Le concile de Trente est le dix-neuvième concile
œcuménique reconnu par l'Église catholique.
Convoqué par le pape Paul III le 22 mai1 1542, en
réponse aux demandes formulées par Martin Luther et Jean Calvin dans le cadre
de la Réforme protestante, il débute le 13 décembre 1545 et se termine le 4
décembre 1563. Étalées sur dix-huit ans, ses vingt-cinq sessions couvrent cinq
pontificats (Paul III, Jules III, Marcel II, Paul IV et Pie IV) et se tiennent
à Trente dans la cathédrale de San Vigilio, puis à Bologne et enfin à nouveau à
Trente, dans l'église Santa Maria Maggiore.
En réponse aux théories protestantes, le concile
confirme la doctrine du péché originel affirmée lors du 16e concile de Carthage
en 418, précise celle de la justification, de l’autorité de la Bible spécifique
au catholicisme et confirme les sept sacrements, le culte des saints et des
reliques ainsi que le dogme de la transsubstantiation. Sur le plan
disciplinaire, il crée les séminaires diocésains, destinés à former les
prêtres.
Trente est l'un des conciles les plus importants de
l'histoire du catholicisme ; il est le plus abondamment cité par le concile de
Vatican II (1962-1965). Entre Trente et Vatican II, il n'y eut qu'un seul
concile, Vatican I (1869-1870), qui définit le dogme de l'infaillibilité
pontificale mais fut interrompu par la guerre franco-allemande de 1870 et
l'intervention des troupes italiennes qui, à la prise de Rome, annexèrent les
États du pape.
Régine Pernoud présente ce concile comme « la
coupure entre l'Église médiévale et l'Église des temps classiques »3. Cette
Église « de la Contre-Réforme » est aussi appelée Église « tridentine » (cet
adjectif dérivant du nom latin de la ville de Trente, Tridentium).
La
genèse de la réunion du concile
Les premiers appels au concile émanent de Luther
lui-même. D'abord le 28 septembre 1518, puis le 11 octobre 1520 : il demande l'arbitrage
d'un concile dans son conflit avec la papauté. En effet, le début du XVIe
siècle est encore fortement marqué par l'idée que le concile, incarnation de
l'Église universelle, est l'instance, supérieure au pape, où se juge toute
injustice. La papauté connaît bien ce risque et Clément VII, pape de 1523 à
1534, hésita.
Les États protestants du Saint-Empire romain
germanique réclament officiellement la tenue d'un concile allemand. Si Charles
Quint est favorable à la tenue d'un concile, il refuse la convocation d'une
assemblée uniquement allemande. Cependant, la guerre avec François Ier de
France rend impossible la tenue d'une assemblée universelle.
En 1534, le pape Clément VII meurt. Paul III, son
successeur, souhaite que l'Église reprenne l'initiative. Il accepte donc l'idée
du concile dans une optique de réforme générale. Pour ce faire, il élève à la
pourpre cardinalice des réformateurs italiens et constitue la Commission de
emendenda Ecclesia, « pour la réforme de l'Église ». Charles Quint pense qu'un
concile pourra rétablir l'unité chrétienne. Le 2 juin 1536 est publiée la bulle
d'indiction, Ad Dominici gregis curam, qui fixe l'ouverture du concile le 22
mai 1537 à Mantoue.
Peu après, la guerre reprend entre Charles Quint et
François Ier. Parallèlement, le lieu de la tenue du concile pose un problème :
le duc de Mantoue formule des exigences démesurées tandis que la république de
Venise refuse à demi-mot d'héberger l'assemblée, qui est donc ajournée. Le 22
mai 1542, Paul III publie de nouveau une bulle d'indiction, mais la guerre
retarde de nouveau l'ouverture du concile jusqu'au 13 décembre 1545, cette fois
à Trente, dans les Alpes, terre d'Empire.
La
première séance (1545-1549)
La première séance se tient dans la cathédrale de
Trente, le 13 décembre 1545. Le légat qui ouvre la première session précise les
buts de la réunion : exaltation de la foi et de la religion chrétienne,
extirpation des hérésies, paix et union de l'Église, réformation du clergé,
extinction des ennemis du christianisme. Tous les aspects de l'Église sont
visés.
Pour la séance d'ouverture, la foule est maigre :
trois légats, quatre archevêques, vingt évêques, le procureur de l'archevêque
de Mayence et cinq généraux d'ordres. Calvin plaisantera à ce sujet : « Si
c'estoit seulement un synode provincial, ils devroyent avoir honte de se
trouver si peu ». Pire encore, les États chrétiens considèrent que le concile
est sous la coupe de l'Empereur. La France ne daigne y envoyer que trois
évêques. Lors de la septième session, en mars 1547, seuls 68 prélats sont
présents. Il faut dire que seuls les Italiens peuvent se rendre commodément à
Trente.
Rapidement, cependant, les Pères conciliaires
entendent s'affranchir de la tutelle impériale. Contre Charles Quint qui veut
les limiter aux abus ecclésiastiques, ils se saisissent également des questions
dogmatiques. Contre sa volonté également, ils condamnent les doctrines
protestantes : le 8 avril 1546, ils font de la Tradition un élément de la
Révélation ; le 17 juin, ils réitèrent la conception catholique du péché
originel et le 13 janvier 1547, ils font de même pour la justification. Devant
leur audace, Paul III s'inquiète, alors que ses relations avec l'Empereur se
tendent.
En mars 1547, Giovanni Maria del Monte, légat
pontifical et secrétaire du concile, à la suite d'une épidémie à Trente, fait
transférer le concile à Bologne. Furieux, Charles Quint interdit à ses prélats
de quitter Trente, et déclare invalide le transfert. Dès lors, les sessions
tenues à Bologne sont purement formelles. Les pères conciliaires prennent soin
de ne prendre aucune décision, qui serait contestée par l'Empereur : aucun
décret n'est voté pendant cette session. Parallèlement, Charles Quint ne fait
pas poursuivre les travaux des prélats allemands restés à Trente. Le pape met
donc fin à cette première série de réunions qui a compté jusqu'à 70 votants le
17 septembre 15497.
La
deuxième séance (1551-1552)
Peu de temps après, Paul III meurt. Le secrétaire du
concile est élu pape et prend le nom de Jules III. Réputé anti-impérial, il
tourne casaque aussitôt sacré et, dans l'espoir de ramener Parme dans le
patrimoine familial, il s'allie avec l'Empereur, permettant ainsi au concile
d'être rouvert le 1er mai 1551, sous la présidence du légat Marcello
Crescenzio. Henri II, furieux, récuse le concile et interdit à ses prélats de
s'y rendre. Pour sa part, Charles Quint force ses États protestants à dépêcher
des représentants au concile. Seuls les ducs de Saxe et de Wurtemberg,
l'électeur de Brandebourg et la ville de Strasbourg s'y plient. Sitôt arrivés,
les ambassadeurs protestants posent leurs conditions, qui sont rejetées par le
concile qui, au contraire, réaffirme le dogme de la transsubstantiation.
Parallèlement, les Pères espagnols et la papauté s'opposent sur la réforme
disciplinaire des clercs.
En 1552, les États protestants et Henri II déclarent
la guerre à Charles Quint. L'armée de Maurice de Saxe qui dirige la ligue de
Smalkalde menace le sud de l'Allemagne. Le 28 avril, le concile est levé et
évacue la ville. Le nombre de votants n'a pas dépassé les 65 pendant cette
deuxième session.
Jules III prend acte de l'échec du concile en
matière d'unité chrétienne. Il se replie sur la réforme de l'Église catholique
et prépare une bulle qu'il n'a pas le temps de publier. Son successeur, Paul
IV, élu en 1555, se consacre à la réforme des institutions romaines. Il réforme
la Daterie et l'Inquisition.
En 1556, Charles Quint abdique et partage ses
possessions entre son fils Philippe II et son frère Ferdinand Ier du
Saint-Empire. Il meurt en 1558. En 1559, c'est le roi de France Henri II qui
trouve la mort accidentellement. Son successeur François II meurt dès l'année
suivante laissant le trône à son frère Charles IX qui, avec leur mère,
Catherine de Médicis, face à une France déchirée, souhaitent alors convoquer un
concile purement français pour régler la question religieuse. Ce sera la
tentative du colloque de Poissy (1561). Pour la papauté, un concile séparé est
inacceptable.
Pie IV, élu en décembre 1559 doit faire face à des
pressions divergentes. Le roi d'Espagne Philippe II veut reprendre les débats
du concile. L'empereur Ferdinand Ier, les Français, les Allemands souhaitent
l'organisation d'un nouveau concile qui réaliserait un accord avec les
protestants11. Le pape convoque finalement de nouveau le concile à Trente par
la bulle Ad Ecclasiæ regimen (29 novembre 1560).
La
troisième séance (1562-1563)
Le 18 janvier 1562, le concile est de nouveau
ouvert, cette fois avec davantage de prélats, mais encore majoritairement
italiens. Cette session du concile porte principalement sur le sacrement de
l'ordre, plus précisément sur la résidence épiscopale. En novembre, la
délégation française arrive présidée par le cardinal de Lorraine. Le débat se
porte alors sur la définition du pouvoir pontifical. Les affrontements sont
rudes entre la « conception romaine » fondée sur le pouvoir pontifical et la «
conception épiscopaliste » défendue par les Espagnols, les Français et une
minorité italienne, selon laquelle l'évêque est institué directement par Dieu.
Dans leur élan, les Pères conciliaires entendent
s'attaquer aux abus des princes. Aussitôt, les rois de France et d'Espagne font
part de leur mécontentement. Les ambassadeurs français quittent Trente après
maintes protestations. Le projet de décret est finalement écarté. Le concile
s'achève par une succession de décrets sur le purgatoire, le culte des saints
ou encore les reliques.
Les 3 et 4 décembre 1563 se tient la séance de
clôture. L'ensemble des décrets du concile est lu devant les Pères, rassemblés
dans la cathédrale Saint-Vigile de Trente. Les archevêques et les évêques y
sont beaucoup plus nombreux que dans les réunions précédentes. 220 prélats
signent l'acte final le 4 décembre 1563. Au terme de cette lecture, le légat
Giovanni Girolamo Morone, secrétaire du concile, demande aux Pères s'ils
souhaitent clore leur assemblée. Tous ayant répondu amen, le cardinal de
Lorraine rend grâce :
aux différents papes du concile ;
à Charles Quint, à l'empereur Ferdinand et aux «
sérénissimes rois » (non nommés) ayant protégé le concile ;
aux légats apostoliques ;
aux cardinaux et ambassadeurs ;
aux évêques.
À chacune de ses acclamations répond la
foule des Pères conciliaires.
Enfin, il s'exclame : « Anathème à tous
les hérétiques ! »,
repris par les Pères : « Anathème,
anathème ! »
Œuvre
dogmatique
Première caractéristique du travail doctrinal du concile,
il est conçu directement en réponse aux thèses protestantes. Il n'a donc rien
de systématique.
La Révélation
S'agissant des sources de la Révélation, le concile
définit, à l'occasion de sa IVe session (8 avril 1546), le Canon — c'est-à-dire
le contenu considéré comme authentiquement révélé —, dans lequel sont inclus
des livres que les protestants qualifient d'apocryphes et les catholiques de
deutérocanoniques. La Vulgate, traduction latine rédigée par Jérôme de Stridon
au Ve siècle, reçoit un monopole d'authenticité pour la discussion, la
catéchèse et la prédication dans l'Église catholique. Les éditions de la Bible
sont désormais soumises à la censure des autorités ecclésiastiques.
À la différence de versions plus récentes de la
Bible, la Vulgate est reconnue fiable du fait qu'on n'y a jamais décelé
d'hérésie. Elle n'est cependant pas exempte d'erreurs ou de reproches et mérite
une révision. La lecture d'autres versions que la Vulgate n'est pas interdite.
Cela n'intervient que plus tard, sous la poussée de l'Inquisition en Espagne et
contre les traductions jansénistes en France.
Par ailleurs, la question de la traduction de la
Bible en langue vernaculaire est abordée, mais après d'abondants débats, le
concile choisit de ne pas trancher. En pratique, toutes les éditions de la
Bible en langue vulgaire sont mises à l'Index en 1559.
Le concile reconnaît également la Tradition comme
source de la Révélation. Il la définit comme « les traditions non écrites qui,
reçues par les Apôtres de la bouche du Christ lui-même ou transmises comme de
main en main par les Apôtres sous la dictée de l'Esprit Saint sont parvenues
jusqu'à nous. » Le concile se garde bien, cependant, de dresser la liste de ces
traditions. Calvin conclut que « tout ce qu'ils mettront en avant, combien
qu'il ne soit nullement fondé en l'Escriture, sera mis au nombre des
traditions, lesquelles ils veulent qu'on croye autant que la loy et les
prophètes. » Le décret sur la Révélation suscite des réticences chez certains
Pères conciliaires, entre autres Giacomo Nacchiante.
Le
salut
Le dogme du péché originel est défini lors de la Ve
session, le 17 juin 1546. S'il touche tous les hommes, il est effacé par le
baptême : « En ceux qui sont nés de nouveau, rien n'est l'objet de la haine de
Dieu. » Par ce décret, le concile s'oppose résolument aux thèses protestantes
d'une nature humaine irrémédiablement corrompue : pour eux, l'homme n'est plus
intrinsèquement pécheur, mais entraîné au péché par la concupiscence, auquel il
se doit de résister.
Le concile aborde ensuite, dans sa VIe session (13
janvier 1547), le problème de la « justification », c'est-à-dire des modalités
du salut. Dans un très long texte (16 chapitres, 33 canons), le concile
explique que la foi est à l'origine du salut de l'homme. Cependant, « personne
ne peut savoir, d'une certitude absolue de foi excluant toute erreur, qu'il a
obtenu la grâce de Dieu » : le concile s'oppose là non seulement aux
protestants, mais à une vieille tradition médiévale. L'homme doit donc lutter
sans cesse, et progresser dans la foi. L'homme est donc justifié par la foi et
par les œuvres, l'existence du purgatoire, du culte des saints, des images, des
reliques, la pratique des indulgences. Les pères conciliaires rappellent
l'existence des sept sacrements, tous nécessaires au salut. Ces sacrements
doivent être conférés par un prêtre, sauf le baptême pouvant être conféré par
un laïc. Le sacrement de l'ordre (ordination) ne peut être conféré que par un
évêque.
Il y a donc en même temps rejet de la justification
par la foi seule soutenue par Luther, et refus de la thèse de la duplex
justitia, « double justice » (du Christ et des hommes), sorte de consensus
entre catholiques et protestants défendu à Trente par plusieurs théologiens,
dont le cardinal Girolamo Seripando, prieur général des Augustins, et récusé
notamment par le jésuite Jacques Lainez.
La définition des sacrements
Le concile confirme la liste des sept sacrements
dégagée par l'Église à la fin du XIIIe siècle : baptême, eucharistie,
pénitence, confirmation, ordination, mariage et extrême-onction. Ces sacrements
sont déclarés efficaces par eux-mêmes (ex opere operato), indépendamment de
celui qui les administre, et même de celui qui les reçoit. Ils sont tous
nécessaires au salut. Ces sacrements doivent être conférés par un prêtre. En
définissant l'eucharistie, le concile maintient et confirme le dogme de la
transsubstantiation :
« Par la consécration du pain et du vin s'opère le
changement de toute la substance du pain en la substance du Corps du Christ
notre Seigneur et de toute la substance du vin en la substance de son Sang ; ce
changement, l'Église catholique l'a justement et exactement appelé
transsubstantiation. »
La nécessité de conserver les hosties et le vin
consacré dans un endroit sacré est affirmée. La messe reste un sacrifice. Elle
doit être dite en latin mais le prêtre peut faire le sermon en langue
vernaculaire. Les Pères écartent donc la thèse luthérienne de la
consubstantiation et la thèse sacramentaire, niant la présence réelle. En ce
qui concerne le sacrement de pénitence et de réconciliation, les décrets
insistent sur la contrition, « douleur intérieure et détestation du péché » et
de l'attrition, « honte du péché, crainte du châtiment et des peines ».
L'attrition est une étape sur le chemin de la grâce.
Concernant le mariage, le décret Tametsi promulgué
en 1563 impose la publicité du mariage chrétien, et entreprend ainsi de mettre
fin à la pratique de l'union clandestine.
À la suite de ce concile est rédigé, dès 1566, le
Catéchisme du concile de Trente.
Le
culte des saints
Le concile a confirmé le culte des saints, mais
établit une distinction entre le culte de dulie, simple vénération due aux
saints, et le culte de latrie, adoration qui n'est due qu'à Dieu et à chacune
des hypostases de la Trinité chrétienne. Le culte de la Vierge Marie est appelé
hyperdulie.
Le
principe de majorité
Le concile introduit le secret du vote et affirme
que la majorité doit être présumée sanior. Adhémar Esmein souligne l'importance
de l'introduction du secret du vote dans cette évolution : « C'était par là
même sanctionner la loi du nombre, la majorité absolue et dans tous les cas,
puisque le système antérieur exigeait, comme on l'a vu, qu'on sût pour quel
candidat chacun avait voté. La règle subsidiaire sur les deux tiers des voix
tombait également, puisqu'elle avait pour unique objet d'empêcher, lorsqu'elle
s'appliquait, la collatio quant à l'autorité, au zèle et au mérite ».
Œuvre disciplinaire
Les Pères conciliaires entendent réformer l'Église
de l'intérieur. Ils n'hésitent pas à citer leur propre exemple pour dénoncer
les abus ecclésiastiques : ainsi du cardinal de Lorraine, archevêque à 14 ans.
Reprenant des canons médiévaux, le concile fixe à 27 ans l'âge minimal de la
prêtrise.
La résidence des évêques est abordée lors de la VIe
session, le 13 janvier 1547. Le concile reste prudent : il prévoit des
sanctions contre les évêques fautifs, allant jusqu'à la privation de leur
temporel, mais aussi des cas de dispense, le pape restant l'arbitre en la
matière. Les pouvoirs des évêques sont renforcés : désormais, ils doivent
visiter chaque année toutes les églises de leur diocèse, même celles qui
bénéficient d'une exemption accordée par le pape. Le concile parvient à ménager
les susceptibilités pontificales en rappelant que l'évêque tire son pouvoir du
Saint-Siège lui-même.
Les décrets de réformation précisent le pouvoir des
évêques, interdisent le cumul des évêchés et des cures, précisent les règles
d'établissement des institutions scolaires et de la désignation des prédicateurs.
L'évêque reçoit le pouvoir sur les images et l'iconographie religieuse dans les
Églises. Les communautés religieuses sont placées directement sous sa
responsabilité. Ils rappellent le pouvoir des évêques en matière d'ordination
et l'obligation pour tous les clercs de porter l'habit ecclésiastique en
permanence. « D'une façon générale, Trente sous-tend une vision très cléricale
de l'Église, qui passe par une différenciation sociale du clerc : le clerc doit
être décent, s'habiller de façon distincte des laïcs, ne pas fréquenter les
tavernes ».
Le concile met l'accent sur le rôle pastoral de
l'Église : lors de sa Ve session, il institue un poste de lecteur en Écritures
dans chaque cathédrale, couvent ou monastère, et un poste de maître de
grammaire dans les églises plus petites. Il rappelle aux évêques leur
obligation de prêcher ou de faire prêcher. Il institue des séminaires pour la
formation du clergé. Cependant, il laisse subsister un flou entre école pour
enfants pauvres et centre de formation des clercs. Le modèle du séminaire
tridentin ne s'établit clairement que lors de la distinction entre petit et
grand séminaire, ce dernier accueillant des élèves plus âgés, ayant reçu un
ordre mineur. Enfin, le concile appelle les artistes à respecter la décence et
à présenter des modèles doctrinaux clairs. De fait, le concile compte sur les
évêques et les curés pour entamer la reconquête sur les protestants.
Conséquences
du concile
Dans
le monde catholique
Selon l'historienne Nicole Lemaître : « Le Concile
de Trente a été la réponse catholique pour se protéger de la réforme
protestante alors perçue comme une agression. Cette crispation a provoqué des
décisions dont nous subissons toujours les conséquences, notamment dans le
gouvernement de l'Église : absolutisme pontifical, centralisation, culte du
secret ».
Selon Alain Tallon, alors qu'il est essentiellement
théologique, le concile marque toutefois un redémarrage étonnant du
catholicisme en France : « Ceci explique peut-être une nostalgie d'une partie
de l'Église envers lui. […] Mais cette vision idéalisée, défendue en
particulier par le courant lefebvriste, est aussi caricaturale que certains
propos entendus en 1968 disant qu'il fallait en finir avec le Concile de Trente
».
Sur le plan de l'art, en contradiction avec le
courant iconoclaste de la réforme, les images sont encouragées dans une visée
didactique mais aussi pour favoriser une dévotion soutenue par l'émotion comme
celle autour des saints ou de la Passion du Christ. Il se développe dans l'art
religieux, les peintures monumentales et la statuaire, une production rattachée
au baroque. Elle répond à deux courants, parfois contradictoires, un courant
mystique de dévotions et un courant intellectuel et doctrinaire justifiant
certaines censures.
Dans
le monde protestant
Sur les 87 ouvrages écrits entre 1546 et 1564 pour
critiquer le concile de Trente, 41 sont l'œuvre de Pier Paolo Vergerio, ancien
évêque catholique converti au protestantisme. Les quatre volumes de l'Examen
Decretorum Concilii Tridentini de Martin Chemnitz, publiés de 1565 à 1573,
constituent la principale riposte luthérienne au concile.
En France, la fin du concile coïncide avec le début
des guerres de Religion.
Il en va de même aux Pays-Bas, où les guerres de
Religion prennent la forme d'une guerre d'indépendance connue sous le nom de
guerre de Quatre-Vingts Ans.
Les
actes originaux :
Canones et decreta Sacrosancti œcumenici et
generalis Concilii Tridentini sub Paulo III, Iulio III, et Pio IIII,
Pontificibus Max.... Romæ : apud Paulum Manutium, Aldi fil., 1564.
Le saint Concile de Trente, oecuménique et général…
Trad. nouvelle par M. l'Abbé Dassange… Paris, 1842
Les
Papes de la Contre-Réforme
Pie V (1566-1572) crée de nouvelles congrégations : celle du Concile, chargée de l'application des décrets tridentins, celle de l'Index, qui surveille les ouvrages imprimés et publie le catalogue des livres interdits, celle de la Conversion des hérétiques et des infidèles qui se concentre sur les réformés. Il organise une croisade contre les Turcs qui aboutit à la victoire de Lépante. Il soutient financièrement la guerre contre les protestants français et condamne en 1567 les propositions de Michel Baïus sur la grâce.
Grégoire
XIII
(1572-1585) s'engage dans la formation du clergé. Le Collège romain devient un
séminaire appelé Université grégorienne qui est confié aux Jésuites. Le Collège
germanique leur est lui aussi confié. Il entreprend également la réforme du
calendrier.
Sixte
V
(1585-1590) poursuit la centralisation de l'administration. Il crée la
Congrégation des réguliers, la Congrégation des procès consistoriaux, qui
examine les enquêtes faites préalablement à toute nomination épiscopale ou
abbatiale, la Congrégation des rites et des cérémonies, la Congrégation de la
typographie. Il fixe le nombre de cardinaux à 70. Il impose aux Romains un
comportement austère et embellit la ville de Rome. L'art est mis au service de
la propagande catholique : la cité de Rome doit offrir l'image du triomphe de
la religion et devient le centre de rayonnement de l'art de la Contre-Réforme :
l'art baroque.
Paul
V
(1605-1621) renvoie de Rome les évêques qui y séjournent au lieu de résider
dans leur diocèse. Il fait face aux revendications gallicanes et obtient la
condamnation d'Edmond Richer.
Grégoire
XV
(1621-1623) élabore les règlements du conclave pour l'élection pontificale. Il
crée la Congrégation pour la propagande de la foi et adjoint à la Congrégation
du concile celle de l'immunité ecclésiastique, destinée à défendre les
privilèges de l'Église et l'autorité pontificale.
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