ne puisse leur être enlevée par des impôts s’ils n’ont été consentis par les États Généraux que les ministres soient responsables de toutes les sommes levées sur le peuple que personne ne puisse être emprisonné pour aucun motif qu’en vertu des lois du royaume, que les impôts qui distinguent les ordres soient supprimés, qu’il soit fait un code rural, qu’il soit donné des défenses aux accusés, que chaque bourg soit tenu de garder et nourrir ses pauvres, que tous les usages (droits en forêt) soient conservés aux usagers.
Toutes demandes qui témoignent de l’ouverture d’esprit dont sont animés
les deux initiateurs de ces cahiers. Ce qui n’empêchera qu’ils soient, par la
suite, arrêtés et emprisonnés, comme Paillot de Montabert du château de la
Motte le sera.
On élit, au début de 1790, des échevins et un maire.
Le premier magistrat municipal est un noble : Jean-Claude François Du Brosset. Après
le dénombrement des citoyens actifs qui doivent être électeurs, une assemblée
primaire se réunit à Chappes, chef-lieu de canton, le 5 mai 1790 sous la
présidence de Du Brosset. Y sont désignés les grands électeurs.
Un nouveau curé, Joseph Vincent Gabiot est élu, à Bar-surSeine et reçu à Rumilly. Il jure de veiller avec soin sur le troupeau dont le salut lui est confié ainsi que soumission et fidélité à la Loy et de maintenir de tout son pouvoir la Constitution décrétée par l’assemblée nationale et sanctionnée par le Roy.
Le cy-devant curé Navarre, réfractaire se réfugie chez Mme Charpy à
la Rocatelle. Quand le culte sera interdit, (décret du 20 brumaire an II) le curé Gabiot deviendra secrétaire
greffier (officier public) de la municipalité. Il sera logé dans le
presbytère devenu mairie avant d’intégrer le logement de l'ancienne école de
filles, face au portail de l’église.
En 1793, Rumilly doit fournir 11 hommes. Dans un chapeau sont déposés autant de bulletins blancs (sauf onze «sortis») qu’il y a de noms sur la liste des citoyens aptes à servir la République. Et chacun, appelé dans l’ordre alphabétique des noms de baptême, tire son bulletin. Les onze «sortis» deviennent des volontaires, qu’il faut équiper. Un commissaire se transporte à Rumilly pour y récolter 3 fusilsbaïonnette appartenant à la République, le fusil-baïonnette appartenant à de Chauvet, un habit uniforme et un autre habit que le citoyen Tisserand n’accepte d’apporter que sur réquisition. C’est insuffisant et Rumilly reçoit l’ordre de se pourvoir sous quatre jours de 9 habits, 33 chemises, 22 paires de bas de laine, 22 cotes, 11 paires de guêtres, 11 chapeaux, des brosses, peignes et gibernes. Marc Maladière, lui, va vivre son aventure de soldat de la République (avant d’être soldat de l’Empire.) Affecté le 7 brumaire an II au bataillon des chasseurs de Reims, il est désigné pour cette armée de la Moselle qui, de concert avec celle du Rhin va libérer Landau le 5 nivôse an II avant de progresser sur la rive gauche du fleuve jusqu'à Charleroi et Fleurus.
Pour
ensuite connaître Mayence, deux années d’occupation, intégrer en octobre 1798
l’armée du Danube, et se retrouver aux portes de la Suisse. Il est sacrifié au
plan de Masséna qui veut que Gènes soit défendue, blessé le 17 germinal an VIII
d’un coup de feu à la jambe gauche, il est nommé caporal et admis dans les
hôpitaux.
Le 22 germinal an II (11 avril 1798), de l’incendie
d’une grange proche du presbytère, le feu se communique au campanile et à toute
la charpente de l’église. Treize maisons, dont celle de Vincent Gabiot, seront
complètement détruites elles aussi. Le campanile ne sera pas reconstruit mais,
après quelques réparations, en 1803, les paroissiens s’obligent en1806, vu
l’urgence, à fournir tous matériaux selon
le devis accepté du sieur Dugenot charpentier à Saint-Parres. Celui-ci s’engage
à fournir les trois moutons des cloches, à recouvrir et à piquer de la tuile
tant sur la toiture, au-dessus des grandes portes de l’église que sur les
arêtiers au-dessus des basses chapelles, à renduire en chaux les piliers,
arcs-boutants du sanctuaire, à refaire la voûte tombée à l’entrée de l’église,
à renduire en chaux et en ciment les dessus des piliers brisés ainsi que le
dessus des murs dégradés, d’en faire tomber les pierres menaçantes...
L’effort est à la mesure du désastre.
Une carte postale de la fin du XIXème siècle montre
comment la rosace du portail a été «vitrée» de briques. Encore de nos jours,
sans compter le campanile qui n’a pas été reconstruit, manquent des balustrades,
des gargouilles, des statues qui ont péri lors des orages de 1739 et lors de cet
incendie de 1798.
En 1807, Marc Maladière revient à Rumilly, borgne et boiteux, après quinze années de bons et loyaux services dans les armées de la République et de l’Empire. Le mémoire de proposition pour solde de retraite de ce vieux soldat indique que le caporal Maladière a rejoint, à Brest, l’armée dite des Côtes de l’Océan et, pendant deux ans, attendu de l’empereur l’ordre d’envahir l’Angleterre.
Il se retrouve ensuite au sein de la Grande Armée qui enregistre la
capitulation d’Ulm. Avant de voir de ses yeux l’empereur à Austerlitz puis,
après avoir reçu les galons de sergent, connaître le désastre d’Eylau et perdre
un œil dans la bataille. Il revient à Rumilly y solliciter la place de garde
champêtre et il décède au village, âgé de 79 ans, en janvier 1846.
Luce Balson, un autre Rumillon, parti en 1793, nommé
chef d’escadron en 1808, blessé plusieurs fois, s’illustre en 1814 au commandement
du fort de Ham (Somme). Il résiste à une attaque prussienne et permet ainsi de
conserver à la France un matériel de guerre important. Son attitude courageuse
lui vaut la croix de l’ordre royal de la Légion d’Honneur.
A la suite de la campagne de France et l’abdication de Napoléon. A la suite du passage et des exigences des troupes ennemies, le député, maire de Rumilly, Victor Paillot du château de la Motte, plaide à la Chambre, la cause du département et particulièrement celle du village.
« Dans
une paroisse qui contient 192 feux, nous avons recueilli les états détaillés de
la perte de 71 habitants. Beaucoup d’entre nous ont perdu la totalité de leur mobilier,
presque tous la plus grande partie de leurs effets. Mais une perte plus cruelle
encore nous distingue surtout des autres lieux qui ont été accablés de passages
et met le comble à nos malheurs. Une terrible épizootie a enlevé toutes les bêtes
à cornes qui avaient échappé à l’avidité du soldat. »
Fréquemment, la rivière Hozain inonde le bas du
village. On cherche des solutions. En 1853, pour que les eaux s’écoulent de
meilleure façon vers la région des Noues, un canal est créé, muni d’une vanne. Il
a fallu 20 ans pour que ce projet aboutisse.
La maison de Chaussepierre est entièrement reconstruite en1843.
La façade en est ornée de bustes et d’une statue de la belle Hélène, (celle qui fut enlevée par Paris lors de la guerre de Troie.)
A
proximité du domaine, une chapelle s’élevait, au-dessus d’une source dite «la
Sainte,» dont l’eau passait pour favoriser les mariages. Les jeunes gens désireux
d’être unis dans l’année devaient, après avoir bu l’eau de la source, déposer
une épingle aux pieds de la statue de la Vierge posée derrière le bassin.
La maison dans laquelle loge Vilain, instituteur,
est réparée et assainie en 1833.En 1837, on envisage de l’agrandir car elle ne
peut recevoir tous les enfants En 1841, on décide d’en construire une neuve. Les
travaux ne commenceront qu’en 1842, entrepris par M. Gamblin, plans dressés par
Fléchey architecte. Fièrement campée en bordure de la rue, avec ses deux
pignons en façade et sa galerie ouverte à colonnes, on procède, le 13 mai 1844
à la réception définitive de cette mairie-école.
Le procès des droits d’usages dans la forêt intenté contre l’Etat en 1793 trouve son dénouement avec le jugement du tribunal de Bar-sur-Seine en date du 6 août 1850.Il faudra attendre quelques années avant que soit délimitée la partie de la forêt attribuée en toute propriété au village (Saint-Parres, Vaudes et Montceaux profitent de l’aubaine.) et que lui soit signifié ce qui lui revient au titre des dommages et intérêts soit 169 206 francs. La somme est ainsi répartie. D’autorité, par décision de l’Etat, 150 000 F sont placés en rente 3%, 11 206 F sont affectés à des travaux divers, et 8 000 F (auxquels sont ajoutés 120 000 F provenant de la vente des bois de la Plaine, sur Jully) vont servir à financer les travaux de reconstruction de l’église. Ces travaux vont durer plusieurs années et, en fin de compte, le Conseil devra ajouter 48 000 francs à la somme précédemment prévue. Mais, en 1870, on s’aperçoit... que des travaux figurant aux devis n’ont pas été exécutés, qu’ils ont été remplacés en particulier par des badigeons (faux-joints, croix, lunes, étoiles...)
On peut s’étonner que le prêtre, le maire et les membres du conseil
de fabrique, ne s’en soient pas aperçus. Le maire Paillot surtout, qui avait
laissé peindre ses armoiries parmi celles des clés de voûte qui dataient du
XVIème siècle, et dont les couleurs avaient été rafraîchies à cette occasion. Les
prévisions budgétaires sont dépassées de plus de 1000francs.Une commission est
nommée. Un procès est engagé qui n’aboutira pas. Le mal était fait.
En 1852, M. Babeau héritier de M. Lerouge, légataire universel du curé Henrion, offre 900F en rente à 9 % aux sœurs de la Providence, à charge pour elles de désigner deux des leurs pour tenir une école destinée uniquement aux filles. Par la suite, on accorde à l’institutrice une indemnité de 150 F afin qu’elle reçoive 20 filles prises parmi les plus pauvres et le conseil municipal demande une institutrice «capable.»
Il faut, précise-t-il, qu’elle sache s’attirer la confiance des enfants et des familles tout à la fois, qu’elle puisse apprendre à ses élèves tout ce qu’elles ont besoin de savoir, talents d'aiguilles et autres, pour devenir aptes dans un ménage.
Il fait remarquer qu’après, et avec
la religion, tout cela fait partie de l’éducation générale des femmes.
Frédéric Saget, forgeron, s’installe au Moulin du
Haut en1850. Il garde la meule à moudre le blé mais, très vite utilise la force
de l’eau pour créer la taillanderie qui le fera connaître dans tout le
département et au-delà. De son atelier sortiront haches, tue-bois, serpes,
écorçoirs, tous outils tranchants et taillants.
Face à la Place de la Bourriquette, un lavoir est
construit sur l’Hozain. Les planches à laver, traversent le bassin, maintenues
par un cadre métallique. Elles peuvent être abaissées ou relevées grâce à un
mécanisme à vis. N’étant plus utilisé, il a été démoli vers 1980.
En 1890, le curé Payen prend possession de la cure après la mise en place de trois nouvelles cloches fondues par Ferdinand Farnier à Robbécourt (Haute-Marne). Autrefois (1826) les cloches étaient fondues sur place. D’où le nom du chemin des Fournets (écrit aujourd’hui Fournay.)
La grosse pèse 784 kg et sonne le fa. Elle dit : Louez Dieu avec des cloches bien sonnantes. La moyenne donne le sol avec ses 584 kg ; on lui confie le soin de louer le vrai Dieu, d’appeler le peuple et d’assembler le clergé.
La plus petite, avec le la, pleure les défunts, anéantit la foudre et solennise les fêtes.
On évoque, avec le nouveau curé,
tout l’éclat de la cérémonie du baptême de ces trois cloches, en présence de
Mgr Cortet évêque de Troyes et des parrains, marraines : M. le maire et sa
fille Marie Paillot, M. Blavoyer de Chaussepierre, M. Carré, adjoint,
Marguerite Vuibert, son épouse.
Les Goncourt ont connu, à Rumilly, leurs cousins : les Henrys d’une part, à la Grange aux Dîmes, et les Labille de Bar-sur-Seine , propriétaires du manoir. Le mariage de Bathilde Huot de Goncourt avec Léonidas Labille scelle l’union des familles. Amenés donc à s’intéresser à Rumilly, les écrivains croquent dans une «nouvelle» le village et le manoir ; ils détaillent les sculptures de l’église, parlent de Jean Colet et d’un maire dont ils n’ont pas honte d’inventer les aventures déplaisantes. voir l'ex maire de Rumilly
« Sur le chemin vicinal qui va du village à la route, il marche un androgyne de six pieds de haut. A chaque enjambée, sous la blouse longue, se cache et se laisse voir, pudibonde et modeste, la broderie anglaise d’un pantalon de petite fille. Cet homme est le seigneur suzerain de cette ancienne terre de moinerie. Cet homme est le maire de Rumilly. »
La commune acquiert le manoir en 1912 pour y
installer la mairie et l’école des garçons. L’initiative est heureuse ; elle a
permis de restaurer un bâtiment qui, sans cela, aurait risqué de n’être pas
sauvegardé. Par lettre du 7 avril 1903, l’administration des Beaux-Arts propose
le classement du monument. Le conseil accepte, le 19 du même mois. Des travaux
de remise en état sont engagés. Parmi ceux-ci, une nouvelle fenêtre est ouverte
au rez-de-chaussée, pour que soit mieux éclairée la salle de classe qui accueille
ses premiers élèves à la rentrée de 1906.
Est-ce pendant la période révolutionnaire, ou à
l’occasion de la nouvelle destination du manoir, sous l’influence de la loi de
1905 de séparation des Églises et de l’État, qu’ont été mutilées les croix et
fleurs de lys? Pour répondre au décret révolutionnaire qui ordonnait que soient
supprimés tous signes rappelant la religion et la royauté certainement, mais
aussi lorsque le manoir est devenu demeure officielle de la République. En
pourrait témoigner la croix de Jérusalem du chapiteau d’une colonne,
aujourd’hui complètement effacée mais dessinée par Fichot vers 1850.
En 1911, les enfants de la première colonie de vacances auboise arrivent à Rumilly où ils sont accueillis à la fois dans des familles du village et dans une propriété proche de l’église. C’est un essai tenté par monsieur et madame Arpin qui encadrent une vingtaine d’enfants troyens afin que ceux-ci puissent profiter pendant un mois du grand air de la campagne. Mme Arpin se bat avec les poux. Mme Coq, la cuisinière qui a installé son matériel dans la chambre à four du pigeonnier carré, assure à tous une nourriture saine. Chaque semaine, les enfants passent sur la bascule de l’abattoir de M. Bouvron.
Une épidémie de
rougeole fera qu’en 1912, les enfants émigreront vers Landreville.
Pour honorer la mémoire des soldats morts pendant le conflit 1914-1918, on commande à M. Ménétrier, marbrier-sculpteur à Dijon, le monument qui sera installé devant le manoir des Tourelles, mairie.
Il sera inauguré en 1920. Aux 26 noms des morts pendant la Grande Guerre
ont été ajoutés ceux de deux Résistants des années 43-44.
Le 3 octobre 1927, on installe une horloge à répétition
avec cadran sonnant les heures, les demies et quarts, pour laquelle M. Léon
Vuibert a légué une somme suffisante, à charge pour ses héritiers de respecter
ses volontés. Les poids qui actionnent le mécanisme devaient être relevés chaque
semaine, à la main, à l’aide d’une manivelle. Le cadran émaillé sera remplacé
par un cadran squelette lorsque l’horloge sera électrifiée en 1977.
Le 16 juin 1940, quatre militaires, qui semblent
avoir perdu le contact avec leurs unités respectives reculent devant l’avancée allemande
et luttent à l’entrée de Rumilly. Ils s’y font tuer, les armes à la main. Une
maison près de l’Hozain portait encore il y a peu, la traces des balles, preuve
de leur combat pour la défense de Rumilly. Provisoirement enterrés sur place,
deux d’entre eux trouveront une sépulture plus décente devant le Monument aux
morts et les deux autres contre le mur nord de l’église, là où était à l’époque
le cimetière communal. Deux jours auparavant, la majorité des habitants de
Rumilly s’en étaient allés sur les routes de ce qu’on a appelé l’exode. Rares étaient
ceux qui possédaient une voiture automobile. Les cultivateurs avaient attelé leurs
chevaux et chargé sur leurs charrettes : provisions pour les hommes et pour les
bêtes, literie, matériel hétéroclite pour eux, leur personnel et les proches voisins.
Les autres étaient partis à pied, la bicyclette à la main, parfois avec quelque
matériel dans une voiture d’enfant. Quelques jours après, l’armistice était
signé et chacun regagnait son domicile.
Ce jour où 4 militaires trouvent la mort dans les
rues de Rumilly, 30 prisonniers français sont froidement massacrés, à la mitrailleuse,
face à la Rocatelle, au-delà de la route de Vougrey donc sur le territoire de
Jully. Ils sont reconnus quelques jours plus tard par Léon Singoth, maire de
Rumilly qui est assisté de François Mothré, instituteur et secrétaire de
mairie. Celui-ci note les éléments qui auraient dû permettre que leur acte de
décès soit dressé.
Une fosse est creusée par quelques hommes de Rumilly disponibles. Hector Ninino et Henri Coffinet, les plus jeunes d’entre eux, acceptent le triste privilège de fouiller chaque cadavre afin de trouver, là un portefeuille, un numéro matricule, quelque alliance, toute pièce susceptible d’identifier ces victimes. Et de transporter leurs corps, déformés par le chaud soleil de juin, la peau tellement brûlée a dit Hector Ninino, qu’on les aurait pris pour des Congolais. Un mois plus tard les corps sont relevés et inhumés dans le cimetière de Jully-sur-Sarce.
Avec ses 2200 ha, la forêt de Rumilly, contiguë à celle des Aumont a été utilisée par ceux qui, depuis quelque temps avaient entrepris de s’organiser dans la lutte contre l’occupant, une forêt propre à dissimuler, et les hommes quand besoin était, et les armes dont ils pouvaient avoir besoin. Le 3 octobre 1943, une dizaine d’Allemands de la Gestapo envahissent le domicile de Léa et Louis Tripogney. Dans le véhicule stationné devant leur demeure, François Mothré est assis, menotté, en compagnie de deux de ses camarades.
C’est Louis qu’ils cherchent. Il est absent, parti en forêt à la recherche d’un sanglier abattu la veille. Prévenu à temps, il échappera à la rafle.
Léa sera emmenée à sa place, accusée entre autres d’avoir hébergé un
aviateur américain...
Elle connaîtra la robe rayée à Ravensbruck. François Mothré sera fusillé à Creney le 22 février 1944.
Ont œuvré à Rumilly, deux organisations résistantes, les FTPF auxquels appartenait François Mothré. Qui a recruté André Gaugué, photographié plus tard devant l’ancienne Coopérative agricole de Saint Parres-lés-Vaudes dans le sous-sol de laquelle était entreposé le matériel du parachutage de 1943 dans les Trous à Grève.
André Gaugué connaîtra, comme Léa, les camps de concentration.
La compagnie FFI du Vaudois s’est créée sous l’impulsion de Jean Védé et
du capitaine Samson, sous les ordres du commandant Nicolas du maquis Montcalm
de Mussy.
La guerre terminée, les prisonniers retrouvent le
village, libérés après que leurs geôliers les aient obligés de quitter leur
camp de base pour les soumettre à un périple souvent éprouvant. Louis
Thiéblement lui, a eu cette chance d’être transporté par le train. Il a noté
tous les instants de son aventure .En 1952, une grande cérémonie se déroule pour
le quatrième centenaire de l’église. (En réalité le quatrième centenaire de la
mort de Jean Colet.) Rassemblement devant le monument aux morts, cérémonie
religieuse, banquet et concert donné par l’Alerte de Troyes, avec le concours
de nombreuses personnalités civiles et religieuses et de la quasi-totalité des
Rumillons. (voir La Rocatelle ).
1955 - Le cimetière, établi jusque-là, devant et au
nord de l’église est déplacé vers le carrefour de la route de Saint-Parres et
celle de Vaudes. La croix qui marquait la tombe des anciens curés se trouve actuellement
au centre du cimetière actuel.
- Un groupe scolaire tout neuf, remplace les
anciennes classes, celles installées au rez-de-chaussée du manoir et celle qui
se trouvait face à la route du Long du Bois. Les premiers élèves y entrent en
octobre 1957.Trois classes, une salle de repos et un local dans lequel, chaque
samedi, se déroule une séance de cinéma. Actuellement, les logements, autrefois
prévus pour le personnel enseignant, ont été transformés en logements locatifs
et attribués à des particuliers.
La galerie extérieure du premier étage du manoir
était étayée depuis 1910. En 1959, les colonnes qui la soutenaient sont remplacées,
sculptées sur place dans d’énormes blocs de pierre par M. Mazurier de
Bar-sur-Seine. La colonne aux spires inversées qui était faite de deux blocs
est aujourd’hui monolithe. Elle n’en reste pas moins, témoin du travail des
Compagnons dans la construction et la rénovation du manoir.
Au premier étage, dans les anciens appartements autrefois destinés à l’instituteur, les cloisons sont abattues et une salle de théâtre est aménagée par les jeunes : décors, mobilier, éclairages.S’y produiront, chaque année, les écoliers et les membres du Foyer Pasteur. Avec des moyens artisanaux, des représentations «son et lumière» dans lesquelles interviennent de jeunes acteurs du village, ont mis en valeur les deux remarquables monuments.
Au manoir, avec l’apparition de Pierre Pion, de son épouse et des moines de Molesme, confortée par les danses du groupe Jeune Champagne. (1963...) Devant l’église et à l’intérieur, mettant en relief l’œuvre de Jean Colet.
Dans le Folklore de Rumilly nous trouvons la SICILIENNE qui est une danse de couple...
ARNAUD—Voyage archéologique.
BABEAU(Albert) —Le village sous l'Ancien
Régime.
BARBELON—Les Monnaies racontent
l'Histoire.
BOUTIOT—Annuaire de l'Aube. Dictionnaire
topographique. Etude sur les voies romaines du département de l'Aube.
COURTALON —Topographie historique de la
ville et du diocèse de Troyes.
DEFER —Vie des Saints du Diocèse de
Troyes.
FICHOT —Statistique monumentale du
département de l'Aube.
FUNCK—BRUNTANO—Le Moyen-Age.
GODEFROY—La révolution dans l'Aube.
GRENIER (Albert) —La Gaule, Province
romaine.
JEAN DAUNEY - Histoires de Rumilly
KOECHLIN ET MARQUETDEVASSELOT—La
sculpture à Troyes et dans la Champagne méridionale au 16e siècle.
LOUIS LE GRAND—Coutume et bailliages de
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LECLERT—Le papier. Recherches et Notes
pour servir à l'histoire du papier, principalement à Troyes et aux environs,
depuis le 14e siècle.
MOREL-PAYEN —Troyes..
PREVOST—Histoire du diocèse de Troyes.
ROSEROT (Alphonse) —Dictionnaire
historique de Troyes.
ROSEROT DE MELIN (Mgr Joseph) —Le diocèse de Troyes, des origines à nos jours.
DIEUDONNE BONNARD (Mgr Jean) - Archives personnelles
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