*La Cour des Grands-Jours
Après
la, réunion de notre province à la couronne de France, elle est maintenue par
Philippe-le-Bel jusqu’à Charles VI, soit par 8 rois successifs, comme une institution
spéciale à notre province. Elle se continue ainsi pendant tout le XIV° siècle.
Les Grands-Jours de Troyes sont ensuite reportés au sein du Parlement siégeant
à Paris, et ainsi s’éteint la primitive institution des Grands-Jours, après sa
session de 1409.
Les
Grands-Jours de Troyes sont une institution permanente, au même titre que le
Parlement de Paris.
Cette
Cour existe au moins depuis 1212, quand la comtesse Blanche, assistée de 34
barons décide du mode de partage, entre filles, des successions nobles, et pose
des règles relatives au duel judiciaire.
Jeanne,
l’héritière de Champagne, épouse en 1284, le petit fils de Saint-Louis qui,
l’année suivante, monte sur le trône de France sous le nom de Philippe-le-Bel.
Les
institutions de Champagne sont maintenues et conservées. Et on trouve des
comptes-rendus des sessions des Grands-Jours tenus à Troyes de 1278 à 1409.
Pour
recevoir les magistrats de Paris, la couronne dispose de l'ancien château des
comtes de Champagne, dont la distribution intérieure est à adapter, notamment
pour la salle des plaidoyers et les prisons. Cette construction du XII° siècle
reçoit des aménagements. L'échevinage rend le palais plus confortable,
il fournit la tapisserie destinée à parer les chambres et décide de livrer
un tapis pour les parquets où se font les plaidoyers. Un tableau avec le Christ
occupe le milieu du mur du fond de la salle des audiences.
Pour
le chauffage du palais, le roi donne des lettres-patentes pour " prendre
et couper jusqu'à 50 cordes du bois de Rumilly-les-Vaudes " lui
appartenant.
En
1399, 10 ans avant la dernière session de l’existence des Grands Jours de
Troyes, Charles VI reconnaît l’existence, la force, le pouvoir et l’autorité de
cette ancienne cour souveraine.
Les
conseillers constituant la Cour de Troyes, sont choisis parmi les membres du
Parlement, auxquels sont adjoints par exemple l’évêque de Troyes, l’abbé de
Montiéramey, celui de saint-Loup, de Saint-Martin-ès-Aires…
Les
clercs, laïcs, conseillers, le procureur général du roi, les avocats du roi,
les greffiers, protonotaires, avocats-procureurs, huissiers et sergents, se
transportent tous de Paris à Troyes. L’entrée dans la ville de Troyes et
l’installation de la cour, se font avec grande solennité. La cloche du Beffroi
et celles des églises sont sonnées à toute volée. L’évêque, le bailli, les
officiers du roi et ceux de la ville, se rendent au-devant des maîtres, et tous
rentrent en ville en formant un nombreux et important cortège. Puis le Conseil
de ville présente, chaque jour, aux membres de la cour, le vin de ville (le
Président et les Maîtres des Requêtes : 4 pots, aux greffiers: 1 pot), offre
des objets de consommation, et paie, avec des gants, les démarches que font
certains commissaires pour s’éclairer sur les requêtes dans lesquelles la
communauté des habitants est intéressée.
L’hospitalité
accordée aux membres de la cour par la population troyenne est grande, et les
réceptions nombreuses.
La
présence d'une importante délégation du Parlement de Paris entraîne une
spéculation et un renchérissement du coût de la vie. Il faut donc une
règlementation des produits de première nécessité. Il y a 20 mesures allant de
la nourriture du cheval et de son maître à la taxation de la volaille, du
gibier, du beurre frais.
Dans " Les droits et coutumes de
Champagne ", un article de 1224 règle les droits d’une femme
bourgeoise mariée à un gentilhomme, à l’occasion d’un litige relevé entre
héritiers.
En
1267, la cour apprécie des faits de violences commis par les gens du comté de
Grandpré, exercées sur les sergents du comte de Champagne, son suzerain.
Un
article de 1270 règle les droits des veuves sur les forêts qu’elles tiennent en
douaire.
En
1275, " le haut justicier a droit de prendre tous les biens de celui
qui a méfait ".
En
1287, la cour défend, par voie de règlement, aux baillis et aux prévôts de
Champagne, de vendre les maisons et les sergenteries de leurs juridictions.
En
1288, elle ordonne qu’il n’y aura plus de tabellions que dans les châteaux.
Elle défend aux bourgeois de Bar-sur-Aube d’acheter, contre la coutume, des
vignes à Couvignon et d’en transporter les récoltes à Bar-sur-Aube.
En
1289, lors d’un litige privé, il est dit " que l’aîné des enfants
aura l’avouerie des plus jeunes ".
La
même année, elle enjoint au bailli de Chaumont de faire réparer par le duc de
Lorraine, en employant même la force armée, et en s’emparant de tout ce qu’il
peut saisir appartenant au duc, les injures et les violences commises par lui
et par ses gens au préjudice du roi, de manière que l’honneur du roi soit
maintenu.
Le
nombre d’affaires soumises à la cour est considérable. A certaines sessions, il
y en a plus de 200 !
A
la session de 1381, la cour transporte dans ses bagages les pièces des procès
commencés à Paris et intéressant la Champagne, pour " les mettre à
fin aux Grands Jours de Troyes ".
En
1408, lorsque les délégués du Parlement de Paris se préparent à se rendre à
Troyes, il est constaté que les charretiers ont, sur leur voiture, chargé
" deux queues (futailles) pleines de procès de Champagne pour être
menés à Troyes, et plusieurs queues et poinçons pleins des habillements et
besognes, tant des seigneurs que des avocats et procureurs… ".
En 1409, la Cour réglemente le prix du service du culte catholique, arrêt important, fixant le prix des mariages, enterrements… Le nombre des affaires soumises à la Cour est considérable et revêt toutes les formes. Certaines sont plaidées, d’autres instruites par écrit…
Ces
faits justifient que, jusqu’au dernier jour, l’autorité des Grands-Jours de
Troyes est égale à celle du Parlement.
La
cour des Grands-Jours eut son sceau particulier que vous voyez reproduit
ci-contre : le roi assis tient un sceptre et une main de justice. A
droite, les armes de France, à gauche celles de Champagne.
Quelle meilleure conclusion que celle que
l’un de nos poètes Amadis Jamyn, né à Chaource, poète champenois de la Pléïade,
ami de Pierre de Ronsard a écrite en 1584 :
"Au nom de la venue et du nom des
Grands-Jours
Les meschants
estonnez à la fuite ont recours :
Volleurs faux monnoieurs
et violleurs de filles…
Le cry de ces
Grands Jours leur fut espouvantable…
Juges je vous
salue, embrassez vostre gloire
Qui sera dans
mes vers d’éternelle mémoire… "
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