C’est ainsi qu’après de longues pérégrinations à
travers l’Europe, une famille d’exilés vient s’établir dans l’Aube : Simplice,
Léonice et leur fille Tanche.
Cette dernière " avait la beauté de Rachel et
de Rébecca et avait été accoutumée au travail des mains. Pieuse, modeste,
charitable, elle était la joie de ses parents et l’édification de la contrée.
" Dès l’âge de 16 ans, elle fait vœu de se consacrer au service du
Seigneur.
Le 10 octobre 637, jour de la dédicace de l’église
d’Arcis-sur-Aube, les parents de Tanche se rendent chez le parrain de leur
fille. Sa filleule n’étant pas avec eux, il s’en plaint et envoie un de ses
serviteurs pour chercher celle " qui devait être l’ornement et
l’édification de la fête ".
Tanche se confie au messager qui lui est dépêché.
Mais ce dernier " est possédé de pensées toutes différentes, et pressé par
d’audacieux désirs ". Il parle d’amour, et se livre à une peinture
séduisante de ce penchant. La Vierge répond avec une sagesse qui en impose au
traître. Il fait semblant de céder et d’abandonner son projet. Mais, arrivé
dans un lieu désert, il arrête la monture de Tanche et menace la jeune fille de
la mort si elle ne consent pas à ses infâmes desseins. L’infortunée, ne voyant
personne dans la campagne qui puisse lui venir en aide, se recommande au Ciel.
Tanche s’élance pour échapper à son agresseur. Il y a lutte, mais malgré son
courage, elle est vite épuisée, et le sang coule de plusieurs blessures. Son
ennemi achève la lutte en tranchant la tête de l’innocente victime avec son
épée, puis disparaît.
Ensuite, toutes les légendes nous donnent la même
version : " quant à la Vierge martyre, elle est glorifiée par le Seigneur.
Elle se relève, prend sa tête entre ses mains et se met en marche vers Lhuître.
Arrivée près d’un buisson d’aubépines, elle s’arrête, dépose son précieux
fardeau, et rend à Dieu sa belle âme, tandis que sa tombe se creuse, en faisant
croître un massif de ronces et d’aubépines, pour la défendre contre toute
profanation ".
De nombreux prodiges ne tardent pas à s’opérer sur
ce lieu : des malades, en passant éprouvent un soulagement subit ou une
guérison complète.
Un pieux habitant d’Arcis-sur-Aube reçoit par
révélation divine, l’ordre d’aller découvrir les restes de la Sainte. Avec le
prêtre de sa paroisse, il se met en route sur un chariot traîné par deux bœufs, se laissant guider par les animaux qui
vont droit au buisson et s’y arrêtent. Ils découvrent à peu de profondeur le
corps de la jeune fille conservé " pur et vermeil " ayant la tête
séparée du tronc. Remplis de joie à la vue de ces reliques vénérées, ils les
placent sur le chariot et reprennent le chemin d’Arcis. Mais, arrivés devant
l’église de Lhuître, les bœufs refusent d’aller plus loin. La nuit commençant à
venir, les deux conducteurs tombent dans un profond sommeil. Le lendemain, à
leur réveil, ils s’aperçoivent que l’aiguillon qu’ils ont fiché en terre, s’est
pendant la nuit, couvert de rameaux. Ce signal est celui donné d’en haut, pour
l’inhumation en cet endroit des dépouilles de la Sainte.
Les reliques sont déposées dans ce sanctuaire, où
elles seront vénérées pendant des siècles. L’arbre miraculeux devient un bel
orme. Les miracles se multiplient, et on accourt de tous côtés : les malades y
recouvrent la santé, les aveugles l’usage de la vue, les boiteux s’en
retournent valides…
Deux chapelles sont élevées en l’honneur de la
vierge de Lhuître.
Vers 1440, les habitants de Ramerupt, jaloux de la
réputation de sainte Tanche, et de l’affluence considérable de pèlerins qu’elle
attire à Lhuître, font courir le bruit qu’ils ont découvert dans leur église,
derrière le maître autel, le véritable corps de la Sainte, avec une pierre
creuse, tachée de son sang. L’évêque de Troyes, Jean Léguisé est obligé de
venir sur les lieux reconnaître solennellement la présence des reliques
authentiques de sainte Tanche à la chapelle de Lhuître, ce qui est confirmé par
une bulle du pape Nicolas V, donnée par Rome en 1442.
Avant la Révolution, les reliques de sainte Tanche
sont transportées à Troyes, et la Tête de la Vierge, richement enchâssée dans
un reliquaire d’argent, est conservée dans l’abbaye de Notre-Dame-aux-Nonnains.
En 1793, alors que l’on brûle plusieurs reliques, le
chef de notre Vierge, destiné à subir le même sort, est sauvé par une pieuse
femme native de Lhuître, et sœur du sacristain. Quelques temps après, la
précieuse épave est restituée à l’église de Lhuître, avec un " authentique
", délivré par l’évêque Sibille.
En 1797, la chapelle de Sainte Tanche aliénée et
déclarée propriété nationale, est vendue par l’administration départementale à
la commune, et démolie en 1808.
Une modeste chapelle est construite en 1812. Le
puits d’époque est conservé.
En 1840, l’évêque de Troyes Mgr Séguin des Hons
consacre l’authenticité de ces reliques.
En 1846, on érige à l’Orme-de-la-Pierre, sur le lieu
même où la tradition place le martyre de la Sainte, une croix de pierre avec
une petite statue de la patronne de Lhuître, dues à la munificence d’un
habitant de la commune.
Après toutes ces vicissitudes, le chef de sainte
Tanche est religieusement conservé à l’église de Lhuître, dans une modeste
châsse que l’on expose aux principales solennités de l’Eglise.
On peut voir sa statue à St-Julien, Grandville,
Montfey et Vaupoisson. Un bois peint dans l’église de Lhuître la représente
portant sa tête. Elle figure aussi sur des vitraux à St-Nizier, Grandville,
Pars-les-Chavanges.
Sa fête se célèbre le 10 octobre.
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