Cité
du vitrail
La scène rapporte la visite du roi Henri IV à Troyes
en 1595. Il reçoit un cœur d’or, symbole de l’attachement de la ville à son
roi. La foule est massée devant l’Hôtel
de Ville, paré pour l’occasion d’une tribune de bois. A gauche, on reconnait la
fameuse « Belle Croix », réalisée en métal doré par le sculpteur
Nicolas Halins et aujourd’hui disparue.
Cette scène, peinte à la façon d’une miniature,
illustre les effets virtuoses permis par la technique d l’émail. Posés sur la
face externe du verre, des rehauts de lavis apportent de subtils effets de
profondeur.
Installée dans
l’enceinte de l'hôtel-Dieu de Troyes (l’ancienne morgue) aile Ouest, est
inaugurée en juin 2013, la Cité du vitrail, première étape d’un ambitieux
projet scientifique, culturel et touristique, conduit par le Conseil Général de
l’Aube. C’est une invitation à découvrir Troyes et l’Aube comme capitale
européenne du vitrail.
Le public y découvre de
magnifiques œuvres, et traverse ainsi une dizaine de siècles. En janvier 2017,
arrive une chargée de mission afin de mettre en œuvre la réalisation de "
la Cité du Vitrail ", qui doit aboutir à l'ouverture des nouveaux espaces
de la Cité en l'an 2020, soit porter les espaces à 3.000 m² au lieu de 330 m²
actuellement. Nicolas Dohrmann, directeur du service Archives et Patrimoine
explique : " La Cité du vitrail aspire à un rayonnement international
".
En janvier 2017, le département de l'Aube propose d'inscrire au Patrimoine Mondial de l'Unesco, " Le Vitrail ", 200 églises de notre département réunissant 9.000 m² de verrières du XIIe au XXIe siècle.
Artiste :
Kehinde Wiley
Réalisation :
ateliers de la République Tchèque - 2014
Verre
et plomb, peinture à la grisaille, émaux
Courtesy
Templon, Paris-Bruxelles
Ce vitrail interpelle, c’est l’un des objectifs de
l’artiste américain Kehinde Wiley. Le peintre se situe lui-même dans la lignée
des peintres de portrait anglais, tels Joshua Reynolds ou Thomas Gainsborough
ou le français jean-Auguste-Dominique Ingres.
L’artiste, face à l’absence du corps noir dans les
collections muséales, décide de les réintégrer en réinterprétant des œuvres
classiques de sa peinture, puis de la sculpture. Dans des portraits de taille monumentale,
il applique le vocabulaire visuel et les conventions de la peinture héroïque et
du sublime en insérant des figures d’hommes et de femmes de couleur. Il
s’inspire de portraits photographiques qu’il prend d’abord dans les rue de
Harlem, puis dans les grandes villes du monde entier. Il est particulièrement
célèbre pour son portrait présidentiel de Barack Obama en 2018.
Ce vitrail fait partie d’une série inspirée des
cartons de vitraux du peintre Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) pour la
chapelle Saint Ferdinand à Paris, commandé par le roi Louis Philippe en 1842.
Kehinde Wiley s’est associé à des ateliers de République Tchèque pour traduire
sa peinture sur le verre. Ici, à la place de Sainte Amélie, reine de Hongrie,
l’artiste représente un de ses modèles récurrents, Kern Alexander. L’homme
auréolé se tient debout sur un podium à son nom, sous une arcade géminée, bordée
de croisillons, rosaces et trèfles à quatre feuilles. L’arrière-plan très orné
et coloré qui s’inspire directement de l’œuvre néo-gothique, contraste d’autant
plus avec la figure de l’homme afro-américain, habillé de vêtements
contemporains urbains.
En 2019, un vrai miracle, le Département réussit à acheter un authentique vitrail troyen du XIIe siècle à un étranger : " La Transfiguration du Christ ". Cette verrière devait appartenir soit à la collégiale Saint-Etienne, soit à notre cathédrale romane (qui précède la cathédrale gothique actuelle). On ne connait que 18 panneaux de vitraux de cette époque : 4 sont conservés au Musée de Cluny, 3 dans les collections du Victoria & Albert Museum à Londres, et quelques-uns détenus par des collectionneurs privés. Il faut savoir que l'art troyen du vitrail du XIIe siècle, est reconnu mondialement.
C’est en 1990 que le
Département de l’Aube rachète l’ensemble du bâtiment pour le transformer en
haut-lieu culturel, universitaire et touristique :
2 octobre 1990 : le
Département de l’Aube achète l’Hôtel-Dieu.
1990-1994 :
réhabilitation de l’aile est et sud, investie par le campus universitaire des
Comtes de Champagne (antenne de l’Université de Reims)
2013 : restauration des
communs du XIXe siècle pour y accueillir l’espace de préfiguration de la Cité
du Vitrail (170 000 visiteurs en 5 ans)
2018-2021 :
restauration de l’aile ouest, de la chapelle, du bâtiment de l’Apothicairerie
et du jardin pour y accueillir la Cité du Vitrail.
Le
jardin de l’Hôtel-Dieu
Poumon vert de 2 800m²
en cœur de ville, le jardin est un lieu de promenade pour les visiteurs le long
d’allées agréablement ombragées, pouvant accueillir des animations et des
événements ponctuels.
La restitution
paysagère s’est faite dans le respect de son apparence historique du XIXe
siècle, dans l’esprit d’un jardin hospitalier. La première mention cadastrale
de ce jardin remonte à 1808. Planté d’arbres en alignement, il offrait deux
allées de promenades : celle des malades (au nord) et celle des religieuses (au
sud). Ces jardins sont en terrasse.
Le
chantier de restauration
Au total, 33 mois de
travaux ont été nécessaires pour assurer l’entière restauration de l’aile ouest
de l’Hôtel-Dieu. Ce chantier a été financé quasi exclusivement par le
Département de l’Aube pour un budget de presque 16 millions d’euros.
Le bâtiment étant
classé au titre des Monuments historiques, cette restauration a été menée sous
la maitrise d’œuvre d’Eric Pallot, architecte en chef des Monuments
historiques. Au total, 14 entreprises habilitées à travailler sur un Monument
historique, dont 12 entreprises auboises, ont participé à ce chantier. Trois
autres entreprises se sont occupées de la restauration du jardin.
Des peintures murales
de la chapelle à l’escalier monumental, retour en images sur ces lourds travaux
de restaurations.
Un
projet scénographique au plus près de l’expérience du vitrail
Par Jacques Simon (1890-1974)
Verre et plomb
La famille Simon-Marq
constitue la dynastie française de peintres verriers ayant connu la plus
remarquable longévité, son activité s’étendant du XVIIe au XXIe siècle. Durant
l’Entre-deux-guerres, son principal représentant est Jacques Simon, qui s’est
illustré à la fois par la restauration d’édifices anciens et par ses créations
destinées aux architectures contemporaines. Ce vitrail s’inscrit dans ce second
aspect de son activité.
Il s’agit d’un vitrail
destiné au pavillon de l’Automobile-Club Champagne-Ardenne-Argonne édifié en
1928 à Reims par l’architecte Jacques Rapin, à l’occasion de l’exposition des
« Meilleures Marques ». Avec le paquebot et l’avion, l’automobile
devient durant l’Entre-deux-guerres un symbole de modernité. Associée aux idées
de progrès technique de vitesse et de liberté, elle constitue un sujet pour les
artistes qui la traitent de manière à mettre en évidence ces propriétés.
Pour cette commande,
Jacques Simon n’a pas eu recours à la peinture mais uniquement au verre et au
plomb qui composent des panneaux maintenus par des barlotières verticales. Les
lignes sont fuyantes et comme courbées par la vitesse du véhicule en plein
virage. Au second plan, le paysage s’efface et ne conserve de reconnaissable que
la rangée d’arbres bordant la route. Le découpage en panneaux verticaux évoque
la succession des images sur une pellicule de photographie ou de cinéma,
participant également à cette représentation moderne, voir futuriste, de la
vitesse.
La scénographie et la
signalétique de l’ensemble de la Cité du Vitrail ont été confiées à l’agence de
design multidisciplinaire GSM Project, basée à Montréal (Canada). Fondant son
expertise muséographique sur le design d’exposition et l’expérience
émotionnelle du visiteur, GSM Project propose une approche simple et
collaborative, sensorielle et à échelle humaine, prenant en compte les
contextes historiques, sociaux, architecturaux qui ont façonné l’art du
vitrail.
En dialogue étroit avec
l’ensemble de l’équipe de la Cité du Vitrail (conservation, communication,
médiation) et des experts dans le domaine du vitrail, GSM Project a conçu une
scénographie discrète et atemporelle. En laissant toute leur place aux œuvres,
à l’éclat, à la délicatesse de la peinture sur verre et à la couleur du
vitrail, cette scénographie dévoile cet art aux visiteurs en tirant parti de
l’architecture des lieux.
La scénographie
s’inspire des éléments d’un atelier de maître verrier, comme les grandes
surfaces de travail lumineuses, le système de rangement du verre ou encore le
plomb et en choisissant du mobilier à structure métallique. Le mobilier est
conçu pour s’adapter aux différentes exigences de présentation. Sa modularité a
été étudiée avec attention pour faciliter le renouvellement des œuvres.
L’utilisation de matériaux neutres et le choix monochrome du noir et du blanc
pour le graphisme laissent toute leur place aux couleurs des vitraux et en permettent
un agencement harmonieux.
La scénographie
privilégie une approche active et accessible du vitrail : faire toucher et
apprécier par le visiteur toute la richesse narrative de l’iconographie vitrée
et rendre accessibles, sensibles et lisibles les sens et symboles des vitraux
en insistant sur l’exposition de vitraux à hauteur de regard.
Un système
d’autoportants permet de conserver toute la transparence du verre en
s’affranchissant des contraintes d’architecture, afin de faciliter une
expérience contemplative et sensorielle.
Le
défi de la lumière
Eglise St Pierre-ès-liens de Laines aux Bois
Jessé - premier ancêtre du Christ – est endormi en
bas du vitrail. Un tronc sort de son flanc et se déploie sur l’ensemble de la
verrière en un arbre dont l »es extrémités des branches se développent en
corolles de fleurs. En sortent 18 rois et prophètes qui forment la généalogie
du Christ. Lui-même est représenté au sommet, enfant, dans les bras de sa mère,
Marie.
Le donateur du vitrail se trouve en bas, présenté
par saint Henri de Bamberg et saint Pierre. La scène qui lui fait face est
assez rare dans le vitrail de cette époque : il s’agit de la lactation de
saint Bernard de Clairvaux.
Cette verrière déposée de l’église de
Laines-aux-bois depuis l’effondrement de la nef en 1910, est un condensé du
savoir-faire des ateliers troyens de peinture sur verre autour de 1500.
Le goût pour les teintes vives et contrastées se
retrouve dans le fond bleu sur lequel se détachent les vêtements richement
colorés. La peinture, délicate et réaliste est influencée par les courants
venus du Nord : rides, verrues, doubles mentons… les visages sont peints
sans idéalisation tandis qu’une grande attention est portée à la richesse des
étoffes, des bijoux, des coiffes extravagantes et autres accessoires orfévrés.
Le thème de l’Arbre de Jessé est repris sur les
verrières auboises à plus de 40 reprises. Le remploi d’un même carton a permis
cette multiplication de l’image même si,
à chaque fois, des modifications sont apportées pour s’adapter à la forme de la
fenêtre ou à la demande du commanditaire. La figue de David par exemple, ici juvénile
et imberbe ne se retrouve nulle part ailleurs.
La présentation de cette verrière de pleine couleur
en regarde de celle de Provins, peinte à la grisaille, illustre les deux
grandes tendances de la peinture sur verre en Champagne pendant le beau XVIe siècle.
L’éclairage des vitraux
a été l’un des plus grands défis scénographiques. Selon le cas de figure, il
faut contrôler et adapter la source lumineuse qui vient traverser le vitrail,
pour faire pleinement ressortir toutes les nuances et variations du verre et du
motif coloré. Les cinq années de préfiguration de la Cité du Vitrail ont permis
de travailler sur cette question et d’affiner les choix. De même, Alain Vinum,
ancien maître verrier et consultant auprès de l’architecte de la rénovation de
l’Hôtel-Dieu, a mené sur plusieurs mois une étude sur la lumière au sein du
parcours. L’agence scénographique s’est également associée à l’agence de
concepteurs lumières 8’18’’ (Paris) pour imaginer tous les principes d’éclairage
des vitraux et du mobilier en intégrant et en miniaturisant autant que possible
l’éclairage.
Le parcours permanent
de la Cité du Vitrail a la particularité de se faire de façon descendante en
débutant du 3e étage pour s’achever en apothéose dans la chapelle de
l’Hôtel-Dieu-le-Comte, entièrement restaurée. La visite se dévoile donc autour
de l'imposant escalier monumental en chêne orné d'un lustre en manchons de
verre. Entièrement accessible, le parcours se décline sur 4 niveaux et 2
entresols.
La visite
chrono-thématique présente le vitrail dans toutes ses dimensions avec des œuvres
originales régulièrement renouvelées.
La visite débute sous
les combles, au 3e étage pour se terminer par la découverte de la chapelle au
rez-de-chaussée.
L'Apothicairerie,
l'une des plus belles de France
Cette grande salle, classée Monument historique, conserve une collection exceptionnelle de pots en faïence et de boîtes pharmaceutiques en bois peint des XVIIIe et XIXe siècles. Gérée par le pôle muséal de la Ville de Troyes, sa scénographie est réétudiée en cohérence avec le projet de la Cité du Vitrail, tout en conservant son caractère authentique. Des tablettes numériques permettent d’explorer ingrédients et recettes anciennes à base de corne de licorne ou de pierres précieuses. Les enfants pourront également y suivre sœur Violette, pour passer leur diplôme d’apothicaire et libérer le fantôme qui hante ces lieux !
Portée par le
Département de l’Aube, la Cité du Vitrail est un projet scientifique, culturel,
pédagogique et touristique d’envergure ainsi qu'un lieu de découverte,
d’émotion et d’expérimentation.
L’Aube en Champagne,
terre européenne du vitrail
Depuis la cathédrale de
Troyes jusqu’aux modestes églises rurales, le département de l’Aube en
Champagne réunit une collection de vitraux unique en Europe. Nul autre
territoire n’offre à la fois une telle abondance, une telle qualité, ni une
telle densité.
Les très nombreuses
verrières antérieures à la Révolution française, au nombre de plus de 1 100,
recensées dans 200 édifices, font en effet de l’Aube le plus riche département
de France en la matière avec la Seine-Maritime, sans compter l'important corpus
légué par les ateliers des XIXe, XXe et XXIe siècles. Cet impressionnant
patrimoine offre un socle d’œuvres considérable sur lequel la Cité du Vitrail a
l’intention de construire son assise, pour élargir ensuite son rayonnement.
l'Ange
Provenance église St Nicaise à Reims
Au sortir de la Première guerre mondiale, un vaste
projet social est lancé pour la création d’une cité-jardin à la périphérie de
Reims : la Cité-Jardin du Chemin-Vert. Une église dédiée à saint Nicaise
est édifiée au cœur de ce « village » de plus de 600 maisons. Sa
décoration, s’inscrivant dans le renouveau de l’Art Sacré est confiée aux plus
grands artistes de l’époque. René Lalique, natif de Aÿ (Marne), proche de
Georges Charbonneaux, commanditaire du projet, reçoit la commande du cycle des
verrières, des luminaires et, plus tard, de la colombe eucharistique.
Pour les vitraux, il développe une technique
novatrice : le verre pressé-moulé. Le verres est coulé dans un moule
préalablement sculpté et passé sous une presse qui permet d’imprimer le motif
dans l’épaisseur de la matière. La forme et les nuances de couleurs de cet ange
agenouillé résultent donc uniquement des différences d’épaisseur du verre. Le
contraste entre l’ange et le fond est accentué par un traitement dépoli du
verre sur les parties en creux, faisant ressortir la transparence du vêtement
ou le moelleux des plumes de l’aile qui retombent sur la jambe. La composition
du verre de Lalique reste encore mal connue : la couleur jaune ambrée qui
en émane diffuse une lumière chaude et tamisée, propre à créer une atmosphère
de recueillement.
Lalique reprit cette technique par la suite pour
réaliser de grands ensembles comme les portes du palais du prince impérial du
Japon à Tokyo en 1932.
Ainsi,
actuellement, le vitrail aubois représente :
Près de 10 siècles
d’histoire du vitrail, XIIe - XXIe siècle ;
9 000 m² de verrières antérieures
à la Révolution française ;
2 048 baies protégées
au titre des Monuments historiques ;
1 042 baies du XVIe
siècle et 1 439 du XIXe siècle, les deux âges d’or du vitrail de l’Aube ;
Des vitraux répartis
dans plus de 350 églises et édifices publics ;
Un art toujours vivant
: plus de 150 baies créées ces 20 dernières années par de prestigieux ateliers.
Peintre
verrier Hermann de Munster
Eglise
Ste Ségolène de Metz
Verre
et plomb, penture à la grisaille, jaune d’argent
Prêt
du musée Lorrain de Nancy
Les
noms de peintres verriers du XIVe siècle associés à quelques éléments de
biographie sont
peu nombreux à nous être parvenus. Celui d’Hermann de Münster est une exception notable pour le monde germanique. Il travailla aux vitraux de la cathédrale de Metz à partir de 1381, pour laquelle il est officiellement nommé « peintre-verrier » dans les archives.
Il
est aussi l’auteur de cet ensemble de vitraux pour l’église Sainte-Ségolène de
Metz vers 1380-1390. On reconnait, sous de grands dais architecturés très
allongés, deux roi mages venus rendre hommage à l’enfant Jésus en lui apportant
de précieux cadeaux : Gaspard à droite porte un ciboire contenant l’encens
et Melchior à gauche tient un pot rempli d’or.
Le
panneau central, manquant, devait représenter Balthazar apportant la myrrhe.
Tous trois se dirigent vers la gauche où l’on devait trouver une fenêtre présentant la Sainte Famille.
Les
silhouettes longilignes des personnages, la coquetterie des pieds et coudes
sortant du cadre –qui créent une profondeur- l’utilisation du jaune d’argent
qui enrichit encore cette composition précieuse sont autant d’éléments propres
au travail de cet artiste.
Provient du Caire - Egypte
Panneau réalisé en plâtre ajouré à motifs de petits
trous sur lesquels un réseau de bordures de plâtre en relief crée un
ornement : un vase fleuri. De fines plaques de verre coloré insérées à l’arrière
complètent le décor. Les bordures de ces motifs en relief sont taillées en
biseau afin de diffuser la lumière plus largement. L’orientation des biseaux
vers le bas, particulièrement visible sur les contours, indique que ce panneau
devait être situé en hauteur et laisser la lumière colorée descendre vers les
parties basses de la salle qu’il ornait.
Le motif du vase fleuri –ici des iris- est très
répandu dans l’art ottoman et s’inspire de la vie quotidienne. La conception de
ce panneau écran est assez éloignée de nos vitraux occidentaux. Ici, il s’agit
essentiellement de filtrer la lumière pour en atténuer la puissance et
maintenir l’intimité de ceux qui évoluent derrière. Très répandus dans le monde
islamique depuis le XIXe siècle en contexte religieux (mosquées) ou privé
(palais), ces panneaux contribuent à créer une atmosphère fraiche et colorée en
intérieur. Ils sont parfois signés de noms célèbres.
La
Cité du Vitrail aujourd’hui
« Un lieu pour expliquer l’art du vitrail et
l’exposer à hauteur de regard »
Après quatre ans de
restauration et d’installation du parcours de visite, la Cité du Vitrail occupe
aujourd’hui quelques 3 000 m² dédiés à l’art du vitrail. Son parcours de visite
s’articule autour de plusieurs objectifs et enjeux :
Une porte d’entrée à la découverte des vitraux de l’Aube : Le parcours de visite a pour principal enjeu de donner les clés de lecture du vitrail, permettant ainsi aux visiteurs de se tourner vers la visite des vitraux disséminés sur l’ensemble du territoire.
Artiste :
Jean Michel Alberola (1953-)
Réalisation :
atelier Duchemin (Paris)
pour
la cathédrale St Cyr et Ste Julite de Nevers de Nevers
Verrière
de la Création– 2002
Verre et plomb, peinture à la grisaille
En 1944, les vitraux de la cathédrale de Nevers sont
détruits par un bombardement. Un programme de création contemporaine est lancé
dès 1948 et se poursuit jusqu’en 2005, faisant intervenir plusieurs artistes.
Les verrières du chœur gothique reviennent à Jean-Michel Alberola qui s’associe
aux ateliers Duchemin.
Ce panneau d’essai appartient à une verrière
consacrée au thème de la Création. Les choix iconographiques et techniques de
l’artiste reposent sur le principe de citation. Ainsi, le guépard est peint à
la grisaille d’après une gravure sur bois du XIXe siècle. L’évocation des
vitraux médiévaux disparus se fait par l’emploi d’une large bordure, par le
motif grillagé qui rappelle les « cages à mouches » du XIIIe s. ou
encore par le choix du plomb qui cerne le dessin.
Pour autant, Albérola ne se contente pas d’un simple
pastiche. Le guépard ici peint sur un verre émaillé opale sur blanc n’épouse
pas la forme prévue au moment du dessin du carton. Le décalage créé entre le
contenu et le contenant évoque visuellement la technique du collage chère à
l’artiste et introduit une part d’abstraction dans l’œuvre.
Un lieu offert à la délectation :
(Trésor
de la cathédrale st Etienne de Châlons-en-Champagne)
Dépôt de l’Etat
Les
quatre panneaux appartenaient à une verrière consacrée à la découverte de
reliques de saint Etienne, patron de la cathédrale. Les gestes expressifs et
les quelques inscriptions permettent de suivre la narration. En haut à gauche,
Gamaliel (un des Sages du Judaïsme pharisien du Ier siècle de notre ère, repris
par la tradition chrétienne) apporte en songe au prêtre Lucien quatre vases
reliquaires : il s’agit des reliques d’Etienne, de Nicodème, de Gamaliel
lui-même et de son fils, Abidas. En bas, Lucien raconte son rêve à l’évêque
Jean de Jérusalem. En haut à droite, Gamaliel apparait à Nigecius endormi et
l’exhorte à rechercher la tombe du saint. En bas, Nigecius et Lucien se
rencontrent. La découverte de la tombe devait être représentée sur autre
panneau aujourd’hui disparu.
L’état
de conservation de ces panneaux est extraordinaire. Le réseau de plombs et
probablement d’origine pour sa majorité et qui est d’une extrême rareté. Le
soin apporté à la composition et les caractéristiques stylistiques sont propres
à cette époque romane. On note entre autres découpage concentrique des fonds
qui alternent bleus clairs et bleus plus foncés pour donner de la profondeur à
la composition. Les plombs suivent soigneusement le dessin, y compris dans les
endroits délicats : plis des vêtements, forme de la main, ourlet des
vases… Des verres fouettés bleus rares et chers, sont utilisés pour le sol qui
soutient les lits de Lucien et Nigecius. Enfin les visages et vêtements sont
peints à l’aide de lavis, traits de grisaille très épais et repris à la pointe
du pinceau.
En présentant des vitraux uniques, d’époques, de styles et de fonctions différents, un des objectifs de la Cité du Vitrail est de renouveler l’image du vitrail et de rendre accessible au plus grand nombre des vitraux, habituellement en hauteur, exposés à hauteur de regard.
Un lieu favorisant la
restauration et la valorisation :
La Cité du Vitrail
permet également de présenter des vitraux déposés pour restauration. Pendant
plusieurs mois, ces vitraux seront exposés à la Cité du Vitrail après
restauration et avant de retrouver leur édifice d’origine.
Un lieu d’étude et de
recherche :
Enfin, le dernier
objectif de la Cité du Vitrail est d’encourager l’étude en accueillant
chercheurs, restaurateurs et autres professionnels. Un espace de recherche est
d’ailleurs dédié à cet accueil.
Pourquoi
une « Cité du Vitrail » ?
L’appellation musée ne
peut être utilisée par la Cité du Vitrail puisqu’elle n’est dotée d’aucune
collection propre. Elle s’appréhende principalement avec les collections
in-situ que forment les 350 églises et édifices publics conservant du vitrail
dans l’Aube. La Web app Route du Vitrail (route-vitrail.fr) est destinée à
compléter la visite de la Cité en permettant aux utilisateurs de découvrir le
patrimoine vitré aubois in situ. Ce large ensemble est complété par
l’exposition de vitraux à la Cité du Vitrail provenant de tous horizons : prêts
de musées, d’artistes, de DRAC…
L'histoire
de la Céramique (1878)
Redécouverte en 1997, cette verrière du palais du Trocadéro est présenté au public pour la première fois depuis son démontage entre 1935 et 1937. Cette verrière fut réalisée par Louis-Charles-auguste Steinheil, assisté de son gendre Albert-Louis Bonnot et du verrier Charles Leprévost.
Un atelier céramistes
habillés à la manière de la Renaissance occupe le centre de la verrière. on y
reconnait les étapes essentielles de la création d'une céramique : façonnage,
peinture, cuisson et présentation aux commanditaires. Les inscriptions
indiquent qu'il s'agit de l'atelier des frères Théodore et Xavier Deck (Paris).
En partie basse, trois fenêtres en trompe-l'oeil encadrent trois scènes en
camaïeu de brun représentant les usages de la céramique au Néolithique, durant
l'Antiquité et au Japon. En partie haute, un paysage complète la composition.
Restauration de saint Gilles, XVIe siècle, par Laurie Blachet
Déposée de l'église Saint-Nicolas à Troyes en avril 2021, cette sculpture a été bichonnée avant d'intégrer le parcours permanent de la Cité où il sera mis en relation avec des vitraux d'époque et thème identique. Un prêt de la Ville de Troyes .
Laurie Blachet,
conservatrice-restauratrice d’œuvres sculptées et tridimensionnelles (Moselle),
a procédé à 2 types d'interventions :
Mesures de conservation
: dépoussiérage, fixage des soulèvements de polychromie et rééquilibrage de la
base.
Mesures de restauration : nettoyage afin de
redonner de l'éclat à la sculpture et réintégrations chromatiques afin de
gagner en lisibilité.
Saint Gilles, moine ermite (fin VIIe-début
VIIIe siècle), est ici représenté en pied avec une biche qu'il a protégé des
chasseurs de Charles Martel. Il fait partie des saints intercesseurs et
populaires au Moyen Âge.
Troyes (Aube), église
Saint-Nicolas, sculpture de saint Gilles, 1ère moitié du XVIe siècle, auteur
inconnu, classée Monument historique (objets), pierre calcaire polychrome et dorée.
Vitrail troyen du XIIe siècle
Fin 2018, la Cité du Vitrail a acquis aux enchères sur préemption de l’Etat, un vitrail médiéval troyen de la plus haute importance, tant au niveau local que national. Cette œuvre, datée des années 1170-1180, appartient à une série de vitraux sans doute créés pour l’ancienne collégiale Saint-Etienne de Troyes qui fut fondée par Henri Ier le Libéral.
Cette série, réemployée
dans les fenêtres de la cathédrale de Troyes au XVIIIe siècle, a été dispersée
dans des conditions non élucidées autour de 1900.
Il est le seul vitrail
complet et authentique de cette série à pouvoir revenir sur le sol troyen, les
autres étant conservés chez des particuliers ou des musées à Paris, en
Angleterre ou aux Etats-Unis. Il est par ailleurs l’un des rares vitraux de
l’époque romane aujourd’hui conservés dans le monde.
Il fait actuellement
l'objet d'étude et de restaurations avant son exposition à hauteur de regard à
la Cité du Vitrail où il sera rendu à la contemplation des visiteurs quelques
120 ans après sa disparition.
Henri Ier offrant son hôtel Dieu aux malades
Vitrail de la chapelle de l'Hôtel-Dieu-le-Comte à Troyes présentant le comte Henri Ier le Libéral, son fondateur, offrant l'édifice aux malades et souffreteux. Atelier Erdmann et Kremer, 1864
Par
Pierre Carron (1923-2022)
Réalisation
Michel Blanc-Garin (Sarthe) 2011
En 2011, un concours est organisé par l’Etat pour
une création contemporaine dans le transept nord de la cathédrale de tours. Il
s’agit de remplacer les verres blancs modernes entourant la rose médiévale.
Le peintre Pierre Carron réalise avec Michel Blanc-Garin
ce panneau d’essai qu’il présente au jury. Il choisit de « peindre
sur le ciel lui-même un contre-ciel, son envers, sous la forme de quatre
éléments ». Sur une corniche architecturale, trois perdrix s’apprêtent à
s’envoler. La perception de la vibration de l’air est permise par l’emploi d’un
verre antique plaqué à l’épaisseur irrégulière, par la gravure et l’emploi de
la grisaille qui modulent la lumière,
par le dépoli qui atténue la transparence.
Le choix du motif figuratif et le recours aux
techniques traditionnelles du vitrail (peinture à la grisaille et jaune
d’argent, emploi du plomb et de la gravure) sont un moyen pour Pierre Carron de
s’intégrer dans le programme de vitraux médiévaux existant. Il avait notamment
utilisé ces procédés pour les vitraux réalisés quelques années avant dans la
cathédral Sainte Croix d’Orléans.
Son projet pour Saint Gatien fut finalement écarté
au profit de celui de Gérard Collin-Thébaut.
Saint-Léger-près-Troyes début du XVIe siècle
Verre
et plomb, peinture à la grisaille, jaune d’argent
Restauration :
Tournel en 1895-1900 ; Lacher 2022
Au centre de la composition, le Christ sort de son tombeau, renversant les soldats romains qui le gardaient. Au fond, trois saintes femmes sont en chemin pour porter au défunt les onguents purificateurs. Le ciel étoilé qui présentait à l’origine des montagnes en « chef-d’œuvre », les tenues richement ornées des soldats, leurs casque extravagants, les délicates gravures sur les motifs perlés sont autant d’indices de la provenance troyenne de ce vitrail. La cohabitation des verres de couleurs avec les carnations peintes à la grisaille est particulièrement remarquable ici.
Saint-Léger-près-Troyes début du XVIe siècle
Verre et plomb, peinture à la grisaille, jaune d’argent
Restauration : Tournel en 1895-1900 ; Lacher 2022
Ces deux vitraux proviennent de deux verrières distinctes de l’église de Saint Léger près Troyes. Ils ont été réalisés par les ateliers troyens au XVIe siècle. Déposés en 1959 par l’atelier Vinum en raison d’un état sanitaire très dégradé, ils furent longtemps conservés dans son atelier sans qu’un programme de restauration ne soit lancé. En 1966, ils sont mis en caisse et stockés dans le dépôt de la cathédrale de Troyes. Leur sélection dans le parcours de visite de la Cité du vitrail a permis de les sortir de l’oubli.
Eglise
Ste Croix de Provins
Verre
et plomb, peinture à la grisaille, sanguine et jaune d’argent
Cette verrière monumentale est présentée dans son
ensemble pour la première fois depuis sa dépose en 1975. L’état sanitaire de
l’église Sainte-Croix fut alors jugé suffisamment critique pour que sa
fermeture au public soit prononcée.
L’iconographie de cette verrière tourne autour de la
Passion du Christ, soit le récit de son arrestation jusqu’à sa mort sur la
croix.
On reconnait à gauche la Prière au jardin des
oliviers, (« Père, si tu veux, éloigne de moi cette coupe ! »).
Au centre et à droite la Comparution du Christ
devant Pilate dans le prétoire. Pour cette scène, le peintre verrier s’est
inspiré d’une gravure de Lucas van Leyden (Pays-Bas 1494-1533).
Au sommet, la scène du baiser de Judas introduit le
récit. Ce panneau comme celui de la dernière Cène du Christ juste dessous est
coloré dans la masse, contrairement au reste de la verrière, peinte en
grisaille et jaune d’argent sur des verres clairs. Cette cohabitation est le
résultat d’un probable remaniement des verrières au XIXe siècle, au cours
duquel pour conserver la majeure partie des panneaux anciens, des verrières
entières ont été recomposées à partir d’éléments épars. On reconnait aussi un panneau
entièrement de « macédoine » au centre.
clichés par moi-même ; infos Cité du Vitrail Troyes
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