L’écrivain
Pierre de Larivey (le père)
En 1430, il y a à Troyes, une rue devant le Pilori (c‘était le pilori du prévôt). A la même époque, on l’appelle aussi de la Tête Noire, car il s’y trouve un logis de ce nom, puis rue de l’Ecritoire, rue de la tête Noire, rue du Papegay (oiseau ou perroquet servant de cible aux arbalétriers). Ensuite, du XVIe au XIXe siècle, elle s’appela rue de la Limace (enseigne représentant un escargot)). Après délibération du Conseil municipal du 26 novembre 1875, un arrêté du maire du 8 avril 1876, donne à la rue de la Limace, le nom de rue de Larivey.
C’est dans le
domaine de la littéraire, une des principales illustrations de la ville que
nous trouvons notre Pierre de Larivey. Son nom est peu connu, pourtant il n’est
pas réservé aux chercheurs universitaires puisqu’il est joué encore de temps en
temps, (en 1953 au Festival d’Angers dans une adaptation d’Albert Camus, puis à
Paris plus récemment).
Il nait vers 1541 à Troyes. Il serait le fils
d’un italien Giunto (en français l’arrivé), florentin venu à Troyes, soit pour
y suivre, à l’exemple de plusieurs de ses compatriotes, des affaires de
commerce ou de banque.
Auteur dramatique, poète comique, traducteur, il est
d’abord prêtre et scribe. Il publie en 1572 Les facétieuses nuits du seigneur
Staparole (traduit de l’Italien), plusieurs fois réimprimé.
En 1577, deux livres de la Filosofie fabuleuse: le
premier Prins des discours de M. Ange Firenzwola, florentin... le second
Extraict des traictez de Sandebar, indien.
En 1579, il aborde le théâtre avec 6 comédies
facétieuses, à l’imitation des anciens grecs, Latins et modernes italiens: le
Laquais, les Esprits, les Jaloux, la Veuve, le Morfondu et les Escolliers.
Ces pièces obtiennent un énorme succès à Paris, et sont plusieurs fois réimprimées.
En 1581, il écrit pour le théâtre de nombreuses
comédies, elles aussi rééditées. " Elles exercent sur notre théâtre une
influence si considérable, que l’incomparable Molière ne rougit point de leur
faire de nombreux emprunts ", comme le remarque M. de Saint-Marc Girardin,
dans son discours de poésie française.
En effet, on dit de lui qu’il est le précurseur de
Molière dont le personnage d’Harpagon est tiré de son œuvre.
Il est nommé chanoine du Chapitre de la Collégiale de Saint Etienne de Troyes, le 21 février 1587.
Dès le 1er juillet 1599, et jusqu’au 10 juillet
1607, il tient le registre des délibérations et conclusions capitulaires de
l’église de Saint-Etienne, et malgré cela, n’en écrit pas moins de 871 feuillets.
En 1604, il écrit (traduit de l’italien) Les trois
livres de l’humanité de Jésus-Christ, et en 1611 sont imprimées trois pièces:
la Constance, le Fidelle et les Tromperies.
En 1608, il écrit Les veilles de Barthélemy Arnigio.
Guillaume Chasble appelle Larivey " l’honneur
de la Champagne ".
Il avait d’immenses connaissances et reçut les
louanges de beaucoup d’écrivains et de personnes distinguées.
Ce qui fait sa gloire, ce sont ses comédies, les
premières pièces régulières que la France ait eues, dans lesquelles il mit sur
la scène française les caractères, les intrigues et les travaux de mœurs de la
comédie italienne. Il eut le mérite d’avoir attiré l’attention des auteurs
dramatiques contemporains sur le théâtre italien et que ses comédies exercèrent
une influence considérable sur notre théâtre.
Pierre de Larivey sait de bonne heure, s’attirer les
faveurs de personnages recommandables, car nous le voyons dédier ses ouvrages
au vicomte de Paulmy seigneur d‘Argensob, à monseigneur de Luxembourg, duc de
Piney, à Jean Vilevailt, procureur au parlement de Paris, à Louis Largentier,
bailli de Troyes, et à M. de Pardessus, conseiller du roi.
Pierre de Larivey décède à Troyes le mardi 12
février 1619, ayant demandé à être enterré dans l‘église Saint-Étienne. Le
service célébré pour son enterrement ne coûta que 5 sous 8 deniers, la messe du
lendemain 4 sous et le service du bout du mois, la même somme.
Il y eut un autre Pierre Larivey, dit le jeune, qui
est son neveu, qui a vécu à Troyes de 1592 à 1644, et fut astrologue et faiseur
d‘almanach. Ce fut d’ailleurs l’un des plus grands astrologues du XVII° siècle,
et Troyes lui dut longtemps la vogue de ses almanachs.
Dans le midi de la France, sa mémoire est toujours
vivace et persistante.
Marseille, Orange, Avignon, Montpellier, Draguignan,
Brignolles, Carpentras... ont toujours possédé, depuis le XVIIe siècle jusqu’à
nos jours, les almanachs de notre troyen Pierre Larivey dit le Jeune.
En 1579, à Paris, chez Abel L'Angelier, il publie
ses Six comédies facétieuses, dont l'action se passe à Paris :
Le Laquais, d’après Ludovico Dolce (Il Ragazzo):
Larivey y introduit le pédant.
La Veuve, d’après Niccolò Buonaparte (La Vedova): on
y trouve le type de 'l'entremetteuse bigote'.
Les Esprits, d’après Lorenzino de Médicis
(L'Aridosia)
Le Morfondu, d’après Anton Francesco Grazzini dit
"Lasca" (La Gelosia): le valet y conduit l'intrigue.
Les Jaloux, d’après Vincenzo Gabbiani (I Gelosi)
Les Escholiers, d’après Girolamo Razzi (La Cecca)1
En 1611, à Troyes, chez Pierre Chevillot, il publie
les Trois Nouvelles Comédies. Leur tonalité est différente des premières. Il ne
s'agit plus de vaincre des obstacles pour trouver l'amour. Les personnages sont
déjà mariés. L'unité d'action y est davantage respectée et Larivey retouche
moins ses modèles. L'action se passe à Troyes.
La Constance, d'après Girolamo Razzi (La Costanza),
proche de la 'comédie larmoyante'.
Le Fidèle, d'après Luigi Pasqualigo (Il Fedele),
d'inspiration misogyne.
Les Tromperies, d'après Nicolὸ Secchi (Gl'Inganni),
d'un comique farcesque2.
Selon l'auteur, ces trois dernières comédies
auraient été retrouvées tardivement par lui : « me print envie d'agencer un peu
de livres que j'ay en mon estude [...] je trouvay de fortune entre quelques
brouillards et manuscripts six [...] comedies toutes chargées de poussières
[...]. j'ay tasché de les r'habiller [...] à la façon de ce pays » (Epistre à
Messire François d'Amboise).
Larivey fait le choix de la prose. La critique
s'accorde à reconnaître en lui le créateur d'une vraie langue comique. Même
s'il suit parfois de près son modèle, il parvient à donner l'impression de la
langue parlée. C'est une langue colorée volontiers grivoise. Les pièces de
Larivey sont des comédies d'intrigue.
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