Les noms de rue confèrent à une ville quelque chose
de son originalité, ils l’empêchent de la confondre avec d’autres cités. Mieux
encore, ils disent sa vie à travers les âges, en un mot son histoire, petite ou
grande.
Jusqu’à la moitié du XIXe siècle, la ville de Troyes conserve jalousement la nomenclature imagée que nos pères lui avaient constituée. En principe, nos rues devraient nous fournir une indication sur l’ancienne physionomie de notre ville. Une ordonnance royale de 1752, prescrivant de faire lever des plans exacts des principales villes du royaume, Bocher de Coluel, ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées, lève le plan de la ville de Troyes.
Quoi de plus simple, pour situer une demeure dans une adresse, que le nom de la rue où elle se trouve et son numéro d’ordre dans cette rue ? Mais il faut savoir qu’à cette époque, il n’est pas facile de se diriger à Troyes, à travers le dédale des rues et le chaos des maisons. Avant cette ordonnance royale, les maisons sont désignées par leur proximité d’une autre demeure où pend une enseigne, ou bien par les sculptures au-dessus des portes. On dit alors : je demeure « à l’Enseigne de la Truie qui file », « à l’Image du Renard qui prêche », « à l’Image de Saint-Honoré », « Grande Rue devant le Puits en Auvergne », « près l’Hôtel du Chaudron », « de la Tête noire », « de la Limace », « de la Toison d’Or », « du Rat Botté », « des Trois Pigeons », « de la Grimace »...
Quant aux rues, elles portent généralement des noms caractéristiques, mais peu recherchés. Le genre de commerce ou d’industrie qui s’y pratique suffit pour les faire reconnaître : on va « rue des Chaudronniers », « place de l’Etape-au-Vin », « rue de la Tannerie », « des Pains-à-Broyer », « ruelle Catin » (où habitent des filles de mauvaises mœurs), « du Bout du Monde »... Mais il y a aussi des Troyens qui demeurent « rue des Mauvaises Paroles », « des Singes-Verts », « Torchepot », « des Trois-Cochons »…
Il semble cependant que cette ordonnance de 1752, n’a pas été prise tellement afin de simplifier la distribution du courrier, mais plus pour des raisons administratives, et souvent financières : recensement des biens en vue de leur imposition, impôts divers, logement des troupes...
Dès 1757, Coluel assisté d’ingénieurs ordinaires, de sous-ingénieurs, d’inspecteurs, de conducteurs et de piqueurs, se met à l’ouvrage pour lever le plan de la ville de Troyes, et poursuit ses travaux les années suivantes. Le « plan Coluel » est sans aucun doute le document le plus précis qui permette de reconstituer rue par rue et maison par maison, l’aspect de notre cité au milieu du XVIIIe siècle.
Avant cette date, il n’existe de Troyes que des plans très imparfaits qui sont plutôt des images panoramiques. Ce plan est tracé à la plume sur papier collé lui-même sur toile. Les cours d’eau sont teintés en bleu, et les jardins en vert. Les monuments civils, les églises et les couvents avec la disposition des jardins qui les entourent, les portes de la ville ainsi que les fortifications avec leurs tours et leurs remparts, sont figurés en plans très détaillés et très précis. Non seulement les rues, mais toutes les maisons sans exception sont très exactement indiquées. Chaque rue est mentionnée en grands caractères par son nom, chaque maison est désignée de double manière : par le nom de son propriétaire d’abord, par un numéro d’ordre ensuite. Ces numéros forment une série unique pour toute la ville. Ils commencent à l’Hôtel de Ville, qui porte le n° 1, et se suivent selon une ligne très sinueuse et très irrégulière, parcourant successivement les rues du quartier haut, puis celles du quartier bas pour aboutir au Palais Royal, ancien Palais des Comtes de Champagne, qui porte le n° 2.766. Trois numéros supplémentaires: 2.767, 2.768 et 2.769, désignent les maisons du cul-de-sac « des Repenties », situé « rue des Filles » (aujourd’hui rue Jaillant-Deschainets).
Le numérotage a été institué pour la commodité du logement des troupes. Ce « plan Coluel » est complété par un registre qui est en quelque sorte le premier livre d’adresses complet de la population troyenne, qui est daté de 1766. Le registre commence à la maison n° 1 et se termine à la maison n° 2.769. Le plan indique aussi les maisons des quatre faubourgs, dont chacun porte un numérotage particulier : le « faubourg de Croncels » comprend les maisons de 1 à 409, le « faubourg des Faux Fossés », celles de 1 à 200, le « faubourg Saint-Jacques », celles de 1 à 323, et le « faubourg des Tauxelles », celles de 1 à 86.
La ville de Troyes, avec ses faubourgs, possède donc en 1769, un total de 3.787 maisons, dont 2.769 dans la ville proprement dite et 1.018 dans ses faubourgs, déjà très peuplés à cette époque. Le registre mentionne même pour chaque maison, la profession de l’occupant, propriétaire ou locataire. A l’aide de ces deux documents, registre et plan, il est extrêmement facile de dresser l’état complet des familles troyennes en 1766 et de déterminer le domicile exact de chaque habitant. Pour de nombreux historiens, l’ordre des maisons est un peu fantaisiste. Les numéros suivent bien chaque côté de la rue, mais tantôt sautent régulièrement ou irrégulièrement d’un côté à l’autre, et l’on voit par exemple le n° 914 à côté du n° 1.083, et le 883 à côté du 1.262, ce qui ne facilite pas les recherches.
Deux de ces numéros sont encore visibles: le 2.706 en imposte forgée, 10 « rue Linard Gonthier », et le n° 1.529 au musée de Vauluisant, provenant de la « cour du gros Raisin » maintenant disparue. Le n° 1.925 est masqué par la devanture d’un magasin 27, « rue de la Cité ». Le 434, peint en vert, apparaît lors de la restauration de l’immeuble 3 « rue Charbonnet », mais depuis, a été malheureusement effacé.
En 1993, le plan Coluel a été restauré. C’est une merveille, il est en 4 morceaux, et mesure environ 6,50 m x 3,50 m. Malheureusement, il n’est pas visible du public.
Le maire fait
placer également des écriteaux au coin des rues (très irrégulières par leur
largeur et dans leurs alignements), au nombre de près de 200 pour en indiquer
les noms, et installe plus de deux cents lanternes dans les principales rues, «
pour la facilité des étrangers, et pour la commodité du logement des troupes ».
Jusqu’en 1940, les Conseils municipaux ont malheureusement débaptisé de nombreuses rues dont le nom parlait aux Troyens. Il reste bien la place du « Marché au pain », la rue du « Marché aux noix », « des Changes », « de l’Eau Bénite », « de la Vierge », « de la Ganguerie », « de la Crosse », « de Molesme », « du Paon ».
Mais qui sait où se trouvaient les rues « de la Chaussetterie », « des
Chaudronniers », « de la Corderie », «
de la Savaterie », « de la Draperie », « de la Ganterie », du « Marché aux
oignons », « de la Filerie », « de la Poulaillerie », « de la Poissonnerie », «
du Charbon », « de la Limace », « du Pape Jai », « du Sauvage » (hôtellerie du
Grand Sauvage), « des Singes verts », « des 3 Têtes » (hôtellerie qui faisait
l’angle de la rue de la Monnaie), « de la Vieille Saunerie » (où était le
marché au sel), « des Mal parlants », « du Cheval rouge » (hôtellerie), « des
Arquebusiers », « de la Clef-d’Or », « du Pont qui Tremble », « du Renard qui
prêche » (hôtellerie », place « Notre-Dame-aux-Nonnains », ou « du Marché aux
Trapans » (cette grande planche percée de plusieurs trous qui sert à égoutter
la feuille dans les papeteries (Quai Dampierre), « du Marché à la Volaille », «
de la Poissonnerie », « des Pois », « de la Feuerie » (marché de la paille), «
de l’Etape au Vin » (étape de l’allemand stapelen = foire ou marché, on y
vendait encore le vin au XVIII° siècle), rue et place « de la Harenderie » (ou
Harangerie, vente de poisson salé), « de la Coefferie » (où les « coiffières »
vendaient leurs produits, qui enveloppait étroitement la tête, fer, acier, lin,
soie… il y avait encore 150 fabricants en 1609)…
En 1868, la municipalité troyenne fait une réforme importante : sur 345 rues ou places, 33 seulement portent le nom d’individualités, toutes d’ailleurs qualifiées par leur origine locale ou leur relation avec notre ville. 19 rues sont alors dénommées en faveur de personnages, au détriment de vieux souvenirs topographiques, d’enseignes, d’édifices, de métiers. C’est ainsi que la « rue des 5 cheminées » devient « rue de la Paix », la « rue du Pied de cochon », « rue de Gournay », la « rue des 3 crochets », « rue Jacques Julyot », « la rue du Marché-aux-Trapans (cette grande planche percée de plusieurs trous qui sert à égoutter la feuille dans les papeteries), « rue Passerat », la « rue du Flacon », « des 6 petits écus », « des Sonnettes », rue Boucherat…
En 1878, la municipalité défère à M. Thiers l’honneur de patronner la seconde artère de la ville et d’y supplanter les noms « de la Corterie aux chevaux » et de cette « rue du Bois » où l’usage antique de nos ancêtres était « de faire » !!! Mais elle fut renommée le 9 novembre 1944 « rue Général de Gaulle ».
En 1906, la « rue du Temple » est baptisée « rue Général Saussier ». D’accord, c’est le nom d’un grand militaire troyen, qui a fait un legs à la ville (plaque 59, rue Notre-Dame), mais on aurait pu donner ce nom à une autre rue, car « la rue de Temple » avait une signification bien précise. Depuis 1186, les Chevaliers du Temple, les templiers, créés dans notre département (en 1118 par Hugues de Payns, et approuvés par le Concile de Troyes avec saint Bernard de Clairvaux en 1128), y avaient leur commanderie (au n° 3).
Prenons
quelques autres exemples malheureux. Troyes a très longtemps battu monnaie pour
les Rois de France, mais en 1936 (inaugurée en 1937), notre « rue de la Monnaie
» ainsi appelée depuis 1450, est baptisée « rue Roger Salengro », au nom de la section troyenne du parti
socialiste, du nom d’un ministre de l’intérieur socialiste qui s’est suicidé à
la suite d’une campagne de presse menée contre lui. Heureusement, le 26 mai
1992 elle reprend son nom de « rue de la
Monnaie ».
Si un Troyen se devait de voir perpétuer son avenir, c’était bien l’évêque, ce premier défenseur de la cité contre le banditisme d’outre-Rhin. Le fait que le bâtiment principal de l’abbaye royale de Saint-Loup a subsisté justifiait à lui seul le maintien de « rue Saint Loup » qui datait de la fin du IXe siècle. Mais en 1904, un adjoint au maire de Troyes, socialiste, qui chaque jour, emprunte ce trajet pour aller à son travail, se déclare offusqué de cette appellation, parce que dit-il, il a lu dans un livre que saint Loup s’est fait le complice d’Attila, ce qui afflige son patriotisme. Pendant X siècles, personne ne s’en était scandalisé, et c’est ainsi que saint Loup perd son auréole de libérateur de Troyes et devient « rue du Musée » ! Voilà la désinformation : oui, Attila, après sa rencontre, passe bientôt à l’admiration pour la vertu de saint Loup, et veut que notre évêque l’accompagne dans sa retraite jusqu’au Rhin. Saint Loup accepte cette offre, car il espère opérer la conversion de ce prince. Le Roi des Huns arrivé sur les bords du Rhin, renvoie saint Loup, et se recommande à ses prières. Ce n’est qu’en 1994, que le conseil municipal rebaptise du nom de saint Loup, une petite voie insignifiante, derrière l’église Saint-Martin. Il aurait mérité mieux !
A la même séance de 1904, le vote substitue le nom «
d’Emile Zola » à celui de « Notre-Dame », porté depuis le Xe siècle par une
principale artère de la ville. Ce serait après de trop généreuses libations que
des jeunes gens parièrent d’obtenir ce changement de vocable. Ce sont là des
épisodes peu glorieux de l’histoire des changements de noms opérés dans notre
ville.
Au XIIe siècle, la « place Jean Jaurès » s’appelait place du « Marché aux Meules », qui devint « du Minage » (Mine était la mesure publique des grains dont l’étalon était réglé par le prince, qui percevait un droit dit minage. Hugues de Troyes l’avait donné à saint Pierre), puis du « Marché au Blé ».
A partir de 1500, elle eut le triste privilège de servir de théâtre aux exécutions. Après les tortures, on y guillotinait. Une Halle de Bonneterie y est construite en 1837, elle devient donc en 1851 « Place de la Bonneterie ».
En 1900, y est érigé un monument pour les « bienfaiteurs de la ville », avec les noms des philanthropes gravés sur le fût, avec un homme de bronze qui représentait un ouvrier bonnetier dont le courage et l’habileté ont assuré la réputation mondiale de notre industrie. En 1919 le Président de la République Raymond Poincaré permet au Conseil municipal d’attribuer le nom de « Jean Jaurès » à cette place, en hommage à ce grand homme, tribun socialiste et pacifiste, assassiné en 1914.
Après
1918, « Raymond Poincaré » expulse « la Grande Tannerie », « Clemenceau » «
l’Hôtel de Ville », « Colonel Driant » la « rue du Beffroi ». Ce militaire
avait profondément marqué son séjour à Troyes et méritait cet honneur, mais
était-il nécessaire de lui sacrifier l’une des plus vénérables appellations
troyennes ? « Rue Kléber » remplace « rue Saint-Jacques » où était le prieuré,
« rue Maurice Bouchor » (sans relations locales), remplace le nom très ancien
de la « Voie des Maures ». Puis ce sont les boulevards Victor Hugo, Gambetta,
Carnot, Blanqui, Guesde, Danton… les rues Voltaire, Zola, Anatole France… …
La liste est longue ! Jusqu’en 1940, nos Conseils
municipaux ont malheureusement continué de débaptiser de nombreuses rues dont
le nom parlait aux Troyens. Pourquoi avoir fait disparaître les noms de nos
rues et places, qui étaient la mémoire de notre ville ? Renouvelés trop
fréquemment, dictés par les caprices des fluctuations politiques, les
changements d’appellation de nos rues équivalent ainsi à une suppression
progressive de tout ce qui en faisait l’utilité et l'intérêt.
Alors, emmenez vos amis se promener, le « nez en
l’air », dans les rues typiquement champenoises si pittoresques : « François
Gentil », « Viardin », « du Marché aux noix », « Larivey », « Linard Gonthier
», « Saint Frobert », « du Paon », « de la Montée des Changes », « de
Vauluisant », Gambey », Passerat », « Général Saussier », « de Turenne », « de
la Trinité », « Paillot de Montabert », « Brunneval » (où se trouve la
synagogue et le centre universitaire Rachi), la « Place du Marché au Pain… et
la célèbre « Ruelle des Chats ». Cette dernière est une des curiosités de
Troyes, avec ses maisons à pignons et à étages en encorbellement, qui se sont
affaissées et se touchent par leur sommet. Elle est ainsi nommée parce que les
maisons se joignant par les toits permettraient aux chats de passer d’un
grenier à l’autre. C’est une ruelle qu’aucun touriste ne voudrait manquer à la
tradition, en n’allant pas la voir, et les Troyens, la revoir (les pavés et
bornes en pierre sont d’origine).
Noms
actuels des rues anciennes
Rue Argence
: ancienne « rue de la Porte Saint-Martin », elle devient le 6 avril 1876, «
rue de la Vallée Suisse », œuvre du maire Désiré Argence (1859-1870), et le 13
février 1895, « rue Argence » (1859-1870), en remerciement pour ce maire qui laissa toute sa fortune à la ville.
Rue Boucherat
: ce fut la « rue du Flacon », la « rue des Clochettes » au XIVe siècle, au XVe,
la « rue du Rondeau », la « rue de la Tour le Roi », enfin la « rue des
Sonnettes ». Entre la rue Hennequin et la rue de la Cité, elle s’appela « rue
de la Monnaie », puis « de l’Ancienne Monnaie », les ateliers monétaires de la
ville de Troyes ayant été transférés dans la rue qui s’appela alors notre « rue
de la Monnaie » actuelle. Le 2 mars 1868, elle reçoit le nom de « rue Boucherat
», chancelier de France, maître des Requêtes au Parlement de Paris.
Rue de Brunneval : en 1475, c’est la « rue par laquelle on va au Bourg-Neuf ». Plus tard, c’est la « rue devant la loge » (du prévôt), puis « rue de la Prévôté-de-Pont », « rue du Bœuf Couronné », et enfin la « rue de la Levrette ». Son nom actuel date du 12 août 1851, M. de Brunneval, fondateur de notre école de dessin, y ayant légué sa maison.
Rue du Colonel Driant : en 1351 « rue du
Belfroy », le 2 mars 1868, « rue du Beffroi » et depuis le 7 mai 1919 « rue du
Colonel Driant », commandant du 1er bataillon de Chasseurs à pied de Troyes
installé à la caserne Beurnonville, tué devant Verdun en 1916.
Rue Gambey : s’appelle ainsi depuis le 12 août 1851. Elle réunit sous un même nom trois anciennes rues : celles « de la Grande-Ecole » (dès la fin du Xe siècle, les études étaient florissantes à Troyes), « du Donjon » (vaste maison de pierre) et « de la Grimace » (un hôtel dès 1550), derrière le chevet de Saint-Remi. En 1680, c’était la « rue du Chat Botté ». Henri-Prudence Gambey (1787-1847), fabriquait des instruments de précision, étudiant les mouvements des astres.
Rue Georges Clémenceau : dite primitivement « vicus magnus », « la Grande Rue », et en 1793 « rue de la Fraternité », pour reprendre son nom après la Révolution. Le 12 août 1851 elle devient « rue de l’Hôtel de Ville », et le 31 mars 1930, « rue Georges Clémenceau », du nom du président du conseil (1906-1917), qui négocia le traité de Versailles. Elle abritait les jeux de paume des Violettes et du Pape Gai.
Rue Huguier-Truelle
: depuis le 28 juin 1924. Huguier
Truelle (1834-1924) était pharmacien philanthrope, bienfaiteur de la ville,
fondateur des Jardins ouvriers de Troyes, du Bureau de Bienfaisance et de la
société Horticole. C’était la « rue de la Porte Saint-Pierre » au XIIe siècle,
qui devient au XVIe « la Porte au Ministre » ou « du Bourreau ». voir Église saint Nicolas
Place Jean Jaurès : Au XIIe siècle, elle s’appelle « place du Marché aux Meules », qui devient « du Minage » (mesure de capacité pour les graines) au XIIIe siècle, puis du « Marché au Blé ». A partir de 1500, elle a le triste privilège de servir de théâtre aux exécutions. Après les tortures, on y guillotine. Elle est aussi le lieu de séditions populaires, d’émeutes, lors des disettes et famines. Une Halle à la Bonneterie y est construite en 1829. En 1851, le conseil municipal appelle ce lieu Place de la Bonneterie. En 1905, la Halle ne répondant plus à sa destination, est transformée en Bourse du Travail, les syndicats y trouvant asile au rez-de-chaussée. En 1919 le Président de la République Raymond Poincaré permet au Conseil municipal d’attribuer le nom de Jean Jaurès à cette place, en hommage à ce grand homme. Après sa complète réfection, notre place Jean Jaurès devient l’une des plus belles places de notre ville. La Bourse du travail est désaffectée, une animation d’eau est créée... La nouvelle place Jean Jaurès est inaugurée en décembre 2005. La place est entièrement réaménagée en 2020, la bourse du travail après 16 ans d’abandon, est entièrement restaurée et devient un restaurant « Les Trois Brasseurs » qui ouvre ses portes en Octobre 2022. La brasserie occupe le rez-de-chaussée, tandis que les bureaux administratif du journal local « L’Est-Éclair » occupe le 1er étage.
Rue Kléber
: avait été divisée en 2 sections : en 1473, au nord « rue du Fort-Bouy » (four
de l’évêque), au midi en 1510, « rue du Faucheur » ou « du grand Faucheur ».
Elle s’appela « rue Saugette » (nom d’une famille), « rue du Puits-Saugette »,
et « rue de Breucher » d’après une enseigne, ou « Breuchet » (vase en terre
pour conserver l’eau potable). Le 8 octobre 1886, elle prend le nom de « rue
Kléber » (1753-1800), général qui s’est illustré lors des guerres sous la
Révolution et a été assassiné au Caire.
voir Maison du Dauphin
Rue du Petit-Credo
: depuis 1909 Elle s’appelait dans les temps les plus reculés (1175) « rue de
la Loge » ou « rue au-devant de la Loge », endroit réservé au pilori. Cette
loge était l’auditoire où le prévôt tenait ses plaids (cour de justice). Les
bâtiments de la loge ayant brûlé lors du grand incendie de 1524, la rue a porté
les noms du « rue du Grand-Credo » ou « rue du Petit-Credo ».
Rue des Quinze-Vingts : en 1851. Avant, elle comprenait 3 noms : « rue des Gris d’Arcis », « rue du Mortier d’Or » et « rue des Quinze-Vingts ». Dans la première, on vendait des gris d’Arcis (étoffe fabriquée à Arcis) ; la « rue du Mortier d’Or » a partagé, à l’origine, avec la « rue du Chaperon ». En 1428, c’était la « rue de la Grande Saulnerie », « de Saulnerie », puis de « Vieille Saulnerie ». La Saulnerie de Troyes était le marché où les saulniers vendaient le sel. Cette rue devint dès 1333, la « rue du Général Nivelle », puis « de Colas-Verdey » (Charmont) du nom de 2 notables y habitant. Dès 1460 elle prend son nom d’aujourd’hui. Elle le doit à une très petite maison qui appartenait à l’hospice des aveugles de Paris fondé par saint Louis pour 300 chevaliers (15x20). voir Hôtel Menisson
Rue de la République
: depuis le 4 décembre 1876. Elle fut créée sur le tracé de la « rue Daudes »
(nom d’une famille aux XIIIe et XIVe siècles) entre la « rue des Bûchettes »
(Claude Huez) et la « Grande rue » (Georges Clémenceau), et prolongée jusqu’au
« Mail de l’Embarcadère » (boulevard Gambetta). Le 27 juillet 1878, elle fut
raccordée à la « Place de l'Hôtel de ville », prolongée le 12 décembre 1885
jusqu’à la « rue Urbain IV » et le 25 juin 1891 jusqu’à la « rue de la Grande
Tannerie ».
Ce bâtiment, d’aspect si curieux, abrita pendant plus de quatre siècles, les étaux des bouchers de Troyes qui ne pouvaient vendre de la viande ailleurs que là. La Corporation des bouchers, qui subsista jusqu’en 1791, était nombreuse, régie par des règlements sévères : étaient seuls admis à s’établir les fils de maîtres, reçus par les gardes jurés lesquels étaient investis d’une mission de police et d’inspection sanctionnée par de fortes amendes envers les délinquants.
Bien entendu, je n’ai parlé que des principales
rues.
La rue du « Cheval-Rouge », comme celle du «
Bois de Vincennes », doit son nom à une enseigne. Il y avait beaucoup
d’auberges.
La rue de la « Clé de Bois », s’appelait de «
Montpellier », à cause des marchands de cette ville qui y possédaient une
halle, c’était aussi le quartier des marchands espagnols, qui vendaient surtout
des maroquins (peau de chèvre épaisse tannée utilisée en reliure pour les
livres raffinés, se prête très bien aux travaux décoratifs, dorure ou
incrustations).
Rue « des Forces » : les anciens
instruments des tondeurs de drap (ouvrier chargé de tondre les draps lainés),
les forces, ont laissé leur nom à la rue demi-circulaire qui vient déboucher
sur la place de Saint-Pantaléon. On y vendait ou on fabriquait les ciseaux des
tondeurs, pesant jusqu'à 18 kg.
Une des voies qui venait tomber dans la rue des «
Forces », la rue de « Varveu » tire son nom, plusieurs fois changé comme
celui des enseignes, d’une hôtellerie ou d’une habitation particulière.
La rue de la « Pierre » est sous vocable
industriel. Il y avait, sous les comtes et pendant le moyen-âge, un atelier
banal où les fabricants devaient, à charge de redevance, faire presser les
toiles de coton sous une pierre d’un gros volume, qui se manœuvrait comme les
plates-formes des pressoirs. Ce foulage avait en vue les résultats que donnent
aujourd’hui l’apprêt et les cylindres.
La rue des « Pigeons » devait son baptême à
quelque circonstance locale : enseigne ou pigeonnier.
La rue de « Bourbereau », connue sous le nom
de rue « Bourdeau », était un ancien quartier jadis envahi par la prostitution.
Nom d’une « maison de passe ».
La rue des « Mal-Parlants » ou des «
Mauvaises-Paroles », était une dépendance du quartier de Bourdereau, pour
les mœurs.
La rue de « l’Eau-Bénite ». Les mœurs de ce
quartier avaient donné cette qualification, car on prétendait que par accident
une religieuse serait tombée dans le puits. C’est la version des chroniqueurs
de ce vieux quartier, où se trouvaient des tripots, un jeu de paume et des
établissements de prostitution rivaux de ceux de Bourdereau.
Le nom de la rue du « Temple » vient de la
Commanderie de Saint-Jean-du-Temple. Elle fut, jusqu’à l’époque de la
révolution, peuplée de comptoirs appartenant à des commerces de diverses
natures. Elle possédait de nombreuses auberges. Avant l’installation des
Templiers, c’était la rue de « Composte », corruption de « Porte du Comte ».
La rue de la « Pie » portait le nom de «
Masquerie », qui vient d’abattoir. Les bouchers du moyen-âge eurent
jusqu’au XVe siècle la faculté d’abattre les bestiaux chez eux.
Le « Cognot-aux-Boeufs » donne bien
l’existence d’écorcheries.
Les fameux papetiers « Le Bé » avaient leurs
étendoirs dans la rue qui porte encore leur nom.
La rue des « Trois Cochets » doit son nom à
une indication qui décorait une taverne.
La rue des « Trois têtes » tire son nom d’une
hostellerie qui faisait l’angle de la rue de la Monnaie.
Rue du « Cheval blanc » doit son nom à une
enseigne d’hôtellerie.
Cette rue conduit au « Gros Raisin ». La
dénomination provenait d’une sculpture remarquable qui décorait une maison au
n° 6. L’archivolte (ensemble d'ornements, sculptures ou baguettes qui encadrent
une arcade) d’un arc à contrecourbes était entourée d’un cep de vigne chargé de
gros raisins. Le long des rampants (plans inclinés) gravissaient 2 vendangeurs.
Ce quartier se nommait la « Petite-Masquerie », ou petite boucherie.
La rue des « Bons-Enfants » doit son nom à
l’existence d’une école d’enfants studieux, par opposition avec la rue des «
Mauvais-Garçons » ou des « Enfants-sans-souci » où s’ébattaient des vauriens.
On appelait « Bons Enfants », au moyen âge, les enfants fréquentant les écoles
publiques.
Rue de la « Montée-des-Changes », ainsi
nommée de sa direction.
Rue de la « Limace », ancienne auberge,
l’escargot étant sa renommée. Dans l’ouest de la France, ces deux noms sont
synonymes. Elle s’appelait avant de la « Tête-Noire ».
Rue « Perdue » : appelée ainsi pour la
mauvaise réputation que les mémoires du temps lui ont faite : il y avait
plusieurs maisons de tolérance ou maisons closes, quartier « chaud » du vieux
Troyes.
Rue des « Trois-Petits-Ecus », mais désignée
sous le sobriquet « rue des Malheureux », parce que les condamnés, conduits au
quartier haut pour être suppliciés, passaient par elle.
Rue « de la Santé », parce que dans le cours
du XVIe siècle, la ville de Troyes était presque périodiquement affligée par la
peste, puis une nouvelle invasion en 1467, et une en 1478 qui fit périr 2.000
personnes. On construisit dans cette rue un hospice provisoire qu’on appelait
par antiphrase « la Santé ».
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