Lettre
de François Ier qui impose le diocèse de
Troyes pour la guerre d’Angleterre
Les Archives de l’Aube renferment un document important
: une lettre de François 1er du 12 février 1545, qui impose un subside aux
bénéficiers du diocèse de Troyes, pour la guerre que le roi projette contre
l’Angleterre.
Le roi rappelle d’abord la glorieuse résistance des
Français contre les armées de Charles-Quint et d’Henri VIII, pendant la
campagne de 1543-1544, et la paix signée avec l’empereur, à Crécy, le 18
septembre 1544.
Mais Boulogne a été rendue aux Anglais le 14
septembre 1544, par Jacques de Couey-Vervins. Le roi déclare que la ville serait
encore au pouvoir des Français, « si les chefs des gens de guerre eussent en
leur cœur aussi bon comme ils étaient bien fournis de vivres, munitions et
autres choses nécessaires à leur défense…».
Enfin, le roi développe un plan de campagne contre
Henri VIII, qui a repoussé des offres de paix « très honnêtes et plus que
raisonnables », qui lui ont été faites selon « l’ancienne et naturelle
magnanimité des Français ». Non seulement le roi se met en devoir de recouvrer
la ville de Boulogne et d’arrêter tout progrès de l’invasion anglaise de la
France, mais il projette une descente en Angleterre pour « guetter » dans les
états d’Henri VIII « la guerre à laquelle il est iniquement obstiné ».
A cet effet, le roi vient de former une armée de
terre, qu’il entretiendra dans le Boulonnais, tant pour le ravitaillement de la
ville d’Ardres que pour tenir tête aux ennemis, et empêcher que l’ennemi ne
soit secouru en vivres et munitions, nécessaires pour tenir la ville de
Boulogne.
Le roi fait préparer, équiper et ravitailler un
grand nombre de gros navires, galions, galères et autres vaisseaux, tant en mer
« de ponant que en celle de levant » pour faire une grosse armée de mer assez
forte et puissante, non seulement « pour garder les Anglais de courir sur la
mer et outrager nos sujets, en quoi nous assurerons le train et commerce de la
marchandise par de là la mer grandement profitable à nos sujets », mais encore
pour opérer une descente sur les côtes d’Angleterre, envahir le pays et
exécuter certaines entreprises dommageables à notre ennemi.
Aussi, le roi « fait dresser un grand nombre de gens
de guerre pour la dite armée, afin de préserver nos autres pays des dommages
que pourrait leur porter le passage des gens de guerre. Quand ils seront
embarqués sur mer, notre royaume sera délivré. Mais aussi, nous faisons de
grands préparatifs pour courir sus à notre dit ennemi et sa grosse armée qui se
dresse en Ecosse, et pour le grand secours
que nous avons promis pour la défense de la chrétienté contre les
ennemis de la foi chrétienne ».
On sait que tous ces projets aboutirent à la prise
de l’île de Wight, après le grand combat naval du 6 juillet 1515. C’est la
première fois que les Français se mesurent avec les Anglais sur mer. La paix
est conclue avec l’Angleterre à Ardres, le 7 juin 1546, mais la ville de
Boulogne n’est rendue à la France que le 24 mars 1550, par le traité d’Outreau,
moyennant 400.000 écus.
C’est pour réaliser ces projets et pour les grandes
dépenses causées par l’achat d’artillerie, de munitions, de vivres et autres
provisions nécessaires, des réparations, fortifications et défenses des places
des frontières, et autres grandes dépenses de cette année, que le roi impose
aux bénéficiers du diocèse de Troyes un « don gratuit » ou subside de 13.352
livres, équivalant à 4 décimes du revenu des bénéfices ecclésiastiques, ce qui
est onéreux.
« François, par la grâce de Dieu roi de France »,
écrit le 12 février 1545 « à son aimé et féal conseiller l’évêque de Troyes
(Louis de Lorraine), qui connait les incroyables dépenses qu’il a dû supporter,
et comprendre que tous les deniers ordinaires et extraordinaires des années
passées ne sont en rien comparables à celles de cette année, et qu’il a besoin
de l’aide de « ses bons et loyaux sujets », lesquels continuant leur bonne
affection, seront prêts d’aider de leur puissance à la conduite de la guerre
qui reste à faire promptement, pour parvenir au reste de la paix, pour jeter
hors notre royaume ladite guerre et les soldats étrangers dont nos dits sujets
sont las et ennuyés en leurs maisons, terres et héritages. Pour ces causes,
nous mandons qu’incontinent vous faites assembler les gens d’église et clergé
de votre diocèse pour qu’ils nous octroient un don gratuit… car tel est notre
bon plaisir…».
Ces sortes de dons gratuits sont fréquemment
imposées par le roi, car les tailles, sous le règne de François 1er,
augmentèrent de plus de 9.000.000.
Pour répondre favorablement à « François », les
bénéficiers du diocèse de Troyes s’exécutent sans retard, et les percepteurs
ecclésiastiques effectuent le recouvrement complet de l’impôt pour le 6 mars
1546.
Pour rappel :
Charles Quint avait conclu une paix séparée avec
François Ier en septembre 1544, la trêve de Crépy-en-Laonnois, laissant le roi
d'Angleterre seul face au roi de France.
Les deux parties s'accordent sur la restitution de
la ville de Boulogne à la France contre paiement de 140 000 écus, et confirment
que Calais reste possession anglaise.
Le traité, d'abord ratifié par François Ier le 8
juin 1546, est contresigné au palais de Westminster le 17 juillet 1546. Les
négociateurs anglais étaient Edouard d'Hereford, William Paget, John de Lisle
et Nicolas Wotton ; et les négociateurs français Claude d'Annebault, Pierre
Remon et Guillaume Bochetel.
Ce traité restera toutefois sans exécution. La France ne reprendra Boulogne qu'en 1550, par le traité d'Outreau.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire